N° 208
Septembre

https://piednoir.fr
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Septembre 2020
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
https://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
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EDITO
  PARMI LES RELIGIONS….  

         Nous avons depuis des siècles des religions traditionnelles, cultuelles et philosophiques qui ont dominé une partie du monde, chacune à leur façon avec des bonnes actions mais aussi des drames effroyables. Je les mets, volontairement de coté.
         Nous avons eu et encore actuellement des religions de pensée politique comme le monarchisme, le " révolutionisme ", le marxisme, le communisme, l'anarchisme, le nazisme, le capitalisme, le gaullisme, le fédéralisme, et j'en passe. Tous, avec leur propre idéologie, visaient la conquête des pouvoirs dans le but de diriger et dominer les peuples, avec aussi en toile de fonds des drames humains épouvantables, pour ne citer que les derniers en Algérie avec le gaullisme de 1945 à 1962.

         Mais une nouvelle religion née timidement vers 1960 est en train de prendre le pas sur toutes les autres afin de les éradiquer. C'est la Religion Ecologique Politique qui se nourrit de " l'imbécilitisme " - du crétinisme - du snobisme - du " boboisme ", LGBT ou BCBG à la mode - mais surtout des taxes qui lui sont reversées. Car le peuple en général ignore qu'à chaque fois qu'une idée " soit disant écolo " est votée, une taxe additionnelle l'accompagne dont une partie est reversée aux écologistes comme cela était sous une autre forme pour le communisme et les syndicats.

         La propagande de façade, de cette religion écologique serait la construction d'une société nouvelle, durable, corvéable à merci, vivant sous la peur (ce que le præsidium exploite à merveille avec un virus).
         Une religion censée préserver les ressources naturelles, garantir la justice sociale, la démocratie, le bonheur et les libertés individuelles, mais où tout le contraire est fait avec des éoliennes posées sur des tonnes de béton - de l'agriculture bio élevée aux produits spéciaux - une justice à deux, voire trois vitesses - une démocratie où sont élus des gens avec 20% de votants - des libertés individuelles sans cesse rabotées, la dernière, le masque obligatoire en attendant la burka, le vaccin et la puce obligatoires - le matraquage des amendes sur les pauvres gens, pas sur la racaille car là c'est très dangereux. Toujours plus d'inégalités car tout le monde n'a pas les moyens de suivre.
         Non le bonheur ne se trouve pas avec cette religion écologiste et égoïste qui apportera du malheur. Les générations futures en paieront le prix comme avec le communisme ou le nazisme.

         Il y a une autre religion, " le Laborisme ", celle des labos et d'un certain corps médical qui se gave de commissions. Le " fameux virus " dont on ne connaît pas le véritable bilan des vrais morts du Corona, est une manne pour cette religion. Cette année, on n'a pas de " chiffre morbide " pour les morts de la simple grippe et pas plus sur ceux de la canicule, car ils sont presque tous classés avec Mr. Corona. La propagande et la mauvaise gestion tuent plus que le virus lui-même qui aurait du être combattu convenablement.
         Sous la pression de la religion " laboriste ", le gouvernement a autorisé l'injection de rivotril (décret du 29 mars 2020) a des vieux dans les EHPAD et autres maisons identiques. Combien de crimes ont été commis, on ne le saura probablement jamais.

         Les gens qui ont été soignés et guéris par le Docteur Marseillais, lui vouent une bénédiction éternelle pendant que d'autres docteurs, spécialistes en tout genre, se pavanent et le dénigrent à la téloche aux ordres du pouvoir.
         Je ne suis pas contre le port du masque mais contre l'obligation qui est une atteinte à la liberté individuelle et devient un bâillon ou une muselière, surtout avec le zèle de certains de la force publique qui trouve là un moyen de verbaliser afin d'avoir des primes.
         Pourquoi le masque et pas le reste du corps qui est dénudé. Je rigole quand je vois des gens masqués avec gants, mais avec des bras nus, des jambes bien nus et assez haut, des décolletés, qui se mouchent dans le coude et qui disent bonjour à d'autres avec le coude. Un peu de réflexion, juste assez pour comprendre qu'on se fout de la gueule du monde.

         Il suffirait que le peuple refuse d'aller pendant 10 jours, dans les commerces ou de se servir de leur carte bancaire pour que le gouvernement recule devant des décisions ridicules, contradictoires ou contraignantes. Mais les veaux du grand Charles n'auront pas ce courage.

         Comment " Être Croyant " avec tout cela ?

Jean Pierre Bartolini          
        Diobône,         
A tchao.



UNE HISTOIRE DE BUANDERIE
GILBERT ESPINAL
ECHO D'ORANIE - N°258
            Ça devait mal finir et ça a mal fini ! Je vous ai dit qu'entre Angustias et Amparo ça allait pas trop fort ? Pos, ça va de moins en moins. Je sais pas si c'est que la Amparo elle avait sur l'estomac que Angustias elle l'avait pas invitée pour le réveillon ou quoi, mais depuis au moins quat' ou cinq jours, elle était, la mère à Doudou, qu'on aurait dit qu'elle avait le courant...
            Hier matin, j'ai entendu dans la cour un de ces potins épouvantab'.
            - Et voui madame, elle disait Angustias...
            - Et non madame, elle lui répondait la Amparo..
            - Vous, vous z'allez pas savoir plus que moi, elle faisait Angustias!
            - Plus que vous, voui moi je sais, elle rétorquait la mère à Doudou ! "Si elles en sont, j'ai pensé moi, à se donner de la madame et à se dire de vous, c'est que ça va mal!"
            La raison de cette dispute, c'était que toutes les deux elles avaient décidé de faire leur lessive le même jour... On dirait un fait exprés ! Chaque fois c'est la même chose !
            C'est ça qu'elle disait Angustias, justement :
            - Vous êtes comme les mouches ! Que depuis vingt ans que j'habite le patio pas une fois j'ai pu laver mon linge tranquille ! On dirait que y a que vous que vous habitez cette maison ! Moi madame, je paye mon loyer comme les aut' et j'ai droit à la clef de la bianderie comme les aut' !

            Avec vous, madame, elle l'y a fait la mère à Doudou, c'est la loi de l'entonnoir : le large pour moi et l'étroit pour les aut' ! Que quand vous avez décidé de laver vot' linge, y faut que tout le monde y dise amen en baissant la tête j'qu'au parterre... - C'ést pas la peine de la baisser si bas, elle l'y a fait Angustias, que quand mon tour y vient, mon tour y vient ! Un point c'est tout !
            - Mais vot' tour y vient bien souvent, elle l'y a dit la mère à Doudou, que si je me trompe, la semaine dernière vous avez lavé des draps ?
            - Voui que vous z'êtes bien renseignée, madame, elle l'y a dit Angustias : Si vous mettriez pas toujours vot' nez là où y faut pas, vous sauriez rien du tout. Voui, madame, J'ai lavé deux draps (un grand et un petit) mais dans ma cuisine, que ça, ça compte pas...
            - Com' ça y devaient t'êt' de prop', elle a fait la mère à Doudou !
            - Et à vous qu'est-ce ça peut vous faire que mes draps y soyent prop' ou qu'y soyent sales, elle a crié Angustias, que toutes les voisines qu'elles étaient dans un coin de la cour com' si elles z' assistaient à un match elles ont commencé à avoir peur. Si vous vous faisez pas le chignon je vous attrape et dans la bouche je vous le mets...
            - Je voudrais bien voir ça, elle a dit Amparo en rentrant chez elle (C'est qu'elle sait qu'avec Angustias y faut pas rigoler). En tous cas je laverai mercredi...
            - Mercredi, elle a fait Angustias ? Eh ben, ça va ! Moi j'ai demandé la clef pour mardi !
            Qui c'est qui m'a dit que tu voulais laver le même jour que moi ? C'est Consuelo ! Consuelo, où t'y es ?
            Consuelo, juste elle venait de partir pour aller au marché...
GILBERT ESPINAL


LE MUTILE N° 80, 1919

LE CHARBON

               Economise le charbon,
        Comme toi je le trouve bon,
        Depuis ce système il profuse ;
        Partout on en trouve des tas.
        " Chez moi jusque au galetas
        Tout est plein et |e le refuse !

        Et du reste, au jour d'aujourd'hui,
        Le charbon est presque gratuit
        Tant est grande l'abondance ;
        Les cent kilos quarante francs
        Allons, mes amis, soyez francs,
        Cent kilos, c'est un tas immense.

        Et c'est pratique, comme tout,
        Car, sauf qu'entre temps on ne meure,
        Le feu pétille en moins d'une heure
        En répandant du noir partout ;
        Tandis que le gaz du progrès,
        Que l'on dirige par degrés,
        Quelle horreur ! Qui pourra comprendre,
        Que l'on puisse, au jour d'aujourd'hui,
        Convoiter un sale produit
        Qu'avec les doigts on ne peut prendre !
        Voyez les gaz asphyxiants !
        Furent-ils jamais conscients
        Ces tueurs de maintes espèces
        Qui roulaient en vagues épaisses ?...

        Donc je suis l'ami du charbon,
        Et pas pour deux sous, incrédule,
        D'où tous les ans je fais un bond
        Sur la pendule.
        Et pendant une heure : Halte-là !
        Plus un bruit, plus une secousse,
        Ensuite après, la revoilà
        Qui marche en douce !

        Et je me dis en bon glaneur,
        Qu'en volant cette heure, elle est celle
        Qui fera pleuvoir le bonheur,
        Et le charbon dans l'escarcelle.

        Donc déclenchons puisque c'est bon
        Au jour d'aujourd'hui truquons l'heure ;
        Et tu verras que le charbon
        Sera bientôt au prix du beurre !


Nixo               


IN MEMORIAM! NE JAMAIS OUBLIER!
Texte
Envoyé par M. Plusieurs lecteurs

Cérémonie hommage massacre d'Oran 5 juillet 1962

         " Madame, Monsieur, Mes amis,

         Chaque année, le 5 juillet est une souffrance, une brûlure. De ces brûlures, de ces souffrances qu’on cache au fond de soi, au fond de son enfance, au fond de sa mémoire hantée par des images qui finissent par prendre forme à force de vous avoir été racontées. Je n’étais pas à Oran ce 5 juillet 1962. Mes parents nous avaient envoyés, mes frères et moi, en métropole. Ils étaient inquiets pour nous. Ils avaient raison.

         Ce jour-là, comme des centaines d’Européens, mon père a été arrêté par des hommes du FLN. Il s’en est sorti grâce à l’intervention d’un musulman qui le connaissait et qui l’a fait descendre du camion qui l’aurait conduit au Petit Lac de sinistre mémoire. D’autres n’ont pas eu sa chance. Ils sont morts ou portés disparus.

         Pendant des années, les leurs ont espéré les revoir, ont tressailli chaque fois qu’on sonnait à leur porte, espérant un retour attendu, espéré, rêvé. Une torture, une nouvelle torture après celles subies à Oran ce 5 juillet.

         La France a oublié les disparus d’Oran. La France qui se présente comme le pays des droits de l’homme, la France qui se mobilise pour des disparus un peu partout dans le monde, cette France n’a pas osé se regarder en face. De peur de froisser le nouveau pouvoir algérien, elle a nié, pendant des années, ce drame qui a bouleversé, anéanti des familles entières.

         La France nous a abandonnés, nous a privés d’un pan de notre histoire. De cette histoire qui lui rappelle qu’une partie de son peuple – le peuple pied noir, le peuple harki – a été chassée de nos manuels scolaires, de notre mémoire nationale. Comme s’il fallait les cacher pour ne pas avoir à demander des comptes à ceux qui ont laissé faire, qui ont regardé ailleurs, qui ont demandé à leurs soldats – des soldats français - de ne pas intervenir.

         Être ici, comme chaque année, c’est refuser que l’oubli, que le long, le lugubre manteau de l’oubli ne vienne faire disparaître, une seconde fois, ceux que les tueurs du FLN ont enlevés, torturés, lynchés, mutilés, égorgés, assassinés.

         Combien sont-ils ces oubliés du massacre d’Oran ? Personne ne le sait exactement. Plusieurs centaines pour le moins. 700, 800 nous disent les historiens les plus scrupuleux. 700, 800 familles à jamais marquées, traumatisées, lacérées par le malheur et la peine, l’inconsolable peine de n’avoir jamais pu enterrer ses morts.

         Le massacre du 5 juillet hante à jamais nos âmes couturées de cicatrices, perclues de chagrin. Il est en nous. Il est une partie de nous.

         Le taire, le passer sous silence serait un abandon, une trahison, une forfaiture. Pour ceux qui sont morts ce jour-là, mais aussi pour leurs familles qui, souvent, ne se sont pas relevées des outrages subis.

         Il ne faut pas, il ne faut plus pleurer nos morts. Il faut leur rendre hommage, les saluer, s’incliner devant eux. Les revendiquer, enseigner leur martyr à nos enfants, exiger qu’ils aient toute leur place dans notre « roman national ».

         À l’heure de la dénonciation du « racisme colonial », il n’est pas inutile de rappeler, en gardant le 5 juillet 1962 en tête, que des exactions ont été aussi l’œuvre de ceux qu’on nous présente comme d’éternelles victimes. À Oran, ce jour-là, les abominations, les crimes étaient le fait des vainqueurs du jour. Et les vaincus, c’était nous.

         Aujourd’hui, je pense à mon père. Comme beaucoup d’entre vous. Aujourd’hui, je pense à cette journée qu’il ne voulait pas évoquer. À cette journée qui était comme un adieu à son pays, comme une porte qui se refermait à jamais sur des années de bonheur.

         Aujourd’hui, nous sommes ensemble dans cette ville qui est devenue la nôtre. Et avec vous, je regarde l’autre rive de la Méditerranée. Avec nostalgie, il faut bien le dire. Avec tristesse, en ce jour de deuil. Avec colère aussi devant la lâcheté de ceux censés nous protéger. Avec horreur face à la barbarie qui fut une fête pour ceux qui nous tuaient.

         Aujourd’hui, je veux pardonner sans jamais oublier. Vive cette Algérie qui fut française et qui n’a aucune raison d’en avoir honte ! Et bien sûr, vive la France !"

Robert Ménard,
maire de Béziers



VIVRE et MOURIR PIED-NOIR...
Envoyé par plusieurs compatriotes
(Il y a les "bons" et les "mauvais" réfugiés)

                  Afin que nos descendants connaissent leur HISTOIRE sans qu'elle ait été dénaturée, falsifiée, trahie, insultée et qu'enfin la vérité soit dite au grand jour et à la face du Monde, de nombreux Pieds-Noirs ont écrit et écrivent tous les jours la VÉRITÉ HISTORIQUE telle que nous l'avons réellement vécue, car nous sommes la MÉMOIRE vivante jusqu'à la mort du dernier d'entre nous.
                  A l'approche de la fin de sa vie, un vieux Pied-Noir anonyme a écrit cette magnifique et émouvante lettre adressée à nos concitoyens de Métropole.
*****************

                A quelques encablures de ma fin de vie, à un âge où les souvenirs se déclinent plus aisément que les projets et après avoir épuisé mes capacités de silence, je ressens le besoin d'éclairer un malentendu.
                  Après plusieurs années de vie professionnelle, j'ai travaillé avec vous, Français de Métropole, milité avec vous, partagé quelques succès et quelques épreuves, communié aux mêmes valeurs, au même humanisme.

                J'ai bu à la coupe de ce bonheur de vivre en France Métropolitaine, de s'étonner de ses richesses, de se pénétrer des mêmes émotions, au point que j'ai cru avoir oublié que j'étais né dans une des provinces française, sur une autre rive de la Méditerranée, de parents et de grands-parents à l'accent impossible souvent venus d'ailleurs, d'une ville de la Méditerranée ou d'ailleurs.
                  Je m'étais cru Français comme vous et j'avais cru achever ce travail de deuil commun à tous les exilés du monde.

                Et puis, depuis quelques mois, des maisons d'édition ont fait pleuvoir témoignages et réflexions sur la guerre d'Algérie.
                  Les chaînes de télévision et les radios ont commenté les ouvrages et refait l'Histoire de 132 ans de présence française en Algérie.
                  Avec une étonnante convergence de vues, la plupart ont révélé, sur cette période, une vision singulièrement sinistre.

                J'ai revu l'histoire de ma patrie, l'Algérie Française, travestie ou défigurée en quelques propositions caricaturales telles que : "La présence de la France en Algérie fut de tout temps illégitime"
                  "Que les Français d' Algérie ont exploité les Arabes et ont volé leurs terres"
                  "Que les soldats Français ont torturé des patriotes qui libéraient leur pays"

                "Que certains Français ont eu raison d'aider les fellagas (révolutionnaires assassins du FLN) à combattre l'armée française et peuvent s'enorgueillir aujourd'hui d'avoir contribué à la libération de l'Algérie en assassinant d'autres Français."
                  Alors, j'ai compris que personne ne pouvait comprendre un pays et un peuple s'il n'avait appris à l'aimer... et vous n'avez jamais aimé "cette belle Province", notre Algérie ! Alors, j'ai compris pourquoi vous changiez de conversation quand je révélais et affirmais mon origine "pieds-noirs".

                J'ai compris que les exodes espagnol, arménien ou juif vous avaient touché mais que le nôtre vous avait laissés indifférents, et même dérangés, au point de vouloir nous rejeter à la mer.

                J'ai compris pourquoi les maquisards qui se battaient pour libérer la France envahie étaient des héros, mais pourquoi des officiers qui refusaient d'abandonner ce morceau de France, ces citoyens Français et ces Harkis, entraînés à nos côtés, étaient traités de putschistes.

                J'ai compris pourquoi des mots comme "colon" avaient été vidés de leur noblesse et pourquoi, dans votre esprit et dans votre langage, la colonisation avait laissé place au colonialisme.
                  Même des Français de France Métropolitaine, comme vous, tués au combat n'ont pas eu droit, dans la mémoire collective, à la même évocation, aux mêmes commémorations que les Poilus ou les Résistants, parce qu'ils furent engagés dans une "sale guerre ! Ayez HONTE ! "

                Alors que leur sacrifice fut aussi noble et digne de mémoire, vous est-il plus facile de célébrer le 19 mars, d'autres "héros algériens", ceux-là plutôt que nos soldats morts pour rien!
                  Dans un manichéisme grotesque, tout ce qui avait contribué à défendre la France métropolitaine était héroïque ; tout ce qui avait contribué à conserver et à défendre notre province algérienne pour continuer à y vivre était criminel...

                "Vérité et légitimité en deçà de la Méditerranée... Erreur et crime contre l'humanité au-delà !"
                  Vous, si prolixes pour dénoncer les tortures et les exactions de l'armée française au cours des dix dernières années (1952/1962), vous êtes devenus curieusement amnésiques sur les massacres et les tortures infligés par les fellagas à vos compatriotes européens et musulmans.
                  Vous ne trouvez rien à dire sur l'œuvre magnifique et pacifique française en Algérie pendant 130 ans. Pas un livre, pas une émission de télévision ou de radio, rien !

                Les fictions même s'affligent des mêmes clichés édités par de pseudo historiens Français, à peine âgés de quatre ans en 62... arrogants et fils de porteurs de valises, et de certains maghrébins volontairement non intégrés, et soi-disant "opprimés".

                Ce qui est singulier dans les débats sur l'Algérie, sur cette guerre de huit ans, et sur la fin de la période française, c'est que celles et ceux qui en parlent, s'expriment comme s'ils parlaient d'une terre étrangère et dont ils ignorent tout, absolument tout même au plus haut niveau d'Etat.

                Disséquer le cadavre de l'Algérie Française leur est un exercice clinique, que Politiciens de basses œuvres, néo-journalistes, commentateurs en verve et professeurs d'université gauchisants, réalisent pour leur "Superbe" avec la froide indifférence d'étrangers à notre Nation.
                  Personne ne pense que plus d'un million de femmes et d'hommes n'ont connu et aimé que cette terre où ils sont nés.
                  Personne n'ose rappeler qu'ils ont été arrachés à leur véritable patrie et déportés en exil et certainement pas "Rapatriés" sur une terre souvent inconnue et fermement hostile...

                Quand certains intellectuels Français se prévalent d'avoir aidé le FLN, personne ne les accuse d'avoir armé le bras des égorgeurs de Français... Ce n'était pas la même musique en 1945 à l'égard des "collabos nazis"...

                Cette terre vous brûle le cœur et votre triste mémoire vous gave de mauvaise conscience.
                  Je n'ai pas choisi de naître Français sur une terre que mes instituteurs Français m'ont appris à aimer comme étant une Province Française à part entière.
                  Mais, même si "mon Algérie" n'est plus, il est trop tard, aujourd'hui, pour que cette terre me devienne étrangère et ne soit plus la terre de mes Arrière-grands-parents, de mes Grands-parents et de mes Parents, ma terre natale, fille de ma patrie.

                J'attends de vous, amis Français métropolitains, que vous respectiez mon Histoire même si vous refusez qu'elle soit aussi votre Histoire...

                Je n'attends de vous aucune complaisance mais le respect d'une Histoire dans la lumière de son époque et de ses valeurs, dans la vérité de ses réalisations matérielles, intellectuelles et humaines, dans la subtilité de ses relations sociales, dans la richesse et la diversité de son œuvre et de ses cultures.

                J'attends que vous respectiez la mémoire de tous ceux que j'ai laissés là-bas et dont la vie fut faite de travail, d'abnégation et - parfois même - d'héroïsme en 14-18 et 39-45.

                J'attends que vous traitiez avec une égale dignité et une égale exigence d'objectivité et de rigueur, un égal souci de vérité et de justice, l'Histoire de France d'en deçà et d'au-delà de la Méditerranée.

                Alors, il me sera peut-être permis de mourir dans ce coin de Métropole Française, en m'y sentant aussi, comme vous , Chez moi... Enfin.
Un vieux Pied-Noir anonyme


De la colonisation en Algérie.
Envoyé par M. Christian Graille
I

                 J'avais déjà fait un premier voyage en Afrique, lorsque j'y fus envoyé en qualité d'inspecteur de colonisation.
                 Après un séjour de deux mois, consacrés à l'étude des ressources et des besoins commerciaux du pays, j'employais quelques jours qui me restaient, avant mon départ, à visiter les terres des environs d'Alger. En traversant la plaine de la Mitidja, où, à côté des marais fiévreux, se déroulaient devant moi d'immenses terres arides et sans cultures. Où, si loin que mon œil put s'étendre, je ne voyais partout qu'une végétation :
                 - sauvage et parasite,
                 - flétrie,
                 - brûlée par l'ardeur du soleil,
                 - je ne trouvais pas un d'arbre pour me servir d'abri, je ne pus me défendre d'un sentiment profond de tristesse et de découragement.
                 Je me disais que cette terre ingrate et insalubre n'indemniserait jamais la France des sacrifices qu'elle s'était imposée pour en faire la conquête.
                 Heureux et fier de la gloire de notre jeune armée, je me demandais :
                 - si sous son sang généreusement répandu,
                 - si ses efforts et son courage,
                 - son héroïsme et
                 - ses souffrances, ne seraient pas perdus pour nous ?

                 Mais lorsque pénétrant plus avant dans la plaine, j'eus enfin rencontré quelques sources d'eau vives et courante, dont l'action salutaire tempérait les ardeurs de ce soleil de feu, lorsque, sur la partie de terrain arrosé, je vis s'élever une végétation vigoureuse et puissante au-delà de toute expression, frappé par ce contraste dont je voyais à la fois la cause et les effets, j'examinai avec plus d'attention les terres que j'avais parcourues.
                 J'étudiais la nature et la configuration du sol ; peu à peu mes premières impressions s'effacèrent pour faire place à des pensées d'espoir et d'avenir. Je vis alors cette plaine, qui d'abord m'avait paru aride et insalubre, partout recouverte d'une couche végétale, dont l'épaisseur et la fécondité dépassent celles de nos meilleures terres de France ; il me semble que les eaux qui se perdent par les infiltrations souterraines ou dans des marais fiévreux, pouvaient être facilement recueillies et utilisée.
                 Poussant plus loin mes désirs d'amélioration et de progrès, j'en vins à me demander ce qu'il en coûterait à la France pour :
                 - dessécher ces marais et
                 - creuser des canaux d'irrigation alimentés par les cours d'eau qui traversent la plaine, au moyen de barrages ou de digues, dont les Romains, nos devanciers en Afrique, nous ont laissé tant et de si beaux restes.

                 J'ai hâte de le dire, ces travaux ne sont pas impossibles et la dépense nécessaire, pour les exécuter, ne devrait pas arrêter un gouvernement qui comprendrait les avantages qu'il pourrait en obtenir :
                 - Avec un plan bien étudié,
                 - de sages économies,
                 - un emploi intelligent de l'armée et des colons.

                 L'exécution de ces travaux serait facile et peu dispendieuse ; on obtiendrait pour résulta d'assainir la plaine, de donner abondamment du travail et du pain à ceux qui n'en ont pas dans la métropole.
                 Le cœur plein de ces idées j'acceptai avec empressement le poste qui m'était offert ; et sans trop rechercher si mes nouvelles fonctions étaient un exil ou une disgrâce, je partis pour l'Afrique, heureux de contribuer activement à la colonisation de ce beau pays.
                 Il ne m'a pas été donné de m'associer longtemps à cette œuvre, que je persiste à regarder comme une des plus importantes et des plus utiles entreprises de la France. Je suis resté peu de jours en Afrique, mais je les ai consacrés à l'étude du progrès et des besoins de la colonisation.
                 Ce nouvel examen a confirmé toutes mes impressions premières ; aussi, malgré les essais malheureux qui ont été faits, je n'ai pas cessé d'espérer et de dire, avec M. Fortin d'Yvry : " J'ai foi dans l'Algérie comme en une nouvelle France, dont la conquête est assurée et dont les ressources sont aussi vastes que le territoire est étendu et varié. "

Première partie.
Premiers obstacles à la colonisation.
II

                 La guerre et les fièvres ont été les grands obstacles qu'a rencontrée d'abord la colonisation :
                 - Quand nos hôpitaux recevaient tous les jours de nouveaux malades,
                 - quand les Arabes, conduits par un chef habile et infatigable, se montraient partout hardis et menaçants, la confiance ne pouvait s'établir ; les travailleurs et surtout les capitaux ne vont que là où il y a pleine et entière sécurité ; et pour coloniser, il faut de l'argent et des bras.

                 L'insuccès des premiers colons est venu aggraver les difficultés. es travailleurs, et plus encore les capitalistes, qui déjà s'aventuraient difficilement en Afrique, ont été effrayés de ces résultats.
                 - Leurs craintes, leurs répugnances, se sont accrus à tel point, que la colonisation par l'industrie privée ne sera désormais possible que lorsque le gouvernement, prenant l'initiative, aura prouvé par le succès que le succès est possible, certain.
                 Ceux qui ont échoué ne veulent pas avoir tort ; ils attribuent leurs malheurs :
                 - au sol, au climat, au gouvernement, à l'usure, à tout enfin,
                 Excepté :
                 - à leur imprudence, à leur ignorance, au leur manque d'argent et de direction, et pourtant ce sont là les causes principales de leurs misères :
                 Comme leurs malheurs sont, les plaintes incessantes et unanimes, on a ajouté foi en leur parole, on les a cru sans examen, et peu à peu s'est accréditée cette opinion,
                 - qu'en Afrique la santé de l'homme dépérit et se perd vite,
                 - que la terre, dure au travail, ne donne que peu ou point de produit,
                 - que le gouvernement ne veut rien faire pour encourager et protéger les colons :
                 Opinion funeste qui a eu pour effet : de décourager ceux qui avaient le plus d'ardeur ; de rendre indifférents ceux qui espéraient encore et voulaient entreprendre, et de généraliser cette pensée mensongère : Qu'il n'y a rien à faire en Afrique !

                 Un examen approfondi des essais de culture faits en Algérie, nous fera connaître les véritables causes de la ruine des premiers colons ; il nous montrera tout ce qu'il y a d'exagéré et de faux dans l'opinion qui s'est accréditée.
                 Quant à moi, je n'hésite pas à affirmer, dès à présent :
                 - que l'Algérie peut et doit être colonisée,
                 - que le climat, le sol et l'État peuvent assurer aux colons, santé bien-être et protection,
                 - que la colonisation n'est pas seulement possible, mais que, dès qu'on le voudra, elle deviendra facile,
                 - enfin, qu'elle doit être immédiate ; car c'est seulement par elle que la France conservera sa conquête.

                 La prise d'Abd-El-Kader a mis fin à la guerre ; l'Algérie est désormais à l'abri de ces attaques meurtrières et inattendues qui ont mis tant de fois à l'épreuve les forces et le courage de notre brave armé.
                 Mais il ne faut pas conclure de là que l'Arabe soit partout soumis ou résigné. Pendant longtemps encore ce peuple :
                 - altier et fanatique,
                 - supportera difficilement le joug de ceux qu'il regarde comme des usurpateurs de ses biens, les ennemis de sa foi.
                 Pour le contenir et le réprimer au besoin, une force imposante sera indispensable.

                 Sans entrer dans l'examen des grandes questions, qui aujourd'hui occupent tous les esprits, on peut se demander si pour telle éventualité qu'il est sage de prévoir, nous ne serons pas forcés de réduire considérablement l'effectif de l'armée d'Afrique et si l'état de nos finances nous permettra de maintenir le budget de l'Algérie au chiffre élevé, mais nécessaire, auquel il a été porté. Dans ce cas :
                 - où trouver une force suffisante pour remplacer les soldats ?
                 - Comment alléger la France du sacrifice énorme qu'elle s'impose ?

                 Telle est la première question à résoudre, car il faut assurer la conquête avant de rien entreprendre.
                 Or, ce que nous indiquons comme une éventualité hypothétique, peut devenir bientôt une nécessité absolue.
                 Cette question n'a qu'une solution possible : La colonisation.
                 C'est évidemment par elle et par elle seulement qu'on obtiendra les hommes et l'argent nécessaires, indispensables.
                 Hâtons-nous donc de coloniser l'Afrique, car déjà la question de l'Algérie pourrait être ainsi posée : Ou la colonisation ou l'abandon.
                 Hâtons-nous ! Car la colonisation n'aura pas seulement pour effet de rendre plus facile et moins dispendieuse la défense du sol que nous avons conquis.
                 Elle sera en outre pour :
                 - les négociants, les industriels, les ouvriers de la métropole une source certaine de bien-être et de richesse.
                 - Si malgré les victoires de notre armée, il faut encore soixante ou quatre-vingt mille hommes pour garder l'Algérie,
                 - si un budget de quatre-vingt à cent millions est aussi indispensable,
                 - si la France ne peut, à l'avenir, s'imposer de si grands sacrifices en hommes et en argent, enfin
                 - si la colonisation peut seule suffire à ces exigences, on peut dire que nous touchons au moment suprême qui doit décider du sort de notre colonie.

                 En effet au moyen du crédit de cinquante millions votés par l'assemblée constituante, l'État a commencé un grand essai de colonisation ; si cet essai ne réussit pas, la colonisation n'est plus possible et l'Afrique est perdue pour la France !
                 Quel est le capitaliste qui voudrait exposer sa fortune et le cultivateur sa famille dans une entreprise où le gouvernement aurait échoué avec ses immenses ressources ? Evidemment, il ne se trouverait plus en France, ni un homme, ni un écu pour coloniser l'Algérie.

                 Au moment où j'écris ces lignes, les résultats de cet essai sont connus ; on sait que les colons envoyés en Afrique en 1848 sont, malgré d'énormes sacrifices, aussi malheureux que leurs devanciers ; mais on sait aussi que cet essai n'était pas sérieux, que ce n'était pas la colonisation qu'on avait pour but lorsqu'on a envoyé en Algérie les ouvriers sans travail de Paris et de Lyon.
                 On sait, enfin, que les causes qui ont empêché ces colons improvisés de réussir, sont indépendantes du sol et du climat de l'Afrique.
                 La commission envoyée en Algérie par le ministre de la guerre a fait connaître quelques-unes de ces causes.
                 Je me borne à dire, quant à présent, que cet essai, stérile et très coûteux, ne préjuge rien et que la question de la colonisation reste entière.
                 - La dignité, l'honneur, l'intérêt de la France sont engagés en Afrique.

                 Nous avons eu la gloire de détruire ce repaire de la piraterie qui, de Malte à Gibraltar, désolait la Méditerranée et rendait la navigation dans ces parages si dangereuse aux navires de commerce.
                 Les nécessités de la guerre, une politique sage et prévoyante ont agrandi le but de la première expédition ; la conquête a été résolue.
                 Cette œuvre grande et difficile, l'armée française l'a accomplie avec constance et courage. Aujourd'hui nous sommes maîtres de cette belle et riche contrée qui donne :
                 - à notre marine plus de deux cents lieues de côtes,
                 - à notre industrie un débouché et d'immenses ressources,
                 - à nos ouvriers sept mille lieues carrées de terrains à cultiver, etc.
                 - Notre marine,
                 - notre commerces,
                 - nos fabriques ont déjà gagné à l'occupation de l'Algérie.

                 Ces premiers avantages seront décuplés, lorsque les richesses de ce beau pays seront connues et convenablement exploitées.
                 Dans nos campagnes et plus encore dans nos villes une population nombreuse manque souvent de travail et souffre même dans les temps de calme. Dans les jours de stagnation et de crise, elle endure toutes les horreurs de la misère et de la faim. Cette population, d'abord :
                 - pleine de sève et de vie, laborieuse, intelligente,
                 - les souffrances et les privations de toute sorte : l'affaiblissent, l'énervent, la démoralisent et la corrompent.

                 Elle trouvera en Afrique le travail et le bien-être ; et la France s'épargnera ainsi de poignantes douleurs et de grandes convulsions.
                 - Ces avantages immenses, Ces ressources certaines, cette gloire,
                 - ces richesses, la colonisation seule peut nous les donner.
                 A l'œuvre donc ! Faisons vite et bien !

                 Mais en agriculture pour réussir, il faut procéder avec lenteur et maturité ; là surtout on doit accorder très peu au hasard, si l'on veut éviter de cruelles déceptions. Une faute a pour première conséquence une considérable perte de temps, et d'un temps précieux.

                 Comment concilier la prudence, la lenteur qu'exige une bonne culture, avec les nécessités de la France et de l'Algérie qui aspirent à une prompte colonisation ?
                 En étudiant les essais des premiers colons, nous échapperons aux fautes qu'ils ont commises ; cette expérience ne doit pas être perdue pour nous. Nous devons en outre nous inspirer des travaux des hommes intelligents et dévoués qui, ont longtemps habité l'Afrique et qui ont publié sur la colonisation des livres malheureusement trop vite oubliés.

                 Nous préserver de ces fautes et profiter de ces leçons, telle doit être notre règle de conduite.
                 Il ne s'agit donc pas aujourd'hui de chercher un nouveau mode de colonisation, ni d'aller vers l'inconnu mais d'appliquer un système qui, grâce à une expérience si chèrement acquise n'ait plus à redouter de déceptions ni de catastrophes. Pour indiquer cette marche à suivre il n'est donc pas besoin de formuler une théorie nouvelle.

                 Il suffira d'examiner les causes qui ont entraîné la ruine des premiers colons et de nous en préserver ; nous devons en outre chercher dans les livres les moyens déjà consacrés par l'expérience et les meilleurs pour arriver sûrement et vite à une bonne colonisation.
                 Mais pour attirer en Afrique des bras et des capitaux ce n'est point assez de dire que le succès de la colonisation est facile, assuré ; il faut d'abord prouver que la santé et la fortune y sont garanties, protégées contre les influences du climat et les attaques des Arabes : à cette triple condition, la confiance renaîtra !
III

                 Les grandes pertes que nous avons éprouvés en Afrique pendant les premières années de l'occupation avaient fait craindre les effets du climat ne rendissent à peu près impossible la colonisation par les Européens.
                 On est à peu près revenu aujourd'hui de cette appréhension ; mais comme elle n'est pas complètement dissipée, je crois devoir entrer dans quelques détails pour démontrer que, en Algérie comme en France, le colon européen peut vivre et travailler sans avoir à redouter les effets du climat, et qu'il n'a besoin pour cela que de s'astreindre à quelques précautions d'hygiène faciles et peu dispendieuses. Le climat de l'Algérie est généralement sain, mais il est chaud et dans les régions élevées, sujet à grandes variations de température : Dans la région du littoral la chaleur est tempérée par des brises de mer presque continuelles.
                 Si on excepte quelques parties basses et sans écoulement, telles que la Macta où le soleil et l'eau décomposent les plantes et développent des germes putrides, l'Européen vit partout en santé et supporte le travail qui n'est interrompu qu'au moment des fortes chaleurs.
                 Dans la région plus élevée des plateaux, le climat est plus sain que dans celle du littoral. Le travail n'y est jamais interrompu. Au reste, l'opinion qui s'était d'abord accréditée de l'insalubrité du climat disparaît et s'efface tous les jours pour faire place à l'opinion contraire.
                 Voici à ce sujet comment s'exprime M. Fortin d'Ivry : " Les ressources de l'Algérie sont immenses et d'abord le climat y est excellent, il offre à différentes hauteurs des plaines, des plateaux et des montagnes qui permettent toutes les conditions de culture et d'habitation pour l'Européen. " Pourtant l'acclimatation sera toujours pénible et la prudence exige qu'on se mette en mesure d'en prévenir et d'en combattre les effets.

                 D'un autre côté les terres d'Afrique n'ont pas été remuées depuis plusieurs siècles et les premiers travaux de culture auront pour résultat l'émanation de miasmes nuisibles à la santé du colon.
                 Il y a là encore un danger contre lequel on doit se prémunir.
                 Le choix des lieux est le moyen le plus sûr et le plus important. Les colons ne doivent être placés que sur des terrains où les eaux sont abondantes, de bonne qualité et d'un écoulement prompt et facile.
                 Il est de plus indispensable d'exercer une surveillance active et de ne pas permettre que le colon se loge dans des maisons qui manqueraient aux premières conditions de l'hygiène.

                 Mieux vaut avoir d'abord quelques travailleurs de moins en Algérie, que de s'exposer, presque à coup sûr, à les voir entrer dans les hôpitaux peu de jours après leur installation.

                 Et c'est ce qui arrive quand le colon est mal logé et, plus sûrement encore, lorsqu'il est placé dans le voisinage d'eaux stagnantes. Les défrichements sont pénibles, dangereux à cause des émanations.
                 Il convient donc surtout dans les premiers temps, que le colon puisse varier ses travaux et ne soit pas constamment employé à remuer des terres presque vierges. Les herbes ramassées avec soin et brûlées tous les jours sur les champs défrichés, contribueront à purifier l'air ; enfin le colon doit avoir une nourriture saine et suffisante et se garantir de tout excès.
                 Avec ces précautions sa santé est aussi assurée qu'elle pourrait l'être en France. Les moyens que j'indique sont faciles et peu dispendieux ; ils seront suffisants pour maintenir le colon en santé.

                 Je dois maintenant essayer de dissiper les craintes qu'inspirent encore les Arabes et que de fréquentes révoltes semblent justifier ; ces craintes ne sont pas mieux fondées que celles qu'avait fait naître d'abord la prétendue insalubrité du climat, mais elles sont plus généralement répandues, et pour les détruire, j'ai besoin d'entrer dans de plus grands développements.
IV

                 Il est un grand nombre de personnes qui pensent que l'Arabe, tant de fois vaincu mais toujours révolté, ne nous laissera jamais jouir paisiblement du sol que nous avons conquis. Ceux-là se trompent ; ils ne connaissent :
                 - ni l'Afrique, ni le caractère, ni les mœurs, ni les ressources du peuple qui l'habite.

                 D'autres, moins effrayés, conviennent que la prise d'Abd-el-Kader a mis fin à la guerre, que l'Arabe est soumis ou tout au moins découragé ; mais ils ajoutent que, pour assurer la tranquillité et contenir les populations indigènes, il faut absolument que l'effectif de l'armée d'Afrique soit maintenu sur le pied actuel.
                 Ils pensent que le rappel d'une partie des troupes serait le signal d'une grande insurrection.
                 Et comme l'état présent des affaires de l'Europe et notre situation financière font craindre, avec quelques raisons, que la France ne soit forcée bientôt forcée de rappeler une partie de son armée :
                 - les craintes restent, la confiance ne renaît pas et la colonisation est toujours stérile !

                 Il importe de détruire ces frayeurs exagérées ; il faut que la vérité soit connue et qu'on sache bien que, si les besoins de la France, l'exigent, l'armée d'occupation pourra être réduite sans qu'on ait à redouter ni insurrection, ni soulèvement de la part des Arabes
                 Ce n'est pas sans hésitation, j'allais presque dire sans répugnance, que j'aborde cette question ; mais la défense de nos possessions d'Afrique se lie d'une manière si intime au sujet que je traite, que je n'ai pu me dispenser d'en parler.
                 La colonisation n'est possible qu'avec une sécurité entière.
                 Mais quels que soient l'importance et l'intérêt qui se rattachent à cette question, quoique je sois profondément convaincu que la colonisation ne deviendra possible que lorsque les craintes, l'Arabe inspire, seront entièrement effacées, j'aurais été obligé de laisser, sans la traiter, cette question importante, si déjà un général habile et expérimenté, qui a longtemps commandé en Afrique ne l'avait parfaitement élucidée.

                 En 1846 et 1847, M. Le Pays de Bourjolly a publié successivement deux brochures où il traite de la défense de nos positions avec autant de clarté que de talent.
                 C'est du projet de ce général que je me suis inspiré.
                 Dans la première partie de son travail il s'occupe de la qualité des troupes qui doivent composer l'armée d'Afrique. Cette partie a vivement été controversée par les hommes de guerre ; le maréchal Bugeaud, entre autres, en a fait une longue critique.
                 Il n'en a pas été de même pour la seconde la seule dont nous ayons à nous occuper ici :
                 - celle-là fut généralement approuvée,
                 - du gouvernement lui-même adopta un moment le projet du général de Bourjolly, des travaux furent entrepris à cette occasion.

                 Avant d'exposer ce système de défense et pour qu'on en ait la parfaite intelligence, je dois faire connaître l'état de l'Algérie avant et depuis la conquête, les travaux que nous y avons fait,
                 - les mœurs, le caractère, les besoins des Arabes.

                 L'Afrique française s'étend, de l'Est à l'Ouest, depuis la Régence de Tunis jusqu'à l'empire du Maroc ; elle est bordé au Nord par la Méditerranée au Sud par le Sahara, à l'exception de la grande Kabylie.

                 Cette immense étendue de terrain qui, d'après M. Carette () a plus de vingt mille lieues carrées de superficie, est aujourd'hui la propriété de la France, le prix des victoires de son armée et des sacrifices qu'elle s'est imposés.
                 La population indigène répandue sur cette vaste contrée est évaluée à deux millions d'habitants.

                 Indocile, dur et farouche l'Arabe est nomade ; il serait difficile de le maintenir dans la soumission et peut-être impossible de lui faire adopter nos mœurs et nos usages. Dans l'Est ses mœurs sont plus douces, son caractère moins turbulent ; cultivateur, laborieux et diligent, il s'est attaché aux plaines riches et fertiles de la province de Constantine et s'y est établi à demeure fixe.
                 Il a compris les bienfaits de l'administration française et apprécie les effets de sa puissante protection.
                 Il a su s'approprier avec discernement ce qui a été fait de bon et d'utile dans les essais de culture que nous avons tentés.
                 Peu d'efforts restent à faire pour l'attacher entièrement à la France à laquelle il est soumis et contre laquelle il ne se révoltera jamais, si on évite avec soin de le froisser dans ses intérêts et dans sa foi. Dans la province d'Alger, la population indigène tient par :
                 - l'esprit, les mœurs et les usages des populations de l'Est et de l'Ouest.

                 En la protégeant dans sa personne et ses propriétés, en augmentant son bien-être, ce qui est facile, la France aura beaucoup fait pour la pacification du pays. Voici comment s'exprime, à ce sujet, le général Bedeau : " Je ne crois pas à l'imperméabilité du peuple arabe, à sa haine pour les arts et notre bien-être social, parce que je trouve dans son histoire même, dans les traces si nombreuses de ses arts importés et appliqués en Europe, la cause de ma conviction…. Je ne crois pas qu'il soit insensible aux influences qui partout et toujours ont pénétré les hommes …
                 Et, plus loin, il ajoute : La paix nous a permis de donner à ces populations un bien-être matériel progressif ; ce bien-être a diminué de jour en jour les instincts guerriers que le désordre entretient et excite ; cette population est préparée à nous être un utile auxiliaire de la puissance que nous voulons fonder dans le pays… "

                 La population indigène de l'Algérie peut être classée en quatre grandes races, elle se fractionne à l'infini par la division en tribu :
                 - Deux de ces races sont d'origine kabyle,
                 - une d'origine arabe,
                 - la quatrième connue sous le nom de Chaouia, descend de l'ancienne population numide et s'est conservée à peu près pure de tout mélange avec l'Arabe qui l'a vaincue et soumise.
                 Les Chaouias sont doux et laborieux ; l'Arabe les méprise comme un peuple vaincu et soumis. En les protégeant efficacement il nous sera aisé d'en faire des auxiliaires actifs et dévoués.
                 La haine que se portent ces races est loin d'être éteinte ; elle est plus forte et plus terrible que celle que chacune de ces races éprouve contre nous.
                 Sans les exciter, ce qui serait immoral, il sera d'une sage politique de profiter de ces haines qui entretiennent des divisions, pour nous établir les arbitres et les médiateurs des querelles des tribus et des races entre elles ; nous acquerrons ainsi une influence qui rendra plus facile la pacification de l'Algérie.
                 Le Tell est la région la plus fertile de l'Afrique ; c'est là que doivent être établis nos colons.
                 Il s'étend de l'Est à l'Ouest, mais il varie beaucoup dans sa largeur qui est de plus de cent lieues dans la province de Constantine et se réduit à moins de trente dans celle d'Oran.

                 Puis vient la région du Sahara où la colonisation n'arrivera pas de longtemps, quoique cette partie d'Algérie donne de bons pâturages pendant l'hiver et le printemps et que dans certaines contrées la culture des céréales puisse y être faite avec succès et avantage.
                 Ce pays immense, riche et fertile au-delà de toute expression, défendu par une population de deux millions d'habitants a été conquis par notre armée en dix-sept ans. Les Romains, ces grands dompteurs de nations avaient employé plus d'un siècle à faire cette conquête.
                 Mais au milieu des luttes politiques qui absorbaient tous les esprits, la France a été peu attentive à la gloire de son armée.

                 A part quelques faits d'armes éclatants, quelques désastres inévitables dans une guerre d'invasion et qui seuls ont pu exciter la curiosité publique, cette conquête, à la fois riche et glorieuse, s'est accomplie sans qu'on s'en soit ému !
                 - Et pourtant que d'efforts,
                 - que de constance nos soldats n'ont-ils pas dû dépenser avant de dompter et de soumettre un peuple armé pour la défense du sol et de la religion, avec un chef habile, actif et courageux !

                 Depuis la prise d'Alger jusqu'à la soumission d'Abd-el-Kader :
                 - que de marches, de privations et de fatigues pour :
                 - joindre, attaquer, et
                 - vaincre un ennemi qui toujours fuit et échappe dans un pays presque inconnu, sous un soleil brûlant !

                 Quand nos soldats ne trouvaient :
                 - ni routes tracées, ni villes, ni villages, ils étaient quelquefois obligés d'établir leurs bivouacs auprès de marais insalubres et les germes putride qui se développent avec force et rapidité.

                 Je le dis avec bonheur, la France peut et doit être fière de son armée :
                 - elle a fait en Algérie des prodiges d'énergie et de bravoure,
                 - elle a supporté avec une constance admirable les privations et les fatigues de toute sorte,
                 - les fièvres qui l'ont quelquefois décimée n'ont jamais pu abattre son courage ;
                 - pendant dix-sept ans elle a poursuivi sans relâche un ennemi puissant et dangereux ; elle l'a Vaincu !

                 Grâces en soient rendues à elle et aux chefs habiles qui l'ont dirigée dans cette rude et pénible entreprise ! Leur mission était :
                 - belle, grande, difficile.
                 Ils l'ont remplie ! Ils ont bien mérité de la France.
                 Mais l'armée n'a pas seulement conquis l'Afrique, elle a encore porté à ce pays, les arts et l'industrie, bienfaits de la civilisation ; en cela elle a été puissamment secondée par les colons venus de France pour s'associer à son œuvre.

                 Dans ce pays où naguère encore on ne trouvait que :
                 - deux villes de quelque importance,
                 - des bourgs rares et mal bâtis, et
                 - des gourbis infects ,
                 On voit aujourd'hui plusieurs grandes et belles villes, autour desquelles viennent se grouper :
                 - de délicieux villages,
                 - de magnifiques casernes,
                 - de vastes hôpitaux,
                 - de grands travaux de fortification et de défense ont été exécutés ou sont en d'exécution,
                 - le port d'Alger a été agrandi et rendu plus sûr,
                 - Arzeu, Mers el Kébir, Nemours, Philippeville, Bône ont eu leurs rades et leurs ports réparés et défendus.

                 Au lieu de sentiers difficiles, ardus, accessibles seulement aux piétons et aux mulets, on a tracé :
                 - de magnifiques routes, dont quelques-unes sont déjà carrossables et très bien entretenues,
                 - des ponts ont été établis,
                 - les anciennes villes restaurées et agrandies,
                 - on a bâti des églises,
                 - des palais,
                 - des théâtres.

                 Partout enfin on reconnaît aujourd'hui en Afrique la main de la France et son génie !
                 - Et quand on pense que ces travaux ont été faits pendant une guerre de dix-sept ans toujours pénible et souvent meurtrière !
                 - Quand on se dit que nos soldats et leurs chefs, tenus constamment en haleine par un ennemi actif et courageux y ont puissamment contribué !
                 - que des colons intelligents et hardis n'ont pas craint, au milieu des dangers de la guerre et des privations de toutes nature, d'engager leur fortune et leur vie dans cette œuvre de civilisation, on ne peut se lasser d'admirer :
                 - le courage et l'énergie des soldats,
                 - le génie,
                 - l'activité des chefs,
                 - la constance,
                 - le dévouement des colons.

                 Est-ce à dire pour cela qu'en Afrique tout ait été bien fait et que nous n'ayons que des louanges à donner ? Non, certes, car bien des fautes ont été commises, bien des abus ou ignorés ou tolérés sont restés impunis.
                 Plus d'une fois, dans le cours de ce travail, nous aurons à signaler ces abus et ces fautes ; mais à côté du juste blâme doit se trouver l'éloge mérité.

                 Je suis heureux de pouvoir rendre cette justice à des hommes sur les fautes desquels je ne m'aveugle pas mais dont je reconnais aussi la valeur.
                 Et puis, quelques-unes de ces fautes s'expliquent tout au moins, si elles ne se justifient par les soins incessants qu'exigeait une guerre de tous les jours.
                 Et quand, à côté des erreurs et des abus que le temps efface, on trouve :
                 - des routes, des ponts, des villes, des villages, des hôpitaux, des casernes, des ports, des arsenaux qui restent et témoignent des efforts d'un grand peuple on peut oublier un moment d'erreurs et d'abus pour admirer sans réserve veux qui ont fait ces grandes choses, qu'ils soient :
                 - colons, généraux ou soldats !

                 Outre les avantages qu'ils procureront ou ont déjà donnés :
                 - au commerce, à l'industrie, à la colonisation, les travaux dont nous venons de parler auront surtout pour effet de rendre plus facile et plus sûre la pacification de l'Algérie.
                 La guerre est finie, la mission de l'armée n'est plus d'attaquer et de vaincre, elle doit maintenir et conserver.
                 Cette différence dans le but doit nécessairement apporter une modification dans les moyens.
                 Le nouveau système de défense doit s'appuyer sur les travaux dont nous venons de parler, et cette défense sera d'autant plus facile qu'on tiendra plus compte des mœurs et du caractère des Arabes bien connus aujourd'hui.
                 Enfin on devra s'efforcer de suppléer au nombre des troupes par une bonne disposition.

                 On se rappelle que la conquête que nous avons à conserver et à défendre est un immense plateau longitudinal serré entre la mer et le désert. Si on n'a pas oublié ce que nous avons dit du caractère et des mœurs des Arabes, on comprendra que les forces consacrées à cette défense doivent être placées de manière à pouvoir se porter rapidement sur les points menacés.
                 Il est toujours plus facile de contenir que de réprimer. C'est dire que la principale ligne de nos forces a sa place indiquée au centre même des plateaux.
                 Cette ligne qui s'étendrait de l'Est à l'Ouest, de Constantine à Tlemcen, serait appuyée sur les villes de : - Mascara, Orléansville, Miliana, Médéa, Aumale.

                 C'est là que doit être concentrée la grande masse de nos forces. On comprend en effet que lorsque notre armée sera à portée des points qui pourraient être menacés, les soulèvements seront toujours et facilement prévenus, et que si, par impossible, les Arabes se portaient à une tentative hostile, la promptitude de la répression nous préserverait pour longtemps de leurs attaques. Aujourd'hui nos troupes sont cantonnées dans les villes du littoral.
                 L'Arabe ne voit pas assez souvent nos soldats et cesse de les craindre : A ce premier inconvénient s'en joint un autre.
                 Les longues marches sont toujours pénibles en Afrique, les transports difficiles et dispendieux ; quand une ou plusieurs tribus se soulèvent, il faut pour les joindre, aller les chercher loin et préparer de longs convois, ce qui fait perdre un temps précieux.

                 Souvent, ce temps perdu change en révolte ouverte ce qui n'était d'abord qu'une simple démonstration, et nos soldats fatigués, harassés par une longue marche sont obligés de se battre quand ils n'auraient eu qu'à se montrer pour faire rentrer l'Arabe dans l'ordre, s'ils étaient arrivés quelques jours plus tôt sur les points menacés. Les travaux déjà terminés ou en voie d'exécution, contribueront puissamment à la défense du littoral et de la partie de non possessions comprises entre la mer et la ligne de défense.

                 La côte d'Afrique est difficile et dangereuse ; elle n'est abordable que sur quelques points.
                 - Les brisants,
                 - les roches sous-marines,
                 - le manque de fond et
                 - d'abris la protègent contre les attaques du dehors ; les points accessibles seront bientôt suffisamment défendus.

                 Il y a donc peu de crainte à avoir de ce côté, et à tout évènement les secours venus de France et de l'intérieur seraient promptement rendus sur les lieux.
                 Une attaque de la part des Arabes n'est pas à craindre sur ces points. Nos villes et le pays qui les avoisinent seront toujours suffisamment préservés par la seule présence des Français ; il suffira donc d'une faible garnison.
                 Une ligne de postes avancés par : - Sebdoue, Daya, Saïda, Tiaret, Beaugar, Batna, Biskara, maintiendrait la soumission jusqu'au désert, et quelques détachements de troupes répartis dans les autres villes ou villages de l'intérieur complèteraient ce système de défense.

                 Les colons placés entre la grande ligne du centre et la côte seraient préservés de toute attaque, d'un côté par les travaux et les garnisons de la côte, de l'autre par la masse de nos forces qui sera toujours un épouvantail pour ces Arabes.
                 De plus les centres de colonisation efficacement protégés trouveraient toujours un écoulement facile à leurs produits, soit dans les villes du littoral, soit dans les camps et l'armée, rapprochée des lieux de production et de culture serait constamment approvisionné et garantie par ce voisinage, de la nostalgie qui a déjà cruellement sévi en Afrique.
                 - Vingt mille hommes suffiraient pour garder la ligne du centre,
                 - six mille fourniraient les garnisons de la côte et
                 - six mille les postes avancés.
                 - Cinq mille hommes répartis par petits détachements et cantonnés dans les villes et les villages de l'intérieur, complèteraient l'effectif de l'armée d'Afrique, qui serait de trente-sept mille hommes.

                 Ce système de défense, proposé par le général de Bourjolly et approuvé par des hommes de guerre habiles et expérimentés n'a pas besoin d'être expliqué.
                 Pour ceux qui connaissent l'Afrique, il se justifie de lui-même, car il prévoit tout et assure la libre et tranquille possession de nos conquêtes. Pourtant il serait peut-être désirable de la compléter par l'organisation d'une garde nationale.
                 Les colons qui auront à défendre leurs familles et leurs propriétés seront d'utiles auxiliaires à notre armée.
                 Mais pour être utile, la garde nationale de l'Algérie doit être fortement constituée et organisée ; la loi de 1832 serait insuffisante.
                 Dans ce pays à peine sorti d'une longue guerre où une population nouvelle composée d'éléments hétérogènes est venue s'établir, il faut plus de force et de vigueur dans le commandement et un lien de discipline plus sévère que ne le comporte cette loi.

                 Aussi nous proposerions comme base de cette organisation :
                 1° Que le service fût obligatoire pour tous les colons sans exceptions ni privilèges. Si un citoyen, pour un motif quelconque, est dispensé du service, il naît des jalousies dont le moindre inconvénient est de produire le découragement dans l'esprit de ses camarades.
                 2 ° Les gardes nationaux de l'Algérie ne devraient jamais être astreints au service des places. Outre que ce service est toujours mal fait par la garde nationale, il n'est d'aucune utilité pour elle et fait perdre un temps précieux au négociant et à l'ouvrier.
                 3° la garde nationale devrait être fréquemment réunis en corps et exercée aux manœuvres d'ensemble. On le sait l'Arabe est surtout frappé par les objets extérieurs ; tant qu'il verra des citoyens isolés, se rendre sans ordres dans un corps de garde, il ne croira pas qu'ils puissent être dangereux pour lui. Si au contraire, il les voit réunis en corps, sortir des villes ou des villages, s'exercer aux marches et aux manœuvres, il comprendra que là aussi il y a une force avec laquelle il faudrait compter au besoin et cela le rendra plus sage et plus prudent.
                 4° Enfin, dans chaque localité, suivant l'importance de la population, la garde nationale devrait avoir à sa tête :
                 - un officier de l'armée, ferme et éclairé,
                 - capitaine,
                 - chef de bataillon ou
                 - colonel.

                 On éviterait ainsi les jalousies et les rivalités que la camaraderie introduit dans le service et qui désorganisent les gardes nationales, surtout dans les petites villes.
                 Ces corps ainsi constitués ne grouperaient au besoin autour des détachements de l'armée, cantonnés dans les villes ou les villages, et présenteraient une force imposante ; Ces forces réunies assureraient la paix et la tranquillité en Afrique.
Deuxième partie.
V

                 J'ai dit que par des mesures de prudence :
                 - simples, faciles et peu dispendieuses la santé des colons pouvait être préservée contre les influences du climat de l'Algérie.
                 On a vu que la propriété peut y être suffisamment protégée et efficacement garantie ; la confiance et la sécurité devraient donc être entières.
                 Mais au point où en est la colonisation en Afrique, après les malheurs et les déceptions éprouvés par les premiers colons, il ne suffit plus pour y appeler les travailleurs et les capitaux de rassurer les esprits sur les craintes inspirées par les influences du climat et les entreprises des Arabes.

                 Pour faire renaître la confiance il faut que le succès d'une grande entreprise dissipe toutes les préventions et prouve que la colonisation offre des avantages et une sécurité qu'on retrouverait difficilement ailleurs.
                 Cette preuve, à défaut de l'industrie privée, l'État doit la faire, car l'avenir en Afrique en dépend.
                 C'est ce qui nous a fait dire que le gouvernement doit prendre l'initiative d'un grand essai de colonisation.
                 Pour réussir, il faut surtout se préserver des fautes qui ont été commises ; pour s'en préserver il faut les connaître toutes. C'est à cela que nous devons d'abord nous appliquer.

                 Sans en excepter la ferme des Trappistes on pourrait dire avec vérité qu'il n'y a pas eu encore en Afrique d'essai de colonisation vraiment sérieux.
                 On ne peut en effet donner ce nom à des travaux entrepris dans des conditions qui rendaient le succès impossible.
                 - Les besoins d'argent,
                 - le prix élevé de la main-d'œuvre,
                 - le mauvais choix des lieux,
                 - l'ignorance des ressources du sol, des moyens et du genre de culture,
                 - enfin le manque d'eau pour arroser les terres sont autant de causes de ruine pour le colon de l'Algérie, et ces causes nous les avons rencontrées presque partout.

                 Lorsque l'État a voulu prendre l'initiative de la colonisation les chefs militaires auxquels ce travail a été confié ont eu surtout en vue d'occuper les points qui devaient assurer la possession et la pacification.
                 Nous ne voulons pas contester l'importance de cette préoccupation, mais nous devons constater l'influence qu'elle a exercée sur le choix des lieux où les villages ont été établis car on a tout fait pour la stratégie, rien pour le succès de la colonisation. Les secours donnés par l'État ont été ou mal répartis ou insuffisants.
                 Les colons livrés à eux-mêmes n'ont eu ni direction, ni enseignements. Et, comme s'il eut fallu que rien ne manquât à l'expérience et que nous dussions passer par toutes les épreuves avant d'arriver à une bonne colonisation, aux fautes qui avaient déjà produites des résultats déplorables sont venues se joindre de nouvelles fautes et de nouveaux malheurs.

                 La France regrettera longtemps la pensée qui a présidé à l'installation des colons envoyés en Afrique en 1848.
                 Disons-le, c'est la vérité, cette colonisation de l'Algérie n'a été que le prétexte de cette mesure ; on a seulement voulu éloigner de Paris et de Lyon quelques milliers d'hommes qu'on croyait dangereux : pensée funeste qui n'a rien fait pour la pacification de nos grandes cités, qui coûte déjà plus de quinze millions à la France et n'a produit jusqu'à présent que misère et déception.
                 Rien ne peut donner l'idée de l'imprévoyance, de la précipitation avec lesquelles on a opéré l'installation de ces colons. On les a poussé si loin que bien souvent les convois partaient de Paris sans qu'on en fut informé à Alger.
                 Quelquefois les colons étaient embarqués à Marseille et les travaux pour les recevoir n'étaient pas commencés ; d'autres arrivaient en Afrique avant que le lieu où ils devaient être établi fut désigné. Et pourtant la majeure partie de ces colons était composée d'hommes honnêtes et laborieux.

                 La misère les obligeait à quitter la France, ils partaient plein d'espoir dans l'avenir mais ils ne se dissimulaient pas que pour conquérir une position plus heureuse, ils ne devaient s'épargner ni peines, ni fatigues.
                 Je les ai vu à l'œuvre et je peux dire que, s'ils ne réussissent pas, c'est que tout autre aurait échoué comme eux, car ils ont été placés, presque tous, dans des conditions de succès impossibles.
                 J'ai entendu souvent les officiers chargés de les diriger, déplorer par avance le sort qui attendait ces malheureux.
                 On a dit et répété que si les colons Parisiens et Lyonnais ont échoué, c'est parce que leur ancienne profession était antipathique avec la culture des terres, et qu'on ne fait pas de l'agriculture avec :
                 - des maçons, des charpentiers, des orfèvres , des graveurs.

                 Cela est vrai, mais ce n'est là qu'une des causes et la moins importante des malheurs des colons, car un ouvrier laborieux et intelligent comme l'étaient la majeure partie de ceux qui sont allés en Afrique se fait vite aux travaux de la terre, il faut qu'on le sache ; placés dans les mêmes conditions, les laboureurs les plus diligents auraient échoué comme eux.

                 Nous ne voulons faire peser sur personne la responsabilité de ces fautes ; nous étions à cette époque dans un de ces moments de crise où l'erreur la plus grossière trouve créance et se propage.
                 Une préoccupation malheureuse était dans tous les esprits ; on pensait que du départ des colons dépendait la tranquillité de Paris et comme toujours on a sacrifié à la peur.
                 De là cette précipitation, cause premières de toutes les fautes commises. Les officiers qui ont été chargés de ce service ont fait les plus grands efforts pour suffire à la tâche qui leur était confiée, mais on n'improvise pas un directeur de colonisation.
                 Soldats courageux, comptables habiles, ils pouvaient devenir agronomes si on leur eût donné le temps indispensable pour apprendre cette science nouvelle pour eux. Le temps leur a manqué ; leur intelligence et leur activité n'ont pu suppléer au défaut d'expérience.
                 On le voit, bien des fautes ont été commises en Afrique, les unes s'expliquent par la nécessité de la guerre, les préoccupations de la conquête.
                 - La guerre est finie,
                 - la France est tranquille,
                 - l'argent ne manquera pas,
                 - l'expérience est faite ;
                 - tout enfin concourt au succès de la colonisation.
                 Il n'est plus permis de se tromper.

                 Tout nous fait espérer que nous touchons enfin au moment où la question de la colonisation va être traitée mûrement, sérieusement, comme elle mérite de l'être.
                 L'assemblée législative et le pouvoir exécutif ont pris l'initiative de sages et utiles mesures, qui, si elles sont menées à bonne fin, ne peuvent manquer de donner de bons et utiles résultats.
                 Déjà une commission envoyée en Afrique pour examiner la situation des colons et l'état de la culture est de retour de sa mission, et M. Reybaud, son rapporteur, a publié le résultat de ses investigations.
                 Dans son rapport savamment écrit il a eu, peut-être le tort de ne pas conclure ; surtout il n'a pas assez insisté sur ce que nous appellerons les questions pratiques, c'est-à-dire sur la nature et le genre de cultures qui conviennent au sort de l'Algérie et sur les moyens qui peuvent en rendre le succès facile.
                 Mais le travail de cette commission aura pour effet de faire connaître les ressources immenses de ce beau pays, et d'appeler l'attention de la France sur cette contrée qui peut devenir pour elle une source inépuisable de bien-être et de richesses.

                 Après une discussion à laquelle ont pris part des hommes éminents de l'Assemblée législative, une commission a été nommée ; elle est chargée de préparer la réforme des tarifs de douane de l'Algérie.
                 Cette commission a terminé son travail, le rapport a été déposé. Elle propose des modifications utiles mais insuffisantes, la discussion publique aura pour effet de faire mieux connaître les besoins de l'Algérie et par suite de rendre plus complet et plus profitable le travail de la commission.
                 Le ministre de la guerre a aussi formé une commission qu'il a chargé de réviser et de coordonner les lois et ordonnances qui régissent aujourd'hui notre possession.
                 Cette réforme indispensable était réclamée depuis longtemps par les administrateurs et les colons.
                 On a dit souvent que le sol de l'Afrique était propre à toutes les cultures, que sa fécondité était au-dessus de toute expression ; cela est vrai, mais à une condition, c'est que partout les colons auront de l'eau en quantité suffisante pour arroser tout au moins une partie des terres qui leur seront concédées.

                 Bien d'autres, avant nous, avaient signalé ce besoin dont jusqu'à présent on n'a pas tenu compte. M. le général Bedeau, dans un rapport adressé au maréchal Bugeaud en 1847, dit : " Pour que le colon réussisse, il faut lui donner des terres généralement irrigables. "
                 M. Fortin d'Ivry avait écrit avant lui : " On ne se fait pas l'idée de l'activité et de la force de végétation développée par l'eau et la chaleur. En Algérie on peut obtenir, par ce moyen, deux ou trois récoltes chaque année …
                 Aux environs d'Alger, les Mahonnais louent ces terres 1.000 à 1.500 francs l'hectare. "

                 Le général de Bourjolly, parlant du prix que les Arabes attachent aux fontaines et aux irrigations s'exprime ainsi : " Ils ont apprécié les mains prévoyantes qui semaient de canaux et de fontaines ce sol aride et brûlé, amenaient l'eau où elle n'avait jamais été, et faisaient produire de la terre ce qu'elle n'avait jamais produit avec tant d'abondance. " Tous ceux qui ont écrit sur l'Algérie ont insisté sur les avantages de l'irrigation des terres.

                 Enfin quand on parcourt ce pays, dans chaque vallée on rencontre les ruines d'anciens barrages construits par les Romains.
                 Malgré ces sages avis, tant de fois répétés par les vivants et par les morts et que tout nous faisait une loi d'écouter et de suivre, excepté le village de Saint Denis du Sig, nous n'avons pas trouvé un seul centre de population où l'on puisse arroser plus de quinze à vingt ares de terre, et ceux-là sont rares et privilégiés car le plus grand nombre n'a qu'un puits ou une fontaine, dont les eaux suffisent à peine aux besoins des ménages et des bestiaux.
                 Pour quelques-uns on a dû creuser à grands frais un puits à trente ou trente-cinq mètres de profondeur pour trouver une eau :
                 - saumâtre, mauvaise, au goût impropre aux besoins domestiques.

                 Dans ces conditions, le succès des colons était impossible ; et si une chose doit surprendre, c'est que leur ruine n'ait pas été plus prompte et plus terrible.
                 Les Romains, nos devanciers et nos maîtres en colonisation savaient autrement que nous exploiter ce beau pays ; ils n'avaient pas laissé un cours d'eau sans barrage, une plaine sans un système d'irrigation.
                 Un fragment de pierre trouvé sur les bords du Sig, prouve, par les mots qu'il porte, le prix qu'ils attachaient à l'irrigation :
Numini coloniae, Genio fluminis.
Au génie du fleuve, divinité de la colonie.

                 Ce génie, cette eau si précieuse sans laquelle rien n'est possible qu'a-t-on fait pour l'avoir ? Rien ! Et pourtant tout indiquait que c'était seulement par elle qu'on obtiendrait une colonisation riche et florissante.
                 De ce qui précède, il ne faudrait pas conclure que toute terre qui ne sera pas arrosée sera improductive.
                 Les céréales, et dans certaines contrées la vigne, donneront au contraire, sans arrosage, des produits abondants et de bonne qualité, lorsque la culture en sera faite avec soin et intelligence ; mais il faut bien savoir que le colon européen, qui ne produira que du blé ou de l'orge, sera bientôt ruiné. En effet, l'Arabe :
                 - qui n'a presque pas de besoin,
                 - qui compte son travail pour rien, et
                 - qui n'a pas de capital engagé
                 - sera toujours un concurrent redoutable : car il produit les céréales à 60 ou 80 % meilleur marché que nous.

                 L'Européen doit donc se livrer à des cultures riches et industrielles, à des plantations productives et il ne peut le faire que lorsqu'il aura des terres arrosées.
                 Voici ce que dit, à ce sujet, un des auteurs déjà cités : " Toutes les terres labourables produisent des céréales mais ce n'est pas une culture qui doit être entreprise par les Européens. L'Arabe les produit à bon marché ; il en produit beaucoup.
                 L'Européen ne peut pas essayer de faire concurrence à son travail. Le prix des céréales produites par lui, serait toujours plus élevé que les mercuriales d'aucun des marchés actuels.
                 Ce sont les cultures riches et industrielles, les plantations productives que l'Européen doit entreprendre ; pour qu'il réussisse, il faut lui donner des terres généralement irrigables. "
                 Nous ajoutons que si les colons européens devaient se borner à la culture des céréales, mieux vaudrait cent fois, dans l'intérêt de la France de ne pas les envoyer en Afrique et laisser aux Indigènes le soin de produire les orges et les blés. Car l'État dans le but de protéger le cultivateur européen contre la concurrence des Arabes s'impose tous les ans des sacrifices considérables, qui, pourtant n'empêchent pas la ruine des colons ; et ces sacrifices, c'est la culture exclusive des céréales qui l'oblige à les faire.

                 Au manque d'eau viennent se joindre, presque partout, dans les lieux où les colons ont été placés, les difficultés du défrichement. Il eût été prudent et il était possible d'épargner ces fatigues et ces frais énormes aux colons.
                 Dans certaines parties le sol est partout couvert de palmiers nains. La racine de cette plante a avec la terre une adhérence telle que les instruments aratoires qu'elle que soit leur puissance, ne peuvent l'en détacher.
                 Ce n'est qu'à force de bras qu'on parvient à l'extraire du sol. Pour faire comprendre l'importance et la difficulté de ce travail, nous dirons : Que dans les terrains argileux où le sol durcit et offre une grande force de résistance, un hectare de terre, couvert de palmiers nains, coûte, pour le défrichement mille francs ; et que, dans les terrains sablonneux la dépense et de quatre cents francs. Réduisant ce chiffre en journées de travail et comptant le prix de la journée à deux francs cinquante centimes, on trouve qu'un ouvrier doit travailler deux cent quatre-vingt jours pour défricher un hectare !

                 Plusieurs villages ont été établis sur des terres couvertes de palmiers nains ; pourtant il eut été facile de les placer dans des plaines où il y a de l'eau et où il n'y a que très peu ou point de palmiers. Il est inutile d'ajouter que les colons manquant d'eau pour arroser et placés sur des terres dont le défrichement exige presque une année de travail par hectare ont épuisé, sans résultat, leurs forces et leurs ressources.
                 Heureux encore lorsque leur santé a résisté aux privations et aux fatigues qu'ils ont supportées !
                 Et que ne suppose pas qu'il y ait rien d'exagéré dans nos affirmations, nous pourrions au besoin désigner les villages où un seul puits de trente mètres de profondeur donne aux habitants de l'eau :
                 - saumâtre, très désagréable au goût et
                 - en quantité à peine suffisante pour les besoins des ménages,
                 - d'autres sur le sol desquels il est impossible de faire un pas sans rencontrer un palmier nain !

                 Jusqu'à présent les colons n'ont cultivé que le blé et l'orge. Les plus intelligents ont planté des vignes.
                 - Soit ignorance,
                 - soit manque de ressources suffisantes, la culture n'est pas allée au-delà de la vieille routine de France, et encore cette culture a-t-elle été faite beaucoup plus mal en Algérie que dans la Métropole.
                 Ainsi, dans un pays qui peut produire abondamment les plantes industrielles le plus riches, telles que : - tabac, sésame, coton, canne à sucre etc., etc., on s'est borné à ensemencer de l'orge et du blé ; aussi le colon, au lieu de prospérer, a vu sa misère s'accroître de jour en jour et l'État n'a pu empêcher sa ruine malgré des sacrifices considérables.

                 Pour faire comprendre l'importance des sacrifices dont nous parlons, et les résultats qu'amène la culture exclusive des céréales, je citerai entre mille un fait qui s'est passé sous mes yeux.
                 En 1848, le gouvernement acheta la presque totalité de la récolte des colons européens au prix de vingt-quatre francs les cent kilos de blé et quatorze francs les cent kilos d'orge.
                 Cette même année l'Arabe vendit son blé quatorze francs et son orge sept francs les cent kilos. On peut apprécier la perte que fit l'Administration, et pourtant le colon ne fut pas plus heureux, car suivant sa coutume, il avait mal cultivé ses terres et son revenu fut très modique.

                 A cette même époque un hectare de terre cultivé en tabac près de Blida donnait au propriétaire et ne coûtait pas un centime à la France.
                 Par ce fait qui ne sera pas contesté, on peut juger des avantages de la culture des plantes industrielles, des sacrifices que le colon coûte à l'État et de la misère qui l'attend s'il se borne à produire des céréales.
                 Mais il ne suffisait pas de dire au colon qu'il pouvait et devait cultiver en même temps que les céréales, les plantes industrielles que ce pays peut produire. Il eût encore fallu :
                 - le placer dans de bonnes conditions et
                 - lui apprendre cette culture,
                 - le guider,
                 - le diriger dans ce travail.

                 Or voici comment on a procédé jusqu'à présent. Soit que le village ait été bâti aux frais du gouvernement et par lui, soit qu'il ait été concouru par un secours donné aux colons, partout le cultivateur a été abandonné sans guide et sans conseil.
                 Quand il l'a demandé on lui a prêté : - des bœufs, une charrue, des grains pour les semences.
                 Puis on l'a laissé agir suivant son gré et sa volonté.
                 Livré à lui-même, à son ignorance, à sa vieille routine, il a cultivé selon ses goûts et ses caprices et a commis bévue sur bévue.
                 Il faut qu'on le sache, le cultivateur européen qui va en Afrique n'a sur les ouvriers des villes d'autre avantage que d'avoir habitué son corps aux fatigues des travaux des champs. Son éducation de cultivateur africain est toute entière à faire :
                 - Le sol, le climat, la chaleur, les pluies d'Afrique ne ressemblent en rien :
                 - aux terres, au climat, à la température de la France.

                 Les modes de culture que l'expérience ou la tradition ont enseignés aux cultivateurs européens ne sont pas ceux qui conviennent aux terres de l'Algérie.
                 Cette expérience très peu utile pour la culture des céréales ne sert à rien pour la culture des plantes industrielles et nous savons que c'est précisément à produire ces plantes que le colon doit s'appliquer.
                 De ce manque d'enseignement et de direction il est résulté que les colons ayant cultivé la terre de l'Algérie comme ils cultivent la terre de France n'ont rien produit.

                 Bien plus comme on leur avait vanté outre mesure la fécondité de ces terres ; comme les influences de ce nouveau climat avaient réagi sur eux :
                 - soit que leurs forces aient été affaiblies,
                 - soit excès de confiance dans la richesse du sol, ils n'ont pas travaillé leurs terres aussi bien qu'en France, et souvent ils ont laissé ce soin aux Arabes.

                 Enfin faute de bestiaux les engrais ont manqué. La terre n'a reçu qu'un labour, rarement deux, jamais du fumier et tous les ans on a demandé à la terre une nouvelle récolte. Les effets de cette mauvaise culture n'ont pas tardé à se produire. Les herbes parasites ont envahi les champs.
                 Cette année, dans la subdivision de Mostaganem, on a récolté beaucoup plus d'ivraie que de blé.
                 Par ignorance des ressources qu'offrent les terres d'Afrique et des plantes que ces terres peuvent produire, les colons ont borné leurs travaux à la culture des céréales ; ils l'ont mal faite ; ils sont restés pauvres et malheureux.
                 Et si quelques-uns ont su que le sol africain pouvait produire des plantes industrielles, ils n'ont pu se livrer à cette culture car ils n'avaient personne pour la leur enseigner ; ceux-là comme les premiers n'ont produit que des céréales ; comme eux aussi ils sont restés pauvres et malheureux.

Réflexions sur la colonisation en Algérie par P. Zaccone,
Capitaine au 7e de ligne, détaché aux affaires indigènes
(bureau arabe de Tébessa.)
Édition 1872.

L'administration turque en Algérie
Envoyé par M. Christian Graille
Des Hojas, du Cadi, du Cazenadar, et de divers autres officiers.

               Les Hojas, ou Cogias hachis, ou grands écrivains sont les secrétaires d'État. Il y en a quatre :
               - le plus ancien tient les livres de la paye et des dépenses ordinaires et extraordinaires,
               - le second ceux de la douane,
               - le troisième ceux des revenus de l'État,
               - le quatrième ceux des affaires étrangères et extraordinaires.
               Ils sont toujours assis sur un même rang dans une table ou bureau, à côté droit du Bey, pendant tout le temps qu'il est sur son siège, pour répondre, vérifier, écrire ou enregistrer tout ce qui est de leur département.

               Lorsqu'un consul va porter plainte au Dey de quelque tort fait aux gens de sa nation, ou de l'infraction de quelque article du traité de paix de la part des Algériens, le Dey ordonne au secrétaire d'État qui a le registre des traités de l'ouvrir et de répondre aux plaintes du consul.
               Le secrétaire lit tout haut l'article, que le consul prétend avoir été enfreint, il est suivi à la lettre et sans aucune interprétation.
               Si le consul a raison, on lui rend justice ; mais s'il se plaint fondé sur quelque interprétation favorable de l'article en question, on lui refuse ce qu'il demande et l'affaire est réglée dans un instant de quelque conséquence qu'elle soit.
               Les grands écrivains sont nommés par le Dey. Ils ne décident de rien que par son organe ; mais comme ils sont de sa main, que ce sont les premiers conseillers et qu'ils sont toujours auprès de lui, ils ont un grand pouvoir et leurs avis sont toujours d'un grand poids.
               Ils le donnent ordinairement en particulier et parlent rarement en présence des parties.

               Le Cadi est nommé et envoyé par la Porte ottomane (Surnom donné au gouvernement ottoman en référence à une porte monumentale du palais de Topkapi à Constantinople), après avoir été approuvé par le grand mufti ou patriarche ottoman à Constantinople.
               Il n'a aucun pouvoir dans le gouvernement et ne peut s'en mêler en aucune façon.
               Il juge et décide généralement de toutes les affaires qui regardent la loi et dit rendre ses jugements sans frais et sans appel. Mais comme un Cadi ne vient à Alger que pour s'enrichir et qu'il lui en coûte des présents à la Porte pour avoir cet emploi, il se laisse aisément corrompre par les parties.
               Il est obligé de rester toujours chez lui, sans pouvoir en sortir que par la permission du Dey. Ce dernier fait souvent juger par son Divan ( Assemblée de notables. ) des affaires litigieuses qui sont de la compétence du cadi, lorsqu'elles sont de quelque conséquence et en ce cas il appelle tous les gens de la loi. Il y a aussi un Cadi maure, qui rend la justice aux gens de sa nation, lorsque le dey les renvoie à lui. Il n'a aucune paye et est entièrement subordonné au cadi turc.

               Hazenadar ou Cazenadar est le trésorier général de l'État. C'est lui-même qui reçoit en présence du Dey les fonds provenant des revenus du royaume et qui les met aussi en sa présence et celle des quatre grands écrivains, dans le Hazena ou trésor, qui est une chambre dans la salle du Divan où on l'enferme. Ce trésorier doit tenir un compte général des dépenses de la république ( La république signifie également l'État.) ; mais on n'y regarde pas toujours de si près puisqu'il y a de ces trésoriers qui ne savent point écrire ni même lire.
               Il ne fait ses opérations qu'en présence du Divan ordinaire, soit qu'il reçoive de l'argent ou qu'il en donne. Il a avec lui un commis qu'on appelle Contador, qui est un Turc chargé de tout l'argent tant de la recette que de la dépense.
               Ce Turc a deux aides pour cela et deux Juifs auprès de lui : un pour visiter les monnaies douteuses qui, en ce cas, sont refusées, l'autre pour peser ; et à mesure qu'il reçoit ou qu'il paye, il crie à haute voix ce qu'il fait. Alors le grand écrivain ou secrétaire d'État, écrit ce qui se passe dans son registre courant.

               Le Chekelbeled est l'échevin de la ville. Il a soin de la police en ce qui concerne les réparations de la ville, les rues et autres choses semblables. Il est à la nomination du Dey.
               C'est dans la maison du Chekelbeled qu'on met en arrêt les femmes de bonnes réputations qui ont mérité quelque punition et elles y sont châtiées secrètement comme les Turcs dans la maison de l'Aga.
               Lorsque le Dey a pour esclaves des femmes ou des filles de quelque distinction dont il attend une bonne rançon, il les envoie dans la maison du Chekelbeled sous bonne garde et leur fait donner tout le nécessaire et de l'ouvrage pour s'occuper, si elles le souhaitent ; et elles restent là jusqu'à ce qu'elles soient rachetées.

               Le Pitremelgi ou Bethmagi, qui signifie homme de la chambre des biens, est chargé de s'emparer au nom du Dey de tout le casuel qui appartient à la république par la mort et l'esclavage de ceux qui n'ont ni enfants, ni frère, tant en meubles qu'en immeubles dont il doit rendre compte exactement.
               Il a ses officiers particuliers, et de peur qu'on ne cache la mort de quelqu'un, nul ne peut être enterré sans un billet de lui.
               Cela s'observe d'autant plus exactement, que les sépultures sont toutes en dehors de la ville et qu'il y a un commis à chaque porte pendant tout le temps qu'elles sont ouvertes pour recevoir les billets de permission que le Pitremelgi a signés.
               Lorsque quelqu'un est mort sans enfants ni frère, le Pitremelgi s'empare de tout son bien, dont il paye le douaire à la veuve.
               Il a soin de faire fouiller dans les maisons du défunt tant à la ville qu'à la campagne, s'il y en a dans l'héritage, pour trouver le trésor caché, étant assez ordinaire à cette nation de cacher de l'argent et de l'or.
               La raison de cet usage vient de ce qu'un particulier qui passe pour riche est souvent inquiété par le Dey, qui lui demande de l'argent sous prétexte des besoins de l'État, ou lui impose des amendes pécuniaires fort considérables lorsqu'il commet la moindre faute on confisque ses biens au profit de l'État sur le moindre soupçon d'avoir conspiré contre lui de sorte qu'il aime mieux passer pour pauvre et avoir un trésor caché, qui est une ressource pour lui ou pour ses enfants, en cas qu'il soit obligé de s'en aller furtivement et d'abandonner ses biens pour garantir sa vie. Mais il est assez ordinaire que la mort en surprend beaucoup avec le trésor caché, sans qu'ils l'aient déclaré à personne ; ce qui fait que le Pitremelgi fait de grandes recherches.


               Le Hoja, ou Cogia-Pingié est le contrôleur général, qui est chargé de la part ou portion des marchandises qui revient à la république sur les prises faites en mer.
               Il en tient compte, et les délivre selon l'ordre du Dey, soit à l'enchère, soit par vente particulière, dont il rend compte aux secrétaires d'État. Il a deux écrivains pour ses aides.
               Les Hojas, ou Cogias du deylik sont les écrivains du roi, au nombre de 80. Ils ont chacun leurs différents emplois :
               - Les uns commis à la distribution du pain des soldats,
               - les autres de la viande,
               - les uns aux garâmes ou droits sur les maisons ou boutiques,
               - les autres aux garâmes des jardins, métairies et autres terres.
               Il y en a de préposés pour l'entrée :
               - des bestiaux, des cuirs, de la cire, des huiles
               - et autres marchandises du cru du pays et autres différents magasins tant de la terre que de la mer.
               Il s'en tient toujours deux à chaque porte, quelques-uns auprès du Dey pour recevoir ses ordres et ceux des secrétaires d'État, et d'autres s'embarquent sur les gros vaisseaux qui vont en course.

               Le Dragoman, ou interprète de la maison du roi, est un Turc qui sait lire et écrire en turc et en arabe.
               Il explique toutes les lettres des Arabes et des Maures qui viennent au Dey des différents endroits du royaume, de même que celles des esclaves algériens dans les pays des chrétiens ; et après en avoir fait la traduction en langue turque, il les présente au Dey, qui donne ses ordres en conséquence.
               Il est dépositaire du sceau ou cachet du Dey, qu'il ne quitte jamais, et il scelle en sa présence toutes les dépêches, mandements, traités et autres écrits.
               Il faut observer que le Dey ne signe jamais aucun écrit, et le sceau où il n'y a de gravé que son nom tient lieu de signature.
               Il est toujours auprès du Dey ou dans la salle du Divan, pour servir d'interprète aux Arabes et aux Maures, tant de la ville que de la campagne, qui viennent porter des plaintes au Dey, ou lui demander des avis de ce qui se passe pour ou contre ses intérêts. Il interprète et traduit aussi les lettres qui viennent des royaumes du Maroc et de Tunis, qui sont écrites ordinairement en langue arabe.

               Les Chaoux sont les exempts de la maison du roi. C'est un corps très considérable.
               Il est composé de douze Turcs des plus forts et des plus puissants de la république et d'un chef appelé Bachaoux, ou Chaoux-Bachi ou grand prévôt. Il y a eu plusieurs Bachaoux qui ont été élus Deys.
               Ils sont habillés de vert avec une écharpe rouge, ils ont un bonnet blanc en pointe et sont les fidèles porteurs de tous les ordres du dey.
               Il ne leur est pas permis de porter aucune arme offensive ou défensive, pas même un couteau ou un bâton ; et néanmoins ils arrêtent, lorsqu'ils en ont l'ordre, les Turcs les plus puissants et les plus séditieux, sans qu'il n'y ait aucun exemple qu'on leur ait résisté, quoique ceux qu'ils ont arrêtés aient su leur mort certaine.
               Les Turcs les plus résolus, de quelque qualité qu'ils soient, tremblent et pâlissent dès qu'un Chaoux leur a mis la main dessus par commandement du Dey, et ils se laissent conduire comme des agneaux chez l'Aga de la milice, où ils sont bastonnées ou étranglés, selon les ordres que ce général en a déjà reçus.

               Ces Chaoux ne sont employés que pour les affaires des Turcs, étant indignes d'eux de mettre la main sur un Chrétien, sur un Maure ou sur un Juif.
               Il y a le même nombre de Chaoux maures et un Bachaoux de la même nation, qui ont le même pouvoir, sur les Maures, sur les Chrétiens et sur les Juifs, suivant les ordres du dey mais il ne leur est pas permis de porter aucun ordre à un Turc.
               Les deux Bachaoux se tiennent toujours auprès du Dey pour recevoir ses commandements et les faire exécuter par les Chaoux qui se tiennent toujours dans la maison du roi.
               Lorsque le Dey a ordonné de faire venir quelqu'un qui est accusé devant lui, il ne faut pas que le Chaoux qui en a l'ordre s'avise de revenir sans lui. S'il apprend qu'il est à la campagne, il va l'y chercher et l'y amène avec lui.
               S'il ne peut apprendre où il est, il fait publier par un crieur public, que ceux qui sauront où il est aient à le déclarer sous peine de punition ; et si l'on apprend que l'un l'ait caché ou l'ait fait évader, celui qui lui a rendu ce bon office est puni très sévèrement et mis à l'amende et même puni de mort si l'affaire dont il s'agit intéresse le dey ou l'État.

               Les gardiens Bachis sont des Turcs qui ont le commandement des bagnes du deylik ou du gouvernement et ont le compte et le soin des esclaves. Chaque gardien général :
               - fait la revue tous les soirs dans les bagnes,
               - répartit les esclaves pour aller en mer ou pour le travail journalier,
               - les fait châtier lorsqu'ils sont jugés dignes de punition et
               - rend chaque jour compte au Dey de ce qui se passe dans les bagnes.

               C'est le Bachi-gardien-Bachi qui fait ordinairement préparer les vaisseaux pour mettre à la voile, à cause du nombre d'esclaves du deylik qui y travaillent et qui sont embarqués pour aller en campagne.
               C'est un des anciens Raïs ou capitaines corsaires qui occupe ordinairement cette place. Il a beaucoup de pouvoir dans la république.
               Le Raïs de la marine, ou capitaine du port, est un officier de grande distinction et de crédit. Il n'est pas nommé par ancienneté de capitaine mais à la volonté du Dey, qui choisit ordinairement pour remplir ce poste une personne âgée, expérimentée dans la marine et de bonnes mœurs.
               Cet officier a plusieurs aides qu'on nomme gardiens du port. Il donne avis au Dey de tout ce qui se passe.

               Lorsqu'il arrive des bâtiments, il va à bord avant qu'ils entrent dans le port ; et après avoir pris les informations, il va rendre compte du lieu de départ des bâtiments, du chargement et des nouvelles qu'on lui a données et il revient aussi incessamment pour porter aux capitaines les ordres que le Dey lui a donnés.
               Dès que les bateaux sont dans le port, il conduit les capitaines devant le Dey, qui les interroge, selon son bon plaisir.
               C'est le Raïs de la marine qui fait la visite en chef de tous les navires chrétiens qui sont sur leur départ afin qu'ils n'enlèvent pas des esclaves.
               Il a sa justice particulière pour tous les différends qui arrivent dans le port, à l'occasion des bâtiments, avec pouvoir d'absoudre ou de condamner.
               Dans les cas de conséquence seulement il convoque l'Amiral et tous les Raïs dans le lieu de leur assemblée ordinaire, qui est au bout du môle, et l'affaire est décidée en leur présence après qu'ils ont donné leur avis, en commençant par les plus anciens.

               Après quoi il va faire son rapport au Dey, avant que d'exécuter le jugement, qui est toujours approuvé.
               Il commande la galiote (Navire à rames connu aussi sous le nom de demi-galère.) de garde qui est armée pendant tout l'été pour faire la découverte sur la côte avant la nuit et pour aller reconnaître les bâtiments qui viennent pendant le jour.
               L'Amiral n'est pas le plus ancien officier de la mer, mais celui à qui il plaît au Dey de donner le commandement du seul navire qui appartient au deylik. Il a le pas et les honneurs devant tous les autres capitaines et les commande à la mer.
               Il n'a aucun pouvoir que celui qu'il s'acquiert, en s'attirant l'estime des autres capitaines qui, excepté sur mer, ne dépendent de lui qu'autant qu'il leur plaît. Mais lorsqu'il est reconnu pour un homme de poids et de mérite, le Dey lui renvoie souvent la décision des affaires de la marine et les capitaines et les marchands s'adressent volontiers à lui pour terminer leurs différends.

               Les Raïs, ou capitaines de vaisseaux forment un corps considérable et accrédité, à cause du profit que leurs courses apportent au pays dont ils sont le plus ferme soutien : aussi sont-ils respectés et ménagés par rapport au besoin qu'on a d'eux. Chaque capitaine est un des propriétaires du bâtiment qu'il commande et les autres armateurs le laissent maître de l'armement, et d'aller en course quand il veut, à moins que le Dey ne juge que le bâtiment est nécessaire au service de l'État car alors il faut qu'il le serve avant toutes choses.

               Ce service ne consiste qu'à porter les garnisons des places maritimes lorsqu'on les change. Ils sont fixés à ce poste et n'ont d'autorité dans le gouvernement que celle qu'ils s'acquièrent par leurs services, leur bonne réputation et leur bonheur.
               Un capitaine n'a part aux prises que comme armateur, sans avoir les appointements " Les soute-Raïs " sont les officiers major. Ils sont au choix du capitaine et n'ont point d'appointements. Ils ont quatre parts sur le produit des prises.
               Les Topigi-Bachi sont les maîtres canonniers. Ils commandent l'artillerie à bord.
               Il y en a dans chaque bâtiment corsaire au choix du capitaine et n'a que trois parts aux prises. Lorsqu'ils ont de quoi s'intéresser à un armement, ils parviennent aisément à avoir un bâtiment, de même que les autres officiers subalternes.

               Le Mézouard est le grand bailli et le lieutenant général de la police. Il maintient la paix et le bon ordre dans la ville. Il a une compagnie de gardes à pied, qui ne reçoivent aucun ordre que de lui directement :
               - Il observe,
               - fait informer de ce qui se passe dans la ville pendant le jour,
               - fait la patrouille pendant la nuit,
               - rend compte tous les matins au Dey de tous les désordres qui sont arrivés et de tout ce qu'il a appris par ses émissaires
               - Il a inspection et plein pouvoir sur les femmes de mauvaise vie ; il en exige une garame ou tribut, dont il paye tous les ans 2.000 piastres sévillanes au Dey.

               Il s'empare de toutes les femmes de joie et les tient enfermées dans la maison où elles sont distinguées par classe. Dès qu'il découvre quelque femme ou fille qui commence à donner dans l'intrigue, pourvu qu'il puisse une fois la surprendre en flagrant délit, il a le droit de s'en saisir et de la mettre avec les autres, ou de la rançonner. Il les loue aux Turcs ou aux Maures qui viennent lui en demander et leur laisse choisir celles qui leur conviennent.
               Ils peuvent les garder autant de temps qu'ils veulent, suivant la conclusion du marché fait entre le Mezouard et eux et sont obligés de les ramener à la maison où ils les ont prises, lorsque le temps du marché est fini, ou de le renouveler.
               Celles qui veulent sortir chercher fortune en obtiennent la permission en payant chaque jour une petite somme au Mezouard pour droit de sortie.
               Il est aussi le maître bourreau : il fait ou fait faire les exécutions par ses satellites, donne ou fait donner la bastonnade lorsque le Dey lui en donne les ordres. C'est toujours un Maure qui occupe cet emploi, qui est des plus lucratifs et des plus en horreur.

Histoire du royaume d'Alger
par M. Laugier de Tassy, commissaire de la marine pour Sa Majesté
très chrétienne en Hollande. Édition 1725


La milice d'Alger
Envoyé par M. Christian Graille

             Les forces militaires d'Alger sont diversement évaluées depuis 25.000 ou 30.000 jusqu'à 100.000 hommes dont 15.000 à 16.000 Turcs ; le reste se compose de Bédouins de la partie méridionale de la régence qui sont sous la domination du dey ou avec lesquels il a contracté des alliances.
             Parmi les soldats de la milice figurent le dey, les beys ou lieutenants généraux, les agas ou gouverneurs de place, les secrétaires d'État, l'amiral, les rais ou capitaines de la marine et en général tous les officiers du gouvernement.

             Tous les Turcs qui arrivent à Alger et se font incorporer dans la milice sont ordinairement des gens sans aveu, sans ressources et de mœurs dépravées qui viennent du Levant d'où ils ont été obligés de s'enfuir pour se soustraire au châtiment dû à leurs crimes. Ils n'ont besoin, pour être admis dans ce corps, que de prouver qu'ils sont Turcs. On y reçoit aussi les chrétiens renégats et les Cologlis, nom donné aux individus nés de Turcs et de femmes arabes ou maures. Mais les Maures et les Arabes en sont absolument exclus parce qu'ils sont toujours suspects aux usurpateurs de leur patrie, qui les tiennent dans une sujétion qui ne diffère guère de l'esclavage.

             Tous ceux qui composent cette milice jouissent de grands privilèges et regardent avec le dernier des mépris ceux qui n'en font pas partie. Ce sont les hauts et puissants seigneurs du pays. On leur donne le titre d'effendi ou seigneurs, tandis que l'on ne qualifie les autres individus que de sidi ou monsieur. C'est parmi eux que l'on choisit les deys, les beys et autres principaux officiers de l'Etat. Ils sont exempts de toute espèce d'impôts et des droits de capitation. Ils ne peuvent point être punis en public, et le sont rarement à huis clos. Ils se soutiennent tous à tort ou à raison contre les Arabes et les Maures et le dernier d'entre eux fait trembler par le regard les plus puissants d'entre ces derniers qui leur doivent partout la préséance, sous peine d'être maltraités à l'instant même. Ils sont, au reste, fiers, insolents et très difficiles à gouverner. Il est vrai qu'ils obéissent au bey avec une profonde soumission tant qu'il maintient son autorité, soit par la douceur, par la force ou par adresse ; qu'ils n'enfreignent pas les lois établies, et surtout que leur solde soit régulièrement payée ; car, si elle vient à être, par hasard, différée d'un jour seulement, rien n'arrête les murmures de cette milice hautaine, et le dey est souvent victime d'un aussi court retard.

             Outre leur paye ordinaire, tous les soldats qui ne sont point mariés sont logés dans des casernes grandes et commodes, appelées cacheries, et qui sont pourvues de fontaines pour faire leurs ablutions. Ils ont une grande chambre à trois et des esclaves payés par l'Etat pour les servir.
             Il est alloué à chacun d'eux quatre pains par jour, ce qui est beaucoup plus qu'il ne leur est nécessaire. Quant à la viande, ils ont le privilège de l'acheter à un tiers au-dessous de ce qu'elle est taxée pour le public. Toutefois ces avantages n'existent que pour ceux qui ne sont pas mariés ; car ceux qui le sont, sont obligés de se nourrir et de se loger avec leur seule paye. La raison qui fait ainsi distinguer les soldats mariés de ceux qui ne le sont pas provient de ce que l'Etat est héritier naturel des Turcs ou des Maures qui meurent ou qui tombent dans l'esclavage sans avoir ni enfants, ni frères. Il s'ensuit que, comme il est frustré de cet avantage lorsque les soldats se marient, il se croit dispensé de leur donner autre chose que la simple paye, ce qui empêche beaucoup de se marier.

             Il existe aussi un autre motif pour cela : c'est que les garçons nés de Turcs et de femmes arabes ou maures ne sont point considérées comme Turcs. Il est vrai qu'ils sont reçus dans la milice comme soldats mais ils ne parviennent point aux différentes charges de l'Etat et ne jouissent point, en un mot, des privilèges accordés aux soldats turcs.
             Le gouvernement a eu recours à ces restrictions pour éviter que les soldats ne s'alliassent en trop grand nombre avec les femmes du pays, et ne se rendissent ainsi un jour redoutables à l'Etat, par l'augmentation de leur famille. Les Maures et les Arabes sont également exclus du corps de la milice pour les mêmes motifs. Nous croyons devoir remarquer à ce sujet qu'il n'y a point ou peu de femmes turques à Alger. Elles ont en horreur ce pays qu'elles regardent comme le réceptacle de tout ce qu'il y a de plus vil et de plus méprisable dans les États ottomans. Les véritables Turcs se contentent d'y avoir des concubines du pays ou des esclaves chrétiennes.

             Lorsqu'un soldat turc devient captif il est censé mort pour l'Etat et à la première nouvelle qu'en reçoit le gouvernement il s'empare de ses biens meubles et immeubles lorsqu'il ne laisse ni enfants, ni frères. S'il a le bonheur d'échapper à l'esclavage ou qu'il parvienne à payer sa rançon, l'État, à son retour, est quitte envers lui en lui faisant compter une année de solde, afin de le mettre à même d'acheter un fusil, un sabre et les autres armes qu'un soldat est obligé d'avoir. Un Turc n'est estimé à Alger que s'il est soldat ; aussi le sont-ils tous et ne respirent-ils que la guerre.
             Les Algériens professent le plus profond mépris pour toutes les nations ; ce qui provient probablement de l'habitude où ils sont de se voir, dès leur bas âge, entourés d'esclaves de tous pays. Mais ils portent ce mépris encore plus loin envers les Espagnols, les Portugais et les Maures qui, après les Turcs, sont, par suite de leurs préjugés nationaux, ceux de tous les peuples qui ont la plus haute idée d'eux-mêmes.

             Avec beaucoup de vices les Turcs d'Alger ont cependant quelques bonnes qualités. C'est ainsi que les plus relâchés d'entre eux ne prononcent jamais le nom de Dieu en vain, ni le mêlent dans leurs discours familiers ; ils ne jouent à aucun jeu excepté aux dames et aux échecs ; encore l'argent en est-il formellement exclu et n'intéressent-ils la partie que pour du café, des sorbets, quelques pipes à tabac ou autres bagatelles semblables. Il leur est défendu, et ils considèrent comme un véritable déshonneur, de jamais piller durant le combat, quelque facilité qu'ils en aient ; ils abandonnent cet avantage aux Maures et à leurs esclaves. Mais après le combat ils usent de toutes leurs prérogatives. Ils se font un point d'honneur de laisser toutes les nations professer librement leurs différents cultes et témoignent toujours beaucoup de considération à ceux qui paraissent religieusement attachés à leurs croyances.
             Tout soldat admis dans la milice est inscrit dans une compagnie, sans y être attaché particulièrement, mais seulement pour y recevoir la solde.
             La paye n'est pas la même pour tous. D'abord fixée à fort peu de chose, elle augmente progressivement tous les ans d'environ cinquante aspres, (très petite monnaie d'argent qui vaut à peu près un centime deux tiers) ainsi que dans différentes circonstances particulières, comme à l'occasion de l'élection d'un nouveau dey, d'une victoire, d'une guerre, d'une paix, de quelques réjouissances publiques, de la réception d'un envoyé du grand seigneur, d'une action d'éclat. Il s'ensuit que plus un soldat acquiert d'ancienneté, plus sa paye augmente et qu'au bout de dix, douze ou quinze ans au plus, il parvient à la haute paye, que l'on appelle paye serrée, parce qu'alors elle n'augmente ni ne diminue plus. La paye primitive d'un soldat est de 275 aspres (4 francs 59 centimes) et la haute paye de 69 francs 60 centimes

             Tous les officiers de l'État, depuis le dey inclusivement, ne reçoivent de traitement fixe que la paye de simple soldat. Mais il est alloué à chaque emploi un certain droit sur l'entrée et la sortie des marchandises, les ancrages, la vente et le rachat d'esclaves, etc. Les Turcs qui sont parvenus à des grades qui dispensent de services ultérieurs envers l'État, ou ceux qui ont été blessés ou mutilés de manière à ne plus servir, jouissent de leur paye entière jusqu'à leur mort, dans quelque partie de la régence qu'ils veuillent se fixer. Mais ceux qui quittent le service avant le temps voulu, et sans cause légitime, ce qui est considéré comme ignominieux, en perdent la moitié. Une grande punition pour un soldat est de subir une diminution dans sa paye mais cela arrive rarement.

             Le jour fixé pour le paiement de la solde, tous les officiers du gouvernement s'assemblent dans la grande salle du divan (le conseil réuni par le sultan, dans l'empire ottoman, par le dey ici.) et toute la milice dans la cour.
             L'aga (Officier de la cour du sultan, du dey ici.), tenant alors le registre de la solde à la main, prend la place du dey qui se tient près de lui et fait l'appel général en commençant par le dey lui-même qui reçoit d'abord sa paye et tous les autres successivement.

             Chaque soldat est en outre libre d'exercer une industrie ou une profession quelconque, soit à terre ou en mer, quoiqu'il soit cependant toujours tenu d'être prêt à marcher.
             Au lieu de bataillons et d'escadrons on compte par camps qui comprennent un certain nombre de tentes. Ces tentes sont de formes rondes et peuvent contenir trente hommes à l'aise. Les chevaux sont attachés à des piquets par une jambe et les harnais sont suspendus dans la tente.
             Chaque tente est composée de vingt combattants, outre quelques Maures, qui sont chargés de la conduite des bagages, etc. Le gouvernement fournit six chevaux ou mulets pour le transport de chaque tente, des vivres, de l'habillement, des munitions et des malades.
             Les bagages précèdent ordinairement les troupes de manière que lorsqu'elles arrivent où elles doivent camper, les soldats trouvent leur cuisine prête et n'ont d'autre chose à faire que de se reposer.

             Lorsqu'il sort un camp d'Alger, le dey nomme un aga dont l'emploi est de rendre la justice tant civile que criminelle, attendu qu'il est défendu aux officiers d'infliger la moindre punition aux soldats ; ils doivent s'adresser à cet effet à l'aga qui ordonne ce qu'il juge convenable.
             Les soldats marchent à tour de rôle, sans exception et sans passe-droit ; tous sont à pied, officiers et soldats, excepté le bey et l'aga.

             La cavalerie est aussi distribuée par tente de vingt hommes avec le même nombre d'officiers et de Maures chargés du fourrage et du soin des chevaux. Il part tous les ans, au printemps, d'Alger trois camps, plus ou moins forts selon le besoin. Chacun de ces corps de troupes va rejoindre le camp particulier du bey qui doit le commander, lequel se trouve alors en campagne avec sa milice ordinaire. Le bey jouit d'une autorité absolue dans son camp à l'exception de l'administration de la justice qui est réservée à l'aga. Ce n'est d'ailleurs que dans des circonstances particulières qu'il assemble son divan qu'il préside toujours.
             Comme les Maures se retirent à peu près toujours dans l'intérieur du pays à l'approche des troupes, le bey a constamment soin de se pourvoir de gros bétail, de moutons, de biscuit, d'huile et d'autres objets d'approvisionnement que les Maures sont obligés de fournir, ainsi que les chameaux, les chevaux et les mulets nécessaires pour remplacer ceux qui peuvent manquer pendant la campagne qui est ordinairement de six mois. Les camps ont pour objet de maintenir les Arabes et les Maures dans l'obéissance, de lever le carache ou tribut que l'on fait payer double à ceux qui s'y font contraindre, de mettre à contribution les districts qui ne sont pas entièrement soumis et enfin d'acquérir de nouveaux sujets. Mais comme il y a un grand nombre de districts dans ces déserts qui, attendu leur stérilité, ne paient pas le tribut, les beys ne font guère de campagnes sans y enlever beaucoup d'esclaves ; genre de spoliation qui leur est d'autant plus facile que les Maures n'étant point unis entre eux, se trahissent volontiers les uns les autres.

             Les beys doivent d'ailleurs en agir avec beaucoup de prudence dans ces expéditions parce que les troupes ne s'avancent point qu'elles ne soient assurées de leur retour. Elles n'observent, au reste, aucun ordre de marche régulier : tout dépend de la volonté du chef jusqu'à ce que l'on soit en pays étranger.
             Pour marcher à l'ennemi, les beys réunissent un certain nombre de tentes ou compagnies, tant de cavalerie que d'infanterie, dont ils forment des espèces d'escadrons et de bataillons, et dont ils confient le commandement à des agas. Quand l'armée s'avance en pays ennemi, elle est disposée de la façon suivante : l'avant-garde, composée d'un gros corps d'infanterie, deux escadrons de cavalerie sur les ailes, le reste de l'infanterie sur deux rangs, les bagages, deux autres escadrons de cavalerie en arrière, aussi sur les ailes et l'arrière-garde composée d'un bataillon d'infanterie. La disposition est à peu près la même quand on en vient aux mains, excepté que les bagages sont derrière. En cas d'échec, les corps, tant de cavalerie que d'infanterie doivent toujours se rallier derrière le corps principal. Les Maures auxiliaires se tiennent par pelotons sur les ailes pour donner suivant les circonstances.
             L'organisation de ces corps de troupe permettait aux Turcs de s'installer et de régner dans les régions choisies pour s'y maintenir.

VOYAGE DANS LA REGENCE D'ALGER 1830
Docteur Shaw, pasteur
Traduit par J. Mac-Carthy Edition 1838




Les Espagnols à Oran
Envoyé par M. Christian Graille

                 Alfred Salinas, Universitaire, dans un ouvrage (Oran la joyeuse. Mémoires franco-andalouses d'une ville d'Algérie.) remarquable, dense et fort bien documenté, éclaire de brillante façon le passé d'Oran, ville :
                 - Vivante, fière, libre, dynamique, accueillante, quoique parfois rebelle.

                 Il ne conteste ni ne réfute le fait d'être Pied-noir mais définit ainsi son identité en la nuançant quelque peu :
                 " Je suis en effet un Oranais avant d'être quoique ce soit d'autre ; Ceci veut dire que je ne suis pas né en Algérie après 1830 mais mille ans auparavant, que mes racines plongent dans le passé le plus lointain de la terre nord-africaine à l'égal de tous mes semblables, originaires comme moi d'Andalousie ou du reste de l'Espagne, qui peuplèrent majoritairement la ville d'Oran avant l'indépendance de ce pays en 1962 ".
                 Subtile précision pour présenter cette intéressante communauté.

                 Il est vrai qu'en 902 des marins andalous décidèrent de s'installer à Oran. Au fil du temps, le développement économique de la ville s'accrut ; grâce au port de Mers el Kébir, la cité devint le carrefour des relations commerciales méditerranéennes.
                 1492 sonna le glas de la domination musulmane sur la péninsule ibérique.
                 Au début du XVIe siècle, la recrudescence des actes de piraterie incita l'Espagne à s'installer durablement à Oran mais l'esprit de revanche sur les Maures n'était pas absent des buts de la conquête.

                 L'opération militaire vit le jour en 1509. La ville fut prise ; Commença alors une période de domination qui dura jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, interrompue par une courte domination turque de 1708 à 1732.
                 Si la cité fut : riche, vivante, insouciante, conviviale, tolérante, libertine à certaines époques de son histoire, elle n'en était pas moins demeurée :
                 - Courageuse, fière, laborieuse et douloureusement meurtrie au fil des ans.

                 Lors du tremblement de terre de 1790, la majeure partie de la ville fut détruite. Près de 1.200 habitants périrent (certaines sources font état de 3.000 morts) sur un total de 9.500. Les Turcs profitèrent de ce désastre pour attaquer la citadelle et c'est en 1792 que les Espagnols abandonnèrent la cité.

                 La conquête de l'Algérie par la France en vit revenir un grand nombre et dans un état d'extrême dénuement ; vêtus de haillons, portant de rares objets personnels sur les épaules et un maigre baluchon, on les appelait les " caracolès " (les escargots) car c'est leur maison qu'ils transportaient sur le dos.
                 On les accusait de tous les maux de la société ; un vol était-il commis ? Ce ne pouvait être qu'un Espagnol ; la police faisait croire que certains d'entre eux n'étaient que :
                 - Des repris de justice, des mendiants, des vagabonds, des déserteurs.

                 On laissait aussi volontiers accréditer l'idée que l'Espagne se séparait, à bon compte, d'une partie de sa communauté jugée marginale.
                 L'Administration tentait de les éloigner de leurs racines, les humiliait en les traitent de " cinquante pour cent " car nés Français en Algérie de parents espagnols.

                 Les souvenirs d'Emmanuel Roblès, écrivain sont, à ce sujet, révélateurs de l'état d'esprit qui régnait dans la province :
                 " A l'école on nous interdisait de parler notre patois et nous considérions cela comme une brimade, sans déceler l'intention purement pédagogique de nos bons maîtres.
                 Verneuil, un de nos camarades de classe, me surprit un jour à parler espagnol et fit une remarque désobligeante. C'était la première fois que j'entendais l'expression cinquante pour cent dans son sens injurieux et, piqué au vif, je répliquais, par dépit, défi et amour propre blessé que je n'étais pas cinquante mais zéro de Français et que si tous les Français n'étaient pas contents ils pouvaient toujours repartir chez eux tandis que nous, ici, nous étions chez nous, parfaitement, et sans rien demander à personne etc. etc. "

                 Ils n'étaient d'ailleurs pas les seuls à subir de tels affronts et de telles vexations. Certains Français, arrivés avec l'armée au tout début de la conquête, considéraient que les nouveaux arrivants de Paris en 1848 n'étaient :
                 - " qu'un ramassis de fainéants,
                 - de débauchés et
                 - de francs vauriens ".


                 Une partie de la population d'origine espagnole était présentée comme un ensemble de trublions dont il fallait se méfier et surveiller étroitement tous les faits et gestes dont certains pouvaient être susceptibles de troubler l'ordre public.

                 Après 1870, ils furent encore victimes de fortes discriminations ; ne jouissant pas de la nationalité française, ils ne pouvaient accéder à l'attribution de terres réservées en priorité aux " Français de souche " ; devant de telles injustices le seul espoir qu'ils nourrissaient était celui de se replier vers des métiers manuels :
                 - manœuvres, portefaix, ouvriers agricoles, maçons.

                 Leur afflux massif inquiétait les autorités qui tentaient, par tous les moyens, de les dissuader de gagner les rivages de la province.
                 Fort heureusement une loi de naturalisation fut promulguée en 1889, atténuant leur isolement en privilégiant le droit du sol à celui du droit du sang, permettant enfin aux enfants nés en Algérie de parents espagnols d'acquérir automatiquement la nationalité française.

                 L'intégration prenait forme et se mettait lentement en marche ; elle allait s'ancrer dans les esprits grâce à :
                 - un labeur acharné,
                 - un exceptionnel courage et
                 - une farouche volonté de vaincre l'adversité.


                 Entre 1870 et 1900 les autorités françaises agitaient, auprès des citoyens natifs de la Métropole, l'épouvantail de " l'invasion espagnole en l'Oranie ".
                 - On surveillait, on refoulait, on expulsai car on voulait que la région soit peuplée de Français afin de rétablir l'équilibre démographique.

                 Les Oranais conservaient jalousement :
                 - les mœurs, traditions, la ferveur religieuse de l'Espagne et maintenait un très fort lien affectif avec elle. Malgré les nombreuses naturalisations qui changèrent la composition du corps électoral, une logique de l'exclusion se poursuivit.

                 Pour le pouvoir ces immigrés continuèrent à être méprisés et à compter bien peu dans la vie de la province. Ce sont, en partie, certainement les raisons qui en poussèrent certains à regarder vers l'Espagne plutôt que vers la France. D'ailleurs jusqu'en 1940 il n'y eut aucun parlementaire ou maire issu d'une famille de naturalisés. La défaite de la France attisa l'appétit de conquête de Franco… La population oranaise semblait accepter l'idée d'un rattachement de la région à l'Espagne, encouragée par l'intense propagande faîte par son consulat et ses représentants.

                 Dès 1939, l'arrivée massive de réfugiés espagnols fuyant la guerre civile jeta le trouble et l'inquiétude au sein de l'Administration française qui n'avait pas totalement perdu ses vieux réflexes anti espagnols.

                 Le vent tourna et les sombres projets du Caudillo (Franco a choisi cette appellation en souvenir des chevaliers espagnols ayant repoussé les Arabes, au moyen âge, hors d'Espagne.) ne purent se concrétiser ; Le débarquement des troupes alliées en Afrique du Nord en novembre 1842 sonna le glas de ces ambitions démesurées.

                 " La ville d'Oran devenait vraiment française 112 ans et 10 mois après l'entrée des troupes du général Charles Denys de Danrémont ".
Christian Graille


MON ÂME A UN CHAPEAU
Envoyé par Mme E. Saurel

           J'ai compté mes années et j'ai découvert que j'ai moins de temps à vivre à partir de maintenant, que ce que j'ai vécu jusqu'à présent...
           Je me sens comme ce petit garçon qui a gagné un paquet de friandises : la première il la mangea avec plaisir, mais quand il s'aperçut qu'il lui en restait peu, il commença réellement à les savourer profondément.
           Je n'ai plus de temps pour des réunions sans fin où nous discutons de lois, des règles, des procédures et des règlements, en sachant que cela n'aboutira à rien.
           Je n'ai plus de temps pour supporter des gens stupides qui, malgré leur âge chronologique n'ont pas grandi.
           Je n'ai plus de temps pour faire face à la médiocrité.
           Je ne veux plus être dans des réunions où défilent des egos "agrandis".
           Je ne tolère plus les manipulateurs et opportunistes.
           Je suis mal à I'aise avec les jaloux, qui cherchent à nuire aux plus capables, d'usurper leurs places, leurs talents et leurs réalisations.
           Je déteste, si je suis témoin, des défauts qu'engendre la lutte pour un travail de haute position.

           Les gens ne discutent pas du contenu, seulement les titres.
           Mon temps est court pour discuter les titres.
           Je veux l'essentiel, mon âme est dans I'urgence ...
           Sans beaucoup de friandises dans le paquet...
           Je veux vivre à côté de gens humains, très humains.
           Qui savent rire de leurs erreurs.
           Qui ne se gonflent pas de leurs triomphes.
           Qui ne se sentent pas élu avant !'heure.
           Qui ne fuient pas leurs responsabilités.
           Qui défendent la dignité humaine,
           Et qui veulent marcher à côté de la vérité et I'honnêteté.
           L'essentiel est ce que tu fais pour que la vie en vaille la peine.
           Je veux m'entourer de gens qui peuvent toucher le coeur des personnes ...
           Des gens à qui les coups durs de la vie leur ont appris à grandir avec des touches douces dans leurs âmes.
           Oui ... je suis pressé de vivre avec l'intensité que la maturité peut m'apporter.
           J'ai I'intention de ne pas perdre une seule partie des friandises qu'il me reste ...
           Je suis sûr, qu'elles seront plus exquises que celles que j'ai mangées jusqu'à présent.
           Mon objectif est d'être enfin satisfait et en paix avec mes proches et ma conscience.
           Nous avons deux vies et la seconde commence quand vous réalisez que vous n'en avez qu'une.
           J'espère que la vôtre sera la même, parce que de toute façon, vous y arriverez.

Poème de Mario de Andrade (San Paolo 1893-1945)
Poète, romancier, essayiste et musicologue.
Un des fondateurs du modernisme brésilien.


Espagnols
Envoyé par M. Christian Graille
Connaissez-vous dans Barcelone une Andalouse au teint bruni ?
(Alfred de Musset)

         Au milieu de cette foule algérienne si bigarrée, l'étranger reconnaîtra facilement l'Espagnol. Le tempérament qu'on lui connaît, il a le costume qui le distingue.
         Il est presque toujours vêtu :
         - d'un petit chapeau rond,
         - de la veste courte et porte
         - une ceinture en laine autour des reins.


         C'est près de la mer, dans la ville basse, qu'il habite mêlé aux Napolitains, aux Génois et à tous les émigrés venus des bords méditerranéens.
         Le quartier a nom quartier de la Marine ; c'est qu'en effet la plupart de ses habitants sont :
         - pêcheurs, marins ou vendeurs au marché des poissons.

         Ce quartier espagnol, à côté de quelques rues magnifiquement ensoleillées et fort agréables à habiter en hiver, compte bien des rues étroites où le soleil n'a jamais pénétré et où une population très dense pullule à qui mieux-mieux.
         C'est dans ces rues bruyantes et tapageuses où abondent les marchands de vin, que le soir il n'est pas rare d'entendre les chansons obscènes chantées à tue-tête et d'assister à des rixes semblables à celle de la Casbah ; le cuchillo (couteau) va son train.

         Là on peut surprendre ce peuple dans toute sa pittoresque naïveté. Dans quelques-unes de ces rues on se croirait à Naples.
         - Ce sont les mêmes voix,
         - les mêmes chants,
         - les mêmes guitares,
         - le même langage résonnant de l'accent méridional.

         Les acteurs portent à peu près le même costume,
         - ont le même entrain,
         - la même démarche vive et alerte,
         - les gestes saccadés,
         - un type fort ressemblant et enfin toujours le même négligé.


         Ces gens-là aiment passionnément la musique ; ils s'entassent le soir dans les cafés où un artiste ambulant épuise son répertoire, ou bien, au coin d'une rue, un amateur les attroupe et les retient charmés par les sons de son accordéon qui joue d'interminables danses.
         Ainsi, par une belle nuit, quand on entend du haut de sa terrasse ces bruits qui partent d'en bas et qu'on voit ce beau ciel , cette mer, on se croirait en Italie, en Espagne , si du haut du minaret de la mosquée, à côté de la petite lampe qui veille, le muezzin ne venait à heure fixe , de sa voix vibrante et passionnée rappeler aux croyants que c'est l'heure de la prière, en jetant aux quatre vents les noms d'Allah et de Mahomet.

         A l'époque de noël ce peuple espagnol fait ripaille ; les boutiques de fruitiers, pour satisfaire à la demande, mettent toutes voiles dehors ; quand le carnaval est venu, alors c'est l'orgie générale : des masques sordides au-delà de toute expression parcourent la ville pendant qu'à la maison une veilleuse brûle fidèlement au pied de la sainte Madone, à qui du reste on fera des excuses en rentrant.
         L'Espagnole, elle, est aussi facile à distinguer dans la foule ; cette femme qui passe, la tête entourée d'un simple mouchoir triangulaire de fil ou de soie et noué sous le menton, portant le caraco ( ) et la jupe entourée de rubans qui tranche avec la robe, c'est une Mahonnaise, peut-être une Andalouse, à coup sûr une Espagnole :
         - visage d'un ovale admirable,
         - d'une symétrie parfaite,
         - teint olivâtre,
         - nez droit presque diaphane ,
         - narines minces et dilatées, signe de l'ardeur et de la finesse de la race,
         - sourcils noirs,
         - œil noir et brillant,
         - bouche qui à volonté se pare du sourire, aux dents blanches.

         Voilà pour le visage.
         - La taille est souple et fine, surtout pendant l'adolescence,
         - la hanche est toujours un peu forte, comme chez toute Espagnole,
         - la gorge est haute et belle,
         - le pied cambré et petit,
         - la main, c'est quelquefois une main de Madone de Murillo.

         C'est la femme qui fait dire à ce grand poète qui fut, dit-on, fort amateur :
         " L'Espagnole est la première des femmes ". Le tout, il faut le dire est souvent d'une toilette peu soignée.

         Elles se marient volontiers aux Français ; les Espagnols, eux, de leur côté, recherchent la naturalisation française, et cette race, qui a sur les autres émigrés l'avantage d'être tout acclimatée, fournit à la colonie des gens travailleurs et énergiques, qui forment à Oran la majorité de la population européenne et à Alger un appoint fort considérable.
Alger ville d'hiver d'Henri Dumont.
Notes de voyages. Édition 1878.


Les Juifs à Alger
Envoyé par M. Christian Graille

      Les Chrétiens accusent les Juifs d'avoir mis à mort Jésus-Christ.
       Les Musulmans les accusent d'avoir falsifié les écritures.
       On sait quel sanglant martyre cette race infortunée a subi, depuis dix-huit siècles, partout où elle a planté sa tente.
       Avant la conquête Alger ne leur fut pas plus hospitalière que le reste du monde :
       - défense pour eux de monter à cheval, l'animal était trop noble,
       - impossibilité de posséder une maison,
       - d'avoir des immeubles en gage,
       - défense de passer dans certaines rues,
       - devant certaines mosquées, sans avoir les sandales à la main,
       - le vêtement doit être noir (quel supplice dans ce pays de soleil !),
       - le bonnet doit être noir et
       - le foulard qui l'entoure doit toujours être noir et n'avoir jamais plus d'un nœud,
       - le manteau noir ou de couleur sombre doit toujours être jeté sur le bras gauche de façon à le rendre impuissant,
       - le Juif doit porter en courant ses morts au cimetière et après le soleil couché, et, enfin, par-dessus tout,
       - défense à lui de jamais porter la main sur le musulman sous peine de mort.


       Le sort des chiens errants des villes orientales eût été préférable.
       Le mépris et le dégoût dont les Juifs étaient l'objet n'avaient pas de bornes. Parqués dans certains quartiers de la ville, ils vivaient malproprement, dans d'étroites ruelles, couverts de vêtements sordides, vivant de peu ou plutôt de rien ; de galettes et de sardines, honteux et méprisés, et à force d'abaissement et d'oppression devenus lâches de la lâcheté du découragement le plus complet.
       Leur judaïque avarice les rendait :
       - astucieux,
       - fourbes,
       - capables des plus plates bassesses et assez méprisables pour que la nuit douloureuses dont on enveloppait cette race parût à tous une nécessité sociale.


       De cet état d'abaissement des Juifs il reste encore bien des traces aujourd'hui à Alger. Un jeune Arabe me dit un jour :
       " Oh ! Les Français ils serrent la main aux Juifs ! " Qui dira ce que pour un Arabe a d'injurieux cette épithète : Judi (juif). Aujourd'hui le Juif :
       - est encore vêtu de noir,
       - sa coiffure pour ne pas être semblable à celle des Arabes est souvent une casquette en velours noir à visière de cuir,
       - sa chaussure consiste en souliers à l'européenne, pour différer des babouches arabes.
       - Le manteau est toujours noir et souvent j'ai surpris des Juifs à le porter, probablement sans s'en rendre compte, selon l'ancienne prescription, sur l'épaule gauche.


       Il ne m'a pas été donné de voir jamais un Juif à cheval.
       Point du tout agressif il se garderait bien encore de lever la main contre l'Arabe, et souvent, quand une querelle survient, il s'en va battu et content. Mais ces signes extérieurs de l'ancienne servitude pourraient facilement passer inaperçus.
       Du reste, la classe la plus éclairée de la population israélite a jeté bas la vieille défroque ; elle fut prompte à comprendre que le vainqueur allait établir l'égalité de la protection chez les vaincus.
       Avec une intelligence et une persévérance au-dessus de tout éloge, les Juifs travaillèrent à s'assimiler notre langue et nos coutumes, se glissant partout ; dans le commerce, la finance et même la magistrature.

       Dans le commerce :
       - courtiers parlant presque toujours plusieurs langues,
       - négociants d'une supériorité incontestable,

       Dans la finance :
       - banquiers souvent reprochables, mais toujours nécessaires et, enfin,
       Dans les tribunaux :
       - greffiers,
       - interprètes,
       - avocats,
       - magistrats dont les service durent être appréciés surtout dans les commencements de l'occupation française.


       Après s'être, pour ainsi dire, moralement francisés leur haute intelligence leur fit entrevoir un rêve jusque-là inouï, inespéré : devenir Français !
       Et c'est alors que les rabbins, les quelques magistrats israélites que contenaient les tribunaux, firent entendre à la nation française des appels plein de touchantes supplications.
       " Nous étions méprisables, disaient-ils, n'était-ce point parce que nous étions trop méprisés ? Le mépris existe encore contre nous. Qu'importe ? Ne voyez que notre attachement à la France. Le blanc méprise le noir ; n'avez-vous point pourtant aboli l'esclavage ?
       On nous reproche l'usure, la fourberie ; on ne nous reprochera pas l'inconduite ; nous sommes les hommes de la famille, et puis, n'en déplaise aux autres habitants de l'Algérie, consultons les casiers judiciaires !
       On nous reproche notre lâcheté ! Donnez-nous une patrie ; nous sommes les fils des Machabées, (Mariage d'un personnage de haute lignée avec une personne de moindre rang. ) leur sang ne se démentira pas.
       Rappelez-vous, du siège de Jérusalem et de ce que Tacite a dit de nous : " Ce sont les seuls qui n'ont point cédé aux aigles romains ; ce qu'ils craignent ce n'est pas de mourir, c'est bien plutôt de vivre sous le joug d'un maître. " Il faudrait avoir sous les yeux, pour les citer, les pages éloquentes où les Juifs, s'adressant à la nation française, la suppliaient de devenir leur mère bien-aimée. Lors de son voyage en Algérie Napoléon III leur fit espérer que l'époque de leur naturalisation ne serait pas très éloignée.

       Un jour ils purent se réveiller étonnés et satisfaits : l'israélite Crémieux venait de décréter la naturalisation en masse de tous les Juifs algériens.
       Ce ne fut dans la gent juive qu'un immense cri de joie, les Juifs avaient une patrie ! Ils se dirent heureux comme s'ils avaient retrouvé Jérusalem.
       Comment fut accueilli cet étrange décret ? Ce serait assez difficile à dire.
       Les Arabes s'indignèrent ; ils crièrent que la France était gouvernée par un Juif.
       On sait que ce fut le signal de la révolte de Mokrani et des massacres de la Kabylie. La plupart des Français se demandèrent si le titre de Français avait été mérité par ces gens-là.

       Quant aux Juifs ils sont enchantés. On les appelle bien un peu " les Français de Crémieux " mais ils en ont si longtemps supporté de plus cruelle qu'ils s'en affectent peu. Ils paient comme les autres l'impôt de l'argent et du sang. Il semble que, pour n'être plus méprisés, ils ont cessé d'être méprisables.
       Au peuple la malpropreté des vêtements est encore une habitude invétérée. Les prix dans les boutiques des Juifs atteignent, pour le moindre bibelot, des chiffres fantastiques et leur génie commercial leur suggère quelquefois de curieuses idées ; il y en a un qui a sa boutique place du Gouvernement ; je voyais l'autre jour deux bonnes sœurs grises examiner l'étalage ; Comment ne seraient-elles pas entrées dans la boutique, l'enseigne est : à Saint Joseph et de plus il y a la traditionnelle et large bande : incessamment faillite, mais il n'est pas difficile de voir que cela s'en va.

       Depuis la naturalisation en masse des Juifs d'Algérie, le costume israélien disparaît de plus en plus tous les jours ; le pittoresque y perd évidemment, mais non pas tout ; car si le type juif est à Alger ce qu'il est partout sur la terre, l'artiste découvrira ici des têtes de Juifs de tous les modèles, depuis le père Abraham Abraham jusqu'à Iscariote en passant par la tête si belle que les artistes ont donné dans leurs toile à celui qui fut le plus bel enfant des hommes.
       Chose singulière ! Mahomet leur reprochait déjà d'oublier leurs prière pour courir à la trompette qui les appelait à l'encan.
       A Alger l'encan s'annonce au son d'une trompette de cuivre et les Juifs y répondent avec empressement qui ne laisse aucun doute sur l'affection qu'ils ont pour la vente aux enchères.

Alger ville d'hiver d'Henri Dumont.
Notes de voyage. Édition 1878.


Les Juives
Envoyé par M. Christian Graille
Les Juives d'Alger passent pour belles.

                On pourrait cependant presque à toutes, leur signer ainsi leur passeport :
                - Chairs séreuses,
                - formes lourdes,
                - yeux peu animés,
                - lèvres et ailes du nez épaisses,
                - oreilles charnues,
                - cou gras,
                - pieds et mains énormes.

               Il ne resterait guère à signaler que le teint : presque toujours beau, ce teint particulier aux femmes orientales, à la fois mat et coloré comme celui de la pêche qui s'est dorée au soleil.

               Il faudrait aussi noter, en passant, la chevelure ondulée et d'un noir d'ébène.
                Avec cet ensemble de défauts et de qualités, la Juive fait quelquefois beaucoup d'effet, moins de près que de loin pourtant ; car de près le tempérament lymphatique est trop apparent.
                De loin il ne reste que la grande, la trop grande régularité des traits qui satisfait l'œil et rappelle la pureté de la race.
                Avec cela, la Juive lorsqu'elle s'en tient à l'ancien costume israélite, si pittoresque avec ses " sbades ", sorte de sandales, et ses robes de soie de couleurs voyantes brodées d'or ses mouchoirs en tissus d'or ou d'argent autour de la tête, ses cheveux lisses partagés par une raie sur la droite et formant un bandeau plat sur le côté du front.

               Si elle a quitté la vieille défroque pour s'habiller à la française, alors elle est tout à fait mal vêtue car elle ne peut se défendre des couleurs voyantes et tombe dans un goût détestable. Il faut, au milieu de cette bagarre, faire quelques exceptions.
                Il y a quelques Juives qui sont belles mais alors elles le sont tout de bon. Elles le sont comme la Juive d'Allorib et comme toutes les belles Juives qui se Il y a peu de familles juives qui soient pauvres à Alger.
                Est-ce grâce à cette circonstance que la femme juive est la femme de la famille et qu'en dehors de là elle n'a pas d'histoire. Qui désirera voir des Juives, beaucoup de Juives à la fois le pourra facilement tous les jours de Sabbat au jardin Marengo ; c'est décidément un lieu qu'elles affectionnent.

Alger ville d'hiver d'Henri Dumont.
Notes de voyage. Édition 1878.

               


Le méchoui
Envoyé par M. Christian Graille

               …Et nous avions grand faim. Chacun montrait les dents.
                Le méchoui fumait sur les charbons ardents,
                Le bon mouton rôti qu'on sert aux jours de fête,
                Empalé tout entier des reins jusqu'à la tête.
                Nous, nous étions assis, las d'avoir chevauché
                Dès l'aube, et le soleil, depuis longtemps couché,
                Avait fait place au cœur scintillant des étoiles.
                Nos tentes nous suivaient : on dressait leurs toiles,
                Et nous nous coucherions le repas achevé,
                Là, dans un coin, propice au campement rêvé,
                Du vieux pays arabe étrange et plein de charme …
                Maintenant, le mouton coulait en grosses larmes

                D'une graisse dorée, et le feu qui ronflait
                Sous nos souffles, jetait dans la nuit son reflet.
                C'était près d'un douar, et des ombres furtives
                Se glissaient à pas lents, puis restaient attentives,
                Près de nous ; et tandis que nous causions joyeux,
                Nous vîmes tout à coup, des yeux, rien que des yeux,
                Dardant sur nos apprêts le feu de leurs prunelles,
                Yeux de pauvres, creusés par des faims éternelles,
                Et qui nous contemplaient grands ouverts, ébahis,
                Farouches, comme si, du fond noir des gourbis,
                Tout le hâve troupeau des misères voisines,
                Sentant qu'il se faisait quelque par des cuisines,

                S'était levé d'instinct, et, de tous ces regards,
                Nous couvait à présent, les uns vagues, hagards,
                Et les autres, fixés sur la bête, où friande,
                On eût dit que leur flamme aller lécher la viande !
                Scène étrange, tableau que je n'oublierai pas,
                On leur jeta des os ; mais pendant le repas,
                J'étais devenu triste, et la nuit, dans les ombres,
                Poursuivi par l'éclat de ces prunelles sombres,
                Je fus pris jusqu'au jour d'un indicible émoi,
                Car il me semblait voir, en les sentant sur moi,
                Béantes, sous le front des gueux à maigre mine,
                Tragiquement briller les yeux de la famine !

Victor Pittié
(La vie algérienne et tunisienne 18-02-1897)


La main du sauveur
Envoyé par Eliane


       Marcel fait du stop sur le bord d'une route de Camargue par une nuit très sombre, alors qu'il y a une terrible tempête. Hélas il n'y a pas de voitures qui passent. Trois heures plus tard, la tempête et l'orage sont toujours aussi forts qu'il est impossible de voir plus loin que 3 mètres devant soi.
       Tout à coup il voit une voiture qui s'approche lentement et qui s'arrête. Marcel sans se poser de questions monte dans la voiture, ferme la porte, et lorsqu'il se retourne il se rend compte qu'il n'y a personne à la place du conducteur.
       La voiture démarre doucement, il ne voit rien devant mais sait qu'il y a un virage très sévère qui approche. Effrayé, il commence à prier. Il n'a pas fini d'être étonné lorsque juste avant d'arriver sur le virage, la porte du conducteur s'entrouvre et une main entre pour faire tourner le volant dans le virage.
       Cette fois il y croit au bon Dieu ! Paralysé par sa peur il s'accroche de toutes ses forces à son siège. Il reste immobile et voit que la même chose arrive à chaque fois qu'il y a un virage sur la route.

       La tempête augmente en force, alors, à l'approche de son village, il descend de la voiture et part en courant, entre dans un bar, demande deux double Ricard et en tremblant commence à raconter à tous ce qui lui est arrivé.
       Une demi-heure plus tard arrivent deux gars complètement trempés, l'air exténué et l'un dit à l'autre :

       Regarde là-bas, c'est le con qui est monté dans la voiture pendant qu'on la poussait !




De la colonisation en Algérie.
Envoyé par M. Christian Graille
VI

                  Aux causes que nous venons d'indiquer, dont une seule eut suffit pour faire échouer la colonisation et qui se sont trouvées partout réunies, nous devons ajouter la pénurie d'argent :
                  - tous les colons en ont manqué,
                  - le prix élevé de la main-d'œuvre,
                  - l'usure les maladies qui partout ont paralysé leurs efforts.

                  Grands et petits, cinq ou six exceptés, on peut dire qu'il n'y a pas en Afrique de colon qui ait eu à sa disposition des ressources financières suffisantes.

                  Presque tous sont arrivés sans argent ; un près petit nombre ont pu, sans recourir à l'emprunt. Bâtir sur la terre qui leur était concédée une maison, un abri.
                  Après cet effort, toute ressource a été épuisée et pour vivre et travailler il a fallu recourir à l'emprunt. On le sait dans l'état actuel de nos lois sociales tout propriétaire qui emprunte est par ce seul fait, ruiné :
                  En Afrique, cette ruine est non seulement tout aussi certaine mais encore plus prompte qu'en France.

                  Là l'argent est considéré comme marchandise, il se vend sans cours légal et sans règle, suivant la rapacité du détenteur et les besoins de l'emprunteur.
                  Le taux de quinze pour cent est le plus ordinaire et le plus modéré. Il n'est pas rare de trouver des placements hypothécaires fait à vingt, vingt-cinq et jusqu'à trente pour cent.
                  Comme il n'est pas un seul colon qui n'ait été obligé d'emprunter à ces conditions, il n'en est pas un qui ne soit ruiné.
                  Le manque d'argent et l'usure ont forcé le colon à vivre de privations. Au lieu d'un logement sain et bien abrité, il a dû se contenter d'une baraque insalubre et mal bâtie qui ne l'a garanti ni des fortes chaleurs ni des pluies torrentielles.
                  Au lieu d'une nourriture saine et abondante, nécessaire pour réparer les forces que le travail et la chaleur usent si vite, il n'y a eu le plus souvent pour toute nourriture que du pain noir et de l'eau pour boisson.
                  Lorsque pour se préserver des effets de l'acclimatation il aurait eu besoin de soigner et de ménager sa santé, il a aggravé son état par un travail constant et pénible et par des privations de toute sorte.
                  Aussi les fatigues et le dénuement ont eu bien tôt épuisé ses forces et sa santé ; heureux encore lorsque par un prompt retour en France il a pu fuir ce pays où il avait tant souffert ! …

                  Tout le monde comprendra les conséquences du haut prix de la main-d'œuvre lorsque nous aurons dit que le blé vendu à seize francs, grâce aux sacrifices que l'administration faisait pour venir au secours de ces malheureux colons, leur coûtait au moins quinze francs.
                  Car pour préparer les terres et faire la moisson ils avaient employé des ouvriers qu'ils payaient en moyenne à raison de trois francs cinquante centimes par jour.
                  Pour les villages auxquels le gouvernement a concouru par un secours aux colons, comme pour ceux dont il a fait tous les frais.
                  Nous avons remarqué que les secours ont été presque toujours insuffisants, que les travaux d'appropriation ont été faits tantôt mam, tantôt tardivement. Il nous suffira de dire ce qui s'est passé, à la Stidia et à Saint-Denis-du-Sig pour justifier notre critique sur ce point.
                  Ces deux villages sont, tant par leur situation que par les secours ou les travaux de l'administration, dans de meilleures conditions de succès qu'aucun de ceux qui ont été créés dans la province d'Oran.
                  La Stidia, sur la route d'Oran à Mostaganem est une colonie prussienne dont l'État a fait tous les frais.
                  Il a été donné à chaque famille :
                  - une maison saine et bien bâtie, avec un petit jardin attenant, et de plus
                  - une concession en terres de quatre à huit hectares suivant que la famille était plus ou moins nombreuse.


                  L'administration a en outre fourni aux colons, à titre de prêt :
                  - des bœufs de labour,
                  - des charrues et
                  - les grains pour les semences.


                  Voilà certes un bien grand sacrifice, il a pourtant été insuffisant.
                  On le savait, les Prussiens sont arrivés en Afrique sans argent, sans ressources ; ils ont prouvé leur bonne volonté en se mettant à l'œuvre avec ardeur. Mais pour travailler il ne suffit pas d'avoir :
                  - un bon logement,
                  - des bestiaux et
                  - des charrues,

                  il faut pouvoir se nourrir, le pain a manqué.

                  Pour satisfaire à ce besoin impérieux, les colons ont dû chercher une occupation qui leur donnât une ressource immédiate et par conséquent abandonner la culture de la terre qui pendant un an leur eût fait attendre ses produits : Voici ce qu'il est advenu.
                  Aux environs de la Stidia le pays est un peu boisé, les Prussiens coupent aujourd'hui ces bois et en font du charbon qu'ils vendent à Mostaganem.
                  Ainsi de cultivateurs ces colons sont devenus charbonniers. Et maintenant lorsqu'on arrive dans ce village qui de loin avec ses maisons blanches et coquettement rangées apparaît au voyageur comme une colonie riche et florissante, on ne trouve partout que misère et solitude, la majeure partie des terres est en friche, le jardin qui avoisine la maison n'est pas même cultivé.
                  Si quelques malheureux, rares et maladifs, se montrent encore sur le seuil de leurs demeures, on voit bien vite leur misère et leurs souffrances.
                  Le reste de la population est dans les bois et à Mostaganem, menant une vie rude et misérable, et se nourrissant seulement de pain noir et de café.
                  Il faut bien le dire, la triste situation de ces hommes n'est pas le seul malheur que nous ayons à déplorer à la Stidia.

                  Les bois sont d'autant plus précieux en Afrique qu'ils sont plus rares ; par le libre parcours et plus encore par la détestable coutume de brûler tout ce qui croît sur les terres qu'ils veulent ensemencer.
                  Les Arabes ont empêché les arbres de prospérer et de se multiplier. La misère fait continuer aux Prussiens l'œuvre de destruction des Arabes.
                  L'administration, retenue par un sentiment d'humanité, recule devant la répression qui seule pourrait empêcher cette dévastation, et ce pays, déjà si aride, voit tous les jours ses sources tarir par le fait du déboisement.

                  La Stidia a une fontaine qui fournit de l'eau en quantité suffisante pour les besoins des ménages et des bestiaux.
                  Les terres n'y sont pas arrosées, par conséquent il n'y avait pas lieu d'espérer que cette colonie pût jamais atteindre le degré de richesse et de prospérité que d'autres centres de population jouissant de cet avantage pourront acquérir un jour. Pourtant comme ce village est traversé par une route fréquentée, que les terres sablonneuses et d'un travail facile sont propres à la culture des céréales, et que les défrichements peuvent se faire à la charrue, car il n'y a pas de palmiers nains, on pouvait penser avec raison que les colons qui y ont été placés jouiraient d'une honnête aisance.
                  Il en eût été ainsi infailliblement si on avait pourvu aux besoins des colons jusqu'au moment où les terres qu'on leur donnait en friches auraient produit des récoltes.

                  Si l'on me dit que l'État a assez fait pour eux en leur donnant : - une maison, des terres ; des bestiaux, des instruments aratoires, je répondrai que personne n'a pu ignorer que ces malheureux n'avaient que leur travail pour suffire à leurs besoins quand ils sont allés en Afrique, et que les terres qu'on leur concédait ne pouvaient les nourrir que deux ans après leur installation que pendant ces deux années il fallait vivre et que, la culture ne leur en fournissant pas les moyens, ils ont dû les chercher ailleurs.
                  Il en est résulté de cela qu'une dépense considérable a été presque perdue, et que cent familles souffrant parce qu'on a lésiné devant un surcroît de dépenses qui n'étaient rien comparés au sacrifice déjà fait.
                  Mieux eut valu cent fois, on en conviendra, laisser les colons chez eux, et épargner l'argent déjà dépensé en pure perte. Voilà ce qu'a produit l'insuffisance des secours, nous allons dire ce qui est advenu par suite des travaux incomplets ou faits tardivement.

                  D'ici à trois ans, si les soins ne manquent pas, la colonie de Saint-Denis-du-Sig sera riche et florissante. Cette plaine est recouverte d'une couche de terre végétale profonde et productive ; le barrage établi sur le Sig donne le moyen d'arroser trois mille cinq cents hectares : les colons de Saint Denis sont aujourd'hui dans des conditions telles que le succès est à peu près certain. Mais il n'en a pas toujours été ainsi, ils ont eu leurs mauvais jours.
                  Le barrage et le canal d'irrigation étaient à peine commencés que déjà les colons, qui ont tout au moins l'instinct de l'effet bienfaiteur des eaux sur les terres d'Afrique, arrivaient en foule et demandaient des concessions ; ils furent bientôt établis.
                  Les irrigations commencèrent, la plaine fut inondée, malheureusement on avait oublié qu'il fallait laisser aux eaux un épanchement ; le courant venant à manquer, il se forma de grandes mares, le soleil et l'eau produisirent bien vite la décomposition des plantes végétales et firent naître des germes putrides de fièvre qui en peu de jours décimèrent la population.
                  Les hôpitaux d'Oran se remplirent de malades et on fut un moment sur le point d'abandonner cette plaine, une des plus fertiles et des plus avantageusement situées de toute l'Algérie.
                  Nous n'avons pas besoin de pousser plus loin l'examen des fautes commises en Afrique dans tout ce qui est relatif à la colonisation.
                  Nous avons indiqué les principales et justifié notre critique, il suffira d'une apparition sur les lieux et d'un moment d'examen pour conduire les autres et s'en garantir. Pour entrer dans de plus grands détails, il faudrait avoir un cadre moins restreint que celui que nous nous sommes tracé.

                  Nous avons hâte d'arriver à l'exposé des règles à suivre pour obtenir une colonisation heureuse et florissante. Le lecteur sait déjà que pour arriver à ce résultat, il faut :
                  - choisir avec le plus grand soin les lieux où les colons doivent être établis,
                  - leur donner l'eau en abondance tant pour les besoins des ménages que pour l'irrigation des terres,
                  - les instruire et les diriger,
                  - leur fournir des secours suffisants jusqu'au moment où la terre pourra les nourrir.

Troisième partie.
Règles à suivre.

VII.

                  L'État, le capital et les travailleurs devront concourir à la colonisation de l'Algérie.

                  L'État :
                  - pour désigner les lieux où les centres de population seront établis,
                  - ouvrir les routes,
                  - construire les barrages,
                  - creuser les canaux d'irrigation,
                  - enfin établir des fermes-écoles.

                  Par l'impôt, il sera largement indemnisé de ses dépenses, et sans autre sacrifice qu'une avance de fonds dont le remboursement est assuré.
                  Il aura donné à la France de nouvelles et importantes ressources ; à l'Algérie l'abondance et la paix
                  L'action du capital, comme celle des travailleurs, n'a pas besoin d'être définie, il suffira de dire que :
                  - le premier doit pourvoir à tous les besoins des cultivateurs, et ceux-ci à tous les travaux de culture, jusqu'au moment où les terres donneront à l'un une suffisante compensation de ses sacrifices, à l'autre la juste récompense de son travail. Telle sera, telle aurait dû être la colonisation.
                  - C'est parce qu'on n'a pas pratiqué cette mutualité, indiquée depuis longtemps comme la règle de conduite la plus sûre, que les colons ont échoué dans leur entreprise.


                  Mais ce triple concours ne peut être obtenu aujourd'hui. Les fautes commises ont eu pour résultat des misères si grandes que toute confiance est perdue.
                  Le capital n'interviendrait pas. Cet élément puissant, indispensable se retire très vite des entreprises qui échouent ; et pour le ramener, après un échec, des théories nouvelles et des affirmations sont insuffisantes : il faut prouver par le succès que le succès est possible.
                  Bien d'autres ont dit avant nous que l'insuccès des premiers colons ne peut être attribué ni au sol ni au climat ; que la terre est fertile, que le climat est sain. Ces affirmations n'ont pas amené un écu en Afrique.
                  La confiance ne se rétablira que lorsqu'une expérience pratique aura démontré que la colonisation présente, comme placement de fonds, des avantages et des garanties que l'on ne trouve pas dans bien d'autres spéculations.
                  Aujourd'hui l'État peut seul faire cette preuve. Les colons ne manqueront pas mais il doit suppléer à l'absence de capital.
                  Le décret de l'Assemblée constituante, qui a ouvert un crédit de 50 millions, destinés à la colonisation lui en donne les moyens ; et le projet que nous soumettons à son approbation a cela d'avantageux que les colons seront tenus de rembourser toutes les dépenses qui seront faites, tant pour leur logement que pour leur nourriture.

                  Ce remboursement qui est à la fois juste, nécessaire et facile en capital et intérêts calculés à quatre pour cent au moyen d'un amortissement de un franc pour cent et par année.
                  Ce remboursement est juste parce que les fonds de l'État, qui sont fournis par tous, ne doivent jamais être employés qu'au profit de tous.
                  Les colons d'Afrique seront soumis au paiement des impôts comme les travailleurs de la Métropole.
                  A ce titre on leur doit des routes, des canaux etc. ; mais rien ne leur confère le droit d'être logés et nourris aux frais du trésor public ; et si on leur donne un logement, la nourriture ce ne peut être qu'un prêt qu'ils doivent rembourser.
                  Il est nécessaire, parce que ce remboursement n'était pas exigé, les colons qui viendraient plus tard associés à des capitalistes, seraient dans des conditions beaucoup plus dures que celles où se seraient trouvés les premiers. Ce privilège, cette inégalité qui ne doit pas exister nuirait au progrès de la colonisation.
                  Ce remboursement sera facile ; nous prouverons que lorsque les terres d'Afrique seront cultivées avec soin et intelligence le rapport moyen sera de trois à quatre cents francs par hectare, et que l'intérêt et l'amortissement ne s'élèveront pas à plus de vingt francs par an et par hectare.
                  Ceci posé, et demeurant bien entendu que nous ne proposons de faire un essai sans le concours des capitalistes que par exception ou par nécessité, nous allons indiquer la marche à suivre pour garantir les nouveaux colons contre toute chance mauvaise et assurer ainsi le succès de la colonisation future.

                  Les règles que j'indique ne sont pas applicables seulement à l'essai que je propose de faire par l'État ; elles seront surtout utiles et profitables lorsque la colonisation sera faite avec le concours de l'État, des travailleurs et des capitalistes. Pour être sérieux et profitable l'essai doit se faire sur une grande échelle et simultanément dans les trois provinces.
                  Nous proposons de placer :
                  - trois mille colons dans la province d'Oran,
                  - trois mille cinq cents dans celle d'Alger,
                  - trois mille cinq cents dans celle de Constantine.


                  Ces dix mille colons pris :
                  - trois cinquièmes parmi les ouvriers de France, tous mariés et pères de famille,
                  - un cinquième parmi les soldats de l'armée d'Afrique, libérés du service,
                  - un cinquième chez les Arabes indigènes, seraient répartis en douze villages, quatre pour chaque province.


                  Dix mille colons représentent deux mille cinq cents familles de quatre personnes. En tenant compte des militaires, non encore mariés, cette évaluation me parait exacte.
                  On attribuerait à chaque famille une concession proportionnelle au nombre d'individus dont elle serait composée, et selon une moyenne de cinq hectares par famille, soit douze mille cinq cents hectares pour les douze villages répartis de la manière suivante :
                  - 3.500 h dans la province d'Oran,
                  - 4.500 dans la province d'Alger,
                  - 4.500 dans la province de Constantine.
                  - Total 12.500 hectares.


                  Au lieu d'éparpiller les quatre villages, je voudrais que dans chaque province ils fussent groupés sur un même point.
                  Autour de chacun de ces groupes il serait réservé des terres en quantité suffisante pour établir dix grandes fermes de cinquante à deux cents hectares et des pâturages ou communaux.
                  Les premières seraient destinées à l'industrie privée, les seconds au service des colons. Cette réserve serait de seize cents hectares environ par province.
                  Dans le voisinage de ces groupes et à portée des fontaines abreuvoirs il serait utile et politique de placer des tribus arabes ; des concessions gratuites et le voisinage des eaux assureraient leur concours.
                  Les colons seraient embarqués vers la fin du mois de février 1951 ; d'ici à cette époque, le Ministre de la Guerre ferait rechercher, par des hommes spéciaux, les points les plus favorables à l'établissement des divers centres de population.

                  Ces mêmes hommes seraient chargés de dresser les plans et devis des travaux à exécuter pour :
                  - les barrages,
                  - les canaux d'irrigation,
                  - le nivellement des terrains arrosables et
                  - le dessèchement des marais,
                 
                  - la construction des maisons,
                  - des fontaines,
                  - des abreuvoirs.


                  Enfin et dans le cas où le tracé d'une route n'aboutirait pas déjà au lieu désigné pour l'établissement des nouveaux colons, ce tracé sera fait de manière à relier les centres de population à la ville du littoral la plus rapprochée. Chacune des propositions que je viens d'émettre se justifie par le simple énoncé. Pourtant et pour prévenir toute objection, je vais dire brièvement les avantages qu'elles présentent et les motifs qui me les font admettre comme point de départ de mon travail.
                  Du nombre des colons.
                  L'essai que nous proposons de faire doit avoir pour résultat d'appeler à la colonisation de l'Algérie l'industrie privée que les pertes éprouvées par les premiers colons ont éloignée.
                  Ce résultat ne serait pas obtenu si l'on se bornait à établir un seul centre de population de quelques centaines d'individus ; il ne pourra plus être contesté, lorsque dix mille colons auront réussi à la fois et dans les trois provinces.

                  Choix de colons.
                  On peut et on doit rendre notre essai profitable aux ouvriers qui souffrent en France, aux soldats qui ont rendu des services ; nous devons nous en servir surtout comme moyen de pacification.
                  Voilà pourquoi je demande que les colons soient pris parmi les ouvriers français, les militaires libérés du service militaire et les Indigènes.

                  Importance de la concession.
                  Une famille composée de quatre personnes suffira à la culture de cinq hectares de terre ; elle pourra, en outre, utiliser quelques journées au service des grands concessionnaires ; le prix de ces journées sera souvent d'un grand secours pour les colons.

                  Nécessité d'établir des grandes concessions à côté des villages.
                  En observant les essais de culture faits jusqu'à ce jour, on remarque que le prix de la main-d'œuvre est resté très élevé en Algérie et que l'ouvrier y est fort rare.
                  Si la promesse d'un bon salaire attire partout les travailleurs, il ne devrait pas manquer en Afrique, car le prix de la journée y est très élevé.
                  Pourtant il n'est pas rare de trouver un grand propriétaire qui, faute de bras, est obligé de laisser ses terres en friches, des colons malheureux qui souffrent du manque de travail.
                  Ceci paraîtra extraordinaire à ceux qui ne connaissent pas l'Algérie ; on le comprendra mieux quand on saura que les villages et les concessions se trouvent :
                  - disséminés sur une immense étendue du pays,
                  - n'ayant souvent entre eux ni rapports ni adhérence,
                  - qu'il n'existe que très peu de routes tracées, ce qui rend les communications rares et difficiles, d'où il résulte que les propriétaires ignorent où sont les travailleurs et ceux-ci où est le travail.
                  - Rien de semblable ne peut arriver si l'on place des grandes concessions comme nous le demandons.

                  Propriétaires et travailleurs seront ainsi à, proximité les uns des autres.
                  Il est inutile d'insister sur les avantages qu'ils doivent retirer de ce voisinage ; on comprend en effet qu'il est dans la vie du colon une infinité de besoin qu'il ne peut satisfaire qu'avec le prix de son travail.
                  Ce travail, il l'aura près de lui, à sa portée, comme aussi le propriétaire, placé à côté d'un centre de population de trois à quatre mille habitants, trouvera toujours à des prix modérés des ouvriers habiles et laborieux.

                  Réunion des villages par groupes.
                  Nous demandons que les villages soient réunis par groupes. Cette combinaison nous semble offrir de grands avantages :
                  1° Lorsque les centres de population seront à proximité les uns des autres ils présenteront une force imposante qui les mettra à l'abri de toute tentative hostile de la part des Arabes.
                  2° On sait déjà que, pour coloniser l'Algérie, il faut arroser les terres. Cette irrigation exigera des travaux importants, car il faut créer des barrages et des canaux.
                  De plus il est indispensable de relier par une route les centres de population à une ville du littoral.
                  - Ces barrages, ces canaux, ces routes nécessiteront une dépense à laquelle l'État ne pourrait subvenir s'il fallait la renouveler pour chacun des villages à établir en Algérie.
                  Tout indique que ces travaux doivent être exécutés de manière à en faire profiter le plus grand nombre de colons qu'il se pourra. Dans notre projet :
                  - le même barrage,
                  - le même chemin,
                  - le même canal serviront au moins pour quatre villages.

                  C'est ici le cas de dire que les plaies de l'Algérie ont généralement assez d'étendue pour qu'on puisse y établir un groupe au moins, souvent deux, et quelquefois trois et quatre ; disons aussi que chaque plaine a son cours d'eau.

                  Vacants ou communaux.
                  Nous demandons pour chaque village cent hectares de vacants ou communaux pour le parcage des bestiaux, soit quatre cents hectares pour le groupe.
                  Cette concession nous a paru nécessaire ; nous la croyons suffisante.

                  Choix de lieues, études et travaux préparatoires.
                  Nous avons suffisamment expliqué les effets d'un terrain mal choisi ; le lecteur ait déjà que partout où il n'y a pas de l'eau en quantité suffisante le succès des colons est impossible, et que, lorsque le sol est couvert de palmiers nains, le défrichement est très pénible et très coûteux.
                  Un intérêt immense est donc attaché à la désignation des lieux où les centres de population seront établis. Le ministre ne doit confier ce travail qu'à des hommes connaissant parfaitement le pays et les besoins de la colonisation.
                  Nous avons aussi fait connaître les résultats de la de la précipitation qui a présidé à l'installation des colons envoyés en Afrique en 1848.
                  Pour prévenir le retour de semblables malheurs, nous demandons que les études soient faites dès à présent.
                  Les délégués du ministre après avoir fait le choix des lieux devront dresser les plans et devis :
                  - des travaux à exécuter pour les barrages et canaux,
                  - la construction des maisons et
                  - le nivellement des terres arrosables.

                  Une année consacrée à ce travail permettra de le faire avec la maturité et les soins qu'il exige.

                  Départ des colons.
                  Le mois de mars est l'époque la plus favorable pour l'acclimatation.
                  Les grandes pluies sont finies ; les fortes chaleurs ne sont pas encore venues. A leur arrivée les colons seront campés ; les tentes ou les baraques ne le préservent pas suffisamment contre les pluies ou la chaleur d'Afrique.
                  En les faisant partir à la fin du mois de février, et en les occupant tout de suite à la construction des maisons, ils seront logés convenablement à l'époque des grandes chaleurs et leur santé n'aura pas à souffrir.

                  Importance de leur adjoindre les Arabes.
                  Dans ma pensée tous nos efforts doivent tendre à amener vers nous la population indigène ; il faut lui faire comprendre l'efficacité de notre protection, les avantages qu'elle peut en retirer. Pour cela il faut combattre ses tendances à s'éloigner de nous et lui assurant le bien-être.

                  En recevant dans chaque village un cinquième d'Arabes indigènes, nous aurons beaucoup fait pour atteindre ce résultat ; en assignant aux tribus des terres dans le voisinage de ces villages, en leur donnant l'eau dont elles ne peuvent se passer, nous ferons encore davantage.
                  Ce rapprochement qui aurait pour résultat de fournir aux colons des manœuvres utiles contribuerait surtout et puissamment à la pacification de l'Algérie.
                  Il ne faudrait pas oublier que les Arabes ont joui du sol, seulement à titre de fermiers. Les terres appartenant à quelques-uns d'entre eux, et qu'on nomme melk sont très rares.
                  Ils connaissent notre intention de coloniser l'Algérie et ils savent que nous avons le droit de nous emparer des terres arches (communautaires) qu'ils cultivent mais qu'ils ne possèdent pas. De là une grande inquiétude sur leur avenir.
                  Dans cette circonstance, ils considèreront comme un bienfait un lotissement, si minime qu'il soit pourvu qu'il fasse cesser l'état précaire dans lequel ils se trouvent placés.

                  Pour faire mieux sentir les avantages qui doivent résulter des concessions que nous proposons de faire aux Arabes, nous laisserons par le général Bedeau :
                  " La population indigène est préparée à nous être un utile auxiliaire de la puissance que nous avons voulu fonder dans le pays. Est-il possible qu'on soutienne qu'il faille les repousser, créer la guerre à la place de la paix, et nous donner par système tous les embarras d'une installation européenne isolée …
                  Notre tâche en Afrique présente cette singularité toute particulière dans l'histoire des conquêtes, c'est qu'en réalité notre intérêt bien entendu, notre intérêt égoïste, si je puis dire, nous obliger à civiliser la population indigène, à développer et grandir son bien-être pour assurer le nôtre … Il faudra intéresser, s'il est possible, le travailleur indigène à la prospérité des concessions européennes … "

                  Malgré ces sages avis et les conseils donnés par bien d'autres, on a procédé jusqu'ici, à l'égard des Arabes, comme si on avait pris à tâche de les mécontenter. Chaque fois qu'on a établi un village, les Indigènes ont été refoulés sans égards, sans ménagements.
                  Aussi leur mécontentement se manifeste avec énergie et les troubles de la province de Constantine, jusque-là si paisible, n'auraient peut-être pas eu lieu si les fautes que nous signalons n'avaient pas été commises.
                  Les sources sont rares en Afrique et l'Arabe auquel l'eau est indispensable, tant pour lui que pour ses nombreux troupeaux, les recherche et s'y attache.
                  Et pourtant soit ignorance, soit paresse, il ne fait rien pour se procurer l'eau dont il a tant besoin ; il se contente de la prendre dans les lieux où la nature la donne.
                  De notre côté nous n'avons encore rien fait pour cela, et, comme l'Arabe, nous nous établissons auprès des sources.
                  Ainsi nous avons non seulement pris à l'Arabe, presque toute compensation, les champs qu'il cultivait et auxquels il était attaché, mais encore nous avons été dans la nécessité de lui prendre souvent la fontaine à laquelle il attachait un plus haut prix. De là son mécontentement qui pourrait devenir un danger pour nous.
                  Notre projet, s'il était admis, remédierait à ce danger qui est sérieux en concédant à l'Arabe, en toute propriété, des terres dont il ne jouit aujourd'hui qu'à titre de fermier, et qu'il sait très bien que nous pouvons lui prendre, on l'aura rassuré sur son avenir.
                  En lui donnant l'eau, si précieuse en Afrique, ce qui sera facile, au moyen des barrages et des canaux que nous aurons établis, nous lui aurons rendu un service dont on peut être sûr qu'il appréciera la valeur et l'importance.

IX

                  J'ai exposé les principales règles que l'expérience indique comme indispensables pour arriver à une bonne colonisation. Je dois maintenant parler :
                  - de l'installation des colons,
                  - de leurs travaux,
                  - de ce qu'on doit exiger d'eux,
                  - de ce qu'on doit faire pour eux.


                  Je procèderai pour cette deuxième partie à mon projet comme la première, c'est-à-dire que j'indiquerai brièvement la direction à donner aux travaux et le mode d'exécution ; je reviendrai ensuite sur les points qui exigent quelque développement. Un directeur connaissant bien la culture des plantes industrielles, les besoins et les ressources des terres d'Afrique, devrait être placé à la tête de chaque groupe et chargé de la direction des travaux.
                  - Les terres resteraient dans l'indivision pendant quatre ans,
                  - le travail serait obligatoire,
                  - fait en commun et conformément aux prescriptions du directeur.


                  Les deux premières années l'administration fournirait aux colons les vivres :
                  - pain, viande, légumes, vin,
                  Le tout en quantité suffisante et proportionnées à la déperdition des forces occasionnée par un travail assidu et pénible ; il serait de plus accordé :
                  - aux colons un salaire de quinze centimes pour chaque journée de travail,
                  - de dix centimes aux femmes et
                  - de cinq centimes aux enfants occupés.


                  La troisième année le colon aurait récolté ; il ne recevrait que moitié ration de vivres et moitié salaire.

                  La quatrième année il devra suffire à ses besoins.
                  - Si, comme nous l'avons demandé au précédent chapitre, les lieux ont été choisis par avance,
                  - si le plan et les devis des travaux sont terminés pour l'époque fixée pour l'envoi des colons,
                  - enfin, si toutes les études ont été faites, dès leur arrivée en Afrique, les colons pourront être employés suivant leur force et leur aptitude :
                  - soit à la constructions des maisons d'habitation et des barrages, -
                  soit à la culture des terres désignées pour établir la pépinière du groupe et dont les semis devront être faits dès le premier mois de l'installation.


                  Puis viendront les canaux d'irrigation et le défrichement des terres, dont deux hectares au moins par famille devront être préparés pour les semences d'octobre suivant.
                  Enfin les canaux d'irrigation seront commencés dès la première année.
                  La deuxième année les canaux d'irrigation et les défrichements seront continués :
                  - trois hectares de terre par famille seront ensemencés en céréales,
                  - travaux pour l'écoulement des eaux et le nivellement des terres devront être commencés,
                  - enfin la récolte des céréales ensemencées l'année précédente sera coupée et battue.

                  La troisième année on terminera les travaux pour l'irrigation et de nivellement des terres,
                  - les plantations seront faites,
                  - la pépinière fournira des arbres suffisamment venus,
                  - les prairies artificielles arrosables seront ensemencées et


                  La quatrième année sera consacrée à la culture des plantes industrielles.
                  Les céréales seront ensemencées, n'exigeront que peu de travaux, les terres ayant été bien préparées les années précédentes.
                  Au fur et à mesure que :
                  - les terres seront ensemencées,
                  - elles seront divisées et limitées,
                  - les terres non arrosables en parcelle d'un hectare,
                  - les terres arrosables en parcelle d'un demi-hectare.


                  Avant les semences de la quatrième année, ces terres seront partagées entre les familles des colons, par la voie la plus équitable, en ayant égard, pour ce partage, au nombre d'individus composant chaque famille et à l'aptitude des colons alors bien connue.
                  Chaque colon aura droit à une part de terres arrosables et une part de celles qui ne le seront pas.
                  Si, pour quelque cause que ce soit, autre que le cas de maladie, un ou plusieurs colons refusaient de concourir aux travaux, ou si, par leur inconduite, ils troublaient l'ordre dans la commune, ils seraient, par ce seul fait, déchus de tous leurs droits et ramenés en France aux frais de l'État.

                  Toutefois cette mesure de rigueur ne pourrait être prononcée que par le préfet en conseil et sur le vu d'une enquête faite d'après les formes tracées d'avance et qui offrirait toute garantie aux colons.
                  Enfin, l'administration fournira, à titre de prêt une paire de bœufs et une charrue pour trois familles ; elle fournira de plus à chacune d'elles les outils et instruments aratoires et les grains pour les semences de la première année.
                  Trois points de cette partie du projet doivent être expliqués :
                  1° les dépenses mises à la charge de l'État,
                  2° l'indivision des terres pendant quatre ans et le travail en commun pendant cette même période,
                  3° la direction imposée aux colons et les conséquences d'un refus de concours ou d'insubordination.

                  Il serait surabondant de revenir sur les autres.

                  Dépenses à la charge de l'État.
                  L'assemblée constituante, par son vote de septembre 1849 assure aux colons plus que nous demandons dans notre projet ; d'après les termes du décret, l'État doit fournir les vivres et le vin pendant trois ans ; dans notre système la troisième année, les colons ne recevrons que moitié ration de vivres.
                  Nous pourrions nous en tenir à cette explication, puisque nous nous sommes tenus en deçà des limites du décret.
                  Mais ce n'est pas la seule économie que nous entendons donner à l'État ; les ressources prochaines et sures que l'ouvrier trouvera en Afrique lui permettra de rembourser toutes les avances qui lui seront faites, tant pour sa nourriture que pour son logement.
                  Nous avons dit et prouvé que ce remboursement était juste et nécessaire ; nous avons ajouté qu'il serait facile ; nous le prouverons bientôt.
                  Maintenant nous devons nous attacher à démontrer que si on a la ferme intention de coloniser, cette dépense ne doit pas arrêter.
                  Il ne faut pas croire que le cultivateur aisé quitte la France pour aller coloniser l'Algérie.

                  Pendant longtemps encore on ne trouvera pour cultiver la terre que des ouvriers sans travail et malheureux ; bien plus, s'il s'en présentait d'autres, il serait d'une sage politique et d'une haute moralité de préférer les plus pauvres.
                  La France doit d'abord venir en aide à ceux qui souffrent.
                  On sait que la première récolte ne peut se faire qu'à la fin de la deuxième année. Pendant deux ans il faudra donc, de toute nécessité, pourvoir à tous les besoins des colons, puisqu'ils n'auront pas de ressources qui leur soient propres et que leur travail ne leur en donnera pas.
                  On devra de plus leur donner un logement ; c'est là un besoin de première nécessité auquel ils ne pourraient non plus satisfaire. Enfin, et par les mêmes motifs, on leur fournira les grains pour les premières semences, les bœufs et les instruments aratoires.
                  Il faut considérer encore que le travail sera d'autant plus pénible pour les colons, qu'aux fatigues qu'il cause partout viendront se joindre les effets de l'acclimatation. Aussi nous pensons qu'il y aurait économie et avantage à ne pas diviser les vivres par ménage et les réunir et préparer dans un centre commun.

                  En tenant compte de la part que les colons prendront aux travaux :
                  - de barrages,
                  - canaux d'irrigation,
                  - dessèchement,
                  - assainissements qui, dans tout état de cause, devraient être à la charge de l'État, nous évaluons à quatre millions les avances à faire par l'administration et qui devront être remboursés.

                  Cette somme répartie sur les douze mille cinq cents hectares de terres concédées, porte la créance de l'État à trois cent vingt francs par hectare.
                  Mais comme il faudra en outre tenir compte à l'administration de cinq années de l'intérêt de cette somme pendant lesquelles le colon ne pourra rien payer, le capital augmentant, les annuités seront de dix-neuf francs vingt centimes par hectare. Les autres travaux que l'État sera obligé de faire et dont le remboursement ne sera pas exigé, peuvent être évalués à six millions.
                  Jusqu'à ce jour, il a été dépensé pour les colons envoyés en Afrique en 1848, environ quinze millions.
                  Mais on ne peut laisser ces malheureux dans l'état où ils se trouvent.

                  Pour améliorer leurs positions autant que pourra le permettre la situation dans laquelle on les a placés, il sera indispensable de leur donner la plus grande quantité d'eau possible, au moyen de puits à roues ou autres travaux hydrauliques.
                  Il faudra de plus les aider dans les défrichements, partout où le palmier nain rendra ce travail trop coûteux.
                  Si l'on ajoute à ces travaux les frais de la nourriture qu'on s'est engagé à leur donner pendant trois ans, on peut évaluer à six millions au moins les dépenses qu'il reste à faire pour ces colons.
                  Ainsi le crédit de cinquante millions sur lequel on a dépensé déjà quinze millions, duquel il faudra déduire en outre six millions pour les colons de 1848, et dix millions sur l'essai que nous proposons, sera réduit à dix-neuf millions lorsque ces divers essais seront faits.
                  Mais nous pensons qu'alors :
                  - le succès aura dissipé tous les doutes,
                  - fait cesser toutes les répugnances et
                  - que l'industrie privée viendra coloniser l'Afrique.

                  Dans ce cas les dix-neuf millions suffiront pour faire :
                  - les barrages,
                  - les routes,
                  - les canaux d'irrigation et de dessèchement que l'État prendra à sa charge.

                  Ainsi le crédit ouvert par l'Assemblée nationale ne sera pas dépassé et l'Afrique sera colonisée.


                  Du travail en commun.
                  Un savant documentaliste a dit : " Si on emploie deux cents hommes à lever la colonne de la place Vendôme, en un jour cette colonne sera sur son piédestal ; un homme seul occupé pendant deux cents jours à ce travail, usera ses forces sans aucun résultat. "
                  C'est la meilleure preuve qu'on puisse donner de ce que peuvent faire les forces réunies et de l'impuissance des forces isolées.
                  Cette règle s'applique surtout à la colonisation.
                  En effet un ouvrier, mis en présence d'un hectare de terre à défricher, se sent découragé à la seule vue du travail qu'on lui demande et rien n'abat les forces comme le découragement.
                  Ce travail partagé lui paraîtra moins lourd ; il sera aussi plus facile et moins dangereux. Mais outre l'effet incontestable de plusieurs forces réunies et combinées, il est encore un autre motif qui nous fait demander le travail en commun. Les colons doivent faire en Afrique une culture nouvelle pour eux et pour le succès de laquelle ils ont besoin d'un enseignement et d'une direction.
                  Si chaque colon travaillait son champ, le directeur quelle que fût son activité :
                  - ne pouvait suffire à sa tâche,
                  - donner l'instruction à chacun en particulier et
                  - exercer la surveillance nécessaire.

                  Le cultivateur livré à lui-même, suivait sa routine, ferait mal et le succès de l'entreprise serait compromis.
                  Le travail en commun rendra la surveillance plus facile et plus active.

                  De l'indivision des terres.
                  L'indivision est la conséquence obligée du travail en commun ; si l'on assignait aux colons, dès leur arrivée, les lots de terrains qui leur seront destinés, on s'exposerait à exciter :
                  - des rivalités,
                  - des haines,
                  - des jalousies car on ne pourrait empêcher de penser qu'on fait plus pour le champ de son voisin que pour le sien.

                  Tous ces inconvénients sont prévenus par le travail en commun et l'indivision des terres.

                  Travail obligatoire, moyen de sanction.
                  Nous savons que pour l'homme la liberté est un droit imprescriptible et sacré, et qu'il ne peut l'aliéner sans crime, mais nous pensons que ce droit n'est pas incompatible avec un engagement volontaire de se conformer à certaines règles tracées d'avance, pour arriver à un résultat connu et désiré.
                  S'il n'en était pas ainsi, il n'y aurait pas d'entreprise collective possible ; car toute entreprise suppose une direction, et toute direction implique obéissance de la part des dirigés. Une direction n'est efficace que lorsque une pénalité peut attendre le dirigé insoumis. Ces principes justifient notre troisième proposition.
                  Nous n'avons pas besoin d'insister car nous avons eu le soin de prescrire des règles qui garantiront le colon contre tout acte arbitraire.

X

                  On n'attend pas de nous une théorie complète sur la manière de cultiver les plantes industrielles ; il nous aura suffi d'insister sur l'importance que nous attachons au choix du directeur des groupes. Il doit parfaitement connaître la culture pour pouvoir l'enseigner. Nous dirons pourtant :
                  - que l'olivier et le mûrier viennent bien et partout en Afrique et qu'avec des soins le premier donne des fruits, et le second des feuilles après la troisième année de plantation,
                  - que l'oranger, le grenadier et le citronnier arrosés, croissent vite et donnent des fruits délicieux,
                  - de même que nos arbres à fruits et principalement le figuier, le cerisier et l'abricotier,
                  - enfin les arbres forestiers ou d'alignement tels acacias, vernis du Japon, chêne vert, etc., croissent et prospèrent promptement et facilement en Algérie.


                  Au moyen des irrigations et d'une culture bien faite :
                  - tous les oléagineux, la garance, le tabac et les prairies artificielles prospèrent en Afrique.

                  Enfin le coton et la canne à sucre peuvent être une source féconde de richesses pour ce pays.
                  Énoncer ces diverses productions et dire qu'un bon système d'arrosage et une intelligente direction les rendrons faciles et certaines, c'est dire en même temps la richesse et la fécondité du sol, le bien-être qui attend le colon en Afrique.
                  C'est aussi indiquer la culture à faire et les moyens de réussir. Si, d'un autre côté on songe aux conséquences de la culture on songe aux conséquences de la culture exclusive des céréales, si on n'a pas perdu de souvenirs les sacrifices qu'elle coûte à l'État, le peu de ressources qu'elle offre aux colons, on comprendra combien il importe de sortir vite de la voie funeste dans laquelle on est entré.
                  Et pourtant nous n'avons pas tout dit quand nous avons parlé des dangers de la culture exclusive des céréales.
                  Un mal plus grand que nous avons signalés pour en être la conséquence. Les colons, ne sachant à qui s'en prendre de leur misère, demandent avec instance la libre introduction en France des blés et des orges de l'Algérie, comme le seul remède à leurs maux.

                  Quelques personnes honorables mues par un sentiment d'intérêt pour notre colonie ont pensé que les céréales récoltées en Afrique pouvaient être admises en franchises dans les ports de la métropole sans nuire aux agriculteurs français, et que cette mesure aurait pour effet d'améliorer la position des colons.
                  Il y a là une double erreur que nous devons nous empresser de détruire car elle pourrait servir de prétexte à une mesure qui, si elle était prise, porterait le dernier coup à la propriété foncière de la métropole déjà si pauvre, si malheureuse.
                  Et d'abord nous disons que la libre introduction en France des blés de l'Algérie ne serait d'aucun profit pour le colon.
                  Jusqu'à présent l'administration a acheté presque toutes les céréales produites par les cultivateurs européens et elle a fait ses marchés à des prix aussi élevés que les prix établis sur les diverses places du midi de la France.
                  Les colons ont donc vendu leur récolte en Afrique avec autant d'avantage qu'ils auraient pu la vendre en France. En sont-ils pour cela moins pauvres ?

                  D'autre part, il est important d'ajouter que les céréales récoltées en Afrique, tant par les Européens que par les Arabes n'ont pas suffi jusqu'à présent à la consommation de la colonie, et que, tous les ans, plusieurs navires chargés de grains ou de farines viennent compléter l'approvisionnement de l'Algérie.
                  Le cours des farines est souvent plus élevé à Alger qu'à Marseille.
                  Les colons n'ont donc aucun intérêt à vendre leur blé en France. Mais si les colons ne doivent retire aucun profit de la mesure qu'ils sollicitent, l'effet n'en serait pas moins désastreux pour les cultivateurs français, car une baisse sensible sur le cours des blés en serait la conséquence immédiate. Les misères de nos campagnes sont connues ; on sait que le sol est écrasé sous le poids d'une dette hypothécaire énorme.
                  On sait que le propriétaire obéré ne peut se procurer de l'argent qu'à des conditions onéreuses, ruineuses même ; toutes améliorations sont donc impossibles dans l'état actuel des choses.

                  Ajoutons que le fractionnement indéfini de la propriété sera toujours un obstacle aux progrès de l'agriculture. Disons-le donc, car un intérêt immense se rattache à cette question.
                  Tant que des réformes utiles et désirées n'auront pas été faites, tant que l'agriculture sera soumise à l'usure et au fractionnement indéfini des terres, le tarif protecteur des céréales ne peut être modifié sans un grand danger pour la France.
                  Ainsi, que le colon de l'Algérie renonce à la culture exclusive des céréales ; malheureuse pour lui, cette culture est dangereuse pour la métropole.
                  Qu'il s'applique à produire les plantes industrielles pour lesquelles la France est tributaire de l'étranger ; il en retirera de grands avantages sans nuire aux intérêts de la mère patrie.
                  Mais les céréales exceptées, tous les produits de l'Algérie doivent être admis en franchise dans les ports de la métropole. Laisser subsister plus longtemps le tarif de prohibition, serait condamner l'Afrique à l'impuissance et préparer la ruine et l'abandon de cette riche et importante colonie. Nous pousserons notre démonstration jusqu'au bout.
                  Nous insistons parce que nous sommes convaincus que l'avenir de la colonisation est attaché à cette question.

                  Si l'on consulte les statistiques qui ont été dressées en Afrique, on voit que la moyenne du rendement des céréales est de huit quintaux métriques de blé par hectare ou de onze quintaux d'orge.
                  Nous pensons que dans les conditions où est placé le colon cette moyenne diminuera tous les ans, au lieu d'augmenter.
                  Huit quintaux métriques de blé à vingt francs représentent une valeur brute de cent soixante francs.
                  Onze quintaux d'orge, à quatorze francs, représentent une valeur brute de cent-cinquante-quatre francs.
                  Si de ces deux sommes on déduit :
                  - le prix de la main d'œuvre,
                  - les impôts,
                  - les semences,

                  Il reste à peine quarante ou cinquante francs au colon.

                  Tandis qu'un hectare de terre cultivée en tabac donnera un produit net de mille à douze cents francs.
                  - Que le sésame ou la garance produisent sept à huit cents francs par hectare,
                  - que le lin et le chanvre donneront de huit à neuf cents francs,
                  - que les prairies artificielles produisent jusqu'à douze cents francs par hectare car, arrosées elles peuvent être coupées huit à neuf fois par an.
                  - Que le coton et la canne à sucre donneront un produit net de plus de mille francs.
                  - Enfin que la cochenille qui s'élève en Afrique aussi bien qu'en aucun pays du monde, peut donner jusqu'à sept mille francs de revenu par hectare.


                  Si l'on ajoute à cela :
                  - l'élevage des vers à soie,
                  - l'amélioration et la propagation des espèces ovines, bovine et chevaline,
                  - la culture de l'olivier qui est l'arbre d'Afrique et dont la plantation est partout négligée, on comprendra les avantages du système que nous proposons.


                  Nous avons promis de prouver que le colon pourrait facilement rembourser à l'État les avances que celui-ci aura faîtes pour lui.
                  Ce que nous venons de dire suffira à faire cette preuve et à mettre sous les yeux du lecteur le bilan des revenus d'une famille de cultivateur après cinq ans d'installation en Afrique.
                  Dans notre projet, chaque famille aura en moyenne cinq hectares de terres, dont deux, au moins, arrosables.
                  Les prairies artificielles dont on se saurait trop encourager la culture permettront au colon de se livrer à l'élevage des bestiaux.
                  Les engrais ne manquant pas et la culture étant faite avec plus de soin et d'intelligence, on peut compter que le produit des céréales sera plus que doublé.

                  Supposons maintenant que le colon ait planté en tabac :
                  - Un demi hectare de terre arrosée, il aura un produit net au minimum de 400
                  - un demi hectare de la même terre en prairie artificielle, produit net 400 (cette culture vaudra une jachère)
                  - un quart d'hectare en lin, produit net 200
                  - un quart d'hectare en chanvre, produit net 200
                  - un demi hectare canne à sucre ou tabac, net 400
                  - trois hectares non arrosables et cultivés en céréales, nous supposons un demi hectare en jachère pour l'amélioration et nous porterons net du reste à 120 francs par hectare, soit 300
                  - Enfin on peut évaluer sans exagération le produit des arbres complantés sur la propriété à 100

                  Revenu net par colon par an 2.000

                  Dont il faudra déduire :
                  pour la rente à servir, 5 hectares à 19 frs,25 = 96,25
                  impositions à 10 frs l'hectare 50,00 = 146, 25
                                    Reste net : 1.853,75

                  Tel sera, quitte de tous frais de culture et autres, le net produit de cinq hectares de terre, lorsque les colons seront placés dans de bonnes conditions.
                  Et qu'on ne suppose pas que nos appréciations sont exagérées. Les statistiques officielles prouvent au contraire que nous sommes restés au-dessous des rendements déjà obtenus.
                  En présence de ces résultats certains, toute hésitation doit cesser : attendre encore serait s'exposer à des reproches mérités, car notre population ouvrière souffre et doit trouver en Afrique un adoucissement à ses maux.
                  Se tromper serait une faute impardonnable, car l'expérience est faite et la ligne de conduite à suivre parfaitement tracée.

                  Cette ligne de conduite peut être résumée ainsi :
                  - Secours suffisants,
                  - irrigation abondante,
                  - direction intelligente.


                  Avec cela, on obtiendra en Afrique des résultats meilleurs qu'il n'est possible de le prévoir ; sans cela, on n'aura rien que misère, ruine et maladie .Ici doit s'arrêter notre travail ; théoriquement nous ne saurions pousser plus loin une démonstration.
                  C'est maintenant à la pratique seule qu'il appartient de corroborer nos affirmations par le succès. En finissant nous résumerons ainsi la question de l'Algérie :
                  1° L'honneur et l'intérêt de la France imposent au gouvernement le devoir de conserver notre conquête.
                  Pour conserver l'Algérie il faut soixante mille hommes et quatre-vingt millions ; la France ne peut s'imposer pendant longtemps un si long sacrifice en homme et en argent. Si la France ne peut s'imposer ces sacrifices, où trouvera-t-elle les hommes et l'argent nécessaires ?
                  Nous répondrons : dans la colonisation et là seulement !
                  Donc il faut se hâter de coloniser. Mais pour coloniser un pays il faut y appeler des bras et des capitaux. Les ouvriers et les capitalistes ne vont que là et il y a sécurité entière.
                  Nous avons prouvé qu'il était facile de préserver les colons des influences du climat et des entreprises des Arabes. Mais pour appeler le capital il faut plus que la sécurité, il faut la confiance dans le succès.
                  Cette confiance, les premiers essais, qui tous ont été malheureux, l'ont détruite.
                  Pour qu'elle renaisse il faut tenter un nouvel essai et que cet essai réussisse : l'État seul peut l'entreprendre.
                  Nous croyons avoir indiqué les règles qui le garantissent. Si l'on nous oppose que nous demandons plus que l'État ne peut donner, nous répondrons, le décret de septembre à la main que nous devons moins à l'Assemblée constituante n'a promis, et que, quand même il n'en serait pas ainsi pour une cause si grande, si importante, la France ne pourrait s'arrêter devant un sacrifice d'argent.

XI

                  Depuis longtemps l'Algérie réclame un gouvernement civil et l'assimilation complète à la France : nous considérons cette demande comme prématurée ; pourtant nous pensons qu'il serait utile que l'administration civile acquit plus de force et d'extension.
                  Mais une assimilation complète à la France nous parait dangereuse.
                  Quand on réfléchit que toutes les nations de l'Europe ont fourni leur contingent de colons à l'Algérie, que la population ainsi composée d'élément hétérogènes n'a encore aucun lien d'affinité, on est forcé de convenir que les formes de l'administration civile seraient souvent ou insuffisantes ou impuissantes. Quand on sait, en outre, qu'il y a très peu de villes en Afrique où la population indigène ne soit en grande majorité, on doit se demander s'il serait prudent de faire jouir de toutes nos franchises municipales une population ignorante, à peine sortie du régime du sabre.
                  Des améliorations sont nécessaires, indispensables, mais elles doivent être lentes et progressives.

                  Ce qu'il faut à l'Algérie, c'est un code administratif libéral, clair et concis pour remplacer des milliers d'ordonnances contradictoires, dédale qui régit aujourd'hui l'Afrique et dans lequel l'administrateur le plus intelligent hésite et se perd quelquefois.
                  Ce qu'il faut surtout, c'est que les attributions soient nettement définies, que la ligne de démarcation des pouvoirs soit clairement indiquée ; beaucoup de rouages inutiles doivent être supprimés.
                  On évitera ainsi des conflits d'autorité dont le moindre inconvénient est de rendre les affaires interminables et qui seuls ont occasionné les plaintes bien souvent légitimes des colons et des administrateurs.
                  Il est encore un mal que nous devons signaler et sur lequel nous appelons toute l'attention du gouvernement.
                  Les meilleures terres sont devenues la propriété des spéculateurs avides et intéressés qui les laissent en friche, en attendant un moment favorable pour les vendre et réaliser des bénéfices considérables.
                  A part quelques rares et honorables exceptions, les grands propriétaires de l'Algérie ou n'ont encore rien fait ou se sont contenter de faire cultiver leurs terres par des Arabes.

                  L'État ne peut sans un condescendance coupable, tolérer plus longtemps un tel état de choses qui est ruineux pour l'Afrique.
                  Il fait contraindre les propriétaires à cultiver ou à délaisser. Le moyen :
                  - est facile, il est juste, équitable et utile.

                  Les industriels dont nous avons parlé, tiennent leurs terres, soit de l'État à titre de concession, soit des Maures auxquels ils les ont achetées à vil prix.
                  Pour les concessionnaires on peut et on doit, après un dernier avis et un délai suffisant, déposséder, sans exception, tous ceux qui n'auront pas rempli les conditions qui leur ont été imposées et auxquelles ils ont souscrit. Quant aux propriétaires à titre onéreux, on doit imposer leurs terres en friche comme si elles étaient cultivées.
                  C'est là pour le gouvernement un droit et un devoir ; il ne doit pas permettre que des terres riches et fertiles demeurent plus longtemps improductives.
                  Le propriétaire actuel ne pourra s'en prendre qu'à lui des conséquences de ces mesures, et si, par incurie ou avarice, il abandonne des terres qui lui rendraient au centuples les dépenses qu'il est obligé de faire pour les mettre en culture, d'autres viendront, plus intelligents et plus dévoués :
                  - pour cultiver à sa place,
                  - jouir des avantages qu'il n'aurait tenu qu'à lui de garder, et
                  - contribuer ainsi au bien-être de la France et de l'Algérie.


                  La conquête de l'Algérie s'est faite sous la monarchie, la République doit donner à ce pays tous les bienfaits de la civilisation.
                  Pour être moins brillante, cette œuvre n'est ni moins belle ni moins utile que la première.
                  Mettre fin à la guerre en amenant à nous par de sages et utiles améliorations la population indigène encore insoumise.
                  Trouver en Afrique les moyens de soulager les misères de nos classes ouvrières si malheureuses, si intéressantes.
                  Tel doit être le but de nos efforts.
                  Nous le répétons, c'est une œuvre à la fois grande et utile ; elle honorera le gouvernement qui en prendra l'initiative et saura la conduite à bonne fin.

Réflexions sur la colonisation en Algérie par P. Zaccone,
Capitaine au 7e de ligne, détaché aux affaires indigènes
(bureau arabe de Tébessa.)
Édition 1872.

LA BELLE ÉPOQUE
Envoyé par M. Hugues
QUAND LES HUMORISTES
AVAIENT DE L'HUMOUR SANS VULGARITÉ

         Pierre DAC, c’était quand même super !

         - Astronaute recherche femme lunatique.
         - Artificier cherche femme canon.
         - Sourd rencontrerait sourde pour trouver terrain d'entente.
         - Jeune homme désintéressé épouserait jeune fille laide même fortunée.
         - Abeille épouserait frelon. Lune de miel assurée.
         - Metteur en scène cherche nain pour rôle dans court métrage.
         - On recherche deux hommes de paille (1 grand,1 petit) pour tirage au sort.
         - Cannibale mélomane cherche travail dans opéra-bouffe.
         - Offre bonne place de gardien de vaches. Paiement par traites.
         - Inventeur produit amaigrissant cherche grossiste.
         - Cause fausse alerte, vend cercueil en ébène, jamais servi.
         - Chien à vendre : mange n'importe quoi. Adore les enfants.
         - A vendre robe de mariée portée une seule fois.. par erreur !!
         - Analphabète? Écrivez-nous dès aujourd'hui pour obtenir une brochure gratuite sur nos formations accélérées.
         - Homme sans histoires recherche éditeur pour devenir écrivain.
         - Souffrant d'insomnies, échangerait matelas de plumes contre sommeil de plomb
         - Échangerait voiture de sport endommagée contre chaise roulante en bon état.
En conclusion:
Quand on voit ce qu'on voit,
Quand on entend ce qu'on entend,
Quand on sait ce qu'on sait,
On a raison de penser ce qu'on pense!
Pierre DAC


Boufarik
Envoyé par M. Christian Graille

                 Lorsque par une belle matinée d'hiver, à Boufarik, sous les arbres en fleurs, on respire un air pur et embaumé qui vous met au cœur la joie d'être au monde, on se sent pris de vénération pour cette terre qui doit à des hécatombes de vies humaines sa gloire et sa fertilité.
                 Boufarik, qui eut la bonne fortune de compter parmi ses administrateurs Toussenel, l'auteur de l'esprit des bêtes, a eu la satisfaction de trouver dans l'armée française un officier qui, sous le pseudonyme de De Follon, s'est fait son historie, Boufarik a ses annales.
                 On peut lire à la bibliothèque de la rue de l'État-Major ce livre qui n'est qu'un recueil d'actions, de vies et de morts héroïques le tout raconté avec un style vif, imagé et qui a su marquer quelques pages au coin d'un véritable talent littéraire.
                 - Deux puits,
                 - une potence,
                 - un marabout sur un sol fangeux, labouré et pétri par les sabots de mulets et les pieds nus des Arabes, des flaques d'eau sur lesquelles quelques herbes sèches servaient de pont, et par là-dessus les rayons d'un soleil irrité, tel est l'aspect du marché de Boufarik en 1832.


                 En 1834, un Français, suivi de quatre Européens, ose s'y présenter. Rumeur des Arabes, fermentation de la foule en armes ; le baron De Vialar est obligé de se retirer. Mais voilà que l'autorité militaire établit près de là le camp d'Erlon ; les cantiniers deviennent spontanément colons, et Boufarik est fondée l'année suivante.
                 Que de luttes vont avoir à soutenir ces cantiniers devenus colons et miliciens, établis au milieu de ce terrain d'alluvion, obligés de le disputer, de concert avec les soldats du camp :
                 - contre les Hadjoutes de la plaine, sorte de cosaques vivant à cheval,
                 - toujours prêts au vol et au massacre du roumi,
                 - cavaliers redoutables,
                 - téméraires à découvert,
                 - rusés en embuscade et toujours cruels,
                 - tueurs de blessés et
                 - mettant leur orgueil à trancher une tête sur le pommeau de leur selle sans ralentir l'élan de leur monture !


                 Combien de colons pensaient qu'ils fauchaient la plaine, combien de soldats isolés se sont vus enlevés tout d'une pièce et emportés Dieu sait où !
                 Les annales de Boufarik conservent hélas ! à ce sujet, trop de noms et trop de faits. On compte les morts, on a peine à compter les disparus. Détail original. Un télescope était braqué en permanence sur cette vaste plaine de la Mitidja pour la fouiller, et il y avait tout un système de signaux pour avertir le colon de la situation plus ou moins périlleuse dans laquelle il se trouvait ; on hissait sur le camp des drapeaux de diverses couleurs :
                 - Le drapeau blanc voulait dire : Fauchez tranquillement, tout parait être calme.
                 - Le drapeau rouge signifiait : c'est peu sérieux, attention cependant !
                 - Le drapeau noir voulait dire autre chose : Ça va mal, la poudre va résonner.


                 Et le colon rentrait dans sa demeure, quittant la faux pour le fusil, et en ressortait milicien. Alors les épisodes ne sont pas rares.
                 - Un jour c'est une jeune jardinière enlevée dans sa propre maison par un Hadjoute ; elle est chargée et placée sur le pommeau de la selle du cavalier qui s'élance au galop quand le mari arrive à temps pour envoyer une balle dans le dos du ravisseur et reprendre possession de sa femme.
                 - Une autre fois c'est l'assassinat de vingt et un colons décapités par des Hadjoutes, à une faible distance de Boufarik,
                 - c'est l'incendie qui dévore la maison d'un colon.


                 On se fera une idée de l'inquiétude des habitants de Boufarik par cette lettre que les colons écrivirent au Gouverneur pour lui demander un mur d'enceinte :
                 " Toutes nos nuits, Monsieur le Gouverneur, sont troublées par des détonations d'armes à feu, ou par des incendies ou par les cris de désespoir de quelque victime. Tous les matins on se demande : dans la nuit dernière qui a-t-on volé, qui a-t-on assassiné ? "
                 En 1841 la situation devient intenable. Le général Bugeaud va à Boufarik :
                 " Si j'ai un conseil à vous donner, eh bien, mes braves, c'est celui de rentrer, de faire vos paquets et de filer sur Alger. Je vous préviens que je suis obligé de vous retirer votre garnison. "
                 Et cependant ces braves gens sont restés à Boufarik

                 En 1842, ils écrivent qu'on leur conserve leur garnison, que ce serait folie d'abandonner Boufarik, que le climat est loin d'être aussi malsain qu'on le dit :
                 " On prétend, disent-ils, que le juge de paix qui nous avait été donné est mort cet été dernier d'une maladie contractée à Boufarik Nous répondrons, en nous appuyant sur le témoignage de toutes les personnes qui ont vu arriver ce magistrat dans notre localité qu'il était déjà atteint de la maladie qui l'avait emporté. "
                 S'il fallait les croire Boufarik serait l'endroit le plus sain de la terre.
                 Ils terminent en disant qu'ils veulent montrer aux ennemis de la colonisation ce qu'on peut dans ce pays avec des bras et avec du cœur. Cependant Toussenel, qui fut commissaire civil à Boufarik en 1842, nous a laissé un tableau de la situation.

                 D'après lui Boufarik est la localité la plus mortelle de l'Algérie. Les visages des rares habitants échappés à la fièvre pernicieuse sont verts et bouffis la paroisse change trois fois de prêtre en un an, l'église est fermée.
                 Tout le personnel de l'Administration civile et militaire a dû être renouvelé ; il est mort, cette année, quatre-vingt-douze personnes de la maladie du climat, sur une population de trois cents habitants.
                 On le voit, Boufarik, avant d'être ce qu'il est, le village peut-être le plus sain, le plus agréable à habiter de l'Algérie, fut, selon la parole de ceux mêmes qui le fécondèrent au prix de leur vie, un cimetière.

                 Au cabaret on se faisait les honneurs en s'offrant un verre de quinine ; on travaillait, on se battait en méprisant la mort.
                 Il y aurait assez de tant d'obscurs dévouements pour que Boufarik pût être considéré comme une cité des plus glorieuses de l'Algérie. Mais la destinée, juste à son égard, a voulu qu'elle comptât dans son histoire la mort héroïque du sergent Blandan et de ses camarades , qui, au nombre de vingt, se firent écraser à Béni-Méred en résistant jusqu'à la mort à un goum de trois cents cavaliers arabes plutôt que de se rendre.
                 Après tant de morts héroïques, les unes obscures, les autres couvertes de gloire, Boufarik est devenue une terre verte et riante.
                 Sans doute l'économiste calculerait qu'elle a coûté bien cher, mais que ne vaut-elle pas par ses souvenirs et ses enseignements !

Alger ville d'hiver d'Henri Dumont.
Notes de voyage. Edition 1878.

Les livres de M. Fromentin
Envoyé par M. Christian Graille
Jugés par un journal algérien.

                 Lors de la publication du second des livres d'Eugène Fromentin, l'Algérie nouvelle qui paraissait à Alger depuis le 5 décembre 1858 sous la direction de Clément Duvernois et d'A. de Fonville fit paraître l'article suivant sous le titre :
                 " Variétés. Une année dans le Sahel par E. Fromentin ".
                 " Les livres de Monsieur Fromentin ne valent ni mépris, ni enthousiasme. Ils sont écrits à un point de vue parfaitement restreint, parfaitement délimité, qui ne peut satisfaire ni les Français qui n'ont jamais vu l'Algérie, ni les Algériens qui habitent depuis longtemps la colonie.
                 Il plaira tout au plus à ceux, parmi les peintres, qui ne cherchent que la couleur et le dessin, en un mot le point de vue pittoresque. On dirait que Monsieur Fromentin a marché en Algérie sans jamais regarder à ses pieds et qu'il n'a nuit et jour, considéré que : le ciel, les étoiles, le soleil et les horizons.

                 Étrange manie des artistes du pinceau qui consiste à ne voir dans la nature que les effets d'ombre et de lumière.
                 - La nature agissante,
                 - la nature pensante,
                 - la nature active et vraie,


                 Telle qu'elle est, telle que nous la voyons tous les jours, ils ne la voient pas, ils ne sauraient la voir. Pour eux la terre n'est pas une sphère, c'est une perspective.
                 Le livre de M. Fromentin, un été dans le Sahara est à mon avis meilleur que celui d'un été dans le Sahel et voici pourquoi :
                 Le Sahara est précisément ce que l'artiste cherche en Afrique, un pays d'horizons
                 - où le ciel compose la plus grande partie du paysage,
                 - où l'habitant est rare,
                 - où la nature est seule,
                 - où l'homme marche en rêvant c'est-à-dire sans penser et sans calculer.


                 Il a fait des descriptions qui sont vraies parce qu'il les a faites au point de vue de la palette et que la palette bien plus que le chiffre ou l'idée représente le désert, parce que le Sahara n'offre aux yeux qu'une succession de tons et que l'homme n'y est qu'un accident.
                 Une année dans le Sahel est un livre sans valeur parce que le Sahel n'est pas seulement pittoresque,

                 Mais dans les produits qu'elle donne, dans le résultat de ses cultures, dans le rapport que donnent entre eux les chiffres que l'économie y recueille.
                 Une année dans le Sahel est une série de paysages ou de tableaux de genre ; ce n'est pas la page d'histoire que l'on écrit sur la toile, à plus forte raison, ce n'est pas un livre.
                 Un peintre n'est pas apte à décrire l'Algérie, pas plus qu'un général.
                 L'un juge au point de vue du pittoresque, l'autre au point de vue de la stratégie ou de la remonte. Ils se trompent tous les deux parce que le public n'est ni peintre, ni Général.
                 L'écrivain qui doit donner de l'Algérie une description complète et vraie n'est pas encore venue. Il devra être à la fois :
                 - historien, économiste, agriculteur et soldat.

                 Avant tout il devra être algérien !
                 M. Fromentin a quitté son atelier de Paris pour voir les Arabes. Il a vu :
                 - des burnous, des haïks, des chéchias,
                 Le tout orné de bras, de jambes, de têtes plus ou moins bronzées. Il a vu :
                 - des cafés maures,
                 - des tentes de poils,
                 - des gourbis,
                 - des bordjs,
                 - les maisons blanches d'Alger,
                 - les maisons terreuses d'El-Aghouat.


                 Il n'a pas vu l'Algérie, il n'a pas même vu :
                 - qu'il y avait des colons,
                 - qu'il y avait deux qu'il y avait en jeu des intérêts et des besoins.

                 M. Fromentin écrit non seulement correctement mais même élégamment.
                 Il écrit du reste comme il peint, gentiment. Ses livres sont agréables à lire mais ils n'apprennent rien. J.M Junca. "
Revue africaine publiée par la société historique algérienne.
(1er et 2ème trimestre 1927)

La colonisation libre.
Envoyé par M. Christian Graille

           En parlant de la colonisation libre, nous avons cité récemment les régions de Bel-Abbès et d'Aïn Témouchent, comme un exemple de ce que pourrait faire l'initiative personnelle, sans les entraves que la loi du 26 juillet 1873, apportée à la constitution de la propriété individuelle.
           Voici, à ce sujet, ce que nous écrit un colon de Lamoricière, très compétant en la matière :
           " Bien d'autres localités seraient dans la situation florissante des centres que vous citez, si le Gouvernement général avait appliqué à leur profit, les articles 6, 8 et suivants de la loi du 26 juillet 1873.
           Sans crainte d'être démenti, on peut affirmer que si, pendant qu'on le faisait pour Bel-Abbès et Aïn Témouchent on avait nommé un commissaire enquêteur pour mettre à exécution l'article 6 dans la circonscription de Lamoricière la prospérité de ce dernier centre ne le cèderait en rien à celle des deux premiers.

           Mais les arrêtés du Gouvernement général ordonnant les opérations indiquées par l'article 6 n'ont paru que grâce aux influences qui les réclamaient. Pour notre département on a dès le début désigné les environs d'Oran, de Mostaganem, et les Sidi-Abdellys, point isolé, et enclavé au milieu des Ouled-Zeïr, des Ouled-Mimoun, des Benis-Ouazan et de Pont-de-l'Isser. On ne peut expliquer le choix de cette circonscription que par la présence sur son territoire de la concession Clinchant.
           Plus tard de nouveaux arrêtés ont désigné Bel-Abbès, Tlemcen, Hennaya, Aïn-Témouchent et tout le littoral. Le centre de Lamoricière a toujours été oublié ; et cependant s'il existe des terrains de nature à tenter les agriculteurs, ce sont bien ceux de cette circonscription.

           Des colons courageux ont essayé de construire une propriété. Tout leur avoir reposait sur le terrain acheté. Ils ont arrosé ce sol avec les sueurs d'un travail opiniâtre, et ils n'ont pas encore le titre français exigé par l'article 30 de cette loi du 26 juillet 1873. Après avoir dépensé cinquante mille francs sur une propriété, après y avoir enterré quatre ans de labeur, ils ne peuvent même pas, si le besoin les y force, contracter sur cette propriété un emprunt de mille francs.
           Il est de notoriété publique à Lamoricière qu'un grand nombre d'habitants de la métropole, ont, ou vont tenter de pratiquer des achats dans la circonscription de Lamoricière. Les premiers ont dû renoncer à leurs tentatives, les seconds devront y renoncer aussi, tant les difficultés sont grandes. Un achat peut-il en effet réussir actuellement à Lamoricière ! Non. Le sol ici est presque tout possédé à l'État indivis par divers membres d'une famille. Les droits de chaque intéressé figurent sur le même titre. Ces titres anciens ont été en partie égarés, ou se trouvent pour des motifs plus ou moins avouables, dans les mains de quelques agioteurs qui les détiennent injustement et qui cherchent à spolier les vrais propriétaires.

           Qu'est-il résulté de cet état de chose ? C'est que les copropriétaires ont demandé au cadi de nouveaux titres. Ces titres qui ont une apparence plus ou moins trompeuse ont été délivrés. De là, confusion, revendications, procès, demandes d'assistance juridiques devant le tribunal de Tlemcen. Tout est hypothétique ici même les terrains vendus par autorité de justice, même les réserves communales, même les réserves domaniales.
           Pour remédier à cet état de choses, le Gouvernement général doit immédiatement nommer un commissaire enquêteur pour la circonscription de Lamoricière qui compte 110.000 hectares (cent dix mille). L'intérêt général l'exige. En effet si la fertilité du sol, si l'abondance des sources permettent aux agriculteurs de faire prospérer notre circonscription sans les secours officiels ; le jour où la Chambre revenant sur son erreur votera les 50 millions, le Conseil général n'aura pas à s'occuper de nous, et notre part aidera la colonisation dans les contrées moins favorisées par la nature.

           Il se passera de longues années avant que le projet de loi préparé par le Gouvernement général en vue de modifier cette loi du 26 juillet 1873 soit adopté par le parlement. Le rejet des 50 millions indique le degré de sympathie que la majorité des députés accordent à tout ce qui concerne l'Algérie. Mais jusqu'à ce jour où cette loi tracassière sera modifiée, il importe que le Gouvernement général mette à exécution ce qu'elle contient de moins vicieux. Le Gouvernement général vient de prouver d'une façon trop manifeste son attachement à la colonie algérienne pour ne pas affirmer que lui signaler un acte indispensable à la prospérité générale, c'est en voir ordonner l'exécution immédiate.

(Petit Algérien)
La Tafna ( 16-01-1884)

PHOTO DE BÔNE
Envoyée par J.L. Ventura

BOULANGERIE KRAIM à BEAUSEJOUR


Elections municipales de 1900
Envoyé par M. Christian Graille
Le bilan de la municipalité sortante

           Dans une série d'articles successifs, parus dans le progrès de Sétif, nous avons établi le bilan de la municipalité sortante, et avons démontré, par des faits, ce qu'a été et ce qu'aurait dû être la gestion des intérêts communaux.
           Nous en reproduisons quelques-uns dans l'intérêt de nos lecteurs.

          

Provocations

           Sétifiens,
           - Ceux qui devraient faire oublier leur passé de dilapidation et de gaspillage des deniers communaux et d'administration néfaste,
           - ceux qui se prétendent le parti de l'ordre, et qui devraient prêcher l'union, pour le relèvement et la grandeur de notre cité,
           - ceux qui s'érigent, en toutes circonstances en protecteurs des intérêts généraux et qui…. Errare humanum est (l'erreur est humaine) … se trompent…
           - Ceux qui ne veulent point comprendre, qu'à un régime communal nouveau, il faut des hommes nouveaux,
           - ceux, enfin, qui, dans une polémique ou dans la défense qu'ils auront à présenter, remplacent les arguments par des menaces ou des essais d'intimidation, sont les premiers, pour donner le change à l'opinion publique, à provoquer leurs adversaires en déversant sur eux la calomnie et la diffamation.


           Nous protestons contre de tels agissements et nous estimons que de telles mœurs politiques seront désavouées par tous les électeurs.
           Nos amis se présenteront avec un programme :
           - d'apaisement, de concorde et d'union, basé sur une politique d'affaires.
           Il ne nous plaît pas, et certes la tâche nous serait facile, de suivre nos adversaires sur un autre terrain que celui de la discussion courtoise et profitable aux intérêts généraux et nous ne nous départirons pas de cette attitude, assurés que votre bon sens et votre jugement sain feront bonne et prompte justice de ces coups de pied de l'âne.
           Jyher.

Au drapeau

           Appel aux Sétifiens
           A la suite des provocations de la municipalité sortante, la campagne électorale est virtuellement ouverte.
           L'indignité morale de la plupart des politiciens que nous subissons a fait son temps. La terreur et la corruption, pour si étendues et si profondes qu'elles soient, doivent être démasquées et combattues.
           Certaine presse répand de haut sur le peuple un enseignement bien solennel et bien ambitieux. On y fait des leçons savantes sur les plus abstruses théories :
           - scientifiques, morales et politiques
           Et nous doutons que l'ouvrier qui lit puisse les comprendre ; nous craignons même qu'il n'en retienne simplement que des mots creux et une orgueilleuse disposition à l'orgueil intellectuel qui est, dans le fond, le plus antiphilosophique des sentiments.
           Nous devons prendre la résolution de ne jamais donner notre voix qu'à des hommes dont l'honorabilité soit, à notre connaissance, irréprochable, et dont la personne même nous inspire de l'estime.
           Gardez-vous d'accueillir avec une maligne avidité tous les mauvais bruits, ni de donner dans cette aveugle manie du soupçon qui est un des péchés de la démocratie et qui, d'ailleurs, n'a pas généralement pour effet de lui assurer des représentants plus probes.

           Il s'agit de n'être ni dupes, ni complaisants et de vous montrer aussi attentifs sur la qualité morale des gens à qui vous remettez les intérêts de la cité que sur la probité des personnes à qui vous confiez vos intérêts privés
           Nous combattrons journellement pour l'instruction du peuple et pour le rapprochement des classes sociales.
           Nous créerons des réunions où tous nos concitoyens :
           - de vie, de condition,
           - de professions différentes et qui, dans le train habituel des choses, n'ont guère l'occasion de se rencontrer,
           - pourront se voir, se connaître,
           - se communiquer ce qu'ils savent le mieux,
           - s'entretenir familièrement et des intérêts de la cité et des grands intérêts publics. Nous espérons que notre appel sera entendu et que tous les hommes de bonne volonté nous apporteront leur dévoué concours pour faciliter notre tâche.

           La rédaction

Liquidation

           Élément essentiel du progrès social, la liberté politique est acquise. L'idée de la justice sociale avait été perdue de vue au milieu de la lutte des partis, abominable en ses moyens, stérile en ses résultats.
           Mais les luttes des partis n'ont pas pris fin. Seulement capables de retarder le progrès social, elles sont impuissantes à en arrêter complètement la marche ; et c'est en songeant à ce progrès social qui est tout, que l'on demande des comptes à ceux qui doivent en rendre.
           Ne nous arrêtons pas aux apparences des choses. Il est de coutume chez nous que l'on donne une importance énorme à celles qui souvent n'en ont guère et que celles qui en ont se présentent à nous modestement.
           C'est à nous à savoir distinguer, dans l'ombre qui les entoure à leur origine, les idées vraiment utiles et qui entrent en scène sans fracas.
           - Vous blâmez, vous méprisez, vous exécrez ces repus, ces gavés de la fortune, ces crucifiés de la politique qui n'ont pour but que leurs intérêts privés et l'abaissement de l'honneur national et vous n'avez point le courage de renverser ces idoles aux pieds d'argile.

           Lorsqu'il s'agira de voter, soyez assurés de concourir à une œuvre patriotique et morale ; soyez certains que vous serez approuvés.
           Et le jour où vous aurez ce courage, la victoire viendra couronner vos efforts. Qu'on fasse donc courageusement le nécessaire, et le nécessaire c'est le devoir qui incombe à chaque citoyen de faire comprendre à cette édilité néfaste, pour la propagande d'abord et ensuite par le bulletin de vote, que telle qu'une maison ayant failli à ses engagements, on la déclare en liquidation.
           J. R

Sectaire

           De grands maux ont dû causer aux Égyptiens leurs fameuses douze plaies ; mais ils eurent, cependant, la bonne fortune de ne point connaître la treizième : c'est-à-dire le caciquisme (système de contrôle de la vie politique par les notables). Celle-là nous était réservée et nous en subissons les effets depuis de longues années.
           Oui la treizième plaie est la pierre tombale qui opprime les cités les plus florissantes ; c'est elle qui le lie enserrée dans un cercle de fer qu'elles ne peuvent rompre, qui les étouffe par moment et dont souvent elles meurent.
           Le cacique domine, il est roi ; et un troupeau servile, plus ou moins nombreux de flatteurs et de courtisans, forme sa cour. Et quelle cour !
           - Avec quel respect et quelle admiration on l'écoute !
           - avec quelle prudence on lui répond !
           - accompagne dans ses promenades,
           - on fait cercle dans ses réunions.


           Et dans ces réunions :
           - ni d'agriculture,
           - ni d'industrie,
           - ni de commerce,
           - ni d'art.
           - Pourquoi faire ?

           Déblatérer sur le prochain et dire des lieux communs sont des aliments suffisants à ces intellectuels. Il est facile de comprendre par ce simple exposé, combien le cacique doit s'intéresser au progrès moral et matériel de la cité qui est sous sa domination. Que deviendrait-il ?

           Que deviendrait sa force et son prestige s'il sortait ses concitoyens de l'ignorance et de la pauvreté dans laquelle ils vivent ?
           Le bon cacique, celui qui connaît ses obligations, pour rester au pouvoir, accepte les formes et les bénéfices du XXe siècle mais il vit comme au XVIIe : il est éminemment rétrograde par tempérament et par utilité personnelle. Et cette situation est une des causes pour lesquelles l'émancipation rurale est restée stationnaire.
           Le cacique a pour seule préoccupation de soutenir et augmenter son prestige par des moyens licites, si c'est possible, mais recourant à tous les autres moyens s'il rencontre de l'opposition. Rien ne le détourne ni ne l'arrête pour arriver à la victoire. Il se résout à la démarche humiliante et à la protection immorale :
           - menace des foudres de la loi,
           - emploie tous les expédients,
           - exécute les débiteurs gênés,
           - dépossède de malheureux colons de leurs terres et
           - fait révoquer d'honorables fonctionnaires.


           Que lui importe que l'air retentisse des cris de malédictions et d'imprécations amères ! Il ne croit pas aux sorcières de Macbeth !
           Ce qui lui importe, c'est les 4 ou 500 lances qui suivent sa bannière, forment une barrière infranchissable autour des urnes sacrées.
           - Toujours prêt au combat,
           - il contemple le champ de bataille,
           - apprécie la situation avec un œil pratique et, tel un habile général
           - quitte des forces d'un côté pour renforcer la ligne de combat et
           - met des réserves en arrière.


           Ses agents, pareils à de vigilantes sentinelles, croisent dans toutes les directions, apportant et recevant des ordres. Dans un coin on proteste contre de dures vérités ; dans un autre coin on échange des promesses en attendant d'échanger des coups.
           Nous doutons encore, que de nos jours, la force brutale puisse s'approprier de tout ce que la débilité ne peut défendre. En faisant le jeu du caciquisme, c'est propager :
           - l'ignorance, la servilité et la misère.

           Quelle honte et quelle humiliation ! J'ai dit plus haut que le cacique ne reculait devant aucun moyen pouvant lui assurer :
           - la victoire, la calomnie, la diffamation, la délation et l'injure.

           Le couvert de l'anonymat est son arme préférée. Aujourd'hui il s'en prend à M. X… qu'il croit être la base de la liste d'opposition. Une fois cette base creusée, minée, on espère bien que tout l'ensemble s'effondrera en ensevelissant sous ses ruines ce qui reste à Sétif de bons patriotes et de citoyens indépendants.
           Plus de comptes à rendre, plus d'adversaires, plus rien. Tel est l'idéal du cacique qui préside aux destinées de notre cité. Et il n'est pas démontré que si l'indifférence continue, leur but criminel ne soit complètement atteint car leur devise est : diviser pour régner.
           Le pâle et vague troupeau qui, ayant perdu toutes ses traditions et toute notion du moi, suit servilement son cacique, s'associe, sans le vouloir peut-être aux actes qui ne peuvent manquer de germer dans le cerveau de celui qui, dans un esprit de mesquine vengeance privée, et avec son obstination haineuse, allume les colères et attise les haines.
           Le cacique c'est celui qui a été et sera toujours un sectaire politique.
           Jyher

Saltimbanques !

           Notre confrère le Réveil, dans un de ses derniers articles a publié, avec la grâce, la finesse et l'esprit… qu'on lui connaît, sous le titre " Esprit nouveau ", un article sensationnel et destiné à faire croire à ses rares lecteurs que la comédie était finie. C'est parler de corde dans la maison d'un pendu, que de parler de comédie dans les colonnes… j'allais dire les tréteaux… du Réveil.
           Car enfin, Réveil de mon cœur tout le monde sait que dans la comédie…. Vous excellez à remplir le rôle de metteur en scène (attention typos ne mettez pas metteur en page), et si l'emploi du premier grand rôle est tenu dans votre troupe par le célèbre Calaminard, celui du pitre ne peut vous être contesté ; vous étiez fait l'un pour l'autre ; car il faut savoir reconnaître le talent, même chez les adversaires, et si Calaminard est inimitable pour la postiche, vous êtes, vous, sans pareil dans l'art de recevoir taloches et camouflets.
           Et puis, ce n'est là qu'une des farces de cet immense talent et c'est jeu d'enfant pour vous que d'entrer dans la coulisse et, en un clin d'œil, retournant votre veste, nous apparaître avec une figure nouvelle !

           Et ce n'est pas tout : avec quelle perspicacité et quelle désinvolture de plume vous nous présentez vos personnages !
           Votre modestie naturelle doit bien en souffrir, cher monsieur Berrekaïnou, car, les grâces naturelles de votre tête de Turc, laissent bien loin derrière elles celles que la nature vous a si généreusement octroyées ! Votre métier a de bien dures exigences : voir la paille dans l'œil du voisin lorsqu'on a le sien à la coque !
           Vous ne vous êtes probablement jamais regardé dans une glace et c'est ce qui excuse votre effacement. Quel désintéressement … une violette, quoi !
           Ce n'est pas fini ; et dut votre modestie naturelle en souffrir, je m'en voudrais de passer sous silence une des faces sous lesquelles, votre talent si varié a le don de faire prendre, à vos problématiques lecteurs, des vessies pour des lanternes : vous dites l'antisémitisme a vécu, c'est un peu parler de couleur en aveugle, ce que vous faites là, cher monsieur Berrekaïnou, et personne parmi votre demi-douzaine de lecteurs ne se fait d'illusion là-dessus.
           Tout le monde prêchant l'oubli et la concorde, vous auriez eu mauvaise grâce de prendre une belle occasion de vous taire !
           Enfin, avant de terminer, et comme gage de cette alliance, laissez ouvrir à autrui, tous les guichets, tout ce qu'ils voudront, mais vous … de grâce … n'ouvrez rien, vous feriez monter le prix des légumes, en vous relâchant de ce sage avis.
           Comédiante… non e finita …(comédien … ce n'est pas fini)
           J. R

Bilan

           Comme suite à notre promesse faite dans " liquidation ", nous allons établir, sous le titre qui précède, et ce dans une série d'articles successifs le bilan de la municipalité sortante :
           Et cela n'empêchera pas, à part les sentiments de dégoût qui montent parfois du cœur aux lèvres, que nous dénoncions les agissements de ce sectaire de la politique, au tribunal de l'opinion publique, suprême juge en matière de moralité et de probité.
           - Tous ces actes ont été des palinodies (changements complets d'opinion),
           - toutes ces promesses, des mensonges,
           - tous ces serments, des parjures.

           Il a pu ainsi donner à ses partisans des espérances et c'est pourquoi on lui a fait crédit.
           Il ne peut admettre la possibilité d'un échec ; il ne songe qu'à venger ses ennuis sans avouer ses torts, et surtout sans rendre compte de la gestion qui lui fut confiée.
           Nous lui avons offert vainement les moyens de se disculper.
           Et ces moyens honorables, pourquoi les repousse-t-il ? Il restera ce qu'il n'a jamais cessé d'être : un sectaire de la politique, décidé à se servir des procédés des plus honteux pour le sortir d'embarras.

           De mémoire de Sétifien, jamais l'hygiène publique n'avait tant laissé à désirer que depuis que nous possédons, à la tête de la municipalité, un praticien.
           Depuis longtemps, et nous pourrions dire qu'elle n'est pas encore éteinte, la variole, la hideuse variole qui, quand elle ne tue pas, défigure à jamais, sévit dans nos murs à l'état endémique.
           L'Administration militaire a pris des mesures de rigueur. Elle a consigné aux troupes des quartiers entiers. Elle est même allée plus loin en établissant un cordon sanitaire. C'est qu'elle est soucieuse de la santé de nos soldats et qu'elle savait les responsabilités qui pesaient sur elle !
           Que faisiez-vous monsieur le morticole (médecin plutôt contribuant à faire mourir les malades plutôt que de les guérir) pendant ce temps-là ?
           Vous, vous désintéressiez complètement de vos concitoyens ! Vous laissiez, par une coupable indifférence, se pratiquer parmi la population indigène la variolisation directe.
           Et vous ne pouvez exciper de votre ignorance, vous qui êtes, et nous le reconnaissons volontiers un praticien éclairé.
           Depuis Jenner (médecin et scientifique anglais) l'inoculation directe introduite par Marie Wortey a été abandonnée parce qu'elle est une cause de propagation du terrible fléau.
           Pourquoi n'avez-vous point obligé les indigènes, voire même les Européens à se faire vacciner par le médecin communal ? Il y a là, M. le Maire, plus qu'un manquement aux devoirs qui vous incombaient, plus qu'une faute aux mesures préventives, il y a là presque un crime …
           Vos électeurs, pères de famille, vous le rappelleront le 6 mai.
           Jyher

Réponse au maire Aubry

           En réponse aux vagues disculpations nous mettons au défit le maire Aubry de prouver qu'il a fait quoi que ce soit pour empêcher la variolisation à Sétif en 1899 et 1900.
           Quant à son mandat au Conseil Général, ses électeurs d'Aïn-Abessa lui diront, en temps opportun, ce qu'ils en pensent.
           Dixit

La compagnie genevoise

           S'il est une question qui passionne vivement l'opinion publique c'est certainement et sans contredit celle de l'expropriation ou de l'aliénation des terres de cette compagnie étrangère.
           Je ne puis, à mon grand regret, et faute de place, vous faire l'historique de cette palpitante question d'intérêt local, mais je puis du moins parler à votre connaissance qu'il vient de paraître chez M. Rocca, imprimeur à Sétif, une brochure de 200 pages environ qui expose et condense, avec documents à l'appui, tous les griefs reprochés à cette compagnie ainsi que toutes les démarches et tentatives faites pour arriver à la solution pratique de ce problème si nécessaire à l'essor de la colonisation dans la région sétifienne.

           Cette brochure très documentée, écrire en style simple et clair, est destinée à faire sortir de sa torpeur et de sa léthargie volontaire notre Haute Administration.
           Elle a pour auteurs deux modestes représentants du peuple : M. Poulhariès, délégué financier de notre ville et M. Dubar, Conseiller Général des colons de la région.
           Voilà comment s'occupent sans bruit et sans ostentation les véritables représentants de la colonisation.

           Toutes les municipalités qui se sont succédées jusqu'en 1892 ont eu à cœur de démolir cette nouvelle bastille qui a nom " Compagnie genevoise. "
           Tous les conseils municipaux ont émis des vœux. Tous les maires en passant par MM. Baylac et Lagarde n'ont point cessé leurs démarches pour faire aboutir cette question.
           Or ne vous semble-t-il pas d'actualité, électeurs sétifiens, de demander à la municipalité sortante ce qu'elle a fait dans cette question d'utilité publique ?
           - Quelle a été l'attitude du maire depuis huit ans vis-à-vis de cette compagnie étrangère ?
           - Quels vœux a-t-il présenté à son conseil pour appuyer ceux de ses prédécesseurs ? - Quels mémoires a-t-il présenté soit au Gouvernement, soit au Conseil Général de Constantine dont il fait partie ?
           - Quelles démarches a-t-il faites pour présenter la défense de nos intérêts immédiats ou futurs ?
           - Lors du passage du Préfet à Sétif lui a-t-il exposé que la compagnie n'a pas tenu ses engagements et qu'elle était un obstacle à la prospérité de notre ville et de plusieurs villages environnants ?
           - Monsieur le maire a-t-il fait quoi que ce soit pour nous délivrer de cette pieuvre ? - N'avez-vous point entendu les clameurs et les plaintes de ces misérables indigènes et des malheureux colons ?
           - Etes-vous ignorant des procédés de cette accapareuse pour enrichir ses actionnaires, tous étrangers ?
           - Ne savez-vous point qu'elle draine chaque année quatre cent mille francs de bon argent français, qu'elle envoie en Suisse ou ailleurs ?
           - Ne connaissez-vous point l'exode des colons d'El-Ouricia et autres villages ?
           - Ne savez-vous point qu'elle est la redevance exigée des tributaires de ces terres ?
           - Le 63 pour cent !
           - Et son accaparement des terres.

           Les laisserez-vous consommer sans protestation ? C'est ce que les électeurs vous demandent.
           J. R

Le collège

           De toutes les dépenses inscrites au budget communal, celle du collège est une, de celles, qui pèse le plus lourdement sur les finances.
           Chaque année 30.000 francs en chiffres ronds sont déboursés pour l'entretien et la bonne marche de cet établissement universitaire. En échange de tels sacrifices imposés aux contribuables on est en droit d'exiger d'autres résultats d'un établissement qui revient aussi cher.
           Hélas ! Les défauts d'organisation enrayent tout progrès, et malgré le dévouement et l'activité habituelle du corps enseignant, la clientèle, chiffre dérisoire, ne s'élève jamais à plus de 100 élèves. Quels sont ses défauts ?
           Et qui doit assumer la responsabilité devant les contribuables ? N'est-ce pas la municipalité actuelle !
           Et d'abord, l'établissement en lui-même, au point de vu matériel, n'a rien du confortable indispensable au personnel interne et aux élèves pensionnaires. Les bâtiments sont absolument insuffisants.

           Depuis longtemps on aurait dû édifier toutes les salles nécessaires aux différentes classes, aux appartements d'une partie du personnel ainsi qu'aux dortoirs et réfectoires des élèves. Mais c'est surtout l'enseignement donné qui présente de nombreuses lacunes :
           - L'enseignement moderne conduit bien les élèves jusqu'à la première partie du baccalauréat mais ne les prépare pas à la seconde.
           - L'enseignement classique est plus incomplet encore puisqu'on arrive jusqu'à la quatrième classique.

           Ce serait remédiable si dans les différentes classes toutes les matières prévues par les programmes étaient développées par les professeurs.
           Il n'en est rien malheureusement et on voit cette chose stupéfiante d'un collège français qui n'a plus de professeur titulaire de Français. Le cours de français, le plus important sans doute, est fait par des répétiteurs. Ces jeunes gens ont évidemment les aptitudes nécessaires, mais ils ne peuvent se consacrer entièrement à leurs classes.
           Ils poursuivent pour la plupart des études en dehors du collège. Et puis ils sont fréquemment appelés à changer de résidence.
           En consacrant 2.000 à 2.500 francs à cette chaire, notre collège pourrait avoir un professeur diplômé et spécialement chargé des cours de français.
           Cette insuffisance de personnel et de matériel entraîne et provoque même la désertion de notre établissement universitaire.
           En effet les parents soucieux de l'instruction de leurs enfants et disposant de quelques ressources, à l'exemple de notre richissime maire, préfèrent les envoyer dans les lycées où, du moins, ils sont assurés du plus complet bien-être et surtout où ils feront des études complètes.

           Si la municipalité avait su régler intelligemment la dépense de ces 30.000 fracs, ils eussent suffi largement. Il eut fallu d'abord édifier un établissement digne d'une ville qui se paie le luxe de fontaines monumentales de 40 à 50.000 francs ! Il eut fallu créer des chaires nouvelles de façon à faire faire des études complètes et dans l'enseignement classique et dans l'enseignement moderne.
           Cela fait, le nombre des élèves aurait certainement augmenté et les rétributions collégiales nouvelles auraient largement suffi à payer l'augmentation des dépenses. L'exemple des collèges de :
           - Bône, Philippeville, Tlemcen, etc. en sont la preuve.

           Dans ces différents collèges on prépare tous les baccalauréats et le budget de ces communes est moins atteint que le nôtre.
           Je viens de démontrer que notre établissement universitaire donnait des enseignements complets.
           Il appartient aux pères de famille et aux contribuables de reconnaître à qui en incombe la faute.
           Si notre collège est capable de donner des résultats sérieux, il ne faut point lui ménager l'appui financier de la commune.
           La question du collège méritait toute l'attention d'une municipalité soucieuse de l'avenir de nos enfants. Or, qu'a fait cette municipalité depuis huit ans ?
           Elle a dépensé deux cent quarante mille francs sans pouvoir former un seul bachelier complet !!!
           Pères de famille qui n'êtes pas dans l'opulence comme notre maire, vous vous souviendrez le 6 mai de cette façon d'agir.
           Jyher.

Le théâtre

           La stupéfaction qu'éprouve le touriste lorsqu'il découvre ce monument, se change en ahurissement quand, le visitant, il détaille ce chef-d'œuvre de conception grotesque et de malfaçons. Rien n'a été publié dans l'absurde :
           - terrains et emplacement non appropriés
           - style où se heurtent toutes les époques non définies,
           - ensemble lourd, étriqué,
           - sans élégance et
           - sans cachet.


           C'est à croire vraiment qu'il y a eu gageure pour arriver à réunir dans un seul édifice tant d'imperfections esthétiques ! Jusque-là, cependant, le mal ne serait pas irrémédiable si :
           - l'agencement intérieur,
           - la disposition des places,
           - l'acoustique,
           - et bien d'autres détails, n'avaient par coquetterie sans doute, suivis les errements de la construction, enfin que tout soit à l'unisson dans l'incohérence et l'incurie qui a présidé à l'édification de notre boîte à musique.


           Il est de toute équité de reconnaître que la commission des travaux, n'a été appelée à donner son avis qu'après les travaux terminés ! Et c'est alors qu'on s'est aperçu que tout n'était pas pour le mieux dans les meilleurs des théâtres !
           - On a allongé l'immeuble,
           - on a refait la terrasse qui s'était transformée en écumoire,
           - on a reconstruit les escaliers latéraux qui s'étaient séparés de l'œuvre-mère à la première pluie, etc., Voilà pour l'extérieur.


           Pour l'intérieur ça bien été une autre affaire : les spectateurs du Paradis risquaient de faire le plongeon dans la salle, et dare-dare, il a fallu mettre une main courante en fer.
           Ceux des loges n'étaient pas moins favorisés, et pour leur permettre de voir ou d'entendre, il a été indispensable d'exhausser le plancher de 15 centimètres, une bagatelle !
           Et pour les stalles de balcon, aussi bien partagées que les autres, on a été obligé d'élever les parapets, sans compter d'autres réfections de moindre importance.
           Et la note douloureuse, cher électeurs, contribuables, c'est que ce monument dispendieux ne peut servir qu'aux troupes de passages, le budget de la commune ne permettant pas d'allouer une subvention à une troupe théâtrale.

           L'opportunité de cette conception si grandiose n'est point démontrée non plus car il faut songer qu'on a mobilisé un capital important et que l'entretien seul de cet édifice va coûter à la commune une somme relativement élevée et cela sans profit !
           Cette construction a englouti plus de cent soixante-dix mille francs ….. Et ce n'est pas fini !
           Nous estimons, et tous les gens sensés penseront comme nous, que cette somme eût été bien mieux employée en des travaux de premières urgences, tels que :
           - la constructions des égouts au quartier de la gare,
           - la construction de conduites d'eau à la porte de Biskra et au Mesloug et
           - une infinité d'autres travaux plus ou moins nécessaires.


           La municipalité sortante en a jugé autrement.
           Elle fait comparer notre ville à une de ces coquettes qui se montrerait dans une toilette prétentieuses et dont les dessous seraient … maculés ou absents.
           Avec de pareils administrateurs, contribuables, gare à vos poches !
           Jyher

Les égouts

           Lorsqu'un voyageur débarque dans une ville, la première question qu'il vous pose est celle-ci : " L'état sanitaire est-il satisfaisant ? " Et si la réponse obtenue est affirmative, ce nouveau débarqué est tout disposé en faveur de la cité. Dans le cas contraire tout disparaît devant l'intérêt de sa santé ; rien ne saurait les retenir : monuments, curiosités, attractions, climat, commerce industrie etc., n'ont plus d'attraits et ne peuvent le fixer.

           C'est malheureusement ce qui se passe journellement à Sétif depuis quelques années, au grand préjudice des intérêts particuliers et généraux.
           Il est des rues que l'on ose affronter, et où suivant une expression vulgaire les mouches tombent à quinze pas.
           Allez donc après une journée de labeurs vous promener du côté de ce coquet faubourg de la gare, et vous m'en direz des nouvelles !
           L'air est irrespirable tellement il est chargé d'émanations pestilentielles, la puanteur est partout, à gauche, à droite, en haut et en bas.
           A cela rien d'étonnant si vous en demandez la raison aux habitants : " nous n'avons pas d'égouts " vous répondent-ils.
           Et comme vous paraissez surpris, ces braves gens vous ajoutent non sans une pointe d'ironie : " que voulez-vous monsieur il faut savoir modérer ses besoins, on nous a promis une fontaine monumentale pour faire pendant à celle de la ville. "
           Et vous pensez, non sans raison, qu'en fait de besoins…. Les égouts passent avant les fontaines.

           Ah ! Qu'on est fier d'être Français quand on regarde la colonne.
           Et que l'on est fier d'être Sétifien quand on regarde l'œuvre de la municipalité sortante.
           - Depuis huit ans quelques égouts existants n'ont point été nettoyés !
           - Depuis huit ans ces rares égouts n'ont pas reçu une goutte d'eau et aucune chasse n'a été pratiquée.
           - Depuis huit ans le quartier de la gare, si riant, si bien habité, attend sa canalisation. - Depuis huit ans certaines rues, pour ne pas dire certains quartiers, ne peuvent être traversées à cause des odeurs nauséabondes qui se dégagent des égouts mal entretenus.


           Depuis huit ans notre ville qui était réputée pour son état sanitaire exceptionnel est devenue un foyer de maladies épidémiques :
           Variole noire, typhus, fièvre typhoïde, etc., etc.
           Depuis huit ans notre édilité n'a rien fait pour enrayer ou prévenir ces maux. - Depuis huit ans, toutes les énergies, toutes les volontés, toutes les activités ont abdiqué toute initiative, tout contrôle, toute critique entre les mains du Roi-morticole.
           - Depuis huit ans, pas une voix ne s'est élevée pour dire à ce tyranneau ce que tout le monde pense tout bas.


           Cher concitoyens, relevez la tête, nous sommes :
           - pour le faible contre le fort,
           - pour l'oppressé contre l'oppresseur,
           - l'affamé contre l'affameur,
           - pour les miséreux contre les mauvais riches,
           - pour l'expression sincère de l'opinion contre la pression et la contrainte matérielle. Électeurs, vous nous direz le 6 mai, si vous pensez comme nous.

           Jyher

Fontaine monumentale

           Peuple ! Réjouis-toi voici le panem circenses (pain et jeux de cirque) de tes édiles !
           Voilà l'œuvre monumentale qui transmettra à la postérité le nom de notre proconsul et le rendre impérissable. Il ne manquait à sa gloire que les honneurs du Triomphe, et il les obtient par le marbre.
           Passants, découvrez-vous … Vous êtes devant son chef-d'œuvre.
           - D'aucuns disent que notre édite a voulu perpétuer dans cette vénus Astarté,
           - d'un genre particulier, les charmes opulents de notre cité,
           - d'autres plus simples pensent que ce sont les traits de la Samaritaine à la fontaine du Bou-Tahaleb,
           - enfin, quelques mauvais plaisants, il s'en glisse partout, affirment que c'est simplement une allégorie discrète aux finances de la ville :

           Une des filles de Danaüs (prince égyptien dont les filles les Danaïdes, assassinèrent leurs époux la première nuit de leurs noces. Jupiter, pour les punir les condamna à remplir éternellement un tonneau percé.) cherchant à remplir les caisses en guise de tonneau.

           Ne vous plaignez pas contribuables et n'allez pas penser que ce monument n'avait pas un caractère de première urgence et d'utilité publique !
           Ne prêtez pas une attention favorable à ceux qui pourraient vous dire que ce monument est construit de vos deniers.
           N'allez pas croire surtout, les mauvais sont légions, que ce monument a été un gouffre pour les finances municipales ! Le génie et la gloire sont inestimables. Et puis vous savez tous que c'est un cadeau.

           Tout au plus si votre édile a dépensé 30.000 francs pour monter le cadeau sur son socle. Vous voyez, bonnes gens, c'est pour rien ! On vous insinuera, peut-être, que cet argent aurait été mieux employé en construction d'égouts ou en adduction d'eau au Mesloug… ou autres balivernes !
           Ne répondez pas !

           Si les habitants du quartier de la gare n'ont pas d'égouts, qu'ils prennent patience, et qu'ils attendent que notre proconsul fasse racheter les terres de la Compagnie Quant aux habitants du Mesloug, nous ne leur avons jamais défendu, que je sache, de venir boire à Sétif ! Au besoin ils peuvent remplir leurs bidons à notre chère fontaine.
           Que leur faut-il de plus !
           Vous voyez, amis lecteurs, combien il est facile de rétorquer les arguments des adversaires de notre municipalité ! Il y a vraiment des gens intraitables et qui viennent encore vous parler de gaspillage et de dilapidation !
           C'est à vous dégoûter, vraiment.
           Jyher.

Place de l'église

           La garde muette qui règne aux approches de notre église ne peut pousser le fameux : " Sentinelles ! Prenez garde à vous ; " mais nous demandons sa suppression quand même car si elle ne nous empêche pas de dormir elle ne peut non plus nous être agréable à la vue ou à l'odorat.

           Je sais bien qu'il y a encore, à Sétif, une demi-douzaine de braves gens arriérés qui croient à la religion et se figurent qu'on ne peut se passer de morale.
           Je sais encore, que ces honnêtes gens, quelque peu naïfs, se demandent pourquoi le respect dû aux monuments publics n'est point applicable à l'Église catholique Et leur ignorance est si grande qu'il ne leur vient point à l'idée de regarder ce qui se passe autour des autres temples et de comparer. Et leur ignorance engendre l'indifférence, et l'indifférence, la torpeur.
           Voilà pourquoi il nous est impossible, le mot n'est pas trop fort, de transiter par la place de l'Église : c'est le réceptacle de toutes les immondices, c'est le dépotoir de toutes les ordures ; c'est également, au mépris des règlements régissant la voirie, le lieu de dépôt de tous les entrepreneurs de constructions de France et de Navarre, et ce depuis des années. C'est cependant l'unique place publique qui, par :
           - son emplacement,
           - ses dimensions et
           - sa situation, devrait attirer l'attention et les soins de notre édilité.


           Parlerons-nous de l'édifice, en tant que bâtiment communal ? C'est ce que nous allons effleurer, dans l'intérêt de nos finances. Combien de temps M. le Maire croit-il que le clocher tienne debout, si on ne s'empresse de le consolider ?
           - M. le Maire ne va jamais à l'église, sans doute, sans quoi il eut songé qu'un jour ou l'autre il pourrait être victime de sa négligence.
           - M. le Maire qui n'a jamais construit et ne construira probablement jamais, ne peut se rendre compte de l'état de délabrement et de vétusté dans lequel se trouve notre Église, et nous ne pouvons, à ce point de vue, rien lui reprocher.


           Pauvreté n'est pas vice, n'est-ce pas M. le Maire et nous comprenons facilement que vous ne puissiez devenir propriétaire du jour au lendemain.
           Il y a même de méchantes langues, vous savez qu'il y en a encore quelques-unes à Sétif, qui insinuent que vous n'avez jamais bâti c'est pour être prêt à déménager plus tôt après le 6 mai.
           Moi, vous le savez, je ne prête nulle attention à ces malveillants, car, enfin, on n'est pas forcé d'être propriétaire dans le pays qu'on administre, n'est-ce pas ?
           Et puis il y a une raison majeure : ça vous attache à un pays les immeubles, et dame, quand il n'y a pas réciprocité, ça dégoûte ! Pas vrai !
           Aussi j'espère bien que vous n'allez pas vous émouvoir pour si peu, et que vous laisserez le soin à la nouvelle municipalité de faire enlever la marchandise que vous aurait laissée. Ce serait spirituel et de goût… raffiné.
           Jyher

Rendez l'écharpe !

           Ne pouvant réfuter nos arguments, encore moins contester nos documents le Morticole en est réduit presque aux injures.
           Il faut dire qu'il y a là aussi une question d'éducation, et qu'il n'est pas rare de voir la polémique dégénérer avec des écrivains improvisés qui n'ont pas été élevés précisément en vue de la littérature… au contraire.
           Nous n'en voulons pour preuve que la réponse pitoyable faite à nos articles concernant la " compagnie Genevoise " et " le collège " où notre contradicteur affolé fait couler à pleins bords les flots des gros mots et les insinuations calomnieuses.
           Les mêmes calomnies, d'ailleurs, qu'on faisait lancer jadis et qu'on édite aujourd'hui sans plus de vergogne pour son propre compte, nous donnant ainsi s'il en était besoin, la preuve de leur origine.
           On n'est jamais trahi que par les siens.
           - Nous n'aurons pas le mauvais goût de mettre en cause, celui ou ceux à quelque entourage qu'ils appartiennent, qui coupent ou ont coupé les années en deux, ou ont fait suer le burnous, comme le dit si bien et comme le fait si peu ce bel esprit.
           - Nous craindrions d'être au-dessous de la vérité.
           - Nous n'évoquerons pas les morts pour leur reprocher leur mauvaise conduite en ce bas-monde ou bien demander s'ils n'ont pas quelque engagement en souffrance. Nous craindrions d'être trop funèbres.
           - Nous ne parlerons pas non plus des services exceptionnels, d'escamotage de mine ou d'ingratitude humaine.
           - Nous craindrions de nous montrer naïfs.
           - Mais nous dirons simplement et nous prouverons par nos documents et nos arguments que la municipalité sortante n'a pas tenu ses engagements ou ses promesses.
           - Nous répèterons à satiété que son administration néfaste n'a plus notre confiance. - Nous lui démontrerons et lui démontrons chaque jour que la gestion des intérêts communaux n'a pas été celle qu'elle aurait dû être.
           - Nous empêcherons par nos écrits et par notre parole, à nos adversaires de donner le change à l'opinion publique.
           - Nous clouerons au pilori et ses actes et ses procédés.
           - Nous enlèverons petit à petit l'épais bandeau que vous essayez vainement de maintenir sur les yeux des électeurs.
           - Nous parlerons si haut et si fort, que nos raisons seront entendues et comprises de tous. Incapables ou inconscients, retirez-vous !
           - Place aux vaillants !
           - M le Maire, rendez l'écharpe.

           Jyher

Ne fuyez pas !

           Lorsque dans son précédent article j'excusais l'édite de fuir la discussion courtoise pour se vautrer, selon son habitude, dans les attaques personnelles, je ne pensais pas que les évènements viendraient me donner sitôt raison !
           Il ne tourne même plus le dos aux débats … il les fuit… de toute la vitesse de ses grandes guibolles.
           Électeurs, pères de famille, lisez sa réponse parue dans le Réveil du 16 courant : vous aussi colons et ouvriers, lisez cette diatribe et vous serez fixés les uns et les autres sur l'intérêt que professe pour l'instruction et l'avenir de vos enfants, le Roi morticole. A une critique raisonnée de sa gestion, il reprend par un refrain du café-concert.

           A une question d'aussi grande actualité que celle de la " compagnie genevoise " il ne trouve à répondre que c'est moins intéressant que la migration des oiseaux et le frai des grenouilles.
           Électeurs sétifiens, voilà comment votre maire se moque de vous. On ne peut avouer plus piteusement son impuissance ou son parti pris. Nous ne relèverons pas les allusions, plutôt bêtes que méchantes, faites à la famille Desaix.
           Nous allons simplement mettre en parallèle l'ouvrage du maire et celui de l'honorable délégué financier, M. Poulhariès, qu'on essaye de tourner en ridicule après avoir cherché à traîner son nom dans la boue :
           - Quels vœux le maire a-t-il présenté pour appuyer ceux de ses prédécesseurs ? Aucuns.
           - Quelles mémoires a-t-il présenté au soit au Gouvernement, soit au Conseil Général de Constantine dont il fait partie ? Aucuns !
           - Quelles démarches a-t-il faites pour présenter la défense de nos intérêts immédiats ou futurs ? Aucunes !
           - Lors du passage du Préfet à Sétif, lui a-t-il exposé que la Compagnie Genevoise n'a pas tenu ses engagements et qu'elle était un obstacle à la prospérité de notre ville et de plusieurs villages environnants ? Non !
           - Monsieur le maire a-t-il fait quoi que ce soit pour nous délivrer de cette pieuvre ? Rien !
           - Le maire a-t-il entendu les clameurs et les plaintes de ces misérables indigènes et des malheureux colons ? Non !
           - Le maire est-il ignorant des procédés de cette accapareuse pour enrichir ses actionnaires, tous étrangers ? Non !
           - Le maire sait-il qu'elle draine chaque année quatre cent mille francs de bon argent français, qu'elle envoie en Suisse ou ailleurs ? Ce n'est pas intéressant !
           - Et son accaparement des terres ? Ce n'est pas intéressant !

           Voilà le bilan du maire, il est vite établi : Rien ! Rien !

           D'un autre côté, nous allons exposer ce que M. Poulhariès, qui n'est ni maire, ni Conseiller Général de Sétif ; et cela :
           - sans bruit,
           - sans fracas,
           - sans ostentation, bien que l'on lui reprochera, peut-être, chez nos adversaires car il n'était pas tenu de le faire. Il n'a eût qu'un seul but : servir les intérêts de sa région et ceux de ses concitoyens.


           Électeurs lisez et jugez :
           Gouvernement Général de l'Algérie, République Française Délégations financières algériennes

Mascara le 16 mars 1900

           Mon cher collègue,
           C'est avec le plus vif intérêt que j'ai pris connaissance de la brochure dont Monsieur le Conseiller Général Dubar, et vous, êtes les auteurs.
           La situation faite à Sétif est effectivement intolérable. Je ne m'étonne point qu'elle ait autant duré.
           Algérie les choses paradoxales et anti économiques ont le privilège d'avoir la vie longue. Il faut que votre pauvre pays ait l'âme chevillée au corps pour résister à toutes les aberrations et à tous les abus qu'on y a semés !
           N'hésitez pas à soumettre votre travail à la délégation financière. Vos rares facultés de travail, votre compétence et votre aménité ont fait que, dans cette assemblée, vous êtes unanimement écouté et aimé.
           La cause que vous soutenez est donc gagnée d'avance.
           Veuillez agréer …
           Le Président de la délégation financière.
           Signé E. Vinci.


           Et elle n'est pas unique cette attestation donnée au labeur et à l'estime dont jouit M. Poulhariès dans une ses plus importantes assemblées algériennes.
           Nous le pouvons toutes les reproduire mais nous ne pouvons non plus passer sous silence la suivante.

Département de Constantine. Conseil Général.
Ferme Meurs (près Gastu)le 25 mars 1900.

           Mon cher ami,
           Je vous remercie infiniment de l'envoi que vous avez bien voulu le faire de votre brochure sur la Compagnie Genevoise. C'est un document intéressant et qui restera dans ma bibliothèque algérienne.
           Vous avez bien fait de poser la question car elle sera toute prête pour le jour où, devenus maîtres de notre budget, nous pourrons faire de la besogne utile et colonisatrice.
           C'est vraisemblablement sur les fonds de la caisse de colonisation à créer qu'on prendra le nécessaire pour rendre la vie aux environs de Sétif et réaliser les expropriations indispensables.
           Cordiales etc.
           Signé Rouyer

           Maintenant, Électeurs concluez :
           D'un côté : un maire hostile aux projets de rachats et partout nuisibles aux intérêts :
           - des colons,
           - des commerçants,
           - des industriels,
           - des ouvriers,
           - de l'avenir de la cité.


           De l'autre côté : un de nos concitoyens, véritable philanthrope qui n'a ménagé :
           - ni sa peine,
           - ni son argent,
           - ni son repos ; qui a été abreuvé d'outrages et d'insinuations calomnieuses et qui ne sollicite aujourd'hui que le droit de continuer à vous bien servir.


           Sétifiens, quand l'heure de la défense de vos intérêts sonnera, vous vous rappellerez le nom de Poulhariès :
           - C'est celui d'un de vos plus ardents défenseurs,
           - c'est celui d'un honnête homme,
           - c'est aussi celui d'un indépendant.

           Électeurs, souvenez-vous en le 6 mai !
           Jyher

Les communaux

           Louis XIV disait : " L'État, c'est moi ".
           Notre Maire morticole, parodiant cette apostrophe, érige la commune en royauté et distribue suivant son bon plaisir le fief communal entre ses bons et féaux sujets. En voulez-vous quelques exemples !
           En voici entre mille :
           Les colons qui ont des lots ruraux dans le périmètre du village d'El-Hachéchia, aujourd'hui presque abandonné nous assurent qu'ils ne peuvent faire pacager leurs troupeaux sur leur communal.
           Sa majesté le Roi morticole en a disposé.
           N'allez pas croire que je plaisante car 24 hectares de ce communal ont été loués de gré à gré à un indigène, (saluez manants c'est la volonté du Roi) et le restant a été envahi par la suite du locataire : et comme ils auraient eu tort de se gêner, ils ont construit et ont labouré, sans que l'autorité royale ait songé à les troubler dans leur jouissance du bien d'autrui.

           Mais, me direz-vous, et les droits des colons ? Car c'est comme " le collège ", " la compagnie genevoise " ou " les égouts ", ce n'est pas intéressant.
           Faire respecter le bon plaisir du Roi c'est l'unique occupation des gardes-champêtres et pensez-vous qu'ils aient le temps d'empêcher de tels empiétements et de faire respecter les droits des contribuables ! La volonté du Roi n'a point de limites ; elle est comme les communaux.
           L'architecte a d'autres occupations que de s'employer à délimiter ou à borner, pour empêcher ou réprimer les usurpations !
           Et croyez-vous que les sujets d'El-Hachéchia soient réellement en droit de se plaindre lorsque ceux d'El-Hassi et d'Aïn-Trick ne disent rien alors qu'ils sont logés à la même enseigne.
           C'est que ces derniers sont tous fiers d'avoir pour voisine la très haute et très noble dame compagnie genevoise. Ils sont taillables et corvéables à merci ces marauds (coquins) et ils le savent bien. Aussi ne protestent-ils pas.
           Lorsque la très puissante dame les veut honorer en louant pour son seul profit les terrains communaux.
           D'aucuns diront bien que c'est la négation de tout droit administratif que c'est même le désordre érigé à la hauteur d'une institution : c'est bien la canaille car, enfin, où serait le privilège du Roi s'il ne pouvait agir à sa guise et suivant son bon plaisir ! Comment pourrait-il récompenser ses vassaux qui ne tarissent pas d'éloges sur son administration modèle !
           Vous leur fîtes, Seigneur, en les croquant … Beaucoup d'honneur …

           Et vous maroufles (rustres) qui osez critiquer sa majesté, craignez que la colère royale ne vous envoie, quelque jour, tenir compagnie aux mallotiers () et aux tire-laine (voleurs) qui servent sur les galères du Roi ou dans les mines.
           Jyher.

           P S : A l'appui de notre thèse nous dirons :
           - 1° que la compagnie s'est érigée en syndicats libres pour louer à son profit les communaux au détriment des habitants
           - 2° que les communaux appartiennent aux habitants des sections et non à la Compagnie,
           - 3° que la commune de Coligny, malgré opposition, a été autorisée à mettre en location ses communaux qui étaient loués par la Compagnie à son seul profit.

La sécurité

           La sécurité La sécurité, vous l'aurez … disait Albert Grévy, Gouverneur Général de l'Algérie en s'adressant aux colons.
           Et notre maire qui est né deux fois malin, puisqu'il est né Français et en Franc-Comtois par-dessus le marché n'a pas voulu être en reste de promesse avec notre ancien Gouverneur.
           Décemment il ne pouvait faire mieux ; il s'est borné à l'imiter et si je ne craignais pas d'être taxé de courtisan, j'ajouterai que l'élève a dépassé le maître dans l'art de poser des lapins.
           Messieurs les malandrins, voient avec terreur arriver la fin d'un si beau règne !
           Aussi ils en profitent et mettent les bouchées doubles.

           C'est vous dire quelle confiance limitée ils ont dans l'échéance du 6 mai.
           Les colons se plaignent journellement :
           - que leurs animaux sont enlevés,
           - que les récoltes sur pied ou en filets sont volées,
           - que des brèches sont faîtes dans les murs pour les dévaliser et au besoin les assassiner
           - les arbres et les plantations de toutes sortes sont mutilés et coupés.
           - Nulle part l'insécurité n'est plus grande que dans les fermes de notre région.
           - Sur les marchés, dans les fondouks, des vols de toutes natures sont commis par des indigènes du pays sur des indigènes étrangers, discréditant ainsi notre marché au détriment de notre commerce.


           Personne n'est à l'abri des exploits de ces escarpes. Il y a quelques jours à peine ils signalaient leur présence au quartier de la gare en dévalisant le logement d'un commandant. Le lendemain c'est en plein jour et en pleine ville qu'ils opéraient.
           Qu'a-t-on fait pour atténuer ou réprimer les hauts faits de ces bandits ?
           N'aurait-on pas pu mettre en demeure l'adjoint indigènes et les daïras (subdivisions d'une région), si non de dénoncer du moins de rechercher les El Feidh Ben Ysslek

Conclusion

           Les démocrates constatent en le déplorant, qu'on a beaucoup trop baissé la toise des mérites. Ceux qui se piquent d'impartialité reconnaissent qu'on ne saurait sans injustice en rendre les électeurs responsables si les talents deviennent de plus en plus rares.
           Les favorisés, les sectaires de la politique bénéficient seuls de plus l'insuffisance des autres et ne sont que relativement grands parmi les petits.
           Une des étapes de cette marche lamentable vers la disparition des forces vives du pays c'est l'abandon de sa propre volonté au service d'un homme, je veux dire d'un sectaire de la politique.
           La politique de nos adversaires peut se résumer dans cette simple formule, l'exploitation du pouvoir par un parti et dans le fond par une société occulte.
           - Quand tous les bons citoyens voteront,
           - quand ils s'entendront pour voter,
           - quand les frères-maçons et les Dreyfusards ne seront plus seuls à savoir marcher d'accord,
           - quand l'électeur ne mendiera plus de faveurs chez l'édile qui mendie lui-même les suffrages de l'électeur,

           Cela ira mieux et le pays sera sauvé.

           Tout semble présager une ère nouvelle. Nous voyons un peu partout les braves gens s'émouvoir, sortir de leur apathie et nous assistons aux progrès quotidiens de l'opposition.
           Une secte factieuse n'est que funeste en face de concitoyens affamés d'apaisement et d'union.
           Nous pouvons dire à la municipalité sortante : Vous, vous êtes établie dans la cité comme en pays conquis, non pour travailler au bonheur du peuple et au bien-être de ses concitoyens mais pour satisfaire vos ambitions vaniteuses.
           Entre vous et nous rien de commun.

           Quant au maire morticole, nous lui rappelons qu'il n'a point répondu aux questions réitérées de ses électeurs lui demandant de s'expliquer sur sa gestion.
           Il s'est retranché derrière une polémique de personnalités au lieu de rendre compte du mandat qu'on lui avait confié. Il est vrai qu'il n'est point sur un lit de rose Monsieur le Maire.
           Lui dont la subtilité de calculateur est si amusante puisqu'il ne craignait pas de contradiction quand il affirmait tout dernièrement au Préfet, qu'il y avait dans le budget de la commune un excédent de 130.000 francs. Le trait non pas original ni extraordinaire mais cependant caractéristique de cette allégation, c'est sa fausseté, son insincérité.
           Nous n'avons malheureusement ni le temps ni l'espace nécessaire pour passer au crible de l'opinion toute la gestion de ce maire néfaste.
           Nous aurions eu le plaisir de lui demander quelques explications sur le fonctionnement de la " compagnie électrique " et quel contrôle on exerçait sur la distribution aux particuliers ?
           Et le photomètre de la mairie, pour quoi sert-il ?

           Après nous aurions passé en revue l'eau d'alimentation de la porte de Biskra ainsi que celle des habitants de la vallée des jardins, hors la porte d'Alger.
           Là nous aurions demandé au maire pourquoi on refuse de l'eau aux riverains sur le parcours de la conduite quand le papa beau-père qui est à l'extrémité est bien servi. Nous aurions parlé des " sociétés " et de leur fonctionnement.
           Nous lui aurions demandé pourquoi il a refusé de se mettre en rapport, dans l'intérêt de la commune, avec les députés de la circonscription.

           Nous aurions eu aussi à lui demander ce qu'il avait fait en 8 ans de règne pour :
           - l'hygiène agricole et
           - les égouts à compléter,
           - et l'hygiène publique, et
           - la voirie.


           Il arrivera donc nécessairement que pour avoir négligé les travaux de réfection et de développement normal, on sera acculé un jour à la nécessité d'un grand effort ; et ce jour-là, il sera peut-être trop tard, des dommages irréparables auront été causés aux finances communales.
           C'est toujours la même politique ou la même absence de politique qui consiste :
           - à vivre d'expédients au jour le jour,
           - à reculer les difficultés sans jamais les résoudre,
           - à charger l'avenir pour décharger le présent accablé.


           Votre étiquette menteuse ne trompera plus personne. Il prévoit l'échec qui l'attend au renouvellement de notre assemblée communale. Il est aux abois et pratique la morale du caïman : on ne discute pas avec un contradicteur, on le supprime.
           Quand on est sûr d'avoir pour soi l'opinion on ne cherche pas à empêcher ses opposants de parler.
           Les électeurs sétifiens, fort de leur nombre et de leur droit ne se laissent pas terroriser par le jacobin de la décadence. Ils ne nous tromperaient pas. Avec eux nous savons à quoi nous en tenir et nous savons quoi faire ; nous sommes en état de légitime défense et notre devoir est tout tracé.

           L'ouvrier lui-même viendra à nous car il entrevoit que lorsque nous aurons renversé ces faux républicains, quand ses représentants seront en majorité d'honnêtes gens, cela sera déjà mieux pour lui ouvrir comme pour tout le monde et que la solution des questions sociales aura fait un premier pas car elle pourrait être étudiée, enfin, dans un esprit :
           - de patriotisme,
           - de loyauté,
           - de désintéressement,
           - d'humanité.


           Il était nécessaire que le parti indépendant ne laisse s'accréditer aucun racontar ni substituer aucune équivoque sur l'attitude qu'il a prise et qu'il saura toujours conserver.
           Nous ferons l'apaisement partout où le maire morticole a semé la haine. Malgré :
           - ces hypocrisies,
           - ces dissimulations,
           - ces économies dangereuses et
           - ces compressions inquiétantes …nous ne désespérons pas de l'avenir et de la grandeur de notre cité.


           Nous avons fait et nous ferons toujours notre devoir.
           Électeurs sétifiens, à vous de faire le vôtre.

Élections municipales du 6 mai 1900.
Le bilan de la municipalité sortante. Édition 1900




Conquêtes et dominations de l'Algérie
Envoyé par M. Christian Graille

           L'époque punique. Dès le XIIe siècle avant notre ère, les Phéniciens créèrent des établissements sur les côtes africaines. Celui qui eut la plus brillante fortune fut Carthage qui fonda un État puissant dont l'écrasement coûta aux Romains les longues et pénibles luttes dites guerres puniques.
           D'ailleurs, Carthage garda de son origine le caractère d'Etat maritime ; sauf dans le nord de la Tunisie actuelle, nulle part elle n'étendit sa domination directe au-delà des régions littorales. L'intérieur appartenait à des princes indigènes généralement alliés ou vassaux.
           Mais la civilisation punique, influencée elle-même par la civilisation hellénique avait pénétré ces États berbères ; des alliances de famille unissaient les chefs numides et les principaux membres de l'aristocratie carthaginoise.

           L'époque romaine. Carthage abattue, Rome suivit longtemps la même politique indigène. Aux rois numides elle ne demanda que de reconnaître en quelque sorte théoriquement sa suzeraineté. Ce fut contrainte et forcée qu'elle fit la guerre à l'un d'eux, le célèbre Jugurtha qui revendiquait une indépendance complète.
           Après sa défaite elle remit son royaume à d'autres souverains. Jusqu'au début de l'Empire, les États indigènes subsistèrent.
           Juba 1er, rallié au parti pompéien, se crut même de taille à balancer la fortune de César ; sa défaite à Thapsus coupa court ce rêve. L'annexion définitive de toute l'Afrique du Nord fût retardée par la sagesse de son fils Juba II, érudit et hellénisant qui fit de sa capitale Caesarea (Cherchell) une ville grecque.
           Cette annexion ne fut consommée que sous Caligula, en l'an 40 de notre ère. Ainsi furent constituées en provinces :
           - L'Afrique proprement dite ou province proconsulaire (littoral tripolitain, Tunisie actuelle),
           - partie orientale du département de Constantine (avec Bône, Guelma et Souk-Ahras),
           - la Numidie, correspondant à la partie centrale de la province de Constantine,
           - la Maurétanie Césarienne, avec le reste du département de Constantine et le Nord des départements d'Alger et d'Oran,
           - la Maurétanie Tingitane, soit le Maroc septentrional d'aujourd'hui.


           L'occupation romaine fut d'abord assez retreinte et l'extension du territoire des provinces ne s'opéra que progressivement ; encore leurs frontières méridionales ne furent-elles jamais aussi reculées que celles de l'Algérie-Tunisie d'aujourd'hui ; vers l'Est, elles atteignaient le Sahara au-delà des chotts et de l'Aurès ; mais vers l'Ouest, elles laissaient en dehors de la ligne militaire qui les couvrait les steppes du Sud algérois et oranais. De très faibles effectifs militaires suffisaient à contenir et à défendre le pays.
           Le corps d'occupation de la Numidie était toutefois mieux constitué. Son noyau principal était la Légion III Augusta, formée de dix cohortes d'infanterie d'un effectif de 5.500 hommes cantonnés d'abord à Haï, à Tébessa puis à Lambèse.
           Troupes auxiliaires comprises (cohortes d'infanterie, ailes de cavalerie, cohortes montées), l'Armée d'Afrique ne comptait guère plus de 25.000 hommes.
           Il y avait fort peu de fonctionnaires impériaux, les cités s'administrant elles-mêmes par des magistrats, les tribus indigènes étant laissées sous la direction de chefs pour la plupart héréditaires.

           Il ne semble pas que l'Afrique d'alors ait attiré beaucoup d'immigrants ; il n'y eu pas de colonisation, au sens moderne du mot. L'Afrique n'en fut pas moins profondément romanisée ; sans faire oublier le Berbère et le punique, l'usage du latin se répandit.
           - les nombreux édifices des villes,
           - les maisons particulières,
           - les mausolées furent construits dans le style hellénique des cités d'Italie.


           Nulle part, le culte des empereurs ne fut célébré avec plus de ferveur. La conquête du pays par des idées romaines s'accompagna d'un développement continu et considérable de la richesse. L'Afrique fut très prospère sous l'Empire et sa population s'accrut beaucoup ; d'importants centres, dont les monuments encore debout jalonnent des régions actuellement désertes, s'y constituèrent ; les campagnes se couvrirent de fermes et de villages.
           Sur certains itinéraires de la province de Constantine et de la Tunisie c'est à chaque pas qu'on rencontre des ruines antiques. Cette prospérité n'eut d'autre cause que la mise en valeur du sol. L'Algérie -Tunisie fut une des plus riches contrées agricoles de l'Occident.

           On a beaucoup répété qu'elle était le grenier de Rome, et, de fait, ses terres à céréales, dont les réserves en acide phosphoriques n'étaient pas épuisées, devaient porter des moissons magnifiques.
           Mais de gros produits venaient aussi des cultures arbustives qui s'étendirent prodigieusement à partir du IIe siècle ; les vignobles et les vergers d'oliviers, d'amandiers, de figuiers couvraient d'immenses superficies, alimentant une fructueuse exportation.
           L'Afrique fut probablement un centre oléicole sans rival, des Antonins jusqu'à l'invasion musulmane. La place tenue par l'Afrique dans le monde romain devint tout à fait éminente lors de la propagation du christianisme.
           Dès le IIe siècle, les évêchés se multiplièrent. Ce fut l'église d'Afrique qui fournit à l'Occident ses plus fameux apologistes :
           - Tertullien,
           - Saint Cyprien,
           - Arnobe, Saint Optat.


           Ce fut elle surtout qui lui donna Saint Augustin, dont l'influence sur la définition du dogme catholique a été capitale
           Ajoutons que l'activité religieuse n'y resta pas toujours orthodoxe ; au IVe siècle, le schisme des donatistes conquit la moitié du pays.

           L'invasion des Vandales. Dans le second quart du Ve siècle l'Afrique fut occupée presque sans résistance par les Vandales sortis d'Andalousie en 429 ; ceux-ci arrivèrent en 430 devant Bône qui fut prise (431) et d'où ils étendirent leur suprématie jusqu'à Carthage.
           Mais ces aventuriers, Germains comme les Goths et les Francs étaient peu nombreux ; leurs rois se substituèrent simplement aux empereurs sans rien modifier à l'organisation intérieure du pays ; après une assez courte durée de grandeur, que signala le sac de Rome par Genséric (455), le royaume vandale tomba en décadence. Bientôt les successeurs de Genséric furent incapables de réprimer les insurrections indigènes.

           La conquête byzantine. Ce fut le moment que choisit Justinien pour réoccuper l'Afrique au nom de l'Empire. Bélisaire s'acquitta de cette tâche avec un plein succès (533-534). Son successeur Solomon acheva son œuvre en réorganisant le pays.
           Les Byzantins ne recouvrèrent qu'une partie de ce qu'avaient possédé les Romains ; à l'exception de quelques ports, ils ne dépassèrent pas la région de Sétif dans la direction de l'ouest.
           Ce furent de grands constructeurs de forteresses et d'enceintes ; ils entourèrent leurs villes d'énormes murailles, dont beaucoup subsistent encore, utilisant fiévreusement des matériaux provenant des édifices de l'époque antérieure. Ils bâtirent aussi de nombreuses églises.

           La conquête arabe. Un peu plus d'un siècle après la conquête byzantine eurent lieu les premières incursions des Arabes Musulmans. Elles se heurtèrent non seulement à la résistance des Byzantins, mais à celle plus acharnée des Berbères, personnifiée sous la figure légendaire de la reine Kahena.
           Le triomphe définitif de l'Islamisme en fut retardé jusqu'à la fin du VIIe siècle. Les Arabes convertirent les Berbères, mais ce fut sans anéantir leur nationalité.
           Tout au contraire, l'accession des Berbères à la foi musulmane eut comme résultat de surexciter leur esprit d'indépendance et de donner, dans une certaine mesure, à leurs collectivités la cohésion qui leur manquait. Sous le couvert et le prétexte de doctrines religieuses hétérodoxes, de grands États purement berbères se constituèrent et tinrent en échec l'islamisme arabe et orthodoxe des califes.
Les royaumes berbères.

           C'est ainsi que, dès le VIIIe siècle, le schisme puritain du ouahbisme, dont la rude doctrine a plus d'un rapport avec celles des Donatistes, rallia sous le nom de kharedjisme (Kharedjistes veut dire séparés) l'Afrique presque entière.
           Un puissant royaume Kharedjiste, dont leur chef prétendait à l'imamat, c'est-à-dire à la juridiction universelle sur les croyants, fut constitué avec Tiaret pour capitale. Les descendants de ces hérétiques peuplent actuellement le Mzab et Djerba.
           En même temps les représentants des califes se rendaient à peu près indépendants en Tunisie, y fondant la dynastie des Aghlabides (1) (IXe siècle) dont les conquêtes s'étendirent jusqu'en Sicile.

           Après le Kharedjisme, ce fut le schisme, autre doctrine schismatique qui séduisit les Berbères. A elle se rattachent les Idrissites (2) du Maroc (IX-Xe siècles) et surtout les Fatimides (3) de Tunisie (Xe siècle) qui donnèrent aux Berbères leur revanche sur les Orientaux, en les menant à la conquête de l'Egypte dont ils firent le siège d'un califat dissident.
           Les XIe et XIIe siècles virent s'élever les plus puissantes des dynasties berbères, d'abord les Zirides (4) et les Hammadites (5), lieutenants révoltés des Fatimides à Kairouan, à Kalaa près de Msila et à Bougie, puis les Almoravides (6) nomades sahariens et les Almohades (7), sortis des massifs montagneux du Maroc.
           Le caractère religieux et réformiste de ces deux dernières dynasties est très marqué : Souverains almoravides et souverains almohades furent des apôtres ; leur ardeur de prosélytisme les entraîna au secours de leurs coreligionnaires d'Espagne et retarda pour longtemps les progrès des chrétiens dans la reconquête de la Péninsule.

           En même temps, l'un d'entre eux, l'almohade Abd El Moumène (1130-1163), apparaît comme un homme de génie et le politique le plus remarquable qu'ait fourni la race berbère. " On ne saurait le comparer qu'à Charlemagne. Comme lui, justicier, il ne s'empare de l'Afrique septentrionale entière que pour y faire régner l'ordre. Il renouvelle les opérations cadastrales de l'Empire romain. Il crée une flotte. Il organise l'administration la plus libérale qu'on ait encore vue. Ami des lettrés, il fonde des universités " (E. Masqueray).

           Invasion arabe . Malheureusement pour l'avenir de la race berbère, le début de cette période avait été marqué par l'immigration violente de nombreuses tribus arabes que les califes fatimides du Caire avaient imaginé de pousser " comme des loups affamés " contre les Zirides rebelles à leur allégeance. Cette seconde invasion arabe dite hilalienne du nom de la plus puissante de ces tribus (Beni-Hilal) autrement importante que celle du VIIe siècle dont les Berbères avaient sans peine absorbé ou éliminé les éléments, eut les conséquences les plus néfastes.
           Parcourue et pillée sans trêve par des bandes barbares de nomades " semblables à une armée de sauterelles, abîmant et détruisant tout ce qui se trouvait sur son passage ", l'Afrique du Nord vit diminuer dans d'énormes proportions sa richesse agricole. Toutes les régions d'accès faciles devinrent des terrains de parcours, rétrogradèrent au régime pastoral dont des siècles d'efforts les avaient fait sortir ; l'organisation sociale fut du même coup bouleversée de fond en comble ; la langue et les traditions nationales disparurent de la plus grande partie du pays ; refoulés dans les montagnes et le désert, beaucoup de Berbères s'arabisèrent, individuellement ou par groupes, renforçant les éléments de désordre et d'anarchie, qui en devinrent tout à fait irrépressibles. Cependant trois royaumes s'étaient formés sur les ruines de l'empire almohade (XIIIe siècle), correspondant à peu près au Maroc, à l'Algérie et à la Tunisie ; Méridines (8) à Fès, Abd El Ouadites ou Zianides (9) à Tlemcen, Hafsides (10) à Tunis.

           Ce fut contre un prince de cette dernière dynastie El Moustancir que Saint Louis dirigea sa dernière croisade (1270) au cours de laquelle il mourut.
           Luttes sans cesse renaissantes, conquêtes suivies de revanche, insurrections perpétuelles, troubles chroniques sacs des villes et razzias se succèdent avec une désespérante monotonie pendant les trois siècles que se maintiennent tant bien que mal, Mérinides, Zianides et Hafsides.
           Lorsque s'ouvre le XVIe siècle, la Berbérie n'est qu'une expression géographique ; irrémédiablement désagrégée.
           (1) Dynastie d'émirs (800-909)
           (2) Dynastie arabe (789-985)
           (3) Dynastie musulmane (909-1048)
           (4) Dynastie berbère (973-1160)
           (5) Branche de la dynastie berbère ziride
           (6) Dynastie nomade berbère du Sahara (1061-1147)
           (7) Dynastie musulmane berbère (1147-1269)
           (8) Dynastie marocaine d'origine berbère (1269-1465)
           (9) Dynastie berbère (1235-1556)
           (10) Dynastie berbère (1228-1574)


           Ce fut contre un prince de cette dernière dynastie El Moustancir que Saint Louis dirigea sa dernière croisade (1270) au cours de laquelle il mourut.
           Luttes sans cesse renaissantes, conquêtes suivies de revanche, insurrections perpétuelles, troubles chroniques sacs des villes et razzias se succèdent avec une désespérante monotonie pendant les trois siècles que se maintiennent tant bien que mal, Mérinides, Zianides et Hafsides.
           Lorsque s'ouvre le XVIe siècle, la Berbérie n'est qu'une expression géographique ; irrémédiablement désagrégées les collectivités berbères sont incapables d'un effort commun ; l'anarchie est à son comble, la ruine du pays complète.

           La domination espagnole et portugaise. Ainsi réduite à l'impuissance, l'Afrique du Nord fut disputée entre les deux influences qui dominaient alors la Méditerranée, celles des royaumes hispano-portugais, à l'apogée de leur développement, et celles des Turcs ottomans, dont les progrès semblaient irrésistibles, entre la croix et le croissant. La première l'emporta d'abord : peu s'en fallut que la Berbérie ne fût reconquise comme la péninsule ibérique.

           Vers 1510, les Portugais étaient fortement établis au Maroc en occupant les ports et en poussant loin leurs colonnes dans l'intérieur ; les Espagnols dominaient le littoral de Mellila à Tripoli. Mais la seconde prit bientôt le dessus, grâce à l'intervention d'un élément spécial, de corsaires gréco-turcs ou plutôt de renégats de toute race se réclamant de la suzeraineté de la Porte, sauf à lui désobéir le cas échéant. Pour le malheur de l'Europe, qui en pâtit des siècles durant, ces corsaires trouvèrent des chefs de génie qui systématisèrent le brigandage maritime et réalisèrent le tour de force de constituer des États n'ayant d'autre industrie que la piraterie.

           Tels furent les frères Barberousse, Aroudj et Kheïr Ed Dine , dont la sauvage énergie eut raison des armées et des flottes de Ferdinand le Catholique et de Charles Quint.
           Après eux Salah Reïs, Dragut, Euldj Ali achevèrent et consolidèrent leur œuvre.
           Successivement chassés d'Alger, de Bougie, de Tunis, de Tripoli, les Espagnols conservèrent à grand' peine Oran où ils restèrent comme bloqués.
           En un demi-siècle, une association de forbans cosmopolites recueillit l'entier héritage des Hafsides et des Zianides, conquit l'Algérie et la Tunisie actuelles. Ses tentatives pour dominer de même le Maroc échouèrent mais l'Europe chrétienne ne s'en trouva pas mieux : aux faibles Mérinides succédèrent des chérifs, de soi-disant descendants d'Ali qui expulsèrent les Portugais en prêchant contre eux la guerre sainte ; aussi le Maroc eut-il également ses corsaires, non moins terribles et non moins redoutés que ceux d'Alger ou de Tunis.

           La domination turque. Rien de plus étrange que l'État algérien et que l'Etat tunisien, dont les dons déprédations se poursuivirent du XVIe au XIXe siècle en dépit des efforts inconsistants et sans suite des puissances chrétiennes.
           Les classes dirigeantes, milice et taïffe des reïs, s'y composaient exclusivement d'étrangers. La milice ou odjak, recrutée en Turquie et principalement dans l'Asie Mineure, était un corps militaire qui se gouvernait lui-même de la façon la plus démocratique.
           Réputés tous égaux, quel que fut leur grade, ses membres, ou janissaires, n'avançaient qu'à l'ancienneté. Les reïs étaient des patrons corsaires. Alger et Tunis étaient le rendez-vous des pirates de toutes les nations, d'origine chrétienne pour la plupart, accourus afin d'y exercer une industrie qu'ils savaient largement rémunératrice. Ils étaient groupés en corporation ou Taïffe et constituaient un pouvoir extra-officiel, mais parfois souverain.

           L'histoire intérieure d'Alger et de Tunis n'est que celles des luttes séculaires de ces deux puissances rivales, que le chef nominal de l'État s'appelle Pacha, Agha, Dey ou Bey.
           Quant à l'histoire extérieure, c'est une guerre perpétuelle aux nations chrétiennes, dont les épisodes les plus marquants sont des bombardements ou des blocus sans efficacité durable.

           Dans leurs rapports avec les tribus indigènes, les Turcs eurent l'habileté de les opposer les unes aux autres et de s'appuyer sur certaines d'entre elles, dites tribus makhzen (exemptes d'impôt à charge de service militaire). D'ailleurs bien que réparties théoriquement entre des beyliks, la plupart de ces collectivités ne furent jamais que très incomplètement soumises et, en fait, beaucoup conservèrent une indépendance des plus agitées.

           La conquête française. L'expédition victorieuse de 1830 qui aboutit à la prise d'Alger mit fin à la domination turque mais ne donna pas l'Algérie à la France. Il fallut conquérir pied à pied le pays.
           La période la plus laborieuse fut celle de la lutte contre Abd-El-Kader qui se déroula surtout dans la région occidentale de la colonie de 1841 à 1847.
           Pour vaincre ce chef indigène dont on avait eu le tort de reconnaître l'autorité sur un vaste territoire (traité Desmichels du 20 février 1834, et traité de la Tafna du 30 mai 1837), il fallut déployer des efforts soutenus, mettre en ligne pendant plusieurs campagnes des forces de plus de 100.000 hommes.
           Bugeaud attacha son nom à cette grande œuvre. Les principales étapes furent :
           - la prise de Tagdempt, place d'armes d'Abd-El-Kader, par Bugeaud et Lamoricière (mai-juin1841),
           - la capture de la smala par le duc d'Aumale (mai 1843),
           - la victoire d'Isly remportée par Bugeaud sur une armée marocaine (14 août 1844),
           - la reddition d'Abd-El-Kader à Lamoricière (11 septembre 1847).


           Dans l'Algérie orientale, la lutte n'eut pas le même caractère d'acharnement : les deux expéditions de Constantine en 1836 et en 1837 sont les seules opérations de grande guerre qu'il y ait lieu d'y signaler. Lors de la révolution de 1848, l'Algérie pouvait être considérée comme définitivement conquise.
           La soumission de la Kabylie du Djurjura, en 1857, fit disparaître la dernière enclave restée indépendante dans la région tellienne.
           On n'avait pas eu attendu ce moment pour entreprendre la mise en valeur du pays avec des immigrants de race européenne. Commencée dès les premiers temps de l'occupation, mais sans cesse entravée par des guerres et des insurrections, cette colonisation n'avait d'abord progressé que très lentement.
           Le maréchal Clauzel (1835-1836), puis Bugeaud (1840-1848) l'avaient tout particulièrement encouragée. En 1848, la population civile européenne s'élevait à un peu plus de 100.000 individus.

           La guerre franco-allemande de 1870-1871 eut pour contrepartie en Algérie une formidable insurrection qui eut surtout pour théâtre les pays kabyles et la province de Constantine. Depuis sa répression, aucun soulèvement digne d'être mentionné ne s'est produit jusqu'à la dernière guerre. L'insurrection du 8 mai 1945, heureusement limitée à quelques points de la province de Constantine a cependant ouvert les yeux sur la nécessité d'accorder au pays la satisfaction de certaines revendications de caractère limité, administratif ou social.
           Le renouveau d'agitation qui se manifesté en novembre 1954 a trouvé, dans cette région traversée par le massif des Aurès un terrain favorable à la guérilla. Il convient cependant de ne pas accorder trop d'importance à des mouvements nationalistes qui n'ont pas, en fait, de racines profondes dans la population.

           L'évolution contemporaine. L'esprit de revendication démocratique et nationaliste développé par la seconde guerre mondiale a trouvé une large audience en Algérie et en Tunisie et a modifié sensiblement la vie politique de ces deux pays.
           L'Algérie a vu enfin aboutir une évolution préparée depuis de longues années. Un projet de loi Blum-Violette (Gouverneur général de 1924 à 1928), repris devant l'Assemblée Constituante par le président du Conseil Ramadier, est à l'origine du statut qu'a établi la loi du 12 septembre 1947. Près de 100.000 musulmans " évolués " ont été intégrés dans le corps électoral français en conservant leur statut personne.

           Un grand développement a été donné récemment aux institutions municipales et l'octroi de la citoyenneté française à la totalité des musulmans d'Algérie a libéré les ruraux de toute contrainte administrative, laissant ainsi entière liberté à l'émigration nord-africaine en France ; les masses algériennes se sont trouvées par suite associées beaucoup plus profondément à l'activité économique de la Métropole.
           " Nous assistons depuis 1917 à la transformation de l'Algérie en un pays moderne qui s'efforce de ressembler à nos vieilles provinces de France." (R. Montagne).
           Cette évolution qui a eu l'adhésion " des amis du manifeste " répond aux vœux de la grande majorité des musulmans d'Algérie ; elle a, surtout en pays berbère, été pleinement acceptée par les élites.
           Le calme politique et social apporté à l'Algérie par cette évolution récente et continue contraste heureusement avec l'effervescence manifestée dans les autres régions du Maghreb.

Algérie-Tunisie. Extrait de l'Aperçu historique
par M. Marcel N. Schweitzer.
Collection les guides bleus Hachette. Édition 1955



Le Mille pattes ...
Envoyé par Annie


       Un gars vivant seul, décida un jour que sa vie serait moins monotone avec une bestiole quelconque, pour lui tenir compagnie.
       Alors il alla dans un magasin pour animaux et demanda ce qu'il y avait, comme animal peu commun
       Après un certain temps, il décida que l'idéal serait un mille pattes ......
       C' est vrai, une bestiole avec 1000 pieds, c'est vraiment peu commun, NON ???
       Donc, il emporta son mille pattes dans une petite boîte blanche avec des feuilles et du coton, qu'il prit soin de placer dans un coin tranquille, à l'abri de la chaleur.

       Il se dit alors que la meilleure chose à faire pour fêter son arrivée, serait de l'emmener dans un bar pour boire une petite mousse.
       Alors il demanda à son mille pattes :
       - Tu veux aller chez Janine avec moi, pour prendre une bière ???"

       MAIS pas de réponse .... ce qui l'énerva un peu !!! Il attendit un peu, puis redemanda
       - Bon alors tu viens avec moi prendre une bière chez Janine !!!"
       Mais toujours aucune réponse...
       Il attendit encore un peu plus, se demandant pourquoi son petit mille pattes ne répondait pas !!
       Déjà bien agacé il le relança :
       - MERDE TU VIENS BOIRE UNE MOUSSE OU MERDE ?! ?!?!

       Et soudain une petite voix sortant de la boîte, se fit entendre et lui dit :
       - PUTAIN MAIS FERME TA GUEULE, J'AI COMPRIS .... - JE METS MES GODASSES !!!
         


HISTOIRE DE BÔNE
PAR RENE BOUYAC
Contrôleur civil suppléant Interprète militaire hors cadre
Source Gallica
DEUXIEME PARTIE
BONE DEPUIS 1830

        CHAPITRE VII (2ème partie)

        Arrivée du corps d'occupation à Bône.-Le général Monk d'Uzer. - Description de Bône en 1832. - Mauvaises conditions d'installation des troupes. - Les maladies se déclarent. - Lutte contre les tribus. - Travaux de défense exécutés par le général d'Uzer. - Révolte des Merdès. - Combat singulier du capitaine Morris. - Organisation de l'administration à Bône. - Efforts du général d'Uzer pour la colonisation. - Attaques injustes dont il est l'objet. - Sa rentrée en France (3 mars 1836).

        Le corps expéditionnaire, destiné à l'occupation de Bône, fut formé à Toulon. Le général Monk d'Uzer, qui avait commandé avec distinction, en 1830, une brigade de l'armée du maréchal de Bourmont, désigné pour en prendre la direction, ne voulut pas attendre que la concentration des troupes fut terminée ; il prit les devants avec un bataillon du 55e de ligne. Le 16 mai 1832, il débarquait à Bône et lançait la proclamation suivante :
        " Mes chers camarades,
        " La plage où nous débarquons était, il y a quelques jours, inhospitalière. Aujourd'hui, nous sommes reçus en amis, grâce à une poignée de braves, qui, par un fait d'armes des plus brillants, se sont emparés de la Casbah.

        " Honneur ! Honneur aux braves capitaines d'Armandy, Yussuf, Fréart, au lieutenant de frégate du Couédic, à l'élève de première classe de Cornulier Lucinière et à leurs intrépides compagnons de la Béarnaise.
        " Que le drapeau français s'incline devant ces braves, par reconnaissance pour le fleuron de gloire qu'ils viennent d'y ajouter."

        Six cents hommes environ se trouvaient déjà réunis à Bône, et bien que, dès leur arrivée, le Capitaine d'Armandy se fût activement occupé des travaux d'amélioration les plus urgents, la ville n'était encore qu'un monceau de ruines, absolument dénué de ressources et où tout était à créer.
        Quelques jours après, deux bataillons, dont un de la légion étrangère, une batterie de campagne et une batterie de montagne, une compagnie du génie et un détachement des services de l'intendance, débarquaient à leur tour.
        La présence du général d'Uzer, qui s'empresse d'approuver toutes les mesures prises par d'Armandy, vint imprimer aux travaux une nouvelle activité.
        Sur le bord occidental du large golfe qui porte son nom, Bône s'élève en amphithéâtre le long des pentes fortement inclinées d'une colline, dont les revers sont battus par les flots de la Méditerranée.
        A l'époque où nos troupes en prenaient possession, Bône était bien déchue de son ancienne prospérité. Ses ruelles, étroites et tortueuses, ne renfermaient aucun monument digne d'être cité, à l'exception de trois mosquées, dont l'une, celle de Sidi-bou-Mérouan, fut, dès les premiers jours de l'occupation, transformée en hôpital militaire. Il n'en reste aujourd'hui que le minaret, grosse tour carrée de 20 mètres de haut, dominant d'un côté la mer et le port, de l'autre, la ville et la plaine, et une petite nef, qui sert de chapelle à l'hôpital militaire.

        Au centre de la ville se trouvait un carrefour, seul espace un peu vaste, dont nous avons fait la place d'Armes, en démolissant les anciennes masures et en donnant aux nouvelles constructions un alignement régulier. Le côté oriental de cette petite place, aujourd'hui si fraîche et si gracieuse, était occupé par une mosquée, oeuvre de Salah, bey de Constantine, qui la fit construire vers la fin du siècle dernier ( Salah fut bey de Constantine de 1775 à 1795, époque à laquelle il mourut étranglé par ordre d'Hassan, dey d'Alger.), ainsi que le démontre une inscription, gravée sur une plaque de marbre placée au-dessus de la porte qui donne sur la ruelle du Cadi, et dont voici la traduction :
        " J'en jure par votre vie, ceci est la maison de Dieu, ses colonnes répandent une lumière plus éclatante que celle des astres. C'est par elle que Bône s'élève à la félicité. Elle est l'œuvre de la générosité du diadème de la religion, le glorieux Salah, du prince de la terre, qui sans cesse gravit les degrés de la gloire ; que ses succès et ses victoires s'accroissent encore, elle est l'oeuvre du protecteur de la vraie religion et adepte de la loi divine. C'est à la gloire de l'Islamisme qu'il a jeté les bases de cet édifice, dont la construction marque une ère de bonheur et de félicité pour tous. "

        Dans la rue Damrémont qui n'était, à cette époque, qu'un boyau tortueux et étroit, se trouvait une troisième mosquée, dite des Romanets (Grenadier), simple mesedjed (oratoire), qui, tombée dans le domaine privé, servit d'abord de brasserie.
        Achetée par la ville, cette construction fut démolie, et, sur l'emplacement qu'elle occupait adis, s'élève aujourd'hui un bâtiment renfermant la justice de paix et la bibliothèque de la ville. Citons encore la synagogue, célèbre non par son architecture, mais par la curieuse légende qui s'y rattache :
        " Il y a de longues années, un naturel de Bône se rendit en pèlerinage à la Mecque. Ce pieux devoir accompli, il s'embarqua à bord d'un navire en partance pour Alexandrie en compagnie d'un Juif, également né à Bône, qui revenait de Jérusalem porteur d'une Bible sacrée que lui avait confiée le rabbin suprême pour sa ville natale. Le précieux dépôt était enfermé dans un coffre de cuivre merveilleusement ciselé. Au cours du voyage, une horrible tempête engloutit le navire et les passagers à l'exception toutefois du Bônois musulman qui, revenu dans son pays, put raconter le désastre dont il avait été le témoin.

        " A quelque temps de là, le Turc, de garde au port, remarqua dans le lointain et comme se jouant au milieu des vagues, un objet brillant qui se rapprochait rapidement. Il ne tarda pas à reconnaître un coffre et courut informer le caïd de cette étrange apparition.
        Aussitôt des chaouchs se jetèrent dans une embarcation et firent force de rames vers l'épave qui, devinant probablement leur intention, vira de bord et reprit le chemin de la haute mer. En vain l'épreuve fut-elle renouvelée, chaque fois le mystérieux sendouq (caisse) échappait aux mains de ceux qui s'acharnaient à sa poursuite.
        L'embarras était extrême lorsque, soudain, l'histoire du Maure échappé au naufrage revint à l'esprit de tous. On alla chercher le rabbin qui, accompagné de quelques coreligionnaires, s'embarqua à son tour, mais il n'eut pas à aller loin. Le coffre mystérieux vint s'offrir à lui, on l'ouvrit et on y trouva le document intact. Frappé d'un si prodigieux événement, le Maure, compagnon du Juif, victime du naufrage, fit élever un édifice où fut déposé le parchemin sacré. "
        C'est ainsi, dit la légende, que fut fondée la synagogue de Bône.

        A l'exception des trois mosquées qu'entretenaient les soins pieux des habitants, les rues de Bône n'offraient aux regards des nouveaux venus qu'un spectacle lamentable :
        " La ville, dit un contemporain, est fort sale; il est difficile de ne pas rencontrer dans chaque rue de la viande corrompue, des quantités de rats morts, des immondices de toute espèce ; beaucoup d'égouts sont obstrués ; le défaut de latrines communes oblige les militaires à déposer leurs excréments autour des maisons el il y a ainsi dans la ville cinq ou six foyers d'infection qui n'existaient même pas quand les barbares étaient maîtres du pays. "

        Si la ville n'était qu'un amas de décombres et de maisons en ruines, la vieille enceinte délabrée, que nous léguaient les Turcs, était, elle-même, en piteux état. Elle enfermait Bône dans un quadrilatère irrégulier de 1.650 mètres de développement, dont deux côtés faisaient face à la mer. Le premier, bâti sur la plage même, s'étendait de l'extrémité de la rue du Quatre-Septembre au Fort-Cigogne. Cette face existe encore ; elle est en partie cachée par les bureaux de la Compagnie Transatlantique, de la douane et des Touaches, et sert de limite à l'arsenal, à la manutention et à l'hôtel de la subdivision.
        Durant les effroyables tempêtes qui ont dévasté si souvent le golfe de Bône, les vagues venaient déferler jusque sur les remparts qu'elles couvraient d'écume. La plage sur laquelle était construite cette face s'étendait depuis le Fort-Cigogne jusqu'à l'embouchure de la Boudjima, et la mer venait expirer à l'endroit même où se voit aujourd'hui la rue Prosper Dubourg.

        Le deuxième côté se détachant du Fort-Cigogne remontait la pente de la rue d'Uzer, puis, tournant brusquement au nord-ouest, couronnait une ligne de rochers escarpés d'un accès difficile, dont la mer venait baigner la base. Au pied de la falaise que dominent maintenant l'hôpital militaire, la rue d'Armandy et l'hôtel des ponts et chaussées, se trouvait le mouillage des Cazarins ( En arabe, Ksarin : les deux forts.) que défendait un fort situé à l'endroit même où on a créé depuis la batterie de la porte des Caroubiers. Le Fort-Cigogne, sous lequel on a ouvert un tunnel en 1869, formait l'extrémité sud de ce dangereux mouillage que les navires abandonnaient en hiver pour aller se réfugier au Fort-Génois. Au pied de cette même falaise se déroule aujourd'hui une magnifique route en corniche qui, après avoir suivi les sinuosités de la côte, aboutit au cap de Garde.

        La troisième face, partant du bastion où a été ouvert depuis l'escalier qui descend sur la route de la Grenouillère, suivait le boulevard Victor Hugo et aboutissait à l'extrémité nord de la rue du Quatre-Septembre. Elle longeait donc parallèlement la mer, les hauteurs de la Casbah. A partir de ce point, le rempart suivait une ligne droite représentée aujourd'hui par le côté ouest de la rue du Quatre-Septembre et venait rejoindre là première face à la hauteur du palais Calvin.

        Cette enceinte était percée de quatre portes. La première, dite porte de la Marine, s'ouvrait sur la plage ; elle fut bouchée plus tard (1838) et reportée à l'endroit où elle se trouve aujourd'hui.
        La seconde, dite porte de la Casbah, était située au point le plus élevé de la ligne des remparts, sur la place actuelle de la Casbah, à l'extrémité de la rue d'Armandy.
        La troisième était ouverte dans la partie des remparts qui courait au pied de la colline. On lui donna le nom de porte Damrémont au lieu de Bab-el-Mekaber, qu'elle portait auparavant.
        Enfin, la quatrième donnait accès sur la plaine marécageuse dans laquelle serpentait la route de Constantine. Elle était située à l'extrémité de la rue de l'Arsenal, à l'endroit où se trouve aujourd'hui une petite construction d'utilité publique. En avant de cette dernière porte et de l'autre côté d'un canal, qui s'étendait de la mer à l'extrémité nord du cours National, se trouvait un vieux caravansérail que Ben Aïssa avait livré aux flammes avant de lever le siège et dont, faute de mieux, on allait utiliser les ruines pour abriter des troupes. Au-delà du canal dont il vient d'être question, c'est-à-dire au sud de la ville, s'étendait une plaine marécageuse dont les eaux croupissantes, véritable foyer pestilentiel, étaient entretenues par les flots de la mer et les eaux de la Boudjima et du Ruisseau-d'Or.

        Au sommet d'un des derniers contreforts de l'Edough, dominant la ville d'une centaine de mètres environ, s'élevait la Casbah, forteresse construite par les rois de Tunis. Ses murs, solidement restaurés par les Turcs, après le départ des Espagnols en 1541, avaient résisté d'eux-mêmes aux injures du temps, mais ils ne renfermaient plus que les débris des constructions que les janissaires, dans leur indifférence orientale, avaient laissé tomber en ruines. Les terrasses effondrées n'amenaient plus l'eau aux citernes, que nous trouvâmes à notre arrivée complètement vides. La Casbah, comme la ville, ne pouvait même pas offrir d'abri à nos troupes. De cet amoncellement de ruines, de ces cloaques malsains, il fallait faire surgir une ville nouvelle. Cette tâche n'effraya pas le dévouement à toute épreuve de notre modeste et courageuse armée. On se mit bravement à l'oeuvre.
        Il importait en premier lieu de mettre la ville à l'abri d'une attaque que l'on était en droit de prévoir à bref délai, et pour cela de réparer les nombreuses brèches de l'enceinte. Il fallut enlever les décombres qui l'obstruaient en maints endroits et démolir les maisons voisines pour créer une voie de circulation longeant l'intérieur du rempart. Mais ce n'est pas seulement à la restauration des murs extérieurs que nos officiers du génie eurent à appliquer le zèle et le dévouement dont ils firent preuve si souvent, alors que tous les moyens faisaient défaut. A l'intérieur de la ville tout était à créer, hôpital pour les malades dont le nombre, déjà considérable, croissait chaque jour, et pour les blessés que ramènera chacune de nos colonnes de sortie.

        On affecta à cet usage la grande mosquée de Sidi-bou-Mérouan ; mais, comme on n'y pouvait loger que 106 hommes, sept maisons voisines furent aménagées le plus confortablement possible. L'absence de médicaments et de literie pour les malades vint encore compliquer les défectuosités d'une pareille installation.
        D'autre part, il n'existait dans Bône aucun bâtiment ayant servi de caserne ou qui fut propre à en servir. On choisit, à proximité des remparts, les maisons les moins ruinées ; on les divisa par îlots formant chacun une sorte de caserne, renfermant quelques chambres où furent parquées les troupes. " Des chambres au rez-de-chaussée, a dit le docteur Hutin, alors médecin à l'hôpital militaire de Bône, sombres, étroites, humides, sans un seul plancher, beaucoup même sans toiture, incapables de mettre à l'abri de la pluie, où vivent des milliers de rats, de lézards et d'autres animaux qui, par leur bruit, empêchent le soldat de se livrer au sommeil : tel est l'état du casernement. Dans chaque maison il y a un puits ou une citerne, mais ils sont généralement malpropres et par conséquent l'eau en est peu salubre. "

        Il est évident qu'un tel état de choses ne pouvait avoir qu'une influence désastreuse sur la santé des troupes déjà si compromise. Le manque d'eau propre fut d'abord une des principales causes de l'intensité des maladies. Avant que les sièges de Ben Zagoute et de Ben Aïssa eussent ruiné cette malheureuse ville, sept fontaines soigneusement entretenues alimentaient la ville et suffisaient largement à ses besoins. A l'arrivée du général d'Uzer il n'en restait plus qu'une. La conduite qui amenait à Bône les eaux de l'Edough avait été, dès le début de l'attaque, démolie par les troupes de Ben Zagoute, et les malheureux habitants durent, pendant longtemps encore, aller chercher l'eau aux sources qui se trouvaient à une distance assez considérable de la place.

        Aux difficultés matérielles d'installation venait encore se joindre la pénurie des vivres. Les approvisionnement destinés au corps expéditionnaire avaient été calculés sur une courte durée, dans l'assurance qu'on était d'utiliser les ressources du pays. On était convaincu que les Arabes du dehors ne tarderaient pas à apporter leurs produits sur nos marchés ; mais, sauf les habitants, qui, échappés de Constantine, revenaient à Bône dans un tel état de dénuement et de misère qu'il fallait encore les nourrir, personne ne s'approcha de la place. Les indigènes des tribus de la plaine, menacés par les troupes du bey Ahmed qui se tenait dans les environs, s'éloignèrent encore davantage de nos remparts.

        C'était une situation à laquelle il importait de remédier le plus tôt possible. Aussi, dès qu'il eut paré aux premières nécessités du moment, le général d'Uzer ne songea plus qu'à élargir la zone de sécurité autour de Bône, car, si nous étions les maîtres de la ville, notre autorité ne s'étendait pas au-delà de la portée de nos fusils. Il fallut tout d'abord ramener dans les environs les tribus qui, de gré ou de force, s'étaient enfoncées dans l'intérieur à la suite de Ben Aïssa, en leur faisant comprendre que, dans le cas. où elles se rallieraient franchement à notre cause, notre protection saurait les préserver de tout retour offensif de leur terrible maître.

        Le général eut bientôt, en quelques circonstances, l'occasion de faire connaître, aux rares indigènes qui s'étaient aventurés sur nos marchés, son esprit de justice et de modération. Ceux-ci répétaient le soir, dans leurs douars, ce qu'ils avaient entendu, et, peu à peu, la confiance pénétra dans le cœur de cette population farouche et si peu accessible aux sentiments de douceur et d'humanité.
        Les Beni-Urgine, campés entre la Mafrag et la Seybouse, vinrent les premiers faire acte de soumission, et, depuis ce moment, ne cessèrent d'approvisionner notre marché de bestiaux et de vivres frais.
        Ben Yacoub ne pouvait laisser impunie une pareille félonie. Un matin, à la pointe du jour, il se jeta à l'improviste sur les douars alliés. 3.000 bœufs, 10.000 moutons, 200 tentes devinrent la proie du vainqueur. Quelques heures après, des cavaliers des Beni-Urgine. arrivaient à Bône à bride abattue et prévenaient le général d'Uzer. Il eut été impolitique de ne pas tenter de venger le désastre de nos nouveaux alliés.

        Toute la cavalerie, sous les ordres du général Perrégaux, 1.200 hommes d'infanterie et 4 obusiers sortirent en toute hâte de Bône et se lancèrent à la poursuite de Ben Yacoub. Peine inutile, celui-ci, son coup de main exécuté, s'était hâté de se replier au loin, hors de toute atteinte. Aux yeux des Arabes, toute faute restée sans châtiment constitue une victoire. Nous nous en aperçûmes bientôt.

        Pendant que nos troupes, déjà affaiblies par les maladies, prenaient un peu de repos, Ben Yacoub, qui avait employé tout ce temps à exciter les tribus contre nous, reparut dans les environs de Bône, avec les contingents des Sanhendja, des Radjettas et des Dridas, au nombre d'environ 1500.
        Yussuf, avec 400 cavaliers que soutenaient en deuxième ligne 300 chasseurs, sous les ordres du colonel Perrégaux, se lança à sa poursuite et l'atteignit dans la plaine de Duzerville. Après un combat acharné, l'ennemi fut culbuté et vigoureusement pourchassé pendant plusieurs lieues. Cette fois du moins nous avions pu saisir un ennemi qui se dérobait sans cesse et lui infliger une première leçon.

        Elle eut pour résultat de faire cesser les attaques d'ensemble ; mais des nuées de maraudeurs entourèrent la ville et dévalisèrent chaque nuit nos établissements : Chevaux, armes, matériel tout était de bonne prise. Une tribu des plus dévouées à la cause de Ben Yacoub, les Ouled-Attia, était l'entrepôt où les maraudeurs venaient déposer le produit de leur brigandage.
        Le général d'Uzer, à la tête de 500 cavaliers et 1.000 fantassins, sortit de Bône à minuit. Au point du jour, la cavalerie, que son ardeur avait entraînée, attaquait les Ouled-Attia que vint bientôt soutenir la tribu de Ben-Yacoub, accourue au bruit de la fusillade. Le colonel de Chabannes et l'intrépide Yussuf exécutèrent plusieurs charges, dont la dernière mit en déroute l'ennemi. 131 Arabes étaient étendus dans la plaine, la majeure partie des troupeaux était tombée entre nos mains ; une moitié fut versée au troupeau de la garnison, le reste distribué aux Beni-Urgines, afin de les indemniser de la dernière razzia dont ils avaient été victimes.

        L'effet produit par ce sévère châtiment fut immédiat. Ben Yacoub, ne se sentant plus en sécurité, s'enfonça dans le sud, et quelques tribus de la vallée des Kharézas et des environs du lac Fezzara firent demander la paix ; mais on devinait leur hésitation, car, tout en faisant acte de soumission, elles ne se hâtaient pas de se rapprocher de nos murs.
        Les maladies, engendrées par les miasmes pestilentiels qu'exhalaient les marécages, semaient alors de nombreux vides dans nos rangs, et une véritable démoralisation commençait à gagner nos troupes.
        El-Hadj Ahmed n'ignorait pas cette situation et, le 14 août, il lançait Ben Aïssa et 500 cavaliers contre le blockhaus de l'aqueduc qu'occupaient les Turcs de Yussuf. Vigoureusement repoussés par la petite garnison de ce poste, ils allaient revenir à l'attaque, lorsque le général d'Uzer accourut et l'ennemi s'enfuit en mettant le feu aux herbes sèches pour, l'empêcher de le poursuivre.

        Ben Yacoub, après cette attaque, s'était rapproché de Bône et s'était installé à l'endroit où s'élève aujourd'hui le hameau d'El-Hadjar, à quatre kilomètres nord-ouest de Duzerville, sur l'ancienne route de Constantine. De là, il régnait, par la terreur, sur les Arabes qui auraient pu entrer en relations avec nous.
        Le général, comprenant qu'il fallait frapper un grand coup sur l'imagination des populations et leur démontrer que notre douceur et notre générosité n'étaient pas de la faiblesse, résolut d'aller chercher Ben Yacoub, malgré le peu d'hommes qui pouvaient prendre part à cette expédition.

        Le 27 août, toute la cavalerie disponible, quatre compagnies d'élite et deux obusiers sortirent de Bône à huit heures du soir, sous les ordres de Yussuf et du capitaine de Villiers, officier d'ordonnance du général. Malheureusement, les espions dont nous étions entourés étaient allés plus vite que nous et lorsqu'à quatre heures du. matin Yussuf tomba sur les douars, les Drides étaient sur leurs gardes. Néanmoins, on prit beaucoup de bétail, de femmes et d'enfants, qui n'avaient pas eu le temps de se mettre à l'abri.
        Mais, par ordre du général, on relâcha le tout. Cette générosité souleva des murmures, et il fallut l'intervention même du général pour imposer silence aux mécontents, auxquels les événements vinrent immédiatement donner raison. Peu touchés de ce procédé chevaleresque, les Drides, suivant l'usage, se lancèrent à la poursuite de la petite colonne en retraite. Mais, alors apparurent le 55e régiment de ligne suivi d'une compagnie de sapeurs et de quatre obusiers que le général avait laissés en arrière pour rejoindre la cavalerie. On reprit l'offensive, et, quelques instants après, les douars étaient de nouveau en notre pouvoir.
        On les épargna encore ; les indigènes, cette fois, parurent comprendre ; mais, fidèles à la fortune d'Ahmed, ils préférèrent se retirer dans le sud que de se soumettre.

        Grâce à cet acte de rigueur, la tranquillité ne fut pas troublée jusqu'en septembre. Dans les premiers jours de ce mois, Ibrahim, qui, après avoir rôdé autour de Bône, s'était retiré dans le massif de Philippeville, revint, et, pour obtenir une influence plus efficace, simula une réconciliation avec Ahmed. Il eut bientôt avec lui un certain nombre de partisans.
        Le 8 septembre, au matin, il se présenta brusquement devant la place, suivi d'environ 1.500 cavaliers et fantassins, ces derniers composés en grande partie de montagnards de l'Edough. La journée s'annonçait comme devant être d'une chaleur accablante.
        Le général d'Uzer, qu'une longue expérience de dix guerres d'Afrique rendait prudent, ne voulut pas exposer ses troupes à combattre sous un soleil de plomb. Il laissa l'ennemi s'installer tranquillement dans la plaine et sur les pentes boisées de la Casbah qui paraissait être l'objectif d'Ibrahim. Trompés par cette apparente indifférence, les Arabes ne se tinrent pas sur leurs gardes ; ils en furent cruellement punis.
        A quatre heures du soir, au moment où ils s'y attendaient le moins, les portes de Constantine et Damrémont s'ouvrent subitement, pour laisser passer deux bataillons du 55e, forts de 600 hommes, qui s'engagent dans la plaine au pas de course, appuyés par la cavalerie de Yussuf. Bien que surpris, les Arabes n'essayent pas moins de faire bonne contenance, mais, après un court combat, toute la horde s'enfuit, abandonnant, armes, tentes, bagages, etc.

        Ibrahim, lui-même, ne dut son salut qu'à la vitesse de son cheval. Il comprit qu'il venait de jouer sa dernière partie et il alla se réfugier à Médéa. ( Il y mourut en 1834, assassiné par les émissaires d'Ahmed.)
        Le soir, une rangée de têtes, fraîchement coupées par les cavaliers de Yussuf, était placée au-dessus de la porte de Constantine. ( Treize têtes ont été apportées par les Turcs. Il est très difficile de les empêcher de couper des têtes. (Rapport du général d'Uzer).)
        Ahmed, en apprenant la défaite de son ancien rival, s'en réjouit intérieurement ; mais, sous prétexte de venger son échec, il fit appel aux guerriers des tribus des environs de Bône, en leur donnant rendez-vous sur les bords du lac Fezzara. Mais l'effet produit par le désastre d'Ibrahim était tel, qu'il dut remettre à plus tard l'exécution de son projet.
        Bientôt, ces mêmes tribus, qui jusque là s'étaient tenues éloignées de Bône, s'en rapprochèrent. Entre le désir de reconnaître une domination dont ils commençaient à comprendre les avantages et la crainte d'Ahmed, ils avaient longtemps hésité ; mais, du jour où ils reconnurent que nous étions en état de les défendre, elles vinrent franchement à nous.

        On vit donc se présenter successivement à Bône les notables des Beni-Urgines, des Kharézas et même des Merdès, qui venaient demander notre protection et nous jurer fidélité.
        L'accueil bienveillant du général d'Uzer, la modération des conditions de paix, imposées aux nouveaux sujets, ne firent que fortifier les bonnes intentions des Arabes des environs. Les Beni-Urgines, pour se soustraire complètement aux attaques d'Ahmed, vinrent même camper à l'embouchure de la Seybouse.
        Pour mieux cimenter la nouvelle alliance, chacune des tribus, récemment soumises, fournit au général un certain nombre de cavaliers qui, sous le nom d'otages, firent partie de toutes les sorties et combattirent bravement à nos côtés.
        Sur ces entrefaites, un escadron de cavalerie était débarqué à Bône vers le milieu d'octobre ; il devait servir de noyau au 3° régiment de chasseurs d'Afrique.
        Yussuf, promu chef d'escadron à l'occasion du combat contre Ibrahim sous les murs de Bône, en reçut le commandement. D'autres troupes étaient annoncées, mais la présence des maladies qui sévirent si cruellement sur la garnison au mois de novembre, obligea le général d'Uzer à demander la suspension de l'envoi de nouvelles troupes.

        Cependant, avec sa garnison considérablement affaiblie, il sut maintenir la tranquillité du pays au milieu des tribus qui, bien qu'animées de bons sentiments à notre égard, n'auraient pas hésité un seul instant à nous trahir, si elles avaient reconnu le moindre signe de faiblesse.
        L'année 1833 s'ouvrait sous d'heureux auspices. L'état sanitaire s'était amélioré, grâce aux travaux d'assainissement qui avaient été exécutés en quelques mois.
        Les fêtes du Ramadan furent particulièrement brillantes et elles réunirent, ce qui ne s'était jamais vu, 3.000 Arabes dans la plaine de Bône, qui, sous les yeux de la garnison, de la population et des notables indigènes, exécutèrent leurs bruyantes fantasias.
        Les tribus qui, rentrées sous notre autorité, étaient venues camper aux environs de Bône, formaient donc cette première ligne de défense à laquelle le général d'Uzer avait si souvent pensé. Il songea alors à renforcer la deuxième ligne de travaux fortifiés qu'il avait fait commencer et que les maladies et les attaques incessantes l'avaient empêché de continuer. Ces travaux étaient destinés à garder les défilés qui débouchent dans la plaine de Bône et les hauteurs qui la dominent.

        Il voulait ainsi permettre à la garnison et aux habitants de circuler librement et sans danger autour de la ville, de cultiver quelques parties de la plaine et de jouir de ses productions. Il décida donc la création de postes ou blockhaus sur certains points qu'il avait remarqués et qui devaient compléter la ligne de défense.
        Le premier poste avait été construit à trois kilomètres environ de la place, au pied de l'Edough et au fond du vallon où se trouve aujourd'hui l'hospice Coll. Il avait pour but de protéger l'aqueduc qui existe encore aujourd'hui. Ce poste, composé de deux baraques en planches et d'un blockhaus (Ces blockhaus étaient envoyés tout faits de France. Ils étaient construits en planches et avaient la forme d'un carré de 6 mètres de côté et 36 créneaux au rez-de-chaussée, et 8 mètres de côté et 44 créneaux à l'étage au-dessus), était établi sur un mamelon situé à gauche de la route ombragée qui conduit à l'hospice.

        A l'extrémité de la plaine de Bône, sur un mamelon placé à l'embranchement du Ruisseau-d'Or et des Lauriers, à environ deux kilomètres et demi de la place, s'élevait une deuxième redoute qui consistait en un petit mur d'enceinte formant une cour au milieu de laquelle s'élevait un blockhaus auquel on avait donné le nom de Blockhaus du Palmier. Sa position s'opposait à une irruption des montagnards dans la plaine.
        Un troisième poste avait été établi sur un des deux mamelons d'Hippone, au pied duquel coule la Seybouse. Sous la protection de ses feux se trouvaient placés, d'abord le bac que le général d'Uzer avait fait construire à environ 650 mètres de l'embouchure, puis le défilé compris entre le cours de la rivière et le mamelon fortifié et enfin le défilé serpentant entre les deux mamelons d'Hippone.
        Le Fort-Génois, situé à environ sept kilomètres au nord-ouest de la place, devait être occupé un des premiers, mais il n'existait pas de route. Le général résolut d'en ouvrir une et, tant pour protéger les travailleurs que pour défendre le lazaret, il fit placer un blockhaus entre la Casbah et la mer. Ce lazaret, destiné à recevoir les passagers des navires suspects, avait été construit au-dessus de la route actuelle de la Grenouillère, sur la hauteur qui fait face aux constructions élevées par l'entreprise du port.

        L'une des deux redoutes créées par le général Damrémont fut également restaurée et ses travaux de défense complétés. C'était la redoute qui, dans la nuit du 12 octobre 1830, avait eu à repousser le furieux assaut des Arabes.
        Tel était, en 1834, l'ensemble du système de défense.
        En résumé, l'administration bienveillante en même temps que ferme du général d'Uzer avait attiré à l'autorité française la majeure partie des tribus. Nous bénéficions ainsi de l'horreur inspirée par le despotisme cruel du bey de Constantine.
        Malheureusement, si la situation politique s'était améliorée, on n'en pouvait dire autant de l'état sanitaire des troupes. A peine arrivé, c'est-à-dire vers la fin de 1832, le corps expéditionnaire avait été déjà fortement éprouvé par une épidémie cruelle revêtant les symptômes du vomito negro. Les froids de l'hiver en avaient diminué l'intensité, mais le mal éclata au milieu de l'été de 1833 avec une nouvelle violence. La garnison de Bône, forte à ce moment de 5.500 hommes, avait plus d'un tiers de son effectif à l'hôpital. Au mois de juillet, le 55e de ligne pouvait à peine mettre 500 hommes en ligne sur les 2.430 qu'il comptait.

        Les conditions déplorables du casernement, la malpropreté des rues de la ville, l'insuffisance d'eau salubre ( Le service des eaux n'est pas encore régularisé. Surabondantes en hiver, elles manquent totalement en été.) et de vivres frais n'étaient pas les seules causes de la recrudescence des maladies et des décès.
        Les nombreuses sorties de nos troupes, à la poursuite d'un ennemi souvent insaisissable, à travers de longues plaines brûlées par un soleil ardent, avaient fini par épuiser le soldat. Rentré à Bône, au lieu de goûter un repos si justement mérité, il lui fallait reprendre la pioche et la pelle pour travailler la plupart du temps dans des endroits marécageux.
        Pour reconquérir une force factice, il buvait alors des alcools sans nom, qui, dans un corps affaibli par les privations et les fatigues, achevaient rapidement l'oeuvre de destruction entamée par les fièvres.
        La nostalgie venait encore aggraver la situation de ces malheureux. L'espoir souvent déçu d'une prompte rentrée en France, l'aspect des nombreux vides qui dépeuplaient les rangs autour d'eux, les livraient à une sorte de découragement qui ne leur permettait plus de lutter contre les progrès du mal. Enfin, dernière et principale cause, les marécages qui s'étendaient autour de la ville jusqu'au pied des remparts, remplissaient l'air de leurs miasmes pestilentiels.

        Quelles tristes réflexions ne dut pas faire la commission d'enquête, lorsqu'elle débarqua à Bône, le 15 septembre, à l'aspect de ces misérables baraques qui, sous le nom de caserne ou d'hôpital, abritaient si mal des centaines de malheureux. Elle put, du moins, constater de visu l'insuffisance des moyens et signaler, à sa rentrée en France, les améliorations urgentes qui s'imposaient . Cette commission, chargée de faire une enquête sur l'état des choses en Algérie, était composée du lieutenant-général Bonnet et du comte d'Haubresart, pair de France. Quatre membres de la Chambre des députés : MM. Laurence, Piscatory, de la Pinsonnière et Regnard, le maréchal de camp Montiford, inspecteur du génie, et le capitaine Duval d'Ailly.
        Du 1er juin au 30 septembre, 4.097 hommes, dont 36 officiers, étaient entrés à l'hôpital ; 830 y étaient morts. L'hiver vint heureusement diminuer de nouveau l'intensité de l'épidémie ; en outre, le 55e fut relevé par deux bataillons du 59e de ligne.
        Fort heureusement, pendant toute cette période, les Arabes avaient cessé leurs attaques et, sauf une folle tentative d'Ahmed, vigoureusement repoussée, et une nouvelle sortie contre les Ouled-Attia, qui avaient, à plusieurs reprises, pillé nos alliés, rien n'était venu troubler la tranquillité.
        Cependant, après les fortes chaleurs, les émissaires du bey s'étaient remis en campagne et cherchaient à réveiller chez les indigènes le fanatisme endormi.

        Notre inaction de quelques mois, les pertes sensibles causées par les épidémies et connues des Arabes, donnaient à leur parole une certaine autorité. Des symptômes précurseurs de révolte apparaissaient. La puissante tribu des Merdès, qui avait, quelque temps auparavant, simulé une soumission, donna le signal des hostilités en dévalisant et tuant les gens de la plaine qui nous apportaient des provisions.
        Le général d'Uzer, dont les forces étaient considérablement diminuées, voulut d'abord essayer de la conciliation. Il leur envoya dix otages de leur tribu, porteurs de paroles de pardon et de paix. La manière hautaine dont ils reçurent ses envoyés démontra au général la nécessité de les châtier.
        Le 12 septembre, au point du jour, 400 cavaliers et 4 pièces d'artillerie sortaient de Bône et, après avoir traversé le gué de la Seybouse, se divisaient en deux colonnes.
        Nous allons laisser la parole à un acteur du combat, qui eut lieu le jour même. Ce récit, aussi modeste dans la forme qu'émouvant dans le fond, est dû au jeune capitaine Morris, qui écrivait à sa mère quelques jours après l'affaire, à laquelle il avait pris une part si glorieuse :
        " Bône, le 16 septembre 1833. Enfin ! nous avons eu une petite affaire, un petit combat d'avant-garde ; car il est difficile d'en avoir d'un autre genre avec ces dignes Bédouins. Depuis longtemps, MM. les Merdès (le nom même n'est pas très galant) faisaient une opposition malséante aux intentions du trop bon général d'Uzer ; je pourrais, avec leur nom, présenter d'un seul mot une image complète de leur conduite envers nous, mais je suis trop bien élevé pour cela.
        " Forts de leur position et de leur courage, les Merdès n'avaient jamais subi la loi du bey de Constantine ni celle du bey de Tunis, et s'imaginaient qu'il en serait de même avec les Français; non seulement ils n'avaient jamais voulu entrer en relations avec nous, mais encore ils pillaient, rançonnaient et tuaient les Arabes qui passaient près de leurs tribus, se dirigeant sur notre marché. Le général leur faisait cependant bien des avances. Enfin, il se lassa, et, un beau matin, le 12 septembre, à trois heures, nous montâmes à cheval et partîmes avec quatre pièces d'artillerie ; avec les Turcs, les otages et les artilleurs, nous étions à peu près 400 hommes. On fit deux colonnes ; le général d'Uzer avec la première qui se composait de la turcaille, des otages et de ses amis les spahis, les trois premiers escadrons ; cette colonne passa la Seybouse au gué de l'Oasis (la Pissotière).
        " La seconde colonne, trois escadrons et l'artillerie, commandée par notre excellent colonel Perrégaux, qui fait les fonctions de maréchal de camp, passa au gué du Marabout, une lieue plus loin, longeant les côtes et se dirigeant sur Sidi-ben-Bou-Aziz, dans le voisinage des douars des Merdès.

        " Pendant la route, on détacha dans les montagnes le 3e escadron pour donner la chasse à une vingtaine de Bédouins qui se faisaient voir sur les premières collines. Ne commandant pas l'escadron, je partis avec lui et nous nous enfonçâmes dans les gorges ; il fallait voir les Arabes détaler ! pas moyen de les atteindre.
        Etant monté sur une des crêtes les plus élevées, je vis dans la plaine les deux colonnes qui se dirigeaient parallèlement sur une partie des côtes qui se trouvait devant nous ; j'engageai le capitaine B..., du 3e escadron, à suivre les crêtes pour nous trouver en face des colonnes et, par conséquent, prendre les Arabes à dos ; mais M. B... n'a jamais servi que dans les gardes du corps et ne sait rien de son métier. Il voulut redescendre à toute force, et la suite prouva que, sans son obstination, nous aurions fait un coup superbe. Je lâchai mon anti-troupier et me voilà parti au galop avec un officier d'artillerie, amateur comme moi, pour rejoindre la colonne qui était déjà à une petite lieue en avant.

        " Au moment où nous arrivâmes, les Turcs étaient engagés dans la gorge et tiraillaient avec l'ennemi ; les escadrons se réunirent et l'artillerie se mit en batterie sur le mamelon du marabout de Sidi-bou-Aziz, qui se trouve isolé et placé juste en face de la grande gorge où coule la Mafrag, petite rivière qui a sa source dans l'Atlas. Deux chefs se présentèrent au général et lui proposèrent des conditions de paix ; alors, on fit revenir les Turcs ; le régiment débrida et déjeuna. Je laisse à penser si le coup de fourchette fut soigné ! Il était midi, et depuis trois heures du matin nous marchions.
        " Les Arabes ignoraient que deux des leurs étaient en pourparlers avec le général ; aussi, grand fut leur étonnement de voir les Français assis tranquillement par terre, les chevaux débridés et mangeant à leur barbe, malgré leurs coups de fusil. Ils pensèrent que nous n'osions pas les attaquer et se réunirent en grand nombre devant nous. Ils pouvaient être sept ou huit cents; l'insolence des députés augmentait en proportion de nos dispositions pacifiques; enfin, ils attaquèrent et tuèrent un cheval de Turc dont le maître fut aussi blessé. Nous déjeunions toujours et ne faisions pas grande attention à ce qui se passait, quand un coup de canon nous mit lestement sur nos jambes.

        " Au même instant nous voilà à cheval et piquant une charge à fond; le 1er et le 2e escadrons s'élancent en avant. J'avais demandé au colonel à faire partie de son état-major ; je venais de porter un ordre au 6e escadron et je restais un peu en arrière des deux qui chargeaient ; les Arabes traversaient la plaine devant nous pour passer le gué de la Mafrag et s'y poster ; c'est là qu'ils avaient toujours repoussé leurs ennemis.
        " Les bords du fleuve sont couverts de grands roseaux et d'oliviers; il est très encaissé et profond ; les talus de chaque côté sont à pic et à peu près d'une trentaine de pieds. Au moment où j'arrivai, il y avait un peu d'hésitation parmi les nôtres ; on faisait de l'autre côté un feu très vif; le colonel venait d'arriver et faisait rallier le 1er escadron pour le pousser en force dans le gué.

        " Le commandant Magué, de la légion étrangère, qui était là en amateur, venait d'être renversé de son cheval que les Arabes emmenaient.
        " Je me couchai en avant, dans le chemin du gué, pour examiner le passage; en arrivant sur le bord, je me trouve face à face avec une demi-douzaine de Bédouins à cheval qui, du fond de la rivière, attendaient les premiers venus ; les voilà me canardant comme un vrai sanglier, mais mon apparition avait été si soudaine qu'ils se pressèrent trop et me manquèrent. " Ma foi, me dis-je, puisque me voilà en si beau chemin, faut descendre ", et je pique, je pique et je finis par jeter mon cheval dans la rivière ; il savait nager et moi aussi. Un brigadier, Bariller, me suit et nous nous avançons gravement dans l'eau malgré le feu des Arabes, fort étonnés de nous voir passer leur fameux gué, malgré eux.

        " Enfin, j'attrape l'autre bord et je vous les charge en poussant des : "Ah! b...! " sur tous les tons.
        " Pendant ce temps, les chasseurs tiraillaient tant et plus avec ceux qui garnissaient la colline du bord opposé au leur ; personne ne m'avait vu passer. Il y avait devant moi une douzaine d'hommes à cheval et à peu près cinquante tirailleurs à pied qui tenaient bon ; je pique sur celui qui tenait encore le cheval du commandant Magué et je lui casse agréablement les reins d'un coup de pistolet ; j'en tire un second, je le manque. Alors je me rabats sur le cheval pris et j'allongeais la main pour saisir la bride, quand on me tire un léger coup de fusil de derrière un arbre à douze pas de moi ; il faut croire que mon mouvement me sauva la vie : je lâchai le cheval et courus sur mon gueux, le sabre à la main ; il voulait parer mes coups de pointe avec son canon de fusil ; voyant que cela ne lui réussissait pas, vu qu'il en avait trois pouces dans le ventre, le gredin saisit ma lamé à deux mains et me tira si fortement à lui que ma selle tourna et qu'il me jeta sous ses pieds, en bas de mon cheval ; je le voyais rire en tirant son yatagan pour me décoller ; il m'avait saisi à la gorge et me tenait de la manière la plus solide.

        " Mais le gaillard ne savait pas qu'il avait à faire à un rusé Normand et comptait sans son hôte; je lui empoignai les jambes et, d'une vigoureuse secousse, je le jette sur le dos ; nous nous relevons aussi vite l'un que l'autre et nous commençons une bûchade qui sera longtemps fameuse dans les annales du régiment. Un chasseur m'aperçoit de l'autre rive et s'écrie : " Mon colonel, un officier est passé, c'est le capitaine " Morris. "
        " Alors, ce digne colonel s'élance dans le gué, suivi d'une vingtaine de chasseurs et accourt à toute bride pour me tirer d'affaire. Nous, nous battions de trop près pour faire bon usage de nos armes ; enfin, je profite d'une espèce de retraite de corps que faisait le Bédouin, je le pousse fortement, il fait quelques pas en arrière, une pierre se trouve sous son pied, il tombe... et alors je me jette sur lui comme un tigre, je le tiens sous moi et je réponds que le diable ne me l'aurait pas fait lâcher. Je cherchais à tirer mon poignard, lui son pistolet, quand le colonel arrive et, sans descendre de cheval, lui allonge un furieux coup de pointe dans la poitrine ; enfin, un maréchal des logis me passe son pistolet et je brûle la cervelle à mon homme ; comme j'avais sa tête sous mon bras gauche, en lâchant mon coup, je me suis brûlé horriblement l'œil gauche.

        " Ce jour-là, 12 septembre, les Merdès reçurent une pile complète ; on leur prit deux mille moutons et quinze cents bœufs ; mais le général les leur fit rendre à peu près tout et même les têtes qu'on avait coupées. Je ne voulus pas laisser couper la tête de mon Arabe ; il s'était trop bien battu. C'était un des premiers guerriers des Merdes, Ahmed ben Hassein ; quand il fut tué, chacun s'extasiait sur la force de ses membres.
        " Le lendemain, les Merdès vinrent en foule à la ville demander grâce, et le général fut beaucoup trop bon de la leur accorder, car on prétend qu'ils sont maintenant ligués avec ben Yacoub et le bey de Constantine, et qu'ils ne veulent plus laisser arriver personne à notre marché. Nous serons encore obligés d'aller les frotter comme il faut.
        " Pour moi, c'est le plus beau jour de ma vie ; tout le monde me faisait compliment ; les troupiers surtout se pressaient autour de moi et c'est ce qui m'a fait le plus de plaisir.

        " Ils me disaient : " Ah ! mon brave capitaine ! mon digne petit capitaine ! si vous saviez comme nous avons couru quand nous vous avons vu sous les pieds du Bédouin ! "
        " Le colonel m'embrassait et me secouait tant qu'il pouvait, et le général m'a promis que j'aurais la croix.
        Donc, voilà Mons Louis-Michel Morris le plus heureux scélérat de l'armée d'Afrique !

        " Extraits du rapport du général d'Uzer et de l'ordre du jour du 14 septembre 1833 :
        " Deux autres escadrons et le corps auxiliaire eurent l'ordre de passer la Mafrag, au gué de cette rivière large et rapide ; mais l'ennemi s'était réuni pour défendre ce gué à la faveur des positions qu'il occupait.
        " L'intrépidité du capitaine Morris, du 3e chasseurs, força le passage et fit enlever les positions de l'ennemi.
        ..... " Le capitaine Morris a eu à soutenir corps à corps une lutte terrible avec un Arabe qu'il a renversé d'un coup de pistolet, après un combat long et opiniâtre ; ce brave officier avait déjà tué un autre Arabe. "
        " Les Arabes, écrivait à son tour le général d'Uzer au gouverneur, ont laissé 25 morts sur-le-champ de bataille et ont eu un grand nombre de blessés. Sept prisonniers avaient été faits ; je leur ai rendu la liberté. J'ai rendu aux Merdès 3.000 têtes de bétail qui étaient en notre pouvoir, n'en gardant que 100 pour indemniser les otages de la tribu qui servent avec nous et qu'on avait dépouillés par vengeance, et pour dédommager les spahis et les otages dont les chevaux ont été tués dans le combat. Nous n'avons eu qu'un chasseur tué et dix blessés.

        " La tribu des Merdès avait arrêté des hommes, qui venaient à notre marché, et se rendait tous les jours plus hostile. J'avais voulu, il y a quelque temps, l'intimider par une grande démonstration de forces, et, à cet effet, j'étais allé passer la Seybouse à Sidi-Denden.
        " Là, par quelques coups de canon que je fis tirer, je voulus lui faire savoir qu'il dépendait désormais de moi de l'attaquer chez elle quand je le voudrais. Malheureusement il n'y a rien de stable dans la décision des Arabes. Un marabout, qui avait une grande influence sur ceux-ci, les décida à refuser notre amitié. Ce malheureux a payé de sa tête son funeste conseil : un des premiers à nous attaquer, il a été tué un des premiers.
        " Maîtres des douars de l'ennemi, de ses femmes, de ses enfants, nos soldats ont tout respecté, ne faisant la guerre qu'aux hommes armés. Si nous avions voulu garder les 3.000 bœufs que nous avions pris et nous emparer de ceux qui restaient encore, nous en étions les maîtres, et cette tribu était ruinée à jamais. Mais puisque les Arabes doivent alimenter Bône, il est de notre intérêt de les leur conserver. Soumettons-les ; mais, ce résultat obtenu, que notre humanité et notre désintéressement retentissent dans toute la province, de même que notre supériorité en force. "

        Dès lors, une tranquillité parfaite régna dans les environs, et le général d'Uzer put s'occuper sérieusement de la colonisation et des besoins de la population civile qui allait croissant chaque jour.
        A cette époque, Bône comptait un millier de Juifs, autant de Maures et environ 800 Européens, Maltais et Mahonnais pour la plupart.
        Au dehors, l'influence française gagnait du terrain ; les douars protégés couvraient les deux rives de la Seybouse, jusqu'à sept ou huit lieues de distance ; deux spahis pouvaient sans crainte porter aux tribus les ordres du général. Les Européens commençaient à faire des acquisitions de terrain. ( Camille Rousset.)

        Le général organisa tout d'abord une garde de police rurale ; il y fit entrer les otages des tribus, les Turcs de Yussuf et, jour et nuit, les patrouilles de ces hardis cavaliers parcoururent la plaine y ramenant ainsi la sécurité.
        Nous ne nous sommes occupé, jusqu'à présent, que de retracer aussi fidèlement que possible les événements politiques et militaires qui se sont succédés à Bône depuis notre arrivée en Algérie.
        Pendant que nos soldats, le fusil d'une main et la pioche de l'autre, préparaient la voie à la civilisation, des arrêtés et des décrets venaient organiser la nouvelle conquête.
        Bien que prématurées et transitoires pour la plupart, les mesures d'organisation s'imposaient, en raison de l'effet moral à produire sur les indigènes. Il était de la dernière Importance de leur démontrer que notre occupation était sans esprit d'abandon et la substitution de nos lois et de notre administration aux leurs, était le seul moyen de la convaincre.

        Nous avons dit, dans le chapitre précédent, que le rétablissement de la pêche du corail avait été demandé à grands cris et notamment par un ancien agent de la Compagnie d'Afrique, M. Raimbert.

        Les événements de juillet 1830, qui avaient motivé la retraite de Damrémont, suivie bientôt de la catastrophe du commandant Huder, avaient fait momentanément renoncer à ce projet.
        Mais lorsque les Bônois, affolés par la crainte de tomber aux mains d'Ahmed, eurent réclamé notre intervention armée, on comprit que le moment était propice. Le 31 mars 1834, c'est-à-dire quatre jours après l'entrée de nos troupes dans la Casbah, un arrêté de l'intendant d'Alger réglementait la pêche du corail sur les côtes de l'Algérie, conformément aux usages de l'ancienne Compagnie d'Afrique.
        Si d'Armandy eût échoué dans son entreprise, cet arrêté, comme celui qui prononça en 1830 la déchéance d'Ahmed, fût resté à l'état de lettre morte.

        Les pêcheurs de corail, que le traité de 1830 avaient rendu libres de s'établir à Tabarca, y avaient entassé leur matériel. Raimbert, aux sollicitations duquel était due la résurrection des pêcheries dans nos eaux, se rendit aussitôt à Tabarca et obtint des pêcheurs qui s'y trouvaient de transporter leurs magasins et leurs ustensiles à Bône. Enchantés d'échapper à l'obligation onéreuse que leur imposait l'article 1er du traité du 24 octobre 1832 ils suivirent Raimbert. (Article 1er : Les Français paieront pour la forme de la pèche, du corail 13.500 piastres de Tunis, selon l'usage et conformément aux anciens traités, et ils ne seront d'ailleurs soumis à aucuns droits et impositions quelconques.)
        Toute une population industrieuse et paisible vint s'installer dans la ville nouvelle. La France bénéficiait ainsi de la redevance énorme qu'exigeait la cour de Tunis.

        Lorsque la nouvelle de la prise de la Casbah fut parvenue à Alger, on s'occupa immédiatement d'organiser dans la nouvelle conquête les différentes branches de l'administration, afin d'affirmer notre prise de possession. Les services civils, judiciaires et financiers furent placés sous la direction d'un sous-intendant civil. Un commissaire de police, chargé sous ses ordres de la police générale, fut en outre investi des fonctions municipales et de celles d'officier de police judiciaire. Un magistrat, avec le titre de juge royal, devait régler les contestations entre chrétiens et musulmans. Un bureau de douane était également créé.

        N'oublions pas que les formes données aux nouveaux services administratifs étaient soumises aux changements qui se produisaient dans la haute administration à Alger, où les Pouvoirs n'étaient pas encore bien définis..
        Afin de déterminer les biens qui tombaient dans le domaine public, autant que pour éviter le retour des scandaleuses spéculations entreprises par des gens sans scrupules au début de notre conquête, un arrêté du 7 mai 1832 interdit toute transmission de biens immobiliers de musulmans à chrétiens. Ce qui n'empêcha pas, du reste, ceux-ci de spéculer dans l'ombre, en abusant de la crédulité naïve des indigènes, depuis si longtemps accoutumés à se soumettre sans murmurer aux exigences, même injustes du vainqueur.
        C'est ainsi que des maisons furent livrées par leurs propriétaires pour des sommes dérisoires.

        Le général d'Uzer, dont nous venons de constater les efforts en vue de développer la colonisation, crut voir dans cet arrêté, dont les termes s'étendaient aux propriétés extérieures de Bône, une entrave à l'essor de la colonie et, après bien des demandes, il obtint du général en chef que les transactions concernant les propriétés immobilières à l'extérieur de Bône soient autorisées.
        Il fut le premier à en profiter, et, hâtons-nous de le dire, avec les meilleures intentions. Certes, il ne pensait pas qu'il s'exposait à des critiques bien amères, à des soupçons injurieux, en donnant lui-même l'exemple de la confiance dans la prospérité future d'une contrée qu'il ne devait plus quitter.
        " Je mets en pratique, écrivait-il au général en chef, le plan de colonisation que j'ai proposé en demandant l'établissement de maisons crénelées pour recevoir des soldats qui seraient mis à la disposition des colons. J'ai en ce moment un poste au marabout d'Hippone, composé d'un officier et de 25 hommes. Ces derniers sont employés dans une ferme que je fais établir. ( C'est la propriété d'Uzer, située à gauche de la route de Philippeville.).
        Les soldats préfèrent ce travail à l'oisiveté ou au désœuvrement du corps de garde. C'est par goût qu'ils facilitent la culture des terres en s'y dévouant et en restant même plus tard dans la province où ils se plaisent, s'ils y trouvaient à s'occuper, pourvu que la colonisation soit protégée.

        " J'ai la certitude, en obtenant de bons résultats, d'en avoir hâté le développement de deux ou trois années. Je prêche l'exemple. 25 ou 30 soldats des postes travaillent pour moi. La nuit, ils gardent le blockhaus Au printemps prochain, j'en occuperai le double.
        " J'ai acquis environ 2.000 arpents de terres labourables et prairies pour la somme de 30.000 fr. et 1.200 francs de rentes. Je vends chez moi une propriété de 50.000 fr. pour faire ces achats et mettre ces terres en valeur. Le succès que j'obtiens, la confiance que m'accorde le gouvernement, celle que me témoignent la garnison et les Arabes m'encouragent, me déterminent à sacrifier à ce pays qui me plaît quelques années de ma vie. En cessant de servir, je deviendrai colon. "

        Dès cette époque, une sourde animosité se fit sentir à Bône contre le général d'Uzer. Ses actes de clémence, à l'égard des indigènes, peut-être trop souvent renouvelés et surtout mal interprétés, qui ne pouvaient ou ne voulaient pas comprendre l'idée généreuse et élevée qui les dictait, lui firent le plus grand tort. Cette hostilité trouvait un aliment dans la colère impatiente de Yussuf, dont l'éducation à la turque s'accommodait mal de ce système de douceur.
        La calomnie ne tarda pas à remplacer la critique, et essaya de ternir, mais en vain, l'honorabilité du général. Que d'Uzer se soit rendu compte des sentiments de malveillance qui existaient autour de lui, cela est hors de doute. Il n'en continua pas moins son œuvre et nous lui devons cette justice de dire que, s'il a pu se tromper dans l'application des moyens à employer, du moins sa bonne foi et sa conscience d'honnête homme ne peuvent pas être soupçonnées. Il fut le premier à deviner l'avenir de la plus belle partie de l'Algérie, et il a démontré la sincérité de sa conviction, en lui sacrifiant l'intelligence et la vigueur de ses dernières années. Nous reviendrons plus tard sur ce sujet.

        La fin de 1833 vit donc de nombreux progrès dans la situation de la jeune colonie, sous la protection de nos postes avancés et des patrouilles qui sillonnaient les environs de Bône, les Arabes et les premiers colons, aidés des soldats de la garnison, cultivaient la petite plaine. La variété des vivres s'en ressentait. Les rues, soumises à une police sévère, étaient devenues propres ; les égouts avaient été réparés, et l'écoulement du canal dans lequel ils aboutissaient avait été aménagé par de sérieux travaux.
        La population des pêcheurs accourue de Tabarca s'accroissait chaque jour des soldats libérés qui ne craignaient pas d'affronter les privations et le danger d'un climat, alors meurtrier.
        Comme pour l'année 1833, les débuts de 1834 furent paisibles. Les Arabes s'accoutumaient de plus en plus à nos usages et venaient en plus grand nombre. La comparaison entre notre système d'administration bienveillante et juste et l'ancien régime turc était tout, à notre avantage.

        En outre, l'éloignement d'Ahmed, occupé en ce moment à guerroyer devant Médéa où s'était réfugié Ibrahim, les rassurait. Malheureusement, Ahmed, battu par ce dernier et ses alliés, fut obligé de revenir en toute hâte.

        Nous connûmes son retour par la sourde agitation qui se manifesta dans les tribus du voisinage. Les unes, les Beni-Urgines et les Kharézas, terrifiées à l'idée des dangers qu'elles couraient si elles étaient surprises par Ahmed, vinrent se réfugier sous le canon de la place ; les autres, plus éloignées, étaient indécises. La soumission du nouveau chef de La Calle vint consolider leur fidélité chancelante. Ce dernier, qui succédait à son frère, avait reçu d'Ahmed de pressants messages pour aller recevoir l'investiture à Constantine. Non seulement il refusa, mais, le 3 mars 1834, il arrivait en grande pompe à Bône et recevait des mains du général d'Uzer les insignes du commandement.
        Cette manifestation eut un grand retentissement dans les tribus qui reprirent confiance. Elles ne craignirent pas de reprendre leurs anciens campements.

        Les Ouïchaoua, les Kharézas et les Kermiches s'installèrent sur les hauteurs qui dominent le défilé des Kharézas. Les Beni-Urgines s'établirent le long de la rive gauche de la Seybouse ; pour les protéger contre les dangers d'une incursion subite des cavaliers d'Ahmed, le commandant Yussuf s'installa avec un escadron de spahis, les Turcs et les otages au camp de l'Oasis. De là, il poussait des pointes audacieuses dans le pays, déconcertant ceux dont les dispositions à notre égard pouvaient être hostiles par la rapidité de ses courses.
        Le 1
er mai eut lieu, à Bône, à l'occasion de la fête du roi, une imposante revue. De toutes parts étaient accourus les Arabes qui se trouvaient pour la première fois en présence d'un déploiement de troupes aussi considérable. Des jeux nautiques furent organisés par la marine sur la Seybouse et, le lendemain, le général d'Uzer disait dans son ordre du jour : " La journée d'hier a prouvé que les Français et les indigènes ne font plus qu'une même famille. L'harmonie qui règne entre la population et la garnison mérite les plus grands éloges aux troupes françaises. C'est à leur bon esprit, à leur sagesse, à leur modération et à leurs bons rapports avec les Arabes, qu'il faut attribuer les heureux résultats de la domination française et notre influence sur les tribus qui nous entourent. "

        L'été de 1834 vit de nouveau les maladies décimer la population et l'armée; 1.450 hommes sur 3.200 étaient aux ambulances. Les locaux pour abriter les malades devinrent insuffisants. Les troupes durent céder leur casernement déjà si pauvre pour aller vivre sous la tente. C'est ainsi que le 55° abandonna ses baraques de la rue d'Armandy pour y installer un hôpital. Quelques jours après, le 10 juillet, les cinq compagnies de la légion étrangère, qui étaient casernées à la Casbah, durent également l'évacuer pour faire place à 300 malades. Les troupes allèrent camper près de la batterie du Lion.
        L'année fut, du reste, particulièrement mauvaise. Malgré les précautions prises par le général d'Uzer, la récolte de foin, sur laquelle on avait compté pour l'entretien de la cavalerie, fit absolument défaut, et, non seulement il fallut en faire demander en France, mais il fallut encore faire venir des approvisionnements de grains pour les Arabes, dont les récoltes étaient absolument perdues, et qui étaient menacés d'une effroyable misère.

        Ahmed qui, depuis son retour d'Alger, n'attendait qu'une occasion favorable pour venir nous inquiéter, prévenu par ses espions que la garnison de Bône se trouvait considérablement réduite par les maladies, vint camper à El-Hadjar chez Ben Yacoub avec 300 cavaliers. El-Hadjar est actuellement un hameau situé à 14 kilomètres de Bône, sur l'ancienne route de Constantine.

        La terreur s'empara des tribus, qui se replièrent sur Bône en toute hâte, sauf les Merdès, qui allèrent faire leur soumission, et les Oulad-Dhan qui, ayant voulu résister, furent écrasés.
        La situation était difficile pour le général d'Uzer, qui ne pouvait être qu'un spectateur impuissant des malheurs de nos alliés ; la faiblesse de la garnison ne lui permettait pas de trop s'éloigner de Bône, qu'il laissait ainsi exposée à une surprise.
        Fort heureusement pour notre prestige, Ahmed disparut subitement ; nous apprîmes, quelques jours après, qu'une révolte des Hanenchas l'avait appelé dans l'Est de la province.
        Quelques mois de repos nécessaires à la garnison vinrent améliorer l'état des choses. Des renforts arrivèrent de France. Les travaux furent poussés avec une nouvelle activité. Avec la disparition d'Ahmed, la confiance était revenue et, au mois de novembre, la tribu des Eulma, campée sur les bords du lac Fezzara, témoigna le désir de faire sa soumission. Son cheik, Abd el Harch, reçut du général d'Uzer le burnous d'investiture.
        Aussitôt prévenu de ce fait, Ahmed envoya son fidèle Aïssa châtier les coupables. Celui-ci, après une marche rapide et à la faveur de la nuit, tomba à l'improviste sur les campements des Eulma, qui ne purent opposer de résistance. Vingt de leurs meilleurs cavaliers furent tués. Son butin fut immense ; 10.000 têtes de bétail devinrent la proie du vainqueur. Après quoi, il s'installa dans la tribu et se mit en devoir de la ruiner complètement.

        Cependant, quelques cavaliers avaient réussi à s'échapper, et leur premier soin fut de se rendre à Bône. Là, forts de la soumission qu'ils avaient faite quelques jours auparavant, ils supplièrent le général d'Uzer de venir à leur secours. Celui-ci, aussi désireux de frapper un grand coup que de soutenir ses nouveaux alliés, ne perdit pas de temps et, le 19 novembre, 320 chasseurs, 200 cavaliers turcs et spahis, et 6 pièces d'artillerie montée quittaient Bône à onze heures du soir, par une nuit splendide. A trois heures du matin, 900 fantassins et 4 obusiers de montagne, sous les ordres du colonel Petit d'Hauterive, s'engageaient, à leur tour, dans la direction du lac Fezzara.
        Au point du jour, quelques chefs des Eulma, qui avaient réussi à s'évader sans provoquer l'attention des soldats de Ben Aïssa, rejoignirent la colonne qui, guidée par eux, arriva vers sept heures du matin en vue du camp des Constantinois ; trois lieues séparaient encore nos troupes de l'ennemi.

        Notre colonne se trouvait à ce moment à la sortie d'un défilé débouchant sur la plaine où elle allait être certainement aperçue. Il fallait lutter de vitesse. Le général d'Uzer prend ses dispositions. Yussuf et toute la cavalerie irrégulière, formant un premier échelon, accélèrent l'allure et, en une heure, franchissent la distance qui les sépare du campement de Ben-Aïssa. A ce moment, un obstacle imprévu et qui pouvait tout compromettre se présente aux assaillants : un profond ravin, formant une défense naturelle, en avant de la position occupée par le corps de Ben-Aïssa qu'on peut évaluer à 900 hommes et une foule d'Arabes accourus comme volontaires.
        Sous un feu très vif, nos cavaliers enlèvent l'obstacle et abordent résolument l'ennemi. Le colonel de Chabannes et ses chasseurs suivent de près la cavalerie de Yussuf et, dans une magnifique charge, balayent devant ses escadrons toute cette foule épouvantée. 450 cadavres restaient sur le terrain, les 10.000 têtes de bétail étaient rendues aux Eulma, enthousiasmés de la bravoure de leurs défenseurs.

        Cette défaite fut le dernier coup porté au prestige et à l'autorité d'Ahmed. Son plus fidèle compagnon, Ben Yacoub lui-même, comprit que l'heure de la soumission avait sonné et il fit faire des offres au général d'Uzer. Les autres tribus renouvelèrent la leur.
        Les chefs arabes, heureux enfin de pouvoir secouer le joug d'Ahmed, l'engagèrent à marcher sur Constantine. Cette idée lui souriait. Encore sous le prestige du succès qu'il venait de remporter, il croyait que l'occupation de la capitale d'Ahmed se ferait sans coup férir et que nos soldats seraient accueillis en libérateurs par les habitants.
        " Nous pouvons aisément, écrivait-il, aller reconnaître Stora ; la route qui y mène traverse une plaine de toute beauté. Après avoir établi mon infanterie au Fendek (Jemmapes), je me porterais le lendemain avec la cavalerie à Stora, où des habitants viendraient nous apporter des vivres. Les tribus amies nous fourniraient pour cette expédition cinq à six cents cavaliers. Un mois suffirait, au printemps, pour faire la conquête de Constantine, où toute la population désire la domination française.

        " En établissant des relations avec les chefs de la ville et en y laissant une garnison d'indigènes on pourrait se dispenser d'occuper Constantine avec des troupes françaises. " Dans deux ans, ce projet conçu avec les mêmes illusions, entraînera le désastre de la première expédition.
        Deux sinistres vinrent, à quelques jours d'intervalle, jeter la désolation dans la rade de Bône vers les premiers jours de l'année 1835. Dans la nuit du 25 au 26 janvier, 12 navires furent jetés à la côte et, parmi eux, le navire de guerre le Rusé. Un bâtiment génois, emporté par les vagues furieuses, venait de talonner et faisait eau de toutes parts ; les mâts, auxquels se cramponnaient quatre malheureux, émergeaient seuls des flots écumants, lorsque le lieutenant Sainte-Marie Fricot et le caporal Lapierre, sur une frêle embarcation, avec un courage surhumain, bravent la fureur d'une mer épouvantable, et, grâce à leur héroïque dévouement, arrachent ces quatre hommes à une mort certaine. Pendant ce temps le Rusé allait échouer près de l'embouchure de la Seybouse. Aux signaux de détresse, le lieutenant de vaisseau Douignac, directeur du service maritime, et Gelin, capitaine du port, se mettent en mer avec toutes les embarcations disponibles et parviennent, au prix de mille dangers, à sauver l'équipage et le commandant Brindejoue, dont le sang-froid, dans cette longue agonie de cinq heures, ne s'était pas démenti.

        Ce désastre eut cependant son côté utile. La membrure du Rusé, échouée à l'embouchure de la Seybouse, eut pour effet de rétrécir la largeur du courant de la rivière ; les eaux s'écoulant avec plus de violence nettoyèrent la barre des débris et des sables qui s'y étaient amoncelés et, quelque temps après, des navires d'un assez gros tonnage purent venir chercher un refuge assez sûr dans l'estuaire de la rivière.

        Le 12 éclata une nouvelle tempête ; sept navires furent encore perdus. Le brick autrichien Il Rio, mis en pièces, perdit la moitié de son équipage. De nouveaux actes de dévouement vinrent montrer que civils ou militaires étaient animés du même sentiment en face du danger.
        Fait digne de remarque, aux grondements de la tempête, la tribu des Beni-Urgines entière était accourue sur la plage de l'autre côté de la Seybouse; mais, cette fois, ce n'était pas la perspective d'un pillage facile qui l'attirait. Elle se hâta de recueillir avec le plus vif empressement les malheureux que la mer rejetait, agonisants ou morts, et leur prodiguait tous les secours dont elle pouvait disposer.

        " Elle a fait voir, disait le général d'Uzer dans son rapport, en cette circonstance, que les Arabes savent profiter des exemples d'humanité qu'ils ont reçu de nous et que désormais ils sont gagnés à notre cause. "
        Si cette opinion était vraie pour les tribus des environs, elle était absolument fausse pour les autres. Les Dreïds allaient nous le démontrer. Ben Yacoub, leur chef, après la sanglante défaite de Ben Aïssa, comprenant que la cause d'Ahmed était à jamais perdue, avait, nous le savons, fait des offres de soumission personnelle ; il s'était même, pour affirmer la bonne foi de ses intentions, rapproché de Bône et était venu camper à Sidi-Denden, sur la Seybouse, mais avec sa famille seulement. Les Dreïds avaient refusé de le suivre et, non contents de cela, ils s'étaient mis en devoir d'inquiéter nos alliés, les Beni-Urgine.
        Le général d'Uzer alla, le 31 mars, chercher le douar le plus turbulent, les Beni-Foural. Parti de Bône à sept heures du soir avec 700 cavaliers, 500 hommes d'infanterie et 6 pièces d'artillerie, commandés par le chef d'escadron d'Armandy, il surprenait les dissidents au point du jour et leur infligeait une sévère leçon.

        Bien que la sécurité régnât d'une manière générale dans les environs, la présence des maraudeurs et des coupeurs de route rendait nécessaires les mesures de prudence prises par le général. Des ordres sévères avaient été donnés pour que civils ou militaires ne puissent errer isolément à une certaine distance de la place. Ne tenant aucun compte de ces recommandations, un officier et un médecin du navire de guerre la Comète, en station à Bône, périrent ainsi, victimes de leur imprudence, à Tackouch, où ils étaient débarqués pour chasser. A peine l'embarcation qui les avait conduits à terre avait-elle rallié le bord que les deux infortunés étaient massacrés sous les yeux, de leurs camarades désespérés.

        Nous avons dit plus haut que le général d'Uzer avait donné l'exemple de la confiance et encourageait les rares colons qui osaient s'aventurer en Afrique, il mettait tout en œuvre pour leur faciliter des débuts toujours pénibles.

        M. Lavie, issu d'une famille de Saint-Domingue, ruinée par la Révolution, était venu un des premiers s'établir à Bône. Il trouva un appui dans la bienveillance du général qui écrivait, le 2 août 1835, la lettre suivante au général en chef :
        " Un colon industriel des environs de Belfort (Alsace), M. Lavie, est venu se fixer à Bône avec une nombreuse famille et un matériel considérable en charrues, charrettes, instruments aratoires, moulins à huile et à farine. Le ministre de la guerre ayant apprécié les avantages que l'on peut et on doit retirer de l'industrie de ce colon, l'a vivement protégé et lui a fait transporter ce matériel et sa famille sur plusieurs bâtiments de l'Etat ; il l'a, en plus, recommandé au préfet maritime de Toulon, afin qu'il trouvât aide et protection pour arriver à sa destination.

        " Arrivé à Bône avec cette protection et plusieurs lettres du ministre, j'ai pensé qu'il était dans une obligation stricte de seconder et favoriser M. Lavie. Ce qui est le plus difficile à Bône pour les colons, c'est leur établissement dans la première année où ils doivent tout créer, avant d'obtenir le plus léger résultat.
        " Ne pouvant établir extérieurement ses moulins, je lui ai fait céder provisoirement un terrain de casernement qui n'est pour le moment d'aucune utilité au génie militaire.
        " Le conseil provincial a si bien apprécié les avantages que la colonie doit retirer de M. Lavie, qu'il l'a spécialement recommandé au sous-intendant civil pour la concession d'un marais qu'il s'engage à mettre en culture dans deux ans.
        " La famille Lavie se compose de neuf enfants; il en a maintenant quatre avec lui, tous en âge de travailler, plus deux ouvriers charrons et deux menuisiers qu'il a amenés de France, et qu'il a loués pour deux ans. Il a laissé en Alsace sa femme et cinq enfants, qu'il fera venir lorsqu'il sera établi de manière à pouvoir les recevoir.
        Quatre colons comme M. Lavie assureraient le succès de la colonie; on ne peut trop l'encourager. Dès l'instant où on apprendra en Alsace qu'il aura réussi dans son établissement, ses compatriotes arriveront ici. Un grand nombre apporterait et des capitaux et un matériel d'agriculture.

        "J'ai si bien apprécié les avantages de son arrivée dans la colonie, que je l'ai recueilli avec toute sa famille chez moi depuis trois semaines. Ils ont mis dans une petite maison attenante à la mienne leurs charrues et leurs outils. Je leur fais distribuer des rations de vivres. S'ils avaient été forcés d'aller vivre dans une auberge, ils auraient dépensé énormément et cela leur eût enlevé le moyen de donner cours à leur industrie..
        Cela a donné à M. Lavie le temps de se reconnaître et de trouver les moyens de s'établir avec le moins de frais possible. Il est d'une bonne politique d'encourager et de protéger de pareils colons. Je demande que la concession de marais qu'il sollicite lui soit faite le plus promptement possible, afin qu'il puisse mettre la main à l'oeuvre ; il assainira une partie de la plaine qui est la plus près de la ville, et ce sera une économie pour le gouvernement qui aurait dû s'occuper à grands frais de cet assainissement. "

        Confiant en l'avenir, le général ne se contentait pas d'encourager les autres ; il ne craignait pas à cette époque de vendre des propriétés qu'il possédait et dont le revenu était assuré pour acquérir des terrains sans valeur présente.
        De ce qu'on aurait dû considérer comme une preuve d'affection pour la jeune colonie, la calomnie fit un crime au général, en dénaturant les faits. Il existait à Bône, au moment de notre premier débarquement en 1830, un indigène appelé Mustapha ben Kérim, homme intelligent qui, dès le début, se rallia franchement à notre cause. Cette sorte d'apostasie souleva chez ses coreligionnaires une telle haine qu'il dut quitter Bône et suivre le général Damrémont dans sa retraite.
        Revenu à Bône en 1832, il eut occasion de voir le général d'Uzer qui comprit aussitôt tout le parti que l'on pouvait tirer d'un homme de cette valeur. Mais bientôt, haï de ses coreligionnaires, objet de la jalousie des personnes qui formaient l'entourage du général, il fut accusé d'abuser de l'autorité que lui donnaient ses relations avec ce dernier pour exploiter la crédulité des Arabes. A cette même époque, des plaintes s'élevèrent contre le cadi, que l'on accusait d'avoir fait faire des cessions de propriétés immobilières en faveur de Mustapha pour des prix dérisoires. Or, Mustapha étant le chargé d'affaires du général, on en conclut que les acquisitions de ce dernier n'avaient pas été faites avec toute la bonne foi désirable. Or nous venons de voir la preuve du contraire.

        Tant que les récriminations et les critiques n'attaquèrent que son mode d'administration, le général, fort de sa conscience, ne s'était pas détourné de la voie qu'il s'était tracée, mais lorsque la calomnie, désarmée devant l'homme public, osa s'en prendre à l'honneur de l'homme privé, le découragement se glissa dans son âme.
        Deux derniers faits vinrent le décider à demander sa rentrée en France.

        Le chef d'escadron Yussuf, dont l'attitude hautaine et souvent inhumaine à l'égard des indigènes avait été justement réprouvée par le général d'Uzer, dut quitter Bône au mois de mars 1835 pour se rendre dans la province d'Oran où le nouveau gouverneur, le maréchal Clauzel, opérait contre Tlemcen. Yussuf l'accompagna dans son expédition ; le courage dont il donna de nouvelles preuves, l'attrait que faisaient éprouver à tous ceux qui l'approchaient sa parole imagée et son visage martial et beau, lui eurent bientôt gagné la sympathie du maréchal. Il profita de ces bonnes dispositions pour le convaincre que les populations de la province de Constantine, lassées du gouvernement d'Ahmed, non seulement n'opposeraient pas d'obstacles à la marche de nos troupes sur Constantine, mais encore prêteraient leur concours.

        Le maréchal Clauzel accueillit ce projet qui flattait ses idées personnelles et, convaincu que Yussuf seul pouvait préparer les indigènes à notre domination, le nomma bey de Constantine. Mais pour que ce nouveau bey in partibus pût exercer librement ses fonctions, il fallait éloigner le général d'Uzer. On s'appuya sur les bruits infamants semés par ceux-là mêmes que l'intégrité, la droiture et l'honnêteté du général gênaient dans leurs intérêts souvent inavouables.

        Le maréchal osa demander sa révocation , elle fut signée et envoyée à Alger. Le général ne donna pas à ses ennemis le temps de consommer leur infamie. Que dut penser le maréchal Clauzel, lorsqu'à la fin de l'année suivante, après son échec de Constantine, il fut lui-même en butte aux attaques calomnieuses de ses ennemis ?

        En même temps qu'il apprenait la nomination de Yussuf, le général d'Uzer fut prévenu qu'un procureur général et un juge d'instruction du tribunal supérieur d'Alger étaient envoyés à Bône pour faire une enquête, en apparence dirigée contre Mustapha ben Kérim et le cadi, mais en réalité contre le général, sur les faits dont la calomnie l'accusait. C'était déjà une sorte de sanction. Hâtons-nous de dire que l'enquête dirigée par M. Réalier Dumas, procureur général, et M. Giacobi, juge d'instruction, avec l'impartialité qui distingue la magistrature française, ne releva rien que d'honorable pour le général dont tous les actes étaient empreints de la plus entière bonne foi (1), on pourrait même dire du plus complet désintéressement.

        L'agitation produite par l'enquête mit en lumière des faits honorables pour le général d'Uzer. On sut que malgré l'augmentation de valeur des immeubles, il avait cédé au prix d'achat, à un vieil officier, un terrain qu'il avait amélioré. On sut aussi qu'après avoir légalement acheté à un Maure un autre terrain que le vendeur n'avait cru propre qu'au pacage, il tripla de son propre mouvement et sans y avoir été provoqué de nulle manière le prix convenu, parce qu'il reconnut, après avoir bien étudié sa nouvelle acquisition, qu'elle avait une valeur supérieure à l'estimation faite par l'ancien propriétaire.
        Néanmoins, cette dernière et douloureuse épreuve était trop lourde et le général rentra en France le 2 mars 1836, laissant le commandement provisoire au colonel Correard du 3e chasseurs d'Afrique. Il ne devait pas tarder à revenir à Bône comme simple particulier.
A SUIVRE
        


LE PHARE FOUILLEUR   
Par Michel SALANON
Chronique n° 264 - Mercredi 15 juillet 2020  
Trop de Français de souche assassinés par des racailles !
                  
                  Madame, Monsieur, ami(e)s et compatriotes.

              Certains constats déclenchent une immense colère : ces cinq dernières années (2015-2020), 293 personnes ont été sauvagement assassinées, par égorgement dans la rue (!) ou par écrasement volontaire sur les trottoirs à l'aide d'un véhicule (!),               
certains français de papier, jihadistes isolés ou racailles,
venus sur notre sol contre notre volonté,
tuent toujours autant de Français de souche !


              Ce triste constat est le résultat d'un laxisme gouvernemental qui donne la nausée car le peuple français n'est plus protégé sur son propre sol, des citoyens continuent à se faire massacrer dans une indifférence gouvernementale détestable, y compris celle de très nombreux députés qui refusent de dénoncer l'inacceptable :
              - l'immigration-invasion se maintient avec la bénédiction de l'actuel Président qui ordonne à son gouvernement qui ne cesse, par ce fait calamiteux, de détruire l'identité et les valeurs françaises,
              - les ONG ont repris la " pêche aux migrants " qui n'est rien d'autre qu'une forme d'esclavage moderne qui engraisse les passeurs,

              - tous les besoins quotidiens de ces sans-papiers incompétents, payés par nos impôts (loyer, nourriture, eau, électricité, soins…),
              - la multiplication des " zones de non-France ", comme je les qualifie mais que certains appellent pudiquement " zones de priorité ",
              - les financements considérables, à perte, de ces quartiers infestés de " chances pour la France " qui ne cessent de cracher sur Elle,
              - la loi sur la Laïcité bafouée à longueur de temps, que les droit de l'hommistes voudraient modifier pour faciliter le port des vêtements à caractère religieux portés par les musulmans non laïques,
              - la libération anticipée de plusieurs milliers de délinquants afin de désengorger nos prisons (Mme BELLOUBET, juste avant de partir),
              - l'insécurité grandissante sur tout le territoire, qui fait que toute personne dans la rue se demande si elle va être détroussée ou tuée.


              Résultat de cette politique honteuse et indigne d'un Président de la République française plus intéressé par ses photos en compagnie de Noirs asexués qu'à protéger les Français ?

              Regardez ces 3 Français(e)s massacrés avec barbarie, en un mois, par des racailles qui vivent comme des poissons dans l'eau (au lieu d'être enfermées dans un bagne à Cayenne), dans cette douce France devenue un enfer pour les Français de souche :
              Ils s'appelaient :
              - Philippe Monguillot 59 ans, chauffeur de bus à Bayonne qui refusa à des " chances pour la France " de monter dans son bus sans masque et sans payer, fut sauvagement roué de coups, le 5 juillet, laissé au sol en état de mort cérébral, il est mort le 10 juillet,

              - Mélanie LEMEE - écriture Lemée - 25 ans, jeune gendarme volontairement percutée lors d'un contrôle routier, par un chauffard qui a foncé sur elle à plus de 130 km/h, il conduisait sans permis et sous l'emprise de stupéfiants (165 gr de cocaïne), elle est morte le 5 juillet, elle était championne de judo aguerrie, championne de France militaire 2018, médaillée aux Mondiaux en 2016,

              - Thomas X 23 ans,, poignardé à mort dans la nuit du 9 au 10 mai, à Sarcelles (zone de non-France), de huit coups de couteau portés par un repris de Justice, quadragénaire multirécidiviste connu pour des violences aggravées…. à peine sorti de prison grâce à une remise en liberté liée au Covid-19 (merci MACRON et BELLOUBET) !
              Thomas est mort le 11 juin, après une quinzaine d'opérations chirurgicales. Lorsqu'il fut poignardé par son meurtrier ivre et sous l'emprise de cocaïne, il fêtait avec des amis un nouveau travail.
              Inutile que je précise la consonnance des prénoms des tueurs.

              Je conseille à ceux et celles qui oublieraient leurs visages de réouvrir cette " chronique 264 " et de la relire, juste avant l'élection présidentielle de 2022, pour savoir s'ils veulent que cela continue en revotant pour le Dandy-de-l'Elysée, qui préside avec une folle indignité une France détruite de l'intérieur, chaque jour davantage.
              Des rues occupées par des racailles, des villes saccagées par des vandales francisés, la " France des lumières " entachée de sang français, dans l'indifférence générale.…

QUI VA ENFIN NOUS SORTIR DE CET ENFER EN 2022 ?
Merci de votre aimable considération. Bien cordialement.
Michel SALANON                 
largosalan@hotmail.fr                
________________________________________________________
" La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ".
Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen - Article XI - 1789
    

ALGER Juillet1960
Par M. Bernard Donville
            
            Dernier numero de juillet de l'Echo d'Alger ...

            Comme tous les ans on s'appesantit sur les colonnies "de vacances bien sur!"
            Comme à ce qu'on vient de subir l'hopital ne pouvait plus faire face.
            Près d'Alger on s'éclate à Zéralda. NDde la Foret en pleine implantation ne durera pas longtemps après notre départ.
            En mode c'est la saison des mariages (quoique pour Y.St Laurent ?!)
            J'ai retenu comme Coup de coeur nos pélerins à Lourdes et en Bonus une détente humoristique avec vos papas territoriaux !
            Bonnes lectures
            Amitiés, Bernard

Cliquer ICI pour voir la suite du dossier du mois de juillet 1960



Bonjour à tous .
Le mois d’aout 1960 était plutôt avachi.
La ville d’Alger se developpait (qu’elle allait être belle quand nous ne serions plus là…excusez cette remarque déglutie sans retenue).
Dans les banlieues et bien ailleurs aussi les fêtes se multiplient ( voir le bonus).
Les sportifs sont aussi peu actifs.
J’ai retenu en coup de coeur , encore un petit travail de l’ami Brouty.
Ce mois ci il n’y aura pas de complément.
Bonne lecture et protégez vous bien (la vieille garde que nous sommes doit rester vigilante pour témoigner… !)
bernard

Cliquer ICI pour voir la suite du dossier du mois d'août 1960


En complément la suite de la série du journal dans l'esprit "Comment quc'était...comment quc'est devenu!!!" A faire lire à Macron (il faut rabacher avec ce genre d'intellectuel!)
Cliquer ICI pour voir 130 ans de voies ferrées



PLUS BLANC QUE BLANC ?
De Jacques Grieu

TIR à BLANC
              Le racisme, on le sait, est un vilain défaut
       Et rien n'est trop seyant pour le clamer bien haut,
       Pour montrer à chacun qu'on est un humaniste
       Et que sa coulpe on bat d'ancien esclavagiste.
       Des crimes du passé, on se repent très fort,
       Et d'être né trop blanc nous couvre de remord.

       Car de bien des méfaits je me rendis coupable,
       Que les discours du jour me montrent inacceptables :
       J'ai lu, même relu, Robinson Crusoé,
       Et aussi Jules Verne et Céline ou Hergé,
       Sans oublier " Autant en Emporte le Vent "
       Qui ne vaudraient pas mieux que le feu ou l'encan.

       Tout ce qui est bien blanc a des airs de délit
       " Plus c'est noir, plus c'est beau ", Soulages nous le dit.
       Si " l'homme de couleur " a toujours la peau sombre,
       Voilà qui, à certains, a parfois fait de l'ombre.
       Avoir des ides claires est chose fort suspecte.
       La noirceur deviendrait l'attitude correcte ?

       Le vin blanc, pour autant, va-t-il passer de mode,
       Et de pinot bien noir faut-il qu'on s'accommode ?
       De grimper au Mont-Blanc, faudra-t-il s'abstenir
       Et pour les élections, " voter blanc " s'interdire ?
       Il faut rebaptiser la rue des Blancs Manteaux,
       Celle du docteur Blanche et peut-être Clairvaux ?

       Se battre " à l'arme blanche " est la faute interdite,
       Et le nom de " blanc-bec " est l'injure maudite.
       En musique " la blanche ", horreur, vaut bien " deux noires "!
       Le racisme anti-blanc : douleur expiatoire ?
       A quoi Dieu pensait-il, qui fit blanche la neige
       Et noires les idées de l'homme en ses manèges...
Jacques Grieu                  


ORAN
5 juillet 1962

Par M. Robert Charles PUIG

       De la lumière à l'ombre et depuis tant de siècles, elle fut fille soumise ou maîtresse des cœurs.
       Elle eut mille vies depuis plus de mille ans. Elle était à la fois l'amour et l'impudeur.
       Sur cette terre où le soleil brillait, elle fut avec honneur combattante et guerrière.
       Espagnole ou arabe, un jour enfin française, la " Vierge " tout là-haut bénissait ses prières
       En la regardant vivre. Fière et impétueuse, son identité française dura cent trente deux ans.
       Ses pieds baignaient dans la Méditerranée et dans son innocence, elle croyait fermement
       Vivre et mourir ici, entre amitiés et paix. Oran avait toujours ce sentiment un peu fou
       Que la vie se la coulait douce et belle dans le plaisir de la musique du folklore andalous,
       Réunissant dans un parler commun, l'arabe, l'espagnol et le français pour faire la fête,
       Lorsque dans les vieux quartiers imprégnés de l'histoire du passé, on buvait l'anisette.
       Les filles se promenaient le long du front de mer ou traversaient en dansant la Place d'Armes.
       Elles incarnaient la beauté, l'image du bonheur, dans un Paradis débordant de charme.
       Puis... vînt le temps du deuil, du terrorisme, la rébellion. Oran pourtant croyait à son bon sort,
       Qu'il n'y aurait jamais un temps du mauvais sort, du déracinement et au final de la mort.
       Puis... vînt l'indépendance. Partir ou le cercueil ! Un affront, pour un peuple désorienté,
       Qui ne savait plus, hors la lutte armée, l'OAS, quel avenir et quel destin l'attendaient.
       Puis... au trois succéda le Cinq ! Le Cinq juillet ! Soudain le crime déferla des hauteurs.
       Il arrivait avec son horreur, son abomination, comme un cygne noir messager du malheur.

       Imprégné de haschisch, de haine et de fureur, tout un peuple, oubliant sa foi et son Coran,
       Ne tenant pas compte du vivre ensemble depuis si longtemps et qu'il était aussi d'Oran,
       Envahit le centre-ville... sans que Paris ne s'oppose ! Des assassins kidnappèrent et torturèrent.
       Ils assassinèrent des femmes et des enfants. Le F.L " haine " était plus " fort " que les prières !
       Pendant tout ce long temps, le pouvoir français cantonné dans ses casernes... laissa faire !
       Il laissa mourir un peuple sous la lame du douk-douk meurtrier et le feu sacrilège des enfers.
       Il y eut des cris, des râles... Il y eut le sang des immolés sur les trottoirs... Paris laissa encore faire !
       La Capitale, méprisante, outrancière, n'avait qu'une pensée, ne rien voir ou entendre et se taire.
       Il y eut l'horrible mort de trois mille innocents ! La ville était désorientée, en sang et en sanglots !
       Il y avait tellement de civils assassinés. Oran n'était plus une ville, seulement un tombeau !
       L'état-major militaire français d'Oran, sous l'oriflamme honteux et l'ordre de l'Elysée... laissa faire,
       Faisant de ses soldats et du drapeau aux trois couleurs, les complices du diable et de l'enfer.
       Des Oranais furent enlevés, torturés, égorgés, massacrés. Ainsi la ville de la joie et du bonheur
       Vit son visage innocent, son visage d'enfant, se teinter de sang et ses yeux de pleurs.
       Oran la belle, Oran la fière, Oran espagnole et française à la fois, devint ce cinq juillet Oran martyre !
       Il ne manqua plus aux derniers survivants de la ville suppliciée, qu'à fuir... Partir sans revenir !

Robert Charles Puig / juillet 2020
      

KATZ, CRIMINEL DE GUERRE,
Par M.José CASTANO,

Le Boucher d’Oran


« Et ton nom paraîtra dans la race future, aux plus cruels tyrans, une cruelle injure ! »
- Jean Racine - (« Britannicus »)

       En ce début d’année 1962, en Algérie, l’Organisation Armée Secrète était arrivée à l’apogée de sa puissance et le slogan « l’OAS frappe où elle veut, quand elle veut », n’avait jamais été aussi vrai. A Oran, elle était maîtresse de la ville. À sa tête figuraient des noms prestigieux comblés de gloire et d’honneurs qui entretenaient un climat de confiance malgré le tragique de la situation…

       Le gouvernement gaulliste ne pouvant admettre pareille humiliation, avait nommé à la tête du secteur autonome d’Oran, afin de réduire cette « OAS narguante » -et pour le malheur des Oranais- le 19 février 1962, le général Joseph Katz en remplacement du général Fritsch qui refusait de pratiquer sur les membres de l’OAS cette besogne de basse police qu’était la torture. La mission de Katz : « Mettre au pas la ville sous contrôle de l’OAS ». L’Organisation était alors dirigée par les généraux Jouhaud et Gardy, le colonel Dufour, le commandant Camelin, le lieutenant de vaisseau Pierre Guillaume, Charles Micheletti et Tassou Georgopoulos.

       En bon exécutant, Katz, s'apprêtait à écraser ceux qui refusaient d'obéir aux ordres de l'Élysée et ceux qui persistaient à crier « Algérie française ! », maxime désormais classée comme « cri séditieux », ajoutant aux vertus de l'obéissance passive, une haine que même le règlement de la gendarmerie (sa garde prétorienne) ne prescrivait pas.

       Carré d'épaules, rond de ventre, aussi peu distingué que son complice d’Alger, le colonel Debrosse, outre celle de leur cruauté, on leur prêtait une certaine ressemblance : même corpulence massive, même front de taureau, même manie de traiter tout le monde de «con » ou de  « bon à rien », même absence de scrupules. En somme, pour reprendre les mots de Lamartine : « Rien d’humain ne battait sous son épaisse armure ».

       Katz était un militaire républicain que De Gaulle avait cueilli à Bordeaux pour l'envoyer mater la « racaille d'Oran » (sic). Son sentiment à l'égard des Pieds Noirs était celui-ci : « Un ramassis de descendants de déportés de droit commun, de négriers qui veulent conserver leurs privilèges. »

       Alors qu'à Alger, depuis la sanglante affaire des Barricades, on avait surnommé Debrosse : « Le sanguinaire », très vite, aux yeux des Oranais, Katz allait devenir « Le boucher ». Pour briser toute résistance, la première consigne qu'il donna à sa troupe essentiellement constituée de « gens sûrs », en l'occurrence les Gendarmes Mobiles, dits « les rouges », fut celle de tirer à vue sur tout Européen qui aurait l'audace de paraître sur une terrasse ou un balcon lors d'un bouclage. « Le feu - précisa-t-il - sera ouvert sans sommation sur les contrevenants à partir du 23 avril. De même, le feu sera ouvert, par tous les moyens y compris l'aviation, sur les éléments OAS circulant en ville. ». C'était ratifier une pratique que les « gendarmes rouges » utilisaient déjà depuis un mois...

       Les premières victimes du « Boucher d’Oran » furent deux adolescentes de 14 et 16 ans : Mlles Dominiguetti et Monique Echtiron qui étendaient du linge sur leur balcon. Elles furent tuées par les gendarmes. Les projectiles d’une mitrailleuse lourde de 12/7 traversèrent la façade et fauchèrent dans leur appartement, Mme Amoignan née Dubiton, dont le père était déjà tombé sous les balles d’un terroriste du FLN, ainsi que sa petite fille, Sophie, âgée de deux ans et demi et sa sœur, Frédérique, âgée de treize ans qui, atteinte à la jambe, eut le nerf sciatique arraché et dut être amputée.

       « Il est beau qu’un soldat désobéisse à des ordres criminels » ; à l’évidence, ces « soldats » par trop zélés n’avaient pas lu Anatole France…

       Cette lutte « impitoyable et par tous les moyens », selon l'ordre donné par de Gaulle, faisait partie d'un plan mûrement concerté : IL FALLAIT ABATTRE L'ALGERIE FRANÇAISE ; il fallait aussi montrer aux masses musulmanes, longtemps hésitantes, qu'elles devaient maintenant et définitivement, opter pour le FLN dont la France était désormais l'alliée, luttant, avec ce mouvement terroriste, contre l'ennemi commun : LE FRANÇAIS D'ALGERIE ! Et cette alliance n’avait aucune limite, ne souffrait d’aucun scrupule dès lors qu’elle permettrait de venir à bout de l’OAS… Pour preuve : au mois de mai 1962, la gendarmerie « blanche » arrêta un assassin de la pire espèce, Slémani Slimane, qui reconnut avoir torturé et tué vingt-sept Européens. Il fut inculpé. Katz le fit libérer et rapportera que ce dernier « lui rendra de grands services dans les jours les plus agités ».

       S'adressant à un membre de l'Exécutif Provisoire, Katz eut ces mots terribles : « Donnez-moi un bataillon de l’A.L.N. et je réduirai l’O.A.S. à Oran ». Ces propos, monstrueux et inqualifiables de la part d'un officier français firent l'objet d'une question à l'assemblée Nationale (J.O. du 8 mai 1962 - page 977). Ce « bataillon de l’ALN », Katz allait néanmoins se le procurer – avec l’assentiment discret de l’Élysée- en procédant au recrutement de la plus immonde espèce d’assassins qu’il eût été donné de voir…

       Ce renfort était constitué par les « martiens », ces révolutionnaires du mois de mars, qui, le cessez-le-feu prononcé, venaient sans danger rejoindre les rebelles. Ils étaient les combattants de la dernière heure, impatients de fêter dans le sang leur baptême de « libérateurs » et de se parer d’états de service de pillages et de tueries à faire pâlir le plus chevronné des assassins. Leur unique but était de se faire valoir et, surtout, de faire oublier qu’ils s’étaient abstenus de combattre durant sept années, attendant de connaître l’issue des armes pour se ranger du côté du vainqueur. De ce fait, ils étaient devenus les plus sanguinaires : exactions, tortures, viols, massacres d’Européens et de harkis se multipliaient, mais on n’en parlait pas. Leurs bandes anarchiques allaient être à l’origine du pogrom anti européen du 5 juillet 1962 à Oran qui fit plusieurs milliers de victimes… mais dont on taira le nombre exact.

       La fraternisation entre Gardes Mobiles et FLN était sans retenue : le soir, les premiers étaient généreusement pourvus en prostituées envoyées par les seconds. On ne peut, dès lors, s'étonner de l'attitude passive qui fut celle de Katz et de ses gendarmes lors de la tuerie du 5 juillet… Sur ce point, rappelons cette anecdote impliquant un officier français musulman, le lieutenant Rabah Kheliff qui commandait la 4e compagnie du 30e BCP (Bataillon de Chasseurs Portés). Le 5 juillet 1962, celui-ci, apprenant que des civils européens étaient regroupés en divers points de la ville d’Oran dans l’attente d’être exécutés, décida de passer outre les ordres de Katz de ne pas intervenir et de se porter à leur secours.  Il prévint par téléphone son colonel, qui répondit : « Faites selon votre conscience, quant à moi je ne vous ai rien dit ».

       À la tête de la moitié de sa compagnie, le lieutenant Kheliff gagna un des points de regroupement, devant la préfecture. « Il y avait là une section de l’ALN, des camions de l’ALN et des colonnes de femmes, d’enfants et de vieillards européens dont je ne voyais pas le bout. Plusieurs centaines, en colonnes par trois ou quatre, qui attendaient là avant de se faire zigouiller » rapportera-t-il. Le lieutenant Kheliff exigea et obtint du préfet, Souiyah El Houari, leur libération. S’étant quelque peu éloigné de son détachement, il fut lui-même pris à partie et blessé par des civils algériens, puis dégagé par ses hommes, à qui il interdit d’ouvrir le feu. Après quoi, il établit des patrouilles sur les axes routiers menant à l’aérodrome et au port pour « arracher littéralement » des malheureux des mains de leurs agresseurs.

       À la suite de cet acte héroïque, il fut mis aux arrêts de rigueur, et convoqué par Katz qui lui adressa ces mots terribles : « Si vous n'étiez pas arabe, je vous casserais ! ».

       La « victoire » acquise, l’indépendance accordée à ses alliés, KATZ quitta Oran pour la Métropole le 13 août 1962, après avoir fait l’objet, le 4 août, d’une citation à l’ordre de l’armée comportant l’attribution de la Croix de la Valeur Militaire avec palme pour, entre autres, « avoir su rétablir et préserver avec force et dignité l’autorité légale et l’ordre public »... décoration qui lui sera remise par le Ministre des armées, Pierre Messmer. Une nouvelle étoile vint également rappeler ses « bons et loyaux services ». De Gaulle savait payer ses séides !…

       Nommé fin 63 à la tête de la 4ème Région Militaire (Bordeaux), il quitta le service armé début 1968 avec le grade de général d’armée (5 étoiles).

       Une plainte pour « complicité de crime contre l’humanité  et obéissance à des ordres criminels » fut déposée le 16 octobre 1999 entre les mains du doyen des juges du Palais de Justice de Paris au nom de 47 familles des victimes du massacre du 5 juillet à Oran ainsi que du « Comité Véritas »(1). Cette plainte fut déclarée irrecevable mais suivie d’une décision par le juge de non informer. Un appel de cette décision n’aura pas de suite en raison du décès du « Boucher d’Oran » intervenu le mardi 6 mars 2001 à Amélie-les-Bains (66). Rejeté par ses pairs, il finira ses jours, seul, et sa famille choisira de l’inhumer au cimetière de ROSAS, en Espagne.
José CASTANO       
e-mail : joseph.castano0508@orange.fr

(1) - Depuis la « Jus Resistendi » du Droit romain jusqu’à l’article 122-4 du Code Pénal français actuel qui stipule : « N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte commandé par l’autorité légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal », il paraît probable que Joseph Katz, aurait perdu le procès que VERITAS lui avait intenté car il avait, à l’évidence, consenti à l’exécution d’un ordre criminel de de Gaulle consistant en la consignation des troupes françaises en leurs casernements (22 000 hommes) alors que les Français d’Oran se faisaient massacrer en grand nombre, le 5 juillet 1962.
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DE GAULLE CONTRE LE GAULLISME
Envoyé par M. P. Barisain
https://www.reperes-et-jalons.com/de-gaulle-contre-le-gaullisme
Conclusion du livre
Du Vice-Amiral Muselier (Editions du Chêne- Paris)….

        Dans ce livre le Vice-Amiral Muselier parachève le portrait réalisé par Louis Rougier : le personnage est bien un mégalomane - les médecins disent avec plus de précision technique, au vu des symptômes : un paranoïaque. -
        Pour notre part nous ajouterons, ainsi qu'on pourra le constater par la suite, que ce paranoïaque, comme beaucoup d'analogues dans l'Histoire, a été responsable de la mort et du malheur de millions de personnes…
        La Rédaction

        J'ai voulu fixer, pour les historiens de l'avenir, les faits importants auxquels j'ai pris part ainsi que les conditions dans lesquelles s'est développé le mouvement de la France combattante. Les détails de cette période ardente formaient trois volumes. Les difficultés techniques actuelles de publication m'ont amené à condenser le récit en un seul. Certains documents ayant paru, parfois in-extenso, dans les ouvrages suivants : De Gaulle dictateur (De Kérillis), Adventure in diplomacy de Kenneth Pendar, etc. et dans divers périodiques anglais ou américains, il m'a semblé superflu de les reproduire à nouveau. Par ailleurs, afin de ne pas exciter les passions, j'ai préféré ne pas publier encore certains documents et supprimer certains passages du texte original.
        Je décrirai, dans un prochain ouvrage, les événements qui se sont déroulés après ma rupture avec le général en 1942.
Dr. Bernard Lefèvre
* *
*

        En juin 1940, le général Charles de Gaulle était sous-secrétaire d'Etat à la Guerre dans le cabinet Paul. Reynaud. Envoyé en mission à Londres, auprès de M. Churchill, sa présence en Angleterre au moment propice, ses relations avec le Premier Ministre, lui avaient permis de lancer, le 18 juin 1940, par la radio de la B. B. C. l'appel à la résistance et la phrase immortelle : " La France a perdu une bataille, mais la France n'a pas perdu la guerre. " Ses études théoriques sur l'emploi des chars d'assaut et la mécanisation de l'armée avaient fait sensation dans les milieux militaires, et la rupture du front français par attaque brusquée de formations blindées et motorisées donnait un singulier éclat à ses théories en en fournissant la plus brillante application. Au moment de l'Armistice, le gouvernement britannique avait besoin d'un homme capable, par son éloquence, de galvaniser la résistance et d'entraîner l'empire français. De Gaulle s'était trouvé juste à point, à l'endroit et au moment voulus. Il avait en main des cartes superbes, et j'ai montré comment son appétit de pouvoir personnel, son orgueil et son manque de sens politique l'ont amené à les gaspiller.

        Dés qu'il eut obtenu de Churchill sa reconnaissance comme chef de tous les Français qui, où qu'ils soient, se rallieraient à lui pour défendre la cause alliée, il évita soigneusement d'accepter le concours d'officiers généraux plus anciens et plus connus que lui. Seuls, le général Catroux, le général Legentilhomme et moi-même acceptâmes de nous grouper autour de lui, en renonçant à nos prérogatives de grade pour ne songer qu'à la restauration de la patrie. Mais la volonté de De Gaulle d'être le chef absolu de la force militaire française en formation contribua à écarter du parti de la résistance plusieurs grands chefs et les formations et les territoires sous leurs ordres. Malheureusement pour la France, de Gaulle, excellent commandant de groupe de chars, n'avait ni les connaissances générales ni l'esprit politique nécessaire pour la tâche qu'il avait assumée. L'échec de ses négociations de l'été 1940 avec les généraux Nogues et Mittelhauser a donné à la guerre une tournure qu'elle n'aurait pas eue si de Gaulle avait agi avec plus de diplomatie et moins d'orgueil dès le début.

        L'avenir fera toute la lumière souhaitable sur ces négociations qui firent perdre à la France la possibilité de jouer un rôle beaucoup plus vaste dans la conduite de la guerre que cela n'a été le cas. Sa vanité l'empêchait d'écouter les conseils de ses collaborateurs les plus avisés; les fautes se multipliant, il devint difficile de masquer l'insuffisance du chef. Pendant prés de vingt mois, nous passâmes une partie de notre temps à essayer de parer aux conséquences de ses erreurs. Souvent, par ignorance, il sacrifia les intérêts français; souvent, pour les défendre, au contraire, il usa de méthodes maladroites qui nuisaient à notre cause en indisposant nos alliés. A l'intérieur même du mouvement, ses façons d'agir inadmissibles, et les moyens employés par son entourage pour assurer son hégémonie, arrivèrent à décourager la plupart de ses collaborateurs, après avoir écarté du mouvement un grand nombre d'hommes qui auraient volontiers rallié un chef plus humain. " Diviser pour régner " semblait être sa devise, et il n'hésitait pas à employer ou à laisser employer par ses hommes de confiance des méthodes de corruption, morale ou financière, tout en se comparant à la plus pure de nos héroïnes nationales.

        Les hommes et les officiers qui nous ralliaient étaient de deux sortes : une agissante minorité d'aventuriers et d'intrigants pour qui le mouvement de la France libre représentait souvent une chance inespérée de se faire oublier en France et d'exercer leurs talents sur un terrain vierge; la grande majorité était heureusement des volontaires de carrière - ou d'occasion. - qui avaient fait, pour nous rejoindre, un sacrifice immense, celui de leur pays, de leur métier et de leur famille, que peu espéraient revoir. Ceux-ci étaient animés d'une flamme magnifique..
        Le rôle d'un chef digne de la confiance de ses hommes était, avant tout, de séparer le bon grain de l'ivraie, de chasser les aventuriers, et de créer avec le groupe de patriotes ardents qui s'est formé dès le début à Londres une communauté d'hommes qui serait demeurée un véritable symbole de liberté pour la France enchaînée, et la première arme de son affranchissement.
        Au lieu de cela, qu'a fait De Gaulle ? Bien loin d'éliminer les individus douteux qui cherchaient à s'introduire dans le mouvement, il leur confia les postes où l'on avait le plus besoin d'hommes parfaitement intègres.

        Quant aux marins, aux soldats, aux simples héros qui avaient quitté tout et se préparaient à un sacrifice plus grand encore, ils attendaient dans l'oisiveté de la vie de caserne que l'on voulut bien comprendre leur impatience et utiliser leur ardeur... Cependant que le général, plus soucieux de gloire politique que de la victoire militaire, gaspillait, une à une, les chances de notre mouvement dans des intrigues inutiles et nuisibles. Quand, enfin, il se décida à envoyer ces hommes admirables au combat, ce fut pour les engager dans une lutte fratricide contre des français au mépris des engagements solennels qui constituaient le principe même de notre mouvement.
        De Gaulle, souvent à court d'idées, semblait désirer étouffer les personnalités. Son but personnel était de se faire reconnaître comme l'incarnation de la France, exactement comme le maréchal Pétain, et, de ce fait Pétain apparut bientôt comme son principal ennemi. Son intransigeance vis-à-vis de tous ceux qui, dès les premiers jours, ne s'étaient pas rangés sous ses ordres, écarta bien des ralliements, et ses appels enflammés contre les gens de Vichy risquèrent de précipiter davantage et plus vite les gouvernements, successifs du maréchal dans les bras de l'Allemagne, et d'amener la guerre entre la France et l'Angleterre. Son éloquence, soit par la radio, soit dans les conversations publiques, et privées, avec les ministres et les hautes personnalités britanniques, s'exerça constamment dans ce sens: il semblait oublier que nos ennemis n'étaient pas des Français. Il s'obstinait à ne pas comprendre qu'il fallait, avant tout, réconcilier les Français entre eux, et gagner à notre cause les égarés que la défaite avait éloignés du parti de l'espoir et de la liberté.

        De par son accord du 7 août 1940, avec Winston Churchill, De Gaulle était le chef d'une force militaire française. Il pouvait recruter le personnel civil nécessaire au fonctionnement des services de cette force mais il ne tarda pas à multiplier ce personnel civil et à transformer son mouvement purement militaire au début, en un mouvement politique. Influencé d'abord par quelques jeunes gens ambitieux et extrémistes, il écarta progressivement ses collaborateurs républicains dès août 1940, il fit remplacer la devise : " Liberté, Egalité, Fraternité " par " Honneur et Patrie ", aux émissions françaises à la B. B. C. Puis, comprenant, sur mes conseils d'ailleurs, que le peuple français ne voudrait pas entendre parler de l'instauration d'un pouvoir despotique, ou d'un retour à la monarchie, il glissa apparemment vers la gauche, et se donna l'allure d'un général républicain.

        Il parla de constituer, à Brazzaville, une assemblée de délégués français, à titre consultatif, mais y renonça rapidement et se borna à créer un Conseil de défense de l'empire, qu'il prit soin de ne jamais réunir. Puis, en septembre 1941, il créa le Comité national, composé en presque totalité d'hommes dont il disposait entièrement et qu'il pouvait d'ailleurs renvoyer à son gré. Les membres du Comité national avaient les pouvoirs dévolus normalement aux ministres français, mais, pour qu'un décret fût valable, il suffisait qu'il fût revêtu de la signature du général et de celle d'un des commissaires nationaux, et non du commissaire national responsable. Aucun, contrôle n'existait, le Comité consultatif prévu dans l'ordonnance n° 16 du 24 septembre n'ayant pas été constitué avant la convocation, en 1943, de l'Assemblée consultative d'Alger.
        C'est ainsi que le mouvement des Français combattants, qui prétendait représenter la France, fut dirigé par un apprenti dictateur incompétent, pourvu de pouvoirs plus étendus que ceux des monarques les plus absolutistes.

        Une telle organisation ne pouvait pas obtenir l'accord du peuple français, resté foncièrement républicain, et risquait de le conduire à la guerre civile.
        Le danger était d'autant plus grand que De Gaulle, par tous les moyens, a fait croire à nos alliés qu'il était plébiscité par le peuple puis, en fermant ce cercle vicieux, a cherché à persuader, par sa propagande et par ses agents, les Français de France que son organisation était parfaite et qu'elle recevait l'appui intégral des alliés, et que ces derniers la reconnaissaient comme un véritable gouvernement. Or, si De Gaulle, eut, au début du moins, l'appui personnel de Churchill, s'il profita ensuite du fait que le gouvernement britannique ayant largement misé sur lui, chercha, malgré toutes ses fautes, à le soutenir, quoique l'appréciant à sa juste valeur, il n'a jamais eu l'appui complet du gouvernement des Etat-Unis. En effet, la démocratie américaine ne pouvait, sans renier tous ses principes, l'appuyer : Le State Department n'oublia jamais l'occupation de Saint-Pierre-et-Miquelon. décidée sans l'accord des alliés. A la fin de 1942, du fait de son caractère, de son ambition, de ses fautes accumulées, De Gaulle n'avait pas permis au mouvement de la France libre de prendre l'essor qu'il aurait pris sans lui.

        Cet état de fait avait amené le morcellement, le compartimentage de la France et de son empire en un certain nombre de portions rivales, soumises à des chefs qui s'enviaient, et qui, la plupart, ne songeaient qu'à leurs propres ambitions. Cet état de choses risquait d'amener la guerre civile ou, au moins, la perte de certaines de nos colonies. Le peuple de France était alors en droit de se demander aux mains de quel dictateur il allait être livré, il avait le choix entre la dictature Pétain-Laval, sous la coupe d'Hitler, la dictature De Gaulle, appuyée par l'Angleterre, et la dictature Darlan-Giraud soutenue par l'Amérique. Les vrais démocrates : le peuple qui souffrait, qui travaillait et qui résistait, désespérant de ses chefs, mettait tout son espoir dans le communisme, dont De Gaulle favorisait ainsi, bien involontairement, la croissance.
        Lorsqu'en juin 1943, le State Department, qui voulait éviter une perte de prestige, se rendit compte qu'il ne pouvait compter sur le général Giraud et rapprocha sa ligne de conduite de celle du Foreign Office, le général De Gaulle sembla modifier son attitude. Ce renversement apparent de politique lui permit d'obtenir la reconnaissance du Comité national par les Américains.

        Après avoir, par son goût du pouvoir personnel et ses fautes politiques nombreuses - dont le choix d'un entourage trop légitimement suspect aux républicains n'est pas la moindre - rejeté une partie du peuple français vers le parti communiste qui avait su prendre une part essentielle dans la résistance intérieure, et cela au prix de nombreuses victimes, le général de Gaulle appela au pouvoir les chefs de ce parti. Depuis lors, nous avons assisté, aussi bien en politique intérieure qu'en politique extérieure, aux changements d'attitude déconcertants du général De Gaulle. Après avoir promis à plusieurs reprises la restauration des institutions républicaines et s'être fait le défenseur des conseils généraux, il a refusé d'appliquer la loi Tréveneuc, qui permettait d'assurer le retour à la légalité républicaine. Il nous a doté du régime du référendum ainsi que de la loi électorale actuelle d'où sont issus le tripartisme... et la confusion.

        En politique extérieure, il a joué successivement l'une contre l'autre les cartes superbes qu'il avait en mains, opposant tantôt l'Amérique à l'Union Soviétique, tantôt enfin l'URSS aux Anglo-Saxons. Après avoir signé à Moscou l'alliance franco-soviétique, il se fait actuellement le champion du bloc occidental. Le résultat de ces revirements successifs est que, pas plus en politique intérieure qu'en politique extérieure, personne ne peut faire fond sur lui.
        Ses promesses inconsidérées aux Syriens, aux Libanais et aux Indochinois - promesses qu'il a tout fait pour rompre quand elles se sont révélées gênantes - font actuellement perdre à la France des positions stratégiques, économiques et culturelles pour lesquelles des générations de Français se sont sacrifiés, et cela sans la moindre compensation. Sa politique vis-à-vis des Français d'outre-mer a provoqué jusqu'en Afrique du Nord un bouillonnement dangereux.

        Méprisant la leçon tant de fois répétée de l'Histoire - utilisant l'enthousiasme et la foi patriotique des Français, pour qui il fut pendant plusieurs années le symbole de la lutte et de la liberté, et qui ne comprennent pas que l'homme est bien loin de se confondre avec le symbole - il continue sa route vers un but bien défini : la prise du pouvoir personnel dans un régime présidentiel.
Ealing-Paris, novembre 1942, août 1946.
Pages 388-393
https://www.reperes-et-jalons.com/articles/dossier-noir-du-gaullisme


En traversant ma ville…
Par M. Marc Donato


          L'hiver boréal et viral est dépassé, le printemps a trépassé et nous sommes surpassés par un été brutal qui nous tombe dessus sans ménagement. Soleil et chaleur sont de retour, avec des touristes parcourant nos rues, exotiques pour certains, à la recherche d'une ombre bienfaisante, d'une terrasse accueillante. Température aidant, ces dames et ces demoiselles arborent des tenues légères. Cette année, la mode est au short, les décolletés perdurent, les chignons font de la résistance.

          Virus semble s'éloigner… Plus de masques, assurément. Au diable Corona ! Légèreté aussi dans le comportement. Mais attention… Il n'y a pas de retour que chez Martin Guerre, comme me disait mon copain Depardieu au téléphone récemment, les bâtons comme les manivelles font parfois aussi un retour douloureux. Respectons encore les barrières…
          Foin de pessimisme ! Corona nous a été donné par l'ignoble Nature, la même, la noble, l'adorable, l'estimable, qui nous a offert aussi et surtout la Femme. Sacrée Créatrice, cette Nature, capable du meilleur comme du pire… Excusez, je corrige ce qui pourrait passer pour une offense : du pire comme du meilleur. J'ai évacué le premier… Le meilleur, c'est vous, Mesdames, qui dispensez à nos pauvres yeux d'hommes ébaubis un spectacle à nul autre pareil, sans cesse renouvelé, toujours aussi merveilleux. J'ai osé tresser pour vous ces quelques vers tout en votre honneur pour esquisser rime après rime un portrait de l'éternel féminin. Un hymne un peu iconoclaste, j'en conviens. Mais Tristan Bernard l'a écrit avant moi : "C'est Dieu qui a créé le monde, c'est le diable qui le fait vivre".
          Désolé pour vous, Messieurs, avec moi, continuez à fantasmer de conserve !


Prière d'éTé

          Pour ces joues rehaussées au teint couleur de pêche
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces peaux rissolées au soleil du Midi,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces dos révélés qu'Hélios a mordorés,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces cous dégagés par d'érotiques chignons,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces épaules rôties qu'on voudrait bien croquer,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour toutes ces échancrures aux reliefs enchanteurs,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces gorges ouvertes à nos regards envieux,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces seins provocants dans leur écrin offerts,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces robes légères esquissant des contours,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces jeans taille basse, ces hanches libérées,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour tous ces papillons posés au bas des dos,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces verts tatouages gravés aux creux des reins,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces pantalons blancs et ces strings soulignés,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour ces jambes galbées conduisant au bonheur,
          Je dis Merci, mon Dieu.
          Pour toutes ces tentations, pour toutes ces frustrations,
          Pour toute cette torture que tu oses m'infliger,
          Je ne dis pas Merci, mon Dieu.


          Ce poème libertin a été inspiré par le très mystique Cantique des Créatures de saint François d'Assise " Loué sois-tu, Seigneur…". Pourquoi se gêner ? Qui a dit qu'il vaut mieux s'adresser au Bon Dieu qu'à ses saints ? Un ignare qui n'a probablement jamais compté les marches qui, de saint Abraham à saint Zotique, forment l'escalier menant au trône céleste. Comme saint François niche quelque part au milieu du chemin, j'y ai fait une pause pour lui demander l'inspiration. Avouez qu'il a été de bon conseil.

Marc Donato - juin 2020



Si tous les coudes du monde…
Par M. Marc Donato

          Dans un de ses jugements, Salomon, Jérôme, notre directeur de la Santé, pas le prophète, encore que, en guise de prophétie, bas les masques, il nous a régalés. Jérôme, donc, nous apprenait qu'il y avait des gestes barrières qu'on devait appliquer scrupuleusement pour éviter de disperser le virus. Parmi eux, le coude jouait un rôle non négligeable.
          - Eternuez dans votre coude !
          Je me suis présenté devant un miroir pour voir ce que cela donnait. Je n'ai pas été déçu ! Ma face appuyée sur ce coude levé m'a donné un piètre reflet de moi-même, l'image d'un pleutre, d'un peureux qui semblait dire au virus,
          - Va-t-en, j'ai peur, je me cache…
          Essayez, vous verrez ! Comment alors affronter l'ennemi, ainsi affaibli psychologiquement ?
          Mais pire encore. Je me voyais dans la rue, le coude levé pour éternuer innocemment, et là, surpris par je ne sais quelle langue de vipère, j'imaginais les appréciations.
          - Oui, je vous assure, il lève le coude, et pas qu'une fois dans la journée…
          Allez faire comprendre à ces délateurs que j'exécutais fidèlement les ordres de notre éminent administrateur. Ma réputation de sobriété en prenait un sacré coup ; toute une vie détruite par un éternuement. Pourtant, si je devais m'adonner à la boisson, ce serait avec des boissons alcooliques, certes, mais j'y mettrais certainement un peu d'eau de façon à ne consommer que de l'hydroalcoolique. Ainsi je respecterais un autre geste barrière en sauvant ma vie et ma réputation d'un même coup.

          J'éternue dans mon coude, je veux bien, mais après comment me moucher du coude ? Plus moyen… Je garderai ma morve et mes chandelles, tant pis, refusant à coup sûr de reprendre les postillons infectés que j'aurai remisés auparavant dans le pli de ce bras salvateur. Je ne mouche pas du coude habituellement, mais maintenant, finie plus que jamais la solidarité, l'entraide. Et oui, y avez-vous pensé ? Chacun est censé avoir éternué dans son coude et avec des millions de coudes infectés, plus de coude à coude… Distanciation oblige. Partant, plus question de se serrer les coudes. Egoïstement, du chacun pour soi et le virus pour les autres !
          Il y en a une dernière que j'ai gardée sous le coude. J'humidifie mes coudes avec mes éternuements, soit, mais essayez de dire rapidement cinq fois de suite cette phrase écrite un matin d'égarement par Molière, à moins que ce soit par Marcel Proust, je ne sais plus!
          J'mouille mes coudes
          Mes coudes mouillent
          Est-ce que je mouille mes coudes ?

          Pas facile. On patine vite. On frise la contrepèterie, mais de contrepet il n'y a point et, faute d'être contorsionniste, je vous assure que je ne descendrai pas plus loin que mes coudes, que je continuerai à les assaisonner à la sauce coronavirus pourvu que mon arthrose sénile ou ma capsule scapulo-humérale me permettent encore le lever de coude.
          J'ai bien ri quand j'ai appris que le creux du bras s'appelait scientifiquement la fosse cubitale, une fosse septique, quoi !!! Somme toute, mieux vaut celle-là qu'une autre. Voyez ce que je veux dire ? Corona serait trop content de pasticher, entonnant :
          - C'est la fosse(e) finale…
          Protégeons-nous, mes frères, pour mettre une barrière entre nous et cette dernière fosse… Eternuons dans notre coude.
          Je ne peux m'empêcher de lever mon verre avec mon coude :
          - Santé !

Marc Donato - juin 2020



Conversion forcée
PAR KAMEL DAOUD
Envoyé Par A. Bouhier
Purger la mémoire chrétienne de Sainte-Sophie :
Un rêve islamiste réalisé par Erdogan?


        Il y a quelque chose qui rend triste, inquiet, et met en colère dans la volonté d'Erdogan de convertir en mosquée la fameuse basilique Sainte-Sophie. Triste parce qu'on voit là un monument international, un beau triomphe de la pierre, tomber entre les mains d'un homme qui veut en faire le butin de sa guerre et l'instrument de sa politique de folie calculée. On assiste, incrédule, à la disparition d'un symbole de la Turquie laïque, et c'est un califat turc qui désormais s'affiche dans son ambition impériale rejouée pour renflouer les fantasmes de recrutement dans le monde dit musulman.
        C'est aussi une conversion qui met en colère car c'est la même colère à chaque fois que l'on voit un puissant du moment étendre son mauvais goût, sa dictature et son aigreur aux monuments, aux pierres, aux arts ; il y a même quelque chose de commun, dans les intentions, entre la "conversion", au pas de charge, de la basilique et la destruction des bouddhas par les talibans il y a quelques années, ou le vandalisme contre les églises dans le territoire de l'État islamique. Là. bas, on avait dynamité des colosses magnifiques ; ici, on va détruire un symbole d'apaisement de l'Histoire, de la pluralité de la mémoire de la région, et en faire un lieu de triomphe de l'ego et de l'intolérance.

        Il reste enfin ce qui inquiète beaucoup : si, en Occident ou ailleurs, on voit déjà dans la volonté d'Erdogan de s'offrir, avec le rapt de la basilique, une mosquée géante, après la folie ridicule des plus hauts minarets de mosquée pour d'autres dictateurs, une manœuvre pour récréer un point focal médiatique qui fera "oublier", entre autres, le dossier libyen, au"Sud ", le signal est bien différemment interprété. La basilique redevenue mosquée, c'est le triomphe "matériel" de cette nostalgie qui traverse le monde dit musulman pour un passé souvent imaginaire.

        La conversion sera vue comme un acte de cette "restauration" qui est l'obsession idéologique des trois derniers siècles chez les élites de cette région. Ce désir du passé, on peut l'admettre comme le rêve compréhensible de cette géographie, son espoir de retour à la puissance, et il est une tradition chez les nations. Mais là, il s'agit d'un artifice dangereux. Erdogan le sait et en fait un épisode de sa volonté de s'offrir le califat vacant depuis la fin de l'Empire ottoman.

        Ce dictateur sait aussi que le signal va être fort pour d'autres "conversions", l'effacement, peu à peu, de l'histoire chrétienne au" Sud ", le basculement des souverainetés et des âmes vers le désir d'un empire qu'il offre à revivre. Cette évacuation géographique et confessionnelle est ce qui lui servira pour reconstruire son royaume - avant lui, Daech en avait tellement rêvé en exterminant les chrétiens en Orient et en vandalisant les églises. Les islamistes, tous, d'une manière ou d'une autre, rêvent de cette épuration, bien qu'on se le cache et qu'on évite de le dire pour ne pas accentuer les islamophobies de l'autre côté.

        Ainsi, la conversion de la basilique Sainte Sophie aura de graves conséquences. Elle se présente comme une réappropriation là où elle n'est qu'une ruse de dictateur. Elle prélude à des destructions ailleurs, des purges de la mémoire plurielle et à une christianophobie qui aura le prétexte le plus solide désormais. Elle signe surtout la possible fin d'une époque, d'une possibilité de " croire ensemble " et différemment, d'une possible tolérance, d'un apaisement du passé.

        La transformation de la basilique, qui aurait pu rester un musée du passé ouvert au reste du monde, va doper les intolérances et faire croire à des anti-croisades imaginaires, auprès des esprits les plus aigris de notre époque. Erdogan sait ce qu'il vise au "Nord" comme au "Sud". Cette réalité, même si on va crier à l'alarmisme et à l'exagération, sera visible peu à peu. Car, au fil des décennies et des folies, certains révèlent ce qu'ils veulent : nous refaire vivre le passé pour nous voler nos présents et nos futurs.
        Au plus secret, Erdogan ne rêve pas d'une religion mais d'une guerre de religion.
KAMEL DAOUD
Le Point 2498, 9 juillet 2020


Esclavage : 12 choses méconnues à connaître pour la vérité historique ....
Envoyé Par P. Barisain

          On peut ajouter une 13ème vérité occultée dans les manuels d'histoire de l'Education nationale. C'est Charles X qui a mis fin à l'esclavage des Barbaresques en débarquant à Sidi Ferruch en 1830. Cette expédition militaire a réussi, (les précédentes avaient échoué). Cette expédition a été préparée pendant 3 ans. Elle a mis en oeuvre une flotte de 600 bâtiments de la Royale commandés par Duperré et cette expédition a débarqué 27 000 hommes sous le commandement de Marmont.

          La revue d'études et de formation politique L'Héritage publie cet excellent rappel :

          On parle beaucoup de l'esclavage, dans les médias, à l'école, dans les cénacles politiciens, dans des manifestations même.

          Mais a-t-on une vision complète et réaliste de ce terrible phénomène ?

          Voici 12 réalités qui sont ignorées par la plupart des gens, même ceux qui parlent le plus d'esclavage.
          Ces vérités dérangeraient-elles une idéologie en particulier ou un agenda politique ?


          1) L'esclavage a été pratiqué très longtemps et presque partout ; mais son abolition est apparue dans le monde européen, sous la pression de l'Eglise catholique particulièrement.

          2) L'esclavage a constitué un progrès chez de nombreux peuples primitifs dans la mesure où, auparavant, en cas de conflit, les hommes vaincus étaient massacrés (les femmes étant " mariées " de force).

          3) Aux Etats-Unis, au moment de la Guerre de Sécession, seuls 2% des Blancs possédaient des esclaves (4,8% dans les Etats esclavagistes).

          4) Le général Lee, commandant des armées sudistes, était hostile à l'esclavage.

          5) De nombreux Blancs furent esclaves aux Etats-Unis et dans les îles. En 1640, dans les plantations de canne à sucre des Iles de La Barbade, 21 700 blancs sont recensés sur 25 000 esclaves. De 1609 à 1800, près des deux tiers des Blancs arrivent en Amérique comme esclaves.
          Au XVIIème siècle, il y eut davantage de Blancs déportés aux Amériques que de Noirs.

          6) Des Afro-américains possédaient eux aussi des esclaves. L'un des premiers propriétaires d'esclaves aux Etats-Unis fut un Noir (Anthony Johnson), qui avait d'ailleurs des serviteurs blancs.

          7) Le mot " esclave " vient du nom " Slave ", car les peuples slaves (d'Europe centrale et de l'Est) ont été victimes de la traite à très grande échelle (plusieurs millions) pendant des siècles, notamment par l'Empire ottoman.

          8) Du IXème au XIXème siècles, environ 2 millions d'Européens de l'Ouest - hommes, femmes et enfants - sont capturés par les musulmans et réduits en esclavage.
          Pendant des siècles, de nombreux hommes capturés sont - comme dans le cas des Slaves - castrés, opération qui entraîne la mort d'une grande partie d'entre eux. Quant aux femmes, elles sont souvent destinées à l'esclavage sexuel et livrées à la perversité de leurs " propriétaires ", ce qui est parfois aussi le cas des enfants.
          Pour donner une idée de l'ampleur de ces razzias, une lettre du 3 février 1442 adressée par un religieux qui résidait à Constantinople au prieur de Saint-Jean-de-Jérusalem (de l'ordre des hospitaliers) mentionne l'enlèvement par les Turcs de 400 000 chrétiens en seulement 6 ans.

          9) Pendant des siècles, les Barbaresques (occupant le Maghreb) terroriseront la Méditerranée et ses rivages où ils capturent des Européens, mais ils séviront aussi en Atlantique, jusqu'aux côtes anglaises. La France a conquis Alger, en 1830, pour mettre fin à ce fléau.

          10) C'est à l'intérieur de l'Afrique même que l'esclavage a eu le plus d'ampleur ; les Noirs s'y esclavagissaient entre eux.
          La traite interne à l'Afrique a concerné environ 17 millions de personnes.

          o La traite arabo-musulmane a concerné environ 14 millions de personnes.
          Enfin, en dernière position, la traite vers l'Amérique et les îles a concerné de 9 à 11 millions de personnes (noires et blanches).

          o La plupart des Noirs déportés vers les Amériques avaient été réduits en esclavage par d'autres Noirs puis revendus.

          11) Pour la traite transatlantique, une très grande partie des navires négriers appartenaient à des familles juives, étaient commandés par des Juifs et " ce commerce était principalement une entreprise juive " I d'après les historiens (juifs). Au milieu du XIXème siècle, aux Etats-Unis, 40% des Juifs possédaient des esclaves (contre 2% des Blancs).
          Dès le IXème siècle, en France, les Juifs étaient communément montrés comme les maîtres de ce " malheureux trafic ".

          12) L'esclavage existe encore dans certaines parties du monde arabo-musulman (des images de marchés aux esclaves ont été prises en Libye en 2017) ainsi qu'en Afrique : on estime que près de 40 millions de personnes dans le monde vivent encore en esclavage…
          Mais il existe aussi en Europe : aux Pays-bas, chaque année, plus d'un millier de jeunes filles sont victimes d'exploitation sexuelle par des jeunes proxénètes issus de l'immigration ; en Angleterre, dans la seule ville de Rotherham, entre 1997 et 2013, 1400 mineures ont été victimes de viols par des gangs pakistanais, des centaines de jeunes filles réduites à l'esclavage sexuel et à la prostitution.
Henri Ménestrel
Date: 18 juin 2020

          Bonus :
          Christiane Taubira, montrant que les élites savent certaines choses mais veulent les cacher par idéologie, explique qu'il ne faut pas trop évoquer la traite négrière arabe-musulmane pour que les " jeunes Arabes " " ne portent pas sur leur dos tout le poids de l'héritage des méfaits des Arabes " (L'Express, 4 mai 2006).

          Sources :
          La désinformation autour de l'esclavage, Arnaud Raffard de Brienne, Atelier Fol'Fer.

          Le Génocide voilé, Tidiane N'Diaye, Gallimard.
          La désinformation autour de la Guerre de Sécession, Alain Sanders, Atelier Fol'Fer.

          Les Négriers en terre d'islam, Jacques Heers, Perrin.

          https://www.chasse-maree.com/les-battelli-de-carloforte

Listes d’esclaves français

          D’abord vient la shoah. Puis la traite négrière. Et puis c’est tout. Car l’ordre mémoriel a ses priorités sur l’échelle du Mal. Et ses amnésies. Dans les médias, les programmes scolaires et la Loi, les rôles sont clairement définis entre victimes et coupables héréditaires, devant le tribunal de l’Histoire, et corollairement entre privilèges de discriminés positivement et devoirs de repentis : les uns sont condamnés à payer des crimes qu’ils n’ ont pas commis auprès d’autres qui ne les ont pas subit. Mais l’Histoire n’est pas si manichéenne et présente des évènements ébranlant ce verdict. Gare à celui qui ressuscite ces oublis volontaires. L’esclavage arabo-musulman de millions d’Africains dérange (voir cette interview de Tidiane N’Diaye). Les premiers n’y sont guère à leur avantage. Les historiens osent peu en parler par crainte de suspicion de mal-pensance et d’excommunication pour délit de croc-en-jambe dans la course à la victimisation et à la repentance.
          Mais il est un esclavage encore plus enfoui dans les tréfonds de la mémoire officielle. L’Histoire en fournit pourtant maint témoignages, comme cette lettre à la Reine datée de 1643 intitulée Les larmes et soupirs de deux milles François esclaves dans l’enfer d’Alger en Barbarie à la Reine régente, mère de Louis XIV. Durant les siècles que dura cet esclavage, des Français organisèrent, au péril de leurs vies, des missions de sauvetage pour racheter la liberté de leurs compatriotes captifs, tenant à cette occasion des sortes de listes de Schindler : des litanies de noms, de prénoms, d’âges, d’années d’asservissement, de prix de rachat. Vous n’en avez probablement jamais entendu parler. Tellement incorrectes, ces listes témoignent ligne après ligne de vérités à contre-courant des priorités mémorielles de la doxa contemporaine. (suite…)
Pour lire la suite, cliquez ICI


Lettre d'information - juillet 2020
www.asafrance.fr
Envoyée Par l'ASAF
      
Pour lire la lettre de juillet 2020

https://www.asafrance.fr/item/restaurer-l-autorite-urgence-absolue.html
https://www.asafrance.fr/index.php?option=com_acymailing&ctrl=archive&task=forward&mailid=223&key=QW0vZ3DQ&subid=41062-8lJichsxlQYR8a&tmpl=component
      
ALGERIE : A quand les excuses d'Alger pour la traite des esclaves européens ?

       En ces temps de repentance et d'ethno-masochisme, puisque ceux qu'il est difficile de désigner autrement que par le terme d'ennemis, vu leur comportement à l'égard de la France, s'amusent à jongler avec le contexte historique, alors, faisons de même.

          L'Algérie aux abois économiquement, ruinée par les profiteurs du Système qui depuis 1962 se sont méthodiquement engraissés en pillant ses ressources, a donc l'outrecuidance de demander des excuses à la France. Pourquoi pas d'ailleurs, puisque, comme le disait Etienne de la Boétie : " Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux " ?

          Des excuses donc pour avoir tracé en Algérie 54 000 kilomètres de routes et pistes (80 000 avec les pistes sahariennes), 31 routes nationales dont près de 9 000 kilomètres goudronnés, construit 4 300 km de voies ferrées, 4 ports équipés aux normes internationales, 23 ports aménagés (dont 10 accessibles aux grands cargos et dont 5 qui pouvaient être desservis par des paquebots), 34 phares maritimes, une douzaine d'aérodromes principaux, des centaines d'ouvrages d'art (ponts, tunnels, viaducs, barrages etc.), des milliers de bâtiments administratifs, de casernes, de bâtiments officiels, 31 centrales hydroélectriques ou thermiques, une centaine d'industries importantes dans les secteurs de la construction, de la métallurgie, de la cimenterie etc., des milliers d'écoles, d'instituts de formations, de lycées, d'universités avec 800 000 enfants scolarisés dans 17 000 classes (soit autant d'instituteurs, dont deux-tiers de Français), un hôpital universitaire de 2 000 lits à Alger, trois grands hôpitaux de chefs-lieux à Alger, Oran et Constantine, 14 hôpitaux spécialisés et 112 hôpitaux polyvalents, soit le chiffre exceptionnel d'un lit pour 300 habitants. Sans parler d'une agriculture florissante laissée en jachère après l'indépendance, à telle enseigne qu'aujourd'hui l'Algérie doit importer du concentré de tomates, des pois chiches et jusqu'à la semoule pour le couscous…

          Or, tout ce que la France légua à l'Algérie en 1962 fut construit à partir du néant, dans un pays qui n'avait jamais existé et dont même le nom lui fut donné par le colonisateur… Tout avait été payé par les impôts des Français. En 1959, toutes dépenses confondues, l'Algérie engloutissait ainsi 20% du budget de l'Etat français, soit davantage que les budgets additionnés de l'Education nationale, des Travaux publics, des Transports, de la Reconstruction et du Logement, de l'Industrie et du Commerce ! (Voir à ce sujet mon livre Algérie l'Histoire à l'endroit ).

          L'Algérie a exigé, et sur ce point comment ne pas être d'accord avec elle, que la France lui restitue les cranes de combattants vaincus par l'armée française lors de la conquête. Mais alors, quid des restes des dizaines de milliers d'esclaves européens dont des milliers de Français enlevés en mer ou par des razzia littorales, morts en Algérie et enterrés dans la banlieue d'Alger dans ce qui, avant la conquête était désigné comme le cimetière des chrétiens ? C'est en effet par dizaines de milliers que des hommes, des femmes et des enfants européens furent pris en mer ou enlevés à terre par les pirates barbaresques. De 1689 à 1697, Marseille perdit ainsi 260 navires ou barques de pêche et plusieurs milliers de marins et de passagers, tous ayant été réduits en esclavage. En 1718, la comtesse du Bourk, ses enfants et ses domestiques qui avaient embarqué à Sète pour rejoindre via Barcelone son mari ambassadeur en Espagne furent capturés en mer. La petite Marie-Anne du Bourk alors âgée de 9 ans, fut rachetée en 1720.
       Grâce aux rapports des pères des Ordres religieux dits de " rédemption des captifs ", qu'il s'agisse de l'Ordre des Trinitaires fondé par Jean de Matha et Félix de Valois, ou des Pères de la Merci, les Mercédaires, un ordre religieux fondé par Pierre Nolasque, nous connaissons les noms de milliers d'esclaves rachetés, ainsi que leurs villes ou villages d'origine, cependant que, faute de moyens, des dizaines de milliers d'autres ne le furent pas et moururent dans les chaînes.
       En 1643, le Père Lucien Héraut, prêtre de l'Ordre de la Trinité et Rédemption des Captifs, rentra en France avec 50 malheureux Français qu'il venait de racheter aux esclavagistes algérois. Faute de moyens, la mort dans l'âme, il avait laissé derrière lui plusieurs milliers d'autres Français, sans compter les milliers d'esclaves appartenant aux autres nations européennes enlevés en mer ou sur le littoral.
       Dans une lettre d'une grande puissance de témoignage adressée à Anne d'Autriche, Reine-Régente du royaume de France, le père Héraut se fit l'interprète des captifs, s'adressant à la reine en leur nom, afin de lui demander une aide financière pour les racheter.

Une lettre qui devrait clore les prétentions et les exigences d'excuses des descendants des esclavagistes algérois :

       " Larmes et clameurs des Chrestiens françois de nation, captifs en la ville d'Alger en Barbarie, adressées à la reine régente, par le R. P. Lucien Heraut, Religieux de l'Ordre de la Trinité et Rédemption des Captifs, 1643.
       " (…) ainsi qu'il arrive ordinairement aux vassaux de vostre Majesté, qui croupissent miserablement dans l'horrible esclavage (…) cette mesme necessité addresse aux pieds de sa clemence et Royalle bonté, les larmes et soupirs de plus de deux milles François de nation Esclaves en la seule ville d'Alger en Barbarie, à l'endroit desquels s'exerce les plus grandes cruautés que l'esprit humain puisse excogiter, et les seuls esprits infernaux inventer.
       Ce n'est pas, Madame, une simple exaggeration (…) de ceux, qui par malheur sont tombés dans les griffes de ces Monstres Affricains, et qui ont ressenty, comme nous, leur infernalle cruauté, pendant le long sejour d'une dure captivité, les rigueurs de laquelle nous experimentons de jour en jour par des nouveaux tourments: la faim, le soif, le froid, le fer, et les gibets (…) mais il est certain que les Turcs et Barbares encherissent aujourd'hui par-dessus tout cela, inventans journellement de nouveaux tourments, contre ceux qu'ils veulent miserablement prostituer, notamment à l'endroit de la jeunesse, captive de l'un et l'autre sexe, afin de la corrompre à porter à des pechés si horribles et infames, qu'ils n'ont point de nom, et qui ne se commettent que parmys ces monstres et furies infernales et ceux qui resistent à leurs brutales passions, sont écorchez et dechirez à coup de bastons, les pendants tous nuds à un plancher par les pieds, leur arrachant les ongles des doigts, brullant la plante des pieds avec des flambeaux ardents, en sorte que bien souvent ils meurent en ce tourment. Aux autres plus agés ils font porter des chaisne de plus de cent livres de poids, lesquelles ils traisnent miserablement partout où ils sont contrains d'aller, et apres tout cela si l'on vient à manquer au moindre coup de siflet ou au moindre signal qu'ils font, pour executer leurs commandements, nous sommes pour l'ordinaire bastonnez sur la plante des pieds, qui est une peine intollerable, et si grande, qu'il y en a bien souvent qui en meurent, et lors qu'ils ont condamné une personne à six cent coups de bastons, s'il vient à mourir auparavant que ce nombre soit achevé, ils ne laissent pas de continuer ce qui reste sur le corps mort.
       Les empalements son ordinaires, et le crucifiment se pratique encore parmy ces maudits barbares, en cette sorte ils attachent le pauvre patient sur une manière d'echelle, et lui clouent les deux pieds, et les deux mains à icelle, puis après ils dressent ladite Eschelle contre une muraille en quelque place publique, où aux portes et entrées des villes (…) et demeurent aussi quelque fois trois ou quatre jours à languir sans qu'il soit permis à aucun de leur donner soulagement.

          D'autres sont écorchez tous vifs, et quantitez de bruslez à petit feu, specialement ceux qui blasphement ou mesprisent leur faux Prophete Mahomet, et à la moindre accusation et sans autre forme de procez, sont trainez à ce rigoureux supplice, et là attachez tout nuds avec une chaine à un poteau, et un feu lent tout autour rangé en rond, de vingt-cinq pieds ou environ de diametre, afin de faire rostir à loisir, et cependant leur servir de passe-temps, d'autres sont accrochez aux tours ou portes des villes, à des pointes de fer, où bien souvent ils languissent fort long temps.
       Nous voions souvent de nos compatriots mourir de faim entre quatre murailles, et dans des trous qu'ils font en terre, où ils les mettent tout vif, et perissent ainsi miserablement. Depuis peu s'est pratiqué un genre de tourment nouveau à l'endroit d'un jeune homme de l'Archevesché de Rouen pour le contraindre a quitter Dieu et nostre saincte Religion, pour laquelle il fut enchaisné avec un cheval dans la campagne, l'espace de vingt-cinq jours, à la merci du froid et du chaud et quantitez d'autres incommoditez, lesquelles ne pouvant plus supporter fit banqueroute à notre saincte loy.
       Mille pareilles cruautez font apostasier bien souvent les plus courageux, et mesme les plus doctes et sçavants : ainsi qu'il arriva au commencement de cette presente année en la personne d'un Père Jacobin d'Espagne, lequel retenu Captif, et ne pouvant supporter tant de miseres, fit profession de la loy de Mahomet, en laquelle il demeura environ six mois, pendant lesquels (…) il avoit scandalisez plus de trente mille Chrestiens esclaves de toutes nations (…) il se resolu à estre brullé tout vif, qui est le supplice ordinaire de ceux qui renoncent à Mahomet (…)en suite deqoy il fut jetté en une prison obscure et infame (…) Le Bascha le fit conduire au supplice(…) il fut rosty à petit feu un peu hors de la ville près le Cimitiere des Chrestiens.
       Nous n'aurions jamais fait, et nous serions trop importuns envers votre Majesté, de raconter icy toute les miseres et calamitez que nous souffrons : il suffit de dire que nous sommes icy traittez comme de pauvres bestes, vendus et revendus aux places publiques à la volonté de ces inhumains, lesquels puis apres nous traittent comme des chiens, prodiguans nostre vie, et nous l'ostans, lors que bon leur semble (…).
       Tout cecy, Madame, est plus que suffisant pour émouvoir la tendresse de vos affections royales envers vos pauvres subjets captifs desquels les douleurs sont sans nombre, et la mort continuelle dans l'ennuy d'une si douleureuse vie (…), et perdre l'ame apres le corps, le salut apres la liberté, sous l'impatience de la charge si pesante de tant d'oppressions, qui s'exercent journellement en nos personnes, sans aucune consideration de sexe ny de condition, de vieil ou du jeune, du fort ou du foible : au contraire celuy qui paroist delicat, est reputé pour riche, et par consequent plus mal traitté, afin de l'obliger à une rançon excessive, par lui ou par les siens (…) nous implorons sans cesse, jettant continuellement des soupirs au Ciel afin d'impetrer les graces favorables pour la conservation de vostre Majesté, et de nostre Roy son cher fils, destiné de Dieu pour subjuguer cette nation autant perfide que cruelle, au grand souhait de tous les Catholiques, notamment de ceux qui languissent dans ce miserable enfer d'Alger, une partie desquels ont signé cette requeste en qualité, Madame, de vos tres humbles, tres obeyssants, tres fidels serviteurs et vassaux les plus miserables de la terre, desquels les noms suivent selon les Dioceses et Provinces de votre Royaume. "


          Le numéro du mois de septembre de l'Afrique Réelle sera un numéro spécial consacré à la repentance et à l'esclavage et, le 1er septembre, je publierai un livre intitulé Esclavage, l'histoire à l'endroit, une arme de réfutation de la doxa culpabilisatrice. Les lecteurs de ce blog et les abonnés à la revue seront informés dès sa parution.
Bernard LUGAN
15 juillet 2020
Afrique réelle
Plus d'informations sur le blog de Bernard Lugan
https://bernardlugan.blogspot.com/

Rediffusé sur le site de l'ASAF : www.asafrance.fr


La Colonisation :
Un crime contre l'humanité…
Par M.José CASTANO,

Qui sont les criminels ?

30 janvier 1956, à Sétif, toute la famille Cruet sera sauvagement
assassinée. Voici deux des enfants, le père et le grand-père



" Le facteur initial et fondamental qui doit décider les Français à évacuer et à déguerpir est un climat de terreur permanente et de peur perpétuelle "
(Radios Arabes)

       La famille Barral fut exterminée le 11 mai 1957. Dans une chambre, Josiane, 12 ans, violée avant d'être tuée de trois coups de couteau. Suzy, poignardée. Gérard, 16 ans, pieds et poings liés, égorgé. Madame Barral, égorgée. Monsieur Barral, 55 ans, bâillonné, les mains liées derrière le dos, égorgé avec un raffinement de cruauté. Les enfants seront les principales victimes de cette cruauté comme le démontrent ces taches de sang -qui expliquent ses blessures- sur la robe de cette petite fille de 7 ans. Et il s'est trouvé des Français pour justifier de telles atrocités et soutenir les barbares !...


" Aucune cause ne justifie la mort de l'innocent. Si je peux comprendre le combattant d'une libération, je n'ai que dégoût devant le tueur d'enfants "
(Albert CAMUS)

       Le massacre de El Halia, le 20 aout 1955, qui anéantit des familles entières, fit cinquante victimes européennes, dont un grand nombre d'enfants qui furent sauvagement mutilés et égorgés.

       3 mai 1956, trois écoliers européens d'Ain-Beida sont attirés dans un guet-apens par un de leurs petits camarades de classe musulman ; les corps des enfants, martyrisés, lapidés et massacrés, furent retrouvés dans un puits le 23 juin 1956.
       Les bombes dans les lieux publics ont fait des centaines de petites victimes innocentes…


" Quittez le pays, quittez l'Algérie arabe, avant que l'on ne vous chasse, que l'on ne vous jette dehors comme des bêtes féroces et nuisibles "
(Radios Arabes)

Qui sont les criminels ?
OAS ou FLN ?

       1er Mars 1962 - Assassinat de Mme Josette ORTEGA, concierge du stade de la Marsa, à Mers el-Kébir, et de ses deux enfants de 4 et 5 ans. Leurs têtes seront fracassées contre la muraille

" Le cœur de chaque algérien est rempli de haine à l'égard des Français… Chaque algérien est résolu à sacrifier son sang et sa vie pour élever l'étendard de son pays sur le corps des Français "
(Radios Arabes)

       Les massacres collectifs furent innombrables… El-Halia, Ain-Manaa, Wagram, Melouza, entre autres, où plus de 300 personnes furent exécutées le 28 Mai 1957. Villages entiers rayés de la carte. Ci-dessous, le massacre d'Honaine


Ci-dessus, deux victimes musulmanes égorgées comme des moutons selon la coutume du FLN
" Mes frères, ne tuez pas seulement… mais mutilez vos ennemis… crevez-leur les yeux, coupez-leur les bras et pendez-lez "
(" Ez Zitouna ", organe du FLN)
       - Et pourtant, en dépit de cette barbarie, c'est l'Algérie qui voudrait condamner la France pour ses " crimes " et traite nos soldats de " criminels de guerre "… avec la complaisance sénile de nos gouvernants
       - Et pourtant, il se trouve, en France, deux associations d'A/C gauchisantes : FNACA et ARAC, qui considèrent la date du 19 Mars 1962 (cessez-le-feu) comme une " victoire " et la commémorent, comme telle, reniant, ainsi, le sacrifice de milliers de soldats français...
       … Qu'elles se souviennent, en autres tragédies…


       18 Mai 1956 : Le massacre de PALESTRO. Une section du 11/9e R.I.C tombe dans une embuscade. Vingt jeunes soldats appelés sont effroyablement massacrés. Le lieutenant Pierre Poinsignon, commandant la 6ème compagnie de cette même unité venue en renfort, témoignera : " Des cadavres mutilés gisent dans les buissons. Les yeux sont crevés, les corps vidés de leurs entrailles et bourrés de cailloux. Les testicules ont été coupés, et les pieds zébrés de coups de couteaux… "

       Ci-dessous, le 18 juillet 1956, dix-neuf militaires tombent dans une embuscade en se rendant au Douar de Sidi-Ghalem où ils étaient invités par des indigènes infiltrés et terrorisés par le FLN. Ils furent tous atrocement mutilés.
       - 1ère photo : Soldat français du contingent.
       - 2ème : Le médecin Maurice Feignon. Ses tortionnaires l'ont torturé au fer rouge et liquide bouillant, avant de l'égorger.
       - 3ème : Chasseur Falourd, du 29ème BCT. Ses tortionnaires ont mis à nu tout le squelette du bras droit en arrachant méthodiquement les chairs frémissantes du poignet à l'épaule.

       Les âmes chagrines disent que la conscience se révolte au spectacle de certains crimes. Nous sommes ici en présence du plus monstrueux florilège du crime qui puisse se concevoir. Les images qui représentent les milliers d'êtres humains égorgés, les visages mutilés au couteau, les corps écorchés vivants à coups de canif, les enfants déchiquetés par les bombes, les femmes éventrées, les hommes suspendus encore vivants aux crochets d'abattoir, reculent les limites assignées à l'horreur. Cependant, ces atrocités ne révoltent pas les consciences contre les criminels, mais contre les victimes. Ces milliers d'innocents versés dans la mort servent à apitoyer le monde sur le sort des bourreaux. Le réflexe n'est pas l'indignation devant la sauvagerie du crime, mais la compassion envers les assassins à qui l'on trouve toujours une excuse à leurs actes " désespérés "… Et si les survivants excédés ou terrorisés prennent les armes pour sauver leur vie, dans un geste de défense aussi vieux que les âges - c'est ce qui s'est passé en 1961 et 1962 avec l'avènement de l'OAS -, ils soulèvent contre eux l'unanimité des censeurs.
       Et pourtant, en dépit de ces atrocités, c'est l'Algérie qui voudrait condamner la France pour ses " crimes " et traite nos soldats de " criminels de guerre "… sans la moindre réaction de nos gouvernants
       " Les tortionnaires se ressemblent… Ils appartiennent à la sombre patrie des bourreaux et insultent d'abord à notre espèce avant de salir, au hasard des guerres, le drapeau de leurs victimes " (Pierre Moinot)
José CASTANO       
e-mail : joseph.castano0508@orange.fr
-o-o-o-o-o-o-o-

L'AVENEMENT MACRON
De Hugues Jolivet



       L'avènement Macron est une erreur française !
       Depuis trois ans, la France s'enlise dans la glaise.
       Fruit du libéralisme, des maîtres du Néant,
       Qu'incarnent les Médias, les Pouvoirs de l'Argent,
       Ce Président docile répond aux injonctions
       Qui programment la mort, après sa soumission,
       De l'Histoire d'une France dont le riche passé
       Court le risque, désormais, d'être vite remplacé
       Par une culture honnie, contre laquelle Saint Louis
       Dirigea deux Croisades et mourut à Tunis.

       Avant même le scrutin, le candidat "En Marche"
       Vend son âme au Malin. A Alger, sa démarche,
       Au profit d'électeurs qui abusent la France,
       Accuse notre Patrie d'être mère de souffrance
       A l'encontre des peuples qu'elle a colonisés !
       Oubliés les martyrs qui ont agonisé,
       Lors de l'Indépendance, dans la cité d'Oran !
       Il délaisse nos racines, ouvre la voie au Coran,
       Dont les adeptes, libres, créant leurs terres d'Islam,
       Au moindre évènement, brandissent leurs oriflammes !

       A rejeté le peuple, frappé les "Gilets Jaunes"
       Qui réclamaient leurs droits et non pas une aumône !
       A oublié les "gueux", les chômeurs, les sans grade,
       Pour jouir de l'opulence, trônant sur son estrade !
       Il rêve d'une France nouvelle, effaçant son passé,
       Pour suivre une culture qu'il ne cesse d'embrasser,
       En renouant des liens forts avec cette Algérie,
       Oubliant qu'elle s'appelait, autrefois, Barbarie,
       Qu'elle écumait les côtes méditerranéennes,
       Jusqu'à ce que la France élimine cette gangrène !

       Il vise la Présidence d'une "France criminelle," (1)
       Lui, son futur "mari" ! Loin d'être fusionnelle,
       Cette union est l'image d'un mariage arrangé,
       Dont les bénéficiaires sont toujours étrangers
       Aux problèmes, au travail, aux soucis des Français !
       Trois années écoulées, pour Macron, l'insuccès !
       Pour une réélection, qu'aucune voix africaine
       Ne s'éloigne des urnes ! Alors, l'âme en peine,
       Demande qu'une étude, ouverte, objective,
       Bipartite, retrace la rétrospective
       De la France Coloniale, de la Guerre d'Algérie.
       Nouvelle soumission ! Nouvel "hara kiri" !
      
Hugues Jolivet         
Le 26 juillet 2020          
(1) Interview à Alger du 16 février 2017



" L'Afrique à désintoxiquer !
par Ernest Tigori, "
Envoyé par Mme Leonelli

              Traite négrière, colonisation, néocolonialisme, racisme, immigration massive… Kakou Ernest Tigori (Prix Mandela de littérature 2017), intellectuel engagé, dénonce depuis la fin des années 1990 la classe politique qui ruine son pays, la Côte d'Ivoire. En exil en France depuis 2009, il invite, à travers ses écrits, à une réflexion sur cette Afrique post-coloniale décadente, productrice de désordre et de misère. Il dénonce particulièrement la trahison des élites noires, et milite pour la constitution d'une Conscience noire plus responsable. Kakou Ernest Tigori se propose de rétablir la vérité sur les relations entre l'Afrique noire et l'Europe occidentale depuis le XVème siècle. Il bat en brèche les lieux communs mensongers et appelle l'opinion du monde noir à sortir du déni confortable qui dédouane l'Afrique de toute responsabilité dans la conduite de son destin, et qui accable à tort l'Europe repentante à propos de l'esclavage, la traite négrière, la colonisation, le néocolonialisme, le racisme ou l'immigration massive. Il invite l'élite africaine à retrouver du sens pour porter l'ambition d'offrir de l'espérance aux masses populaires du berceau de l'humanité.

L'Afrique à désintoxiquer :
sortir l'Europe de la repentance
et l'Afrique de l'infantilisme.

3 janvier 2020 Yves Montenay

              Le " décolonial " est à la mode " dans l'intelligentsia française, plus que jamais avec la nomination récente du professeur Fauvelle et d'Emilie Delorme, respectivement au Collège de France et au Conservatoire national de musique. Mais aussi dans les faubourgs de Bamako, dans les programmes scolaires du Nord comme du Sud. Et dans la bouche du président français avec la formule " Le colonialisme a été une faute de la république ".
              … Il est donc intéressant d'écouter un Africain disant exactement le contraire !
              Chronique de " L'Afrique à désintoxiquer : sortir l'Europe de la repentance et l'Afrique de l'infantilisme " de Kakou Ernest Tigori.
              Kakou Ernest Tigori est né en 1961 à Abidjan, en Côte d'Ivoire. Détenteur d'un diplôme d'ingénieur à l'Inset de Yamoussoukro, il travaille dans les transports publics à Abidjan jusqu'en 2008 où il est, dit-il, " licencié sans droits, condamné et persécuté pour avoir dénoncé publiquement les détournements massifs des deniers publics organisés par les dirigeants de la Sotra (Société des transports abidjanais) ". Il obtient son " salut " grâce à un visa Compétences et Talents lui permettant de gagner la France en 2009. Il se " considère en exil, dans l'attente d'opportunités pour un retour en toute sécurité en Côte d'Ivoire ".

              Le livre que je présente ici : " L'Afrique à désintoxiquer ", essai de 2018, paru en janvier 2019 aux Éditions Dualpha dans la Collection " Vérités pour l'Histoire " et pour lequel il était interviewé par TV Libertés en février 2019 :" L'Afrique à désintoxiquer " en résumé
              Ce qui suit en est un résumé le plus fidèle possible. J'ai rajouté d'éventuelles précisions ou exemples entre parenthèses.
              Sauf indication contraire, les pays évoqués sont ceux des anciennes colonies françaises de l'Afrique subsaharienne et leurs voisins, principalement le Ghana.

              Fil conducteur
              L'idée générale de l'ouvrage est que l'histoire de l'Afrique est ignorée, non pas, comme beaucoup le disent actuellement, par ignorance et dédain des Européens, mais pour une raison totalement différente : l'action de " la gauche révolutionnaire instrumentalisée par les stratèges staliniens à partir de la décennie 1940. ".
              Or rétablir l'histoire réelle renverse totalement le point de vue aujourd'hui dominant.
              En effet cette histoire a été établie par la propagande soviétique pour " contourner le capitalisme par le sud ", l'Europe étant censée être ruinée si elle perdait ses colonies. Cette propagande a visé la génération des futurs dirigeants des pays africains indépendants. Certains pour le malheur de leur pays ont gardé leurs convictions " révolutionnaires ", tandis que d'autres rompaient avec Moscou.
              Partant de là, la période précoloniale, la colonisation et les indépendances prennent une tout autre figure. Mais les programmes scolaires et discours politiques restent sur la vision soviétique lancée à cette époque.
              Ouvrons maintenant le livre.

              Les remerciements et l'introduction
              Les remerciements sont significatifs : les dirigeants de Singapour, du Botswana, du Ghana post N'Krumah "gouvernants vertueux " et, parmi les intellectuels, René Dumont et Axel Kabou (dont j'avais en son temps apprécié le livre " Et si l'Afrique refusait le développement ") et tous ceux qui " dénoncent l'inconséquence des élites politiques intellectuelles de l'Afrique Noire "
              L'introduction est dans le même ton " quand une communauté connaît la régression socio-économique pendant de nombreuses décennies, il ne faut pas aller (en) chercher les principales causes ailleurs que dans les capacités de ses élites politiques et intellectuels. Cette simple vérité est valable pour toute société y compris l'Afrique."

              L'Afrique combattante sous la tutelle de la gauche révolutionnaire
              Un bref rappel bien documenté de l'histoire des décennies précédant les indépendances rappelle le règne intellectuel de la gauche " internationaliste " française. Cette dernière forme les futurs intellectuels et politiques africains dans la décennie 1940, alors que la gestion coloniale n'avait alors pas duré plus de 30 ans en général (les dates sont variables selon les pays).
              S'ensuit la guerre froide : L'URSS et les États-Unis essaient de dépecer l'héritage colonial de l'Europe affaiblie par les 2 guerres mondiales, et se concurrencent en Afrique jusqu'à l'écroulement de l'URSS en 1990.
              L'URSS s'appuie sur les intellectuels communistes français, après un début de prosélytisme communiste par certains fonctionnaires coloniaux (dont mon grand-père, qui me l'a raconté en détail). Dans toutes les grandes villes africaines se créent des cercles d'études marxistes où l'on retrouvera les acteurs des indépendances.
              La conférence de Brazzaville organisé par De Gaulle en 1944 autorise la création de syndicats par des Africains ainsi que leur implication progressive dans la conduite de leurs affaires. C'est ainsi qu'André Latrille, gouverneur de la Côte d'Ivoire et sympathisant communiste aide Houphouët-Boigny à fonder le syndicat agricole africain.
              La valeur de ce chapitre vient des innombrables citations des " instructeurs " et des " convertis ". Chaque pays de l'Afrique " française " était bien encadré. Le Parti Communiste Français redouble sa pression sur ces " élèves " lorsqu'il se voit chassé du pouvoir en France et cherche un relais en Afrique.
              Mais le rêve de transformer l'Union française en nouveau Vietnam va échouer dans la plupart des pays lorsque beaucoup de " convertis " rompent avec Moscou : Senghor dès 1946, puis bien d'autres, dont Houphouët-Boigny, grâce notamment à l'action du sénateur Étienne Djaument, aujourd'hui oublié.

              De même pour les intellectuels
              Le Parti Communiste Français a également formaté les intellectuels " phares " à partir des années 1940, dont Aimé Césaire, qui a lancé des formules toujours en usage aujourd'hui du " colonialisme, exploitation éhontée de pillage des ressources " et laissant supposer une ancienne Afrique Noire édénique et pacifique, sans esclavage ni trafics humains… alors qu'à l'époque de ces textes, les Africains un peu âgés se souvenaient de l'interdiction de l'esclavage et des sacrifices humains par les Européens.
              Comme ses amis politiques, Césaire rompt avec le communisme en 56, " plongé dans un abîme de stupeur, de douleur et de honte " et devient un adepte de la départementalisation, mais ses discours précédents restent toujours diffusés dans les programmes scolaires et universitaires.
              Mais pour les intellectuels, " Peu importent les mensonges, l'appui de Moscou donne la notoriété internationale. Il faut répéter que l'Afrique n'est pas responsable de son sort, y compris après les indépendances du fait du néocolonialisme ", ou que " pendant des siècles les Blancs sont allés capturer des Noirs pour les déporter et les réduire en esclavage ".
              Le livre du Malien Yambo Ouolguem, Le devoir de violence, prix Renaudot 1968, est retiré de la vente sous la pression du Parti Communiste Français parce que plus nuancé, évoquant notamment les chefs locaux qui vendent leurs sujets aux marchands arabes et occidentaux. Son auteur est harcelé jusqu'à la dépression.
              Mésaventure analogue pour Axel Kabou. Les Européens se sont même accusés d'avoir créé de toutes pièces les divisions tribales (je l'ai effectivement entendu de mes oreilles). Ce courant est représenté en France par l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS).
              Autre témoignage que je partage avec Ernest Signori : dans les années 1960, on entend : " Quand est-ce que ça finit l'indépendance ? ". C'est oublié aujourd'hui, mais mourir traversant la Méditerranée traduit la même déception.
              Une avalanche de citations de ses discours permet de suivre la carrière de Kwame N'Krumah et notamment de ses tentatives répétées d'instaurer un panafricanisme marxiste dont il serait le chef. Nouvel échec. Par contre N'Krumah dirigera et ruinera le Ghana. Même Frantz Fanon finit par le désavouer ! Néanmoins ses discours flamboyants sont encore rappelés avec émotion aujourd'hui.
              La conclusion de cette première partie du livre est que, pour le malheur de l'Afrique, cette vision d'histoire est officielle et enseignée, avec l'appui intellectuel d'une bonne partie des universitaires du Nord, et notamment des Français.
              D'où une vision du monde et de la France largement contraire à la réalité, ce qui conduit beaucoup de dirigeants africains à faire des erreurs stratégiques (je rajoute : comme aujourd'hui les réactions des populations du Sahel gobant la propagande disant que les troupes françaises qui défendent " sont là pour voler notre or ").

              Une histoire africaine " désintoxiquée " de la colonisation
              A ces fables devenues officielles, l'auteur oppose une histoire que je vais schématiser, mais qui est appuyée également par de nombreuses citations et témoignages.
              Les Européens s'implantent pacifiquement sur la côte africaine, en général en louant le terrain sur lequel s'installent, et développent le commerce avec les dirigeants locaux, commerce qui comprend certes l'achat d'esclaves à ces derniers. S'ensuit un intérêt des populations pour ces nouveaux venus, et particulièrement de la part des tribus vassalisées par des empires locaux (que l'histoire officielle idéalise). Ces tribus finissent par demander la protection des Européens et apprécient la fin de l'esclavage et un début d'administration.
              Les très rares combats menés par les Européens ont lieu à l'occasion de la réaction des autorités de ces empires. Tout un chapitre développant ces idées traite, à titre d'exemple, de l'histoire de " l'espace culturel des Akans " et notamment du royaume Ashanti.
              Il " dédramatise " ainsi le terme de colonisation : " Il est important de souligner que toute l'histoire de l'humanité est faite de colonisation, et que l'Afrique noire n'a rien subi de particulier. Par ailleurs, contrairement à l'intoxication communiste, la colonisation fut globalement très bénéfique à l'Afrique ".
              Il rappelle que la défense des intérêts de chaque pays (dont la France) dans d'autres pays est un comportement naturel et universel (comme à mon avis en témoignent les actions américaines, puis chinoises, russes et autres en Afrique aujourd'hui). Il rappelle que le néocolonialisme est un terme inventé par N'Krumah en 1965 pour cacher son échec à la tête du Ghana.
              Dans ce contexte, les termes du néocolonialisme et de Françafrique perdent leur caractère " scandaleux ".

    Autre " désintoxication " historique : l'esclavage et la traite

              Un autre chapitre relativise la traite négrière en rappelant l'histoire de l'esclavage dans le monde et en Afrique, où il décrit des traites très antérieures à l'arrivée des Européens.
              Traite inter-africaine d'abord, avec par exemple le cas de deux bisaïeules de l'auteur, qui étaient des esclaves Sénoufo achetés par des Agnis dans l'actuelle Côte d'Ivoire.
              Traite également vers le Maghreb (la traite arabe en Afrique orientale, plus massive que celle vers le Maghreb ne concerne pas les pays traités dans ce livre).
              Traite européenne enfin, qui s'est faite en commerçant avec des États africains indépendants, aujourd'hui magnifiés par l'histoire officielle.
              Il souligne également que les Européens ont été les premiers anti-esclavagistes, intellectuellement d'abord, puis concrètement à partir de la première moitié du XIXe siècle pour ceux qui intervenaient en Afrique, des États-Unis étant retard dans ce domaine.
              Au passage, il salue l'histoire telle qu'elle est enseignée au Nord où aucun pays ne cache ses " faces sombres " et exhorte les Africains à faire de même pour l'histoire précoloniale et postcoloniale.

              La " désintoxication " de l'histoire économique
              Concernant le rôle réputé négatif du Fond Monétaire International (FMI) en Afrique, il développe les rapports de cette institution avec Samora Machel, dirigeant du Mozambique à partir de 1974, pour illustrer que c'est ce dernier qui est responsable du mauvais état de son pays… qui a fini par abandonner plus tard le socialisme.
              Suit un panorama des échecs économiques des gouvernements africains. Échec nié car " les indicateurs économiques (notamment ceux du FMI) sont inadaptés à l'Afrique, ce qui compte pour la population c'est d'avoir un sentiment de plénitude "… sentiment qui ne semble pas général, comme en témoignent les risques que prennent les migrants pour rejoindre l'Europe.

              De même pour les religions importées et la balkanisation de l'Afrique
              Quant aux méfaits " des religions imposées par les Européens ", il remarque que le christianisme n'a pas empêché la Corée de se développer (et je rajouterai que les côtes chrétiennes du golfe de Guinée sont plus développées que l'intérieur animiste puis musulman).
              Concernant les méfaits du racisme qui aurait plombé l'Afrique, il rappelle que ce dernier est une attitude générale dans le monde et qui ne vise pas seulement les noirs, comme l'a illustré l'épisode nazi.
              Enfin, pour ce qui concerne " la balkanisation " de l'Afrique tant reprochée aux Européens, il rappelle que ces pays étaient parfaitement libres de s'unir après les indépendances, qu'il y a eu quelques essais, mais qu'ils se sont heurtés aux équipes ayant pris le pouvoir dans chaque pays, et qui voulaient le garder. Ce sont ces équipes, et non des Européens, qu'il faut blâmer pour cela.
              On est évidemment très loin du récit anticolonial dominant ! " Dominant " rajoute l'auteur, car beaucoup d'Européens et d'Africains s'aperçoivent qu'il est utile à leur carrière et leur donne notamment l'accès aux médias.

              La stratégie de la gauche révolutionnaire
              Les échecs économiques du marxisme et l'attachement des Africains à leurs religions (les traditionnelles, l'islam, le catholicisme et les divers protestantismes) obligent la gauche révolutionnaire à mettre en avant d'autres thèmes que le développement et l'athéisme. Elle a choisi l'anticolonialisme, et semé la haine de la France auprès des Africains qui sont maintenant piégés psychologiquement et cela non seulement en Afrique, mais aussi en France où on apprend aux migrants que c'est la France qui est responsable de la misère de leur pays d'origine.
              L'auteur voit là une des origines du terrorisme, beaucoup plus importante que la religion musulmane. La gauche révolutionnaire est donc une menace pour la nation française tout autant que pour l'Afrique.

              Une administration coloniale non remplacée
              Le livre " L'étrange destin de Wangrin " d'Amadou Hampaté Bâ décrit l'administration coloniale comme " une affaire de blancs " étrange et bienveillante. La motivation de l'indépendance était davantage la fierté et la dignité que la prise en charge du travail de cette administration.
              Or à l'indépendance, il a fallu remplacer brusquement les anciens cadres. Les nouveaux venus, souvent incompétents, ont fait de l'administration une affaire privée. Il n'y a aucune responsabilité des Européens dans ce fait. L'auteur estime donc nécessaire " la nationalisation de l'État " et le retour à un État de droit, occidental ou coutumier.
              Le fait de constater que les plus riches sont les agents de l'État devrait faire réfléchir. Les élites africaines ne font que semblant de faire fonctionner l'État et de pratiquer la démocratie, notamment pour plaire aux bailleurs de fonds.
              Il faudrait donc rapidement d'importantes réformes.

              Les réformes à entreprendre d'urgence
              Le plus important serait le retour du civisme, puis la mise en place de l'État de droit. À partir de là on pourra envisager des réformes précises, comme le droit de demander un référendum en cas de dérive des gouvernants, ou la réaffirmation des droits des parlements et du pouvoir judiciaire.
              Sur le plan économique, l'Afrique allait bien mieux à la fin de la colonisation qu'aujourd'hui, comparativement au reste du monde (l'exemple plus célèbre est celui de la Corée du Sud qui était au niveau de l'Afrique au début de l'après-guerre).
              Cet effondrement est en général évalué monétairement, mais c'est un effet et non une cause. Les causes profondes sont les dévalorisations des métiers de base : boucher, mécanicien, électricien, instituteur, menuisier, chauffeur, maçon… On essaie d'échapper à cette dévalorisation par une course ruineuse aux diplômes, mais ces derniers ne correspondent pas aux besoins de l'économie.
              Dans le même esprit, il faudrait cesser de confisquer les revenus de l'agriculture qui était et reste encore largement la base de la production.
              Il faudrait enfin s'occuper des infrastructures et de la démographie. Beaucoup de " responsables " attendent avec orgueil les 2 milliards d'Africains prévus pour 2050, au lieu de penser aux infrastructures notamment scolaires que cela demandera. Et de toute façon ce n'est pas le nombre en lui-même qui leur apportera la prospérité ou l'influence dans le monde.

              En conclusion : retour à la réalité historique, ouverture et tolérance
              Toutes les civilisations ne se valent pas, comme c'est illustré à toutes les époques par l'appel à des spécialistes étrangers, par exemple égyptiens en Israël sous le règne du roi Salomon (et spécialistes chrétiens européens dans l'empire turc).
              C'est également illustré à la Renaissance par les emprunts intellectuels de l'Europe occidentale à l'Antiquité. Il n'y aura donc rien d'anormal à ce que les Africains empruntent à la civilisation européenne.

              Et pour cela il faut éradiquer la haine semée par la propagande anticoloniale, et donc sortir l'Europe de la repentance et l'Afrique de l'infantilisme. "
Yves Montenay
https://www.yvesmontenay.fr/2020/01/03/lafrique-a-desintoxiquer-sortir-leurope-de-la-repentance-et-lafrique-de-linfantilisme/

              Cette vidéo d'une dizaine de minutes est à écouter attentivement tant elle remet en place des idées simples au sujet des relations entre l'Europe et l'Afrique :
https://www.youtube.com/watch?v=bzTmsmPyuGE

              Les propos de cet Africain sont, à mon sens, marqués au sceau du courage, de l'intelligence et sans doute du cœur.

La vérité ne sera pas révélée
par ceux qui tiennent les rouages,
et surtout pas en France!

              Regardez la vidéo, lisez le texte ci-dessus et procurez-vous le livre d'Ernest Tigori, " l'Afrique à désintoxiquer ". Vous y trouverez ce que nous savons, nous, de la véritable histoire de l'Afrique et de l'extraordinaire sabotage de cette Histoire orchestré par Moscou, et parfois par les anglo-saxons, et repris par les communistes, notamment Français, et une certaine gauche, depuis 80 ans. Une soit-disant intelligentia dévoyée qui domine le politiquement correct et qui, malheureusement, a réussi à prendre en mains l'éducation et l'instruction de notre jeunesse, y compris celle de nos universités et de certaines grandes écoles, cultivant la haine de la France chez les plus réceptifs à leurs mensonges, cette haine qui motive ces délinquants qui pourrissent la vie des Français de cœur.

              Vous pourrez même offrir ce livre à vos enfants et petits enfants. Ils seront peut-être surpris de voir, sous la plume d'un africain, que papy ne leur a pas trop raconté de bêtises parce qu'il avait la rabia.



 
Le macronisme, pour qui, pour quoi ?
Par M. Robert Charles PUIG


       D'une " Convention citoyenne " aux idées farfelues aux élections municipales, le macronisme a vu grand et c'est planté. Il a épaulé une vague idée écologiste et en retour les grandes villes éliminent Larem pour une louche d'écolo-non-compatibles avec la raison et le besoin des grandes métropoles. En effet, que vient faire l'écologie lorsque ses prétendants jouent avec les extrémistes de gauche, les bras ouverts à la migration sauvage et des faveurs, nombreuses, aux cités salafistes ou dans les mains des frères musulmans, que même l'Algérie ne veut pas. Il est évident que l'abstention a été au top, mais à qui la faute sinon à nos politiciens qui dégouttent le veau-votant de porter son bulletin dans l'urne. Alors la place est libre pour le militantisme anti-blanc, anti-police et la fin de la Vraie Histoire de France, les grands noms qui ont construit le pays pour une histoire nouvelle sans nos héros passés comme le souhaite un Jean-Michel Apathie.
       En vérité, où va-t-on ? La vague verte submerge le pays et siffle la fin de la République de nos ancêtres. C'est le grand changement à Paris, Marseille, Grenoble toujours, Bordeaux et consorts. Le tremblement de la nouvelle France accompagne le président Macron dans son souhait de changer de gouvernement... Alors Philippe Edouard est mis à la porte de Matignon et un nouveau venu au parler régional arrive. C'est dans l'air du temps. L'Elysée a ce désir de changement, que la roue tourne autrement et pour cela, malgré ses bons sondages, Edouard Philippe est " sorti " de son bureau et Jean Castex un inconnu ancien sarkoziste arrive, doux comme un agneau. C'est cela le changement. Mettre à Matignon, un homme souple, aux ordres et donnant au peuple la bonne impression d'un homme des champs. Puis Emmanuel Macron prend la parole à la télévision et dans les journaux locaux... plusieurs fois, pour marteler que le changement se fait... sans rien changer. Beaucoup de promesses comme Hollande et un valet prêt à tout exécuter sans broncher, Castex, le parfait portefaix.

       Il voit grand, loin le président... Bien après ses 600 jours. Pour un nouveau quinquennat ? Le président construit une équipe de fer avec des anciens de Sarkozy : Darmanin qui remplace le triste Castaner à la police et Roseline Bachelot, heureuse comme une guêpe qui reprend une place dans l'hémicycle républicain. Les Larem, où sont-ils ? Ils prendront des places comme " Secrétaires d'Etat " dans un gouvernement qui n'a jamais offert autant de place et autant de voitures de fonctions
       Nous sommes dans le temps des 600 jours. Beaucoup plus de temps que Napoléon Bonaparte de retour de l'île d'Elbe, mais c'est pourtant un temps court. Que peut changer un nouveau gouvernement ? Rien, sinon préparer le futur. La réélection " d'En marche ! " ? Le président ventile et parle. Trop. Il nous promet des lendemains chantants, mais Bruxelles met des bâtons dans les roues de ses promesses à la Hollande. Il a fallu quatre jours de négociations pour obtenir un petit quelque chose et encore... Nos enfants et nos petits enfants seront chargés de rembourser les déficits du macronisme, car les Pays-Bas comme l'Autriche ne veulent pas de prêts " gratuits " et avec une dette qui atteint les 115 % du PIB, notre chemin pour renter dans le rang sera long, très long et les 600 jours, malgré les gestes de moulin à vent de Jean Castex et ses idées piquées à la droite LR, devraient avoir du mal à franchir et remplir les urnes de l'an 2020.

       Tout-feu-tout-flamme, Jean Castex va-t-il changer la face de monde et comment ? Le voilà aux commandes ? Il conduit une voiture à doubles commandes, le guide étant à l'Elysée et les ordres de Jupiter. C'est pour cela qu'il est là. Obéir et seulement obéir, comme la justice de Belloubet que Dupont-Moretti remplace. Il est de la même veine pour le coupable et il l'a démontré souvent. Alors, la victime ? Qu'elle se démerde !
       Pourtant cette justice prend l'eau. Souvenons-nous du discours de sortie de Belloubet. Elle était heureuse que les prisons se soient vidées grâce au coronavirus qui a permis de sortir de tôle des coupables. Belle France ! Certains en ont profité pour reprendre leur métier : vols, trafics divers, drogue, assassinats... Est-ce à la suite de ces libérations intempestives qu'un chauffeur de bus est mort, tabassé par quatre sauvageons ? Qu'une jeune femme gendarme est morte, écrasée par un chauffard drogué ? Il n'y a rien à dire, les juges grâce à Belloubet ont moins de travail. C'est dommage pour le peuple mais il faudra qu'il s'y fasse, la sécurité n'est plus dans les rues. Toujours la justice ? Voilà que l'affaire des écoutes téléphoniques de Sarkozy prend un nouveau visage. Il y a eu tricherie de la justice parait-il et pour Fillon aussi. Madame Houlette, juge chargée du dossier avoue que sa hiérarchie lui a forcé la main pour " aller vite " avant les élections présidentielles. Qui était derrière cela ? Hollande... Macron ? Il y a un blanc et un mystère.
       Pendant ce temps, les villes se mettent en route... à vélo ! Finies les voitures. C'est le règne de la petite reine, avec l'exploit niçois encore plus farfelu que vert. La mairie a créé les " zones vélos " au Bd. Gambetta, une des voies la plus empruntée avec le port Lympia. On ne circule plus qu'en vélo avec un bras d'honneur pour les voitures qui envahissent les rues adjacentes, créaient des embouteillages et enfument à force de bouchons une grande partie de Nice. Bravo la mairie de Nice. Plus écolo que ça, tu meurs asphyxié par le CO2.
       Pendant ce temps nous sortons du Covid-19, à petits pas... et dans certaines villes il revient. La jeunesse se croit permise de fêter sans précaution le retour à une fausse liberté et rêve de voyages... mais pour où, lorsque certaines frontières se referment ?
       Pendant ce temps, une information passée inaperçue trouble les Pieds-noirs dont on connaît le mépris que leur porte l'Elysée qui rend à l'Algérie des crânes de vieux autochtones du début de la conquête. Une belle cérémonie en Algérie et une réclamation de plus de repentance exigée par les algériens... Mais, et nos disparus des années de guerre 1954 / 1962 et des mois suivants ? Pourquoi nos gouvernants ne réclament RIEN ? Cela fait soixante ans qu'ils sont dans le déni de vérité et la soumission à l'Orient. Cela se vérifie avec une nouvelle idée de l'Elysée afin d'éliminer la Saga " Pied-noir ". Benjamin Stora qui a toujours critiqué l'Algérie française et prêché dans la préface d'un livre le combat contre les Pieds-noirs, est chargé par Emmanuel Macron d'entreprendre l'étude d'une ligne de conduite " définitive " pour sortir la France de son complexe des colonies. Pour cela, Stora est le personnage qu'il faut, pensent l'Elysée et son locataire. Il effacera de l'histoire de la Nation 132 ans de présence française en Algérie. Un tour de passe-passe qui plait au président si outrageant avec cette partie de l'histoire de France. Nous faire disparaître demain au nom d'une réconciliation ou plutôt une soumission aux exigences algériennes.

       La France ? Un pays triste et sans honneur ? Je ne peux pas le croire. Il doit bien avoir des hommes et des femmes qui ont du cœur et la volonté de clamer que la Nation est éternelle.

       Au sujet de " l'affaire " Stora, je ne peux pas m'empêcher d'écrire au président de la République.
       Voilà une copie de ma lettre. Pourquoi ne pas faire comme moi, même si vous avez déjà signé une pétition ?

       Monsieur le Président de la République.
       Pourquoi Stora ?
       Je ne suis pas surpris, hélas de cette intention de nommer Benjamin Stora en référant de l'épopée des quinze départements d'Algérie d'avant l'indépendance accordée par le général De Gaulle.
       C'est dans l'ordre de vos décisions, après les étonnants mots prononcés à Alger en 2017, avant votre élection, puis les plus récents en Israël, dans une comparaison surprenante entre la guerre d'Algérie et la Shoa.
       Le désastre est de continuer sur cette lancée avec le sieur ci-dessus nommé.
       Quel rôle peut-il jouer dans ce dossier ? Son aversion pour l'Algérie française est tellement connue que c'est à croire que c'est ce mauvais augure qui vous pousse à dénigrer la fratrie " pied-noir ", les anciens combattants et l'armée d'avant le Putsch des généraux de 1961, en le désignant à cette responsabilité.
       Il y a des obsessions qui sont comme une soupe aux orties. C'est celle que vous nous servez.

       Benjamin Stora est celui qui, en préfaçant le livre d'un romancier algérien, a écrit si mes souvenirs sont bons : " La lutte entre le MNA et le FLN aurait dû n'être qu'une lutte contre la présence française en Algérie. "
       En quelque sorte son quitus et son droit de tuer.
       Une autre fois dans un " livre-images ", il a l'audace de dire que les militaires français en Algérie étaient souvent craintifs, en pleurs et se droguaient...
       C'est la différence dont vous ne tiendrez pas compte. C'est sans doute pour cela que la Nation va mal.

       Acceptez mes salutations distinguées dues à un Président.

Robert Charles Puig / août 2020       
      


LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini


                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.

             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens d'ajouter Petit, Clauzel, Gelât Bou Sba, Héliopolis, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.

             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.

             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Duvivier, Duzerville, Herbillon, Kellermann, Millesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Penthièvre, Randon, Kellermann et Millesimo, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :

 LA VILLE DE BÔNE A SUBI UNE MISE A JOUR TRES IMPORTANTE
AU MOIS D'AOUT 2020   

CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net

             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :
http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P.Bartolini.
 


NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers

Le littoral bônois nettoyé

Envoyé par Basile
https://www.liberte-algerie.com/est/le-littoral-bonois-nettoye-342148

Par Liberté Algérie - par A. ALLIA le 16-07-2020

Eradication de l’habitat précaire à Annaba

             Supervisée par le P/APC et encadrée par les services de sécurité, cette action a ciblé la zone regroupant les plages de la Caroube, Toche et Belvédère.

             Les services techniques de l’APC d’Annaba ont décidé de taper fort, ces derniers jours, en s’attaquant frontalement à l’éradication des construction illicites, notamment des bâtisses qui ont été érigées tout au long de la partie littorale ouest de la ville. Supervisée par le P/APC et encadrée par les services de sécurité locaux, cette action, déclenchée, en début de semaine, a ciblé la zone littorale regroupant les plages de la Caroube, Toche et Belvédère, qui a été la plus touchée par le phénomène. Le P/APC d’Annaba, Tahar Merabti, a affirmé que ce sont 37 constructions illicites, dont 14 à la Caroube, 20 à Toche et 3 à Belvédère, qui ont été détruites, malgré l’opposition de certains individus qui ont tenté de faire échouer l’opération.

             C’était sans compter sur la détermination du P/APC d’Annaba qui a affirmé à plusieurs reprises et ce, depuis sa nomination à ce poste, qu’il nettoiera la ville de tous les bidonvilles qui la ceinturent et l’enlaidissent. Un défi porté à la mafia du foncier qui a jeté, entre autres, son dévolu sur les lots de terrain de la magnifique corniche, y compris ceux situés à des endroits inaccessibles et théoriquement inconstructibles.

             En dépit de l’engagement, verbal du moins, des autorités locales, qui ont de tout temps promis d’y mettre un trait définitif, le problème des constructions illicites continue de se poser et même de s’aggraver à Annaba et touche jusqu’au littoral. Des riverains de la plage de la Caroube, l’une des plus belles baies de la corniche annabie, dénonçaient, en vain, il y a trois ans, l’érection par un particulier de deux immeubles en R+2 en bordure de ce plan d’eau.

             Une plainte qui n’a pas abouti, puisqu’à ce jour aucune mesure de démolition n’a été prise à l’encontre des contrevenants, en dépit de la loi de 2002 qui restreint le développement d’installation et d’aménagement dans une bande de 300 mètres en bordure de rivage.

             Le cas de ces hauts responsables de l’ancien régime, qui ont allègrement violé les lois en construisant, en 2017, deux villas les pieds dans l’eau sur le site protégé du Cap de Garde d’Annaba est toujours cité en exemple dans cette ville lorsqu’on évoque les textes réglementaires protégeant le littoral. Les habitants se rappellent également que la commune d’Annaba a procédé, à la même époque, à la démolition de 80 d’entre les quelque 200 constructions illicites qui avaient été érigées au fil des années en amont de la zone côtière de la caroube.

             “Une action remarquable mais qui n’a malheureusement pas découragé les squatters qui ont profité de la crise sanitaire pour réinvestir les lieux, ici, à Toche et au niveau de la plage Belvédère dans l’espoir de s’y implanter”, signale Le P/APC d’Annaba. Ceci en mettant l’accent sur la nécessité de relancer le programme d’aménagement de la zone d’extension touristique.
A. Allia           


La femme qui embrasse les pieds de son homme !

Envoyé par Elia
https://www.liberte-algerie.com/chronique/la-femme-qui-embrasse-les-pieds-de-son-homme-490


Par Liberté Algérie - l Par M. Amine Zaoui - 16 jillet2020

Soixante ans d’indépendance ou presque.

        Allah Yarham Echouhada. Gloire aux martyrs, les femmes et les hommes, les jeunes et les moins jeunes. Soixante ans après, et nous demandons pardon à nos martyrs, femmes et hommes, en leur disant, sans nuance aucune : excusez-nous, pères et grands-pères, mères et grands-mères, de chuchoter à vos âmes cette réalité amère : Nous nous sommes trompés de modèle, celui que nous avions choisi, depuis l’indépendance, depuis votre départ, votre sacrifice, votre silence ! La vie n’est pas un film égyptien, ni un feuilleton turc, ni un prêche d’un prédicateur moyen-oriental ! Soixante ans d’indépendance ou presque, et des scènes abjectes nous choquent quotidiennement. Des scènes choquantes ne cessent de défiler sur des chaînes de télévision qui jouissent de la publicité des entreprises nationales.

        Voici l’image d’une femme de chez nous, une Algérienne avec un A majuscule, en direct d’un plateau d’une chaîne TV, embrassant les pieds de son mari ! L’ARAV, bonne nuit !
        Dans un mouvement d’humiliation, comme à l’époque de la traite négrière, l’ère de El Ama l’esclave, et dans une position physique honteuse et abjecte, une Algérienne avec un A majuscule embrasse les pieds de son mari. Soixante ans d’indépendance ou presque ! Cela fait mal aux martyres et aux moudjahidat, les braves femmes de la guerre de Libération ! Djamila Bouhired, l’œil qui ne dort jamais ! Louisa Ighilahriz, l’œil qui ne dort point ! Et les autres qui nous regardent de l’au-delà, du ciel ou de l’Histoire ; Malika Gaïd, Maliha Hammidou, Hassiba Ben Bouali, Saliha Ould Kablia, Nafissa Hamoud, Danielle Minne, Akila Ouared, Raymonde Peschard, Jacqueline Gherroudj, Évelyne Safir Lavalette, Claudine Chaulet… Les martyres se retournent dans leur tombe !

        Nous nous sommes trompés de modèle à suivre, cela perdure depuis plus d’un demi-siècle, soixante ans presque. La vie, aux yeux des Algériens, se présente comme un film égyptien, un feuilleton turc, ou un prêche d’un prédicateur moyen-oriental ! Ce spectacle écœurant de cette femme algérienne supposée descendante de Djamila Bouhired, de Louisa Ighilahriz, de Malika Gaïd, de Hassiba Ben Bouali, de Saliha Ould Kablia..., léchant les pieds de son mari, n’a provoqué aucune dénonciation, aucune indignation de la part de la société civile ni intellectuelle... excepté quelques voix isolées presque étouffées. Bonne nuit, l’ARAV !

        En toute franchise : que serait-il passé, sur les réseaux sociaux, si une Algérienne avec un A majuscule, de chez nous, avait embrassé et en direct sur un plateau de TV son mari légitime sur la bouche ou même sur les joues ? L’apocalypse ! Elle aurait été lynchée. Insultée de tous les noms d’oiseaux. Tout le monde aurait demandé sa tête et celle de son mari légitime. Elle aurait été boycottée par toutes les voisines et les voisins. Elle aurait été caillassée. Huée, sans retenue aucune, par les enfants du quartier. Harcelée par les jeunes et les moins jeunes du quartier. La chaîne TV aurait été poursuivie en justice. Les associations caritatives auraient déposé une plainte contre elle et son mari légitime... Le ciel lui tomberait sur la tête !
        Et même l’ARAV se réveillera, peut-être ! Nous vivons dans une société qui endure depuis un demi-siècle le poids d’une grande hypocrisie socioreligieuse et politico-intellectuelle.
A. Z.           


ONZE HARRAGA INTERPELLÉS À ANNABA

Envoyé par Aubin
https://www.jeune-independant.net/Onze-harraga-interpelles-a-Annaba.html

Jeune Indépendant   l Par M Nabil Chaoui - 14 Juillet 2020

Harraga

           Onze harraga ont été interpellés ce mardi à quelques 5 à 7 miles marins au nord de Ras-El-Hamra par les garde-côtes de l’armée nationale (ANP).

           C’est la deuxième arrestation opérée par les mêmes services, après celle de dimanche dernier où sept personnes ont été neutralisées dans le même endroit maritime.

           Agés entre 20 et 40 ans, originaires d’Annaba et d’El-Tarf, le dernier groupe est composé de plusieurs récidivistes de la harga. Ils étaient à bord d’une embarcation artisanale, équipée d’un moteur de 40 chevaux de marque Suzuki, avec aussi à son bord 3 bidons d’essence et de la nourriture. Selon, les services de la protection civile qui ont procédé au contrôle médical des harraga, aucun d’entre eux n’est atteint de maladie, entre autre de la Covid-19 particulièrement.

           Les premiers éléments de l’enquête indiquent que ces harraga ont levé l’ancre au début de la soirée de lundi dernier à partir de la plage de Sidi-Salem en direction de la rive méditerranéenne de l’Italie, entre autre la Sardaigne. A signaler que depuis le deconfinement de plusieurs pays européens, les gardes-côtes, à travers les cotes nationales, avaient mis en échec plusieurs tentatives d’émigration clandestine.

           Selon plusieurs chercheurs de l’Université Badji-Mokhtar d’Annaba : « le phénomène de la harga va reprendre en plus fort devant la crise économique que traverse le pays. Pour la majorité des harraga, la réussite professionnelle se trouve ailleurs, en Europe, mais pas ici ». Encore, les réseaux sociaux semblent jouer un rôle attractif dans l’émigration clandestine.

           Depuis plusieurs mois, on assiste à des vidéos postées sur ces mêmes réseaux sociaux montrant des harraga qui avaient réussi la traversée et par la même occasion saluant, avec des grands rires, leurs amis d’Annaba, d’El-Tarf ou d’ailleurs.
          
Nabil Chaoui                      



ANSEJ de Relizane

Envoyé par Sandrine
https://www.liberte-algerie.com/ouest/formation-a-distance-des-jeunes-porteurs-de-projets-341999


 Liberté Algérie - Par M. E. Yacine - 14/07/2020

Formation à distance des jeunes porteurs de projets

           Dans le cadre de l’initiative “Jeune Entrepreneur”, la direction de l’Ansej de la wilaya de Relizane a récemment lancé des sessions de formation à distance, destinées aux jeunes futurs diplômés qui souhaitent créer leur propre entreprise dans divers secteurs. L’initiative prise par l’Ansej, “Jeune Entrepreneur”, est un ensemble de sessions de formation organisées au profit de jeunes diplômés et porteurs de projets algériens désirant investir dans divers domaines. L’objectif de cette formation est de stimuler l’entrepreneuriat vert chez les jeunes étudiants à travers la réalisation d’un atelier de formation au niveau des agences relevant de la direction.

           Cette formation de qualité est gratuite, sanctionnée par une attestation cosignée entre les deux parties à la fin de la formation. La formation en ligne est dispensée en dix jours à l’adresse des universitaires voulant se lancer dans les énergies renouvelables, la gestion des déchets ménagers, le recyclage des déchets, etc. Il faut dire que si, dans un passé récent, une telle session de formation exigeait plusieurs mois d’enseignement et ne pouvait s’étendre à toutes les communes de la wilaya, ce ne sera plus le cas désormais avec cette formation dispensée via Internet, qui permet à la fois de gagner du temps et de l’argent. De plus, il y aura une possibilité de généralisation à l’ensemble des communes, souligne

           M. Chikhi Fouad, directeur de l’antenne de l’Ansej de la wilaya de Relizane. Les meilleurs projets de différentes universités ont d’ores et déjà été sélectionnés, et les étudiants porteurs de projet vont bénéficier d’une formation conforme aux standards internationaux et seront accompagnés jusqu’à la concrétisation de leur projet. À partir de cette année, il y aura la plateforme numérique diffusant toutes les informations inhérentes. Des experts et des formateurs seront à cet effet conviés à apporter leur contribution.

           Outre l’information, le second objectif assigné à cette plateforme est celui d’encourager le maximum d’entreprises à adopter une approche de l’économie verte. “Il permet aussi d’outiller les jeunes issus des universités, écoles et instituts supérieurs et de doter tous les futurs jeunes entrepreneurs des moyens nécessaires pour concevoir une nouvelle idée de projet vert et la réaliser sur le terrain”, a expliqué M. Chikhi. En fait, a souligné l’organisateur de l’événement, le programme de cette session permet de porter des lunettes vertes à l’entrepreneuriat afin de promouvoir la création d’une nouvelle gamme d’entreprises.
E. Yacine                      



MÉDÉA

Envoyé par Justin
http://www.jeune-independant.net/Medea-Rehabilitation-du-site.html


 Liberté-Algérie - Par Nabil. B. le 9 juillet 2020

RÉHABILITATION DU SITE ARCHÉOLOGIQUE ACHIR

           Dans le but d’entamer la réhabilitation du site archéologique Achir, situé dans la commune de Kef Lakhdar, daira d’Aïn Boucif 120 km au sud-est du chef-lieu de wilaya), une enquête auprès des citoyens vient d’être lancée par la direction de la culture de la wilaya de Médéa, a-t-on indiqué de source au sein de la wilaya.

           Selon cette dernière, l’enquête est lancée dans le cadre du plan de protection et de réhabilitation et des mesures d’urgence concernant le site archéologique Achir, conformément aux dispositions de l’article 11 du décret exécutif n° 3/323 du 5 octobre 2003 portant démarches de préparation d’un plan de protection de sites archéologiques et des zones protégées.

           D’une durée de 60 jours, l’enquête qui a démarré lundi 6 juillet qui s’étalera jusqu’au 3 septembre afin « d’associer les citoyens au projet de protection du site archéologique et en même temps d’offrir une tribune à tout un chacun d’exprimer ses suggestions et ses préoccupations sur le sujet ».

           Pour rappel, le site archéologique Achir compte parmi les sites islamiques les plus importants du patrimoine national, témoin de la construction du 2è Etat musulman, après celui de l’Etat Rostémide. Il a été érigé par Ziri Benmenad en 936 de l’ère chrétienne et devenu la capitale du Maghreb central dont le frontières s’étendaient jusqu’aux limites de la Tunisie (Ifriqya) à l’est et aux limites du Maghreb à l’extrême ouest.

           Dans son descriptif, le plan des travaux de réhabilitation a divisé le site en 3 parties, dont la partie contenant le tombeau de Minzah Bent Soltane, la partie ouest où se trouve le palais de Ziri Benmenad, et la 3è partie qui contient la structure du site Achir Bologhine, selon les indications fournies par le service de la préservation du patrimoine à la direction de la culture de Médéa.

           Cette dernière invite les citoyens intéressés, notamment les habitants de la commune de kef Lakhdar à « se rapprocher du siège de l’APC pour prendre connaissance du dossier relatif au projet d’étude du plan de protection et de réhabilitation du site archéologique Achir et pour donner leurs avis et suggestions concernant le sujet », selon une note de la wilaya.
Nabil. B.                      


MESSAGES
S.V.P., Lorsqu'une réponse aux messages ci-dessous peut, être susceptible de profiter à la Communauté, n'hésitez pas à informer le site. Merci d'avance, J.P. Bartolini

Notre Ami Jean Louis Ventura créateur d'un autre site de Bône a créé une rubrique d'ANNONCES et d'AVIS de RECHERCHE qui est liée avec les numéros de la Seybouse.
Pour prendre connaissance de cette rubrique,

cliquez ICI pour d'autres messages.
sur le site de notre Ami Jean Louis Ventura

Hubert Pérès

             Bonjour,
             La Mise à jour de mon site geneanet, essentiellement Torre del Greco est effective
             Pour info : Mes patronymes d'ancêtres à Milazzo en Sicile :
             PERES/PERESI, MARCHESE, SALMERI, LO PRESTI, D'AMICO, PUGLISI
             Mes patronymes d'ancêtres à Torre del Greco province de Naples :
             GIACOMINO, MARRAZZO, IZZO, PALOMBA, PANARIELLO, PROTO, GAROFALO, BRANCACCIO, SANNINO, LANGELLA, LOFFREDO, ASCIONE, D'AMATO, SORRENTINO
             Mes patronymes d'ancêtres à Alghero en Sardaigne, liés à Torre del Greco :
             CATTOGNO/CATTUOGNO, SARIGA
             Hubert Pérès
             Visitez l'incroyable site généalogique du toujours modeste Cousin Hub :
             http://cousinhub38.free.fr
            
         Mon adresse est, (cliquez sur) : Hubert Pérès
De M. Pierre Jarrige

Chers Amis
Voici les derniers Diaporamas sur les Aéronefs d'Algérie. A vous de les faire connaître.
    PDF 139                                                      N° 139
    PDF 139A                                                   PDF 140
    PDF 140A                                                   N° 140
    PDF 141                                                   PDF 141A
    N° 141                                                          PDF 142 Pierre Jarrige
Site Web:http://www.aviation-algerie.com/
Mon adresse : jarrige31@orange.fr


L'âne au fond du puits
Envoyé Par Eliane

          Un jour, l'âne d'un fermier est tombé dans un puits.
          L'animal gémissait pitoyablement pendant des heures et le fermier se demandait quoi faire.
          Finalement, il a décidé que l'animal était vieux et le puits devait disparaître de toute façon, ce n'était pas rentable pour lui de récupérer l'âne.
          Ils ont tous saisi une pelle et ont commencé à enterrer l'âne dans le puits.
          Au début, l'âne a réalisé ce qui se produisait et se mit à crier terriblement.
          Puis à la stupéfaction de chacun, il s'est tu.
          Quelques pelletées plus tard, le fermier a finalement regardé dans le fond du puits et a été étonné de ce qu'il a vu.
          Avec chaque pelletée de terre qui tombait sur lui l'âne faisait quelque chose de stupéfiant.
          Il se secouait pour enlever la terre de son dos et montait dessus.
          Pendant que les voisins du fermier continuaient à pelleter sur l'animal, il se secouait et montait dessus.
          Bientôt, chacun a été stupéfié que l'âne soit hors du puits et se mit à trotter !'

          CONCLUSION :

          La vie va essayer de t'engloutir de toutes sortes d'ordures.
          Le truc pour se sortir du trou est de se secouer pour avancer.
          Chacun de tes ennuis est une pierre qui te permet de progresser.
          Nous pouvons sortir des puits les plus profonds en n'arrêtant jamais.
          Il ne faut jamais abandonner!
          Secoue-toi et fonce!
          Rappelle-toi, les cinq règles simples !
          À ne jamais oublier, surtout dans les moments les plus sombres.
          Pour être heureux / heureuse :
          - 1. Libère ton coeur de la haine.
          - 2. Libère ton esprit des inquiétudes.
          - 3. Vis simplement..
          - 4. Donne plus.
          - 5. Attends moins.



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Notre liberté de penser, de diffuser et d’informer est grandement menacée, et c’est pourquoi je suis obligé de suivre l’exemple de nombre de Webmasters Amis et de diffuser ce petit paragraphe sur mes envois.
« La liberté d’information (FOI) ... est inhérente au droit fondamental à la liberté d’expression, tel qu’il est reconnu par la Résolution 59 de l’Assemblée générale des Nations Unies adoptée en 1946, ainsi que par les Articles 19 et 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), qui déclarent que le droit fondamental à la liberté d’expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».

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