N° 196
juillet

http://piednoir.fr
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Juillet 2019
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
http://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
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EDITO
  La Francopolie et nos vieux   

         " Voilà l'été le soleil chauffe, les nuages défilent et le ciel bleu s'épanoui... "

         «Je pourrais profiter de cette tribune pour dresser le bilan d'une année déjà très riche pour l'état du pays, évoquer la communication toujours plus importante de sa tête et sa portée dépassant très largement le pays.

         Mais l'avenir seul nous préoccupe. C'est pourquoi le Conseil de la Francopolie a résolument entamé sa " transition écologique " en dépassant la dimension Humaine, sociale, culturelle pour proposer une nouvelle mesure pour soutenir toutes les démarches locales qui interpellent ou accompagnent les pouvoirs publics de notre territoire dépassant les frontières administratives et les clivages politiques, pour contribuer à l'amélioration de notre cadre de vie, et la préservation de notre santé.

         " La solution dépend-elle de l'outil ou de l'esprit qui s'en sert ? "

         Plutôt que de répondre à cette interrogation, qui aurait pu être au programme du bac philo, j'ai une pensée pour nos vieux qui ont rendez-vous sur un autre point ce mois-ci et qui vont attendre en bas d'une liste rouge pour savoir si leurs noms y figurent et si leur élimination est imminente.

         Les Vieux !

         La guerre contre la pollution, en particulier liée au Petsel, (le remplaçant au naturel du diesel) s'intensifie dans le pays qui souffre de pics de pollution de façon régulière. Déjà interdits dans les jardins publics depuis quelques années, les vieux les plus polluants, considérés comme de simples humanoïdes, qui présentent une vignette Cratère 5 (mis en vente forcée à cette occasion) ou non classés en raison de leur vétusté mortifère, seront interdits dans toutes les zones délimitées à partir du 1er juillet 2019.

         Le conseil de la Francopolie du Grand Hexagone a voté la mise en place de Zones à faibles émissions de PHA (Pet humanoïde Arrière) qui interdira la circulation des vieux les plus polluants, classés Cratère 5 ou hors classement, à l'intérieur du périmètre délimité dans les centres ville. La mesure, qui concerne près de 2 millions de pauvres vieux, entrera en vigueur à l'été 2019.

         Le parc Humanoïde le plus ancien devra se renouveler rapidement

         La mise en place de cette mesure s'accompagnera de dispositifs d'aide au remplacement des vieux classés " cratère 5 ". Les autorités de la Francopolie, ont pris un engagement en ce sens avec l'Europe, les gestionnaires des funérariums et cimetières, casses ou recyclage du pays afin de constituer un pole unique des aides au renouvellement pour les francopoliens.

         L'initiative "Francopolie vit propre !", qui octroie entre 3.000 et 5.000 € à une famille pour remplacer son vieux polluant, pourra ainsi se cumuler avec la prime à la conversion et le bonus scatologique.

         Des mesures pourront accompagner le déploiement de la PHA, comme la mise en place de couloirs temporaires de charrettes à ventilation élevée dans des quartiers saturés.

         La Francopolie met en avant l'effet bénéfique du retrait des vieux les plus polluants pour la santé des 65 millions d'habitants des zones protégées, qui enregistrent chaque année le décès prématuré de seulement 5.000 personnes en raison de la mauvaise qualité atmosphérique et qui de ce fait verra une augmentation d'élimination des vieux polluants au bénéfice d'une population de remplacement plus propre. Pour cela, un plan de communication très complet sera mis en place pour en faire la pédagogie du bourrage de cranes.

         Le lobby de l'état qui lutte contre l'homéopathie, s'attaque aussi à l'Olfactothérapie du Petsel produit par le PHA des vieux, qui pourrait permettre de lutter contre le cancer, les AVC et les crises cardiaques… D'après une étude de chercheurs de l'Université d'Exeter, en Angleterre.

         Le 1er avril 2020, le Conseil dressera ou déposera le bilan de ces mesures.

         En attendant, passez un bon été et à la rentrée.»
Jean Pierre Bartolini          
        Diobône,         A tchao.

P.S. : cet édito a été inspiré suite aux écrits et débats télévisés concernant les restrictions de circulation de véhicules anciens sous la soi-disant cause de pollution. Peut-on en rire !!!
Francopolie, Francopoliens, Petsel, PHA, ont été créés pour cette gaudriole.
https://www.20minutes.fr/insolite/1418443-20140715-etude-odeur-pet-bonne-sante


Les Mystères de la Casbah,
Grand Roman local et vécu,
De M. Toni-Pança et envoyé par M. piedineri
Feuilleton en pataouète, paru en 1909 dans le journal algérois Papa-Louette

SUITE PREMIÈRE PARTIE - I -
Les Habitués du Cassour.
- Le naufrage du " San Rafaël "

                Le Vieux Médus et La Tarente, qui z'étaient un peu fatigués, y se couchent sur le rocher à ousque y z'avaient cassé la croûte, tandis que Cataclan, qu'il est solide comme le père Bugeaud, à la place de la rue d'Isly, y se dégage la pastéra qu'elle était à terre et y s'en va pêcher les mulets à côté l'égout, pourquoi Vendeur et Mondine y s'attendent le poisson pour l'apporter bonne heure à la Pêcherie et faire concurrence à les z'autes.
                Tous les autres y se sont jetés la ligne, attendant que les enfants de la mer y viennent se faire la magataille des amorces.
                Quatre heures y sonnaient à la place du cheval. La lune elle devenait un peu zoubia, pourquoi le soleil y commençait à lui dire de sa voix de cassis-cognac : " Allez, va-t-en chez ta mère ! tu as assez montré ton doux… visage à le monde ! "

                Le Vieux Médus et La Tarente, bercés par la cadence des flots, ne tardent pas à roupiller, comme un chemineau qui s'a fait cenquante kilomètres à pattes sur la route d'Alger à Constantine.
                Comme la lune y tombait doucement, doucement, les tchelba elles donnaient dur.
                Chaque y se montait des pièces papasses que Cassar sûr y se les payerait cinq francs.
                Vendeur et Mondine, qui se font le cours des poissons en bas la pêcherie, y se faisaient un cul d'attaque en se voyant que les habitués du Kassour y grimpaient des pièces qui se rendraient jaloux à tous les autres mandataires.
                - Qué prisa ! y disait Mondine. Sûr, nous gagnons aujourd'hui vingt-cinq francs !
                - Z… ! Pas besoin travailler pour vingt-cinq francs. Cinquante ou rien, y se lui répondait Vendeur, qui veut se gagner beaucoup de l'argent pour s'ouvrir une salle de mandataire vec le bureau en rivoire, le comptable et l'enterprète anglais, autrichien, allemand, kabyle et marocain.
                Patron et tout y veut endevenir. Après y s'achète la grosse chaîne vec la montre en or, et y marche plus à pieds nus. Rien qu'avec les souyers vernis et le chapeau noir fendu par le miyieu.
                Prisa après y se fait. Mieux que le baron de Rotchsild y endevient.
                Mondine et Vendeur donc discutaient sur le prix de vente des poissons qui z'allaient emporter à la Pêcherie, allongés tous deux en dessur la petite plage à côté l'égout, quand y se lèvent d'un bond.

                 La Tarente et le Vieux Médus y se réveillent en cerceau et chaque des pêcheurs y se met la ligne à terre.
                Leur attention elle avait été attirée par un bruit comme un coup de canon.
                - Atso ! y fait La Tarente, on se croirait à Casablanca !
                Y s'avait pas fini faire la réflexion, quand un second, puis un troisième coup de canon rébolver y se font entendre et y s'aperçoive là-bas, au loin, au loin, à la clarté du jour qui commençait à poindre à l'horizon, la Marie-Rose, le bateau des doiniers, qui se poursuivait une balancelle des contrebandiers.
                Tous les deux y se luttaient en vitesse. Le bateau des contrebandiers y filait, filait, qu'on s'arrait dit l'éclair.
                Tout à coup un bruit sourd y se fait entendre à nouveau.

                C'était plus un coup de canon rébolver, mais le bruit qui se fait un bateau quand y se fait bous-bous à un rocher de fond.
                La balancelle elle venait de toucher le rocher de la Reine Mathilde, qui l'est pas marqué sur la carte des marins et que un bateau anglais, l'Harbury y s'avait resté, il y a dix ans environ, 8 jours collé en dessur. On arrait dit qui faisait les arapètes.
                Des cris perçants se firent entendre. Tandis qu'un contrebandier y se sonnait dans un escargot de mer l'appel des naufragés.
                Cataclan, vec sa pastéra, n'écoutant que son courage, prit le Vieux Médus et La Tarente, à bord avec lui, et vinga vinga de ramer vers le rocher de la Reine Mathilde.
                Les autes qui se pouvaient rien faire, y s'avaient remonté par la corde sur le boulevard et y se regardaient quoi il allait se passer.

                La Marie-Rose, dont la machinerie qu'elle est commandée par Turco, est plus meilleure que les rames à Cataclan, elle s'arrive la première, juste au moment où le bateau il allait couler à pic, vec l'équipage et une passagère, une belle fille, brune aux yeux de velours, vec les dents blanches comme une petite souris.
                Turco, Jacques, Hébrard, qui se trouvaient sur la Marie-Rose, y se jettent de suite les couronnes de sauvetage à la mer et, au moyen de cordes et d'échelles, y se font monter à bord les contrebandiers et l'adorable jeune fille, que sa beauté y s'avait foutu le rouli et le tangage dans le cœur de Turco.
                Cataclan, le Vieux Médus et La Tarente, qui z'arrivaient un peu en retard, on les a fait monter ensuite à bord, pour servir de témoins endevant l'enspecteur des doines.
                On a engantché la pastéra en darrière de la Marie-Rose et vinga, le petit bateau de la doine y s'a filé dardare, en se lançant la fumée blanche par la cheminée, tandis que sirène y se jetait à tous les échos un cri retentissant de victoire.

                Le soleil - que le père à Nombrino, que c'est un poète, y se l'appelle Fébus - y s'inondait l'horizon de ses rayons ardents, empourprant la grande bleue et annonçant la vie quotidienne.
                Fiers et tout y z'étaient Médus, Cataclan et La Tarente de pouvoir parler à l'enspecteur des doines, qu'on s'appelle M. Casukirini, un type chic qui s'aime bien les cagayous qui sont honnêtes, bons garçons et tout.
                Six heures sonnaient à l'Horloge de la Place du Cheval, quand la Marie-Rose accostait le quai en devant la grande doine, à côté le ponton de la Compagnie Touache.
                Chaque y descend et les doiniers de service qui z'étaient commandés par un brigadier, y se font entrer les contrebandiers, la jeune fille, que ceusse-là qui z'étaient avec elle y se l'appelaient Mercédès, et Cataclan, La Tarente et Médus, en dedans le bureau de l'enspecteur.
                Le planton y va charcher çuilà qui commande la doine à la marine et l'enstruction y commence.

                II - Les contrebandiers y z'enlèvent Mercédès, la fille d'un notable palmaisan

                Il faisait nuit noire. Pas une étoile y se montrait la fatche au fermament. La mer qu'elle était houleuse, elle se faisait entendre un grondement sourd.
                En dedans une petite crique, le San Raphaël il était ancré. Pédro, Martinez et Pastor y parlaient tout bas, à la lueur d'une lampe à huile, tandis que sur la table sur laquelle y z'étaient appuyés, y s'alignait une chiée de bouteilles de vin, qu'on s'arrait dit qu'un bataillon des pompiers y s'avait passé par là.
                Pédro que c'était le chef des contrebandiers y disait doucement, pour pas que le mousse Henrico, qui se dormait dans le hamac à côté la porte de la cale, y se l'entende :
                Faut que demain soir, coûte que coûte, la petite Mercédès Gomera, elle soye disparue de la circulation. Il faut l'enlever ou l'envoyer trouver le Bon Dieu.
                - Alors, comme ça, sans crier gare, y répond Martinez, tu veux lui faire passer le goût du pain. Elle est jolie pourtant la petite, j'aurais peur, moi, de se lui salir sa peau qu'elle est blanche comme le lait.
                - Viens pas faire le sentiment ici, y dit Pastor, un vieux loup de mer que l'air salé y se lui a fait les joues noires comme les tabatières à Taupin. Y faut lui donner sec un coup de ce madone de couteau qu'il est suspendu en dessur le tableau de la Vierge, si la petite elle veut pas se venir en Algérie avec nous.
                - Pourtant, y dit Martinez, si on se lui faisait la morale à la petite, pas besoin de faire le crime.
                - Assez ! Ferme ! y se dit méchamment Pédro, tu feras ce que je voudrais. Il y a au bout le pèse du fils du comte Luis de Placido, le plus grand négociant de Palma.
                Il frappa un coup si tant fort sur la table que le mousse Henrico y s'était réveillé et y s'écoutait la conversation.
                " Alors, continue Pédro, c'est pour demain soir à 10 heures que nous se rendons à la villa de M. Gomera.
                " Un de ses domestiques, Vicentet, que c'est un espion du fils du comte Luis de Placido, y nous fera entrer dans la maison par la petite porte du jardin de darrière.
                " M. Gomera y doit s'absenter pour aller régler des affaires commerciales à Palma et y se laissera seule sa fille Mercédès au faubourg Arrabal de santa Catalina, une ville de 12.000 habitants.
                " Pour y aller on se prendra une voiture, on se dirigera du Muelle vers le pont de la Riéra et la rue de Santa Catalina.
                " C'est à l'extrémité de cette rue que se trouve la villa San Lucia.
                " Si nous avons le temps, nous se regarderons le panorama.
                " De là, on s'aperçoit la Sierra de la Burquesa, au fond les falaises, au bord les moulins à vent du Molinar de Ponent. Au centre, toi qui est pieux comme Pascualine, mon vieux Martinez, tu verras le clocher que la lune elle éclairera taïba, de San Magin.
                " Moi je connais ça comme ma poche. C'est à Arrabal que j'achetais la poudre que je vendais de contrebande à Alger.
                " Pastor apportera une corde solide et un mouchoir pour bâillonner la petite si elle fait du rousqui, moi je m'emporte le couteau et toi Martinez, tu seras chargé de lui faire le boniment, vec ton parler de père blanc.
                " Si elle gueule, je lui fous une cébat dans l'estomac et vas savoir qui c'est qui l'a fait.
                " C'est entendu ?

                - Entendu ! y se répondent les deux autres contrebandiers.

                Y z'allaient se quitter la table pour aller se coucher, quand y z'aperçoivent que Henrico, le petit mousse, y se dormait pas dans le hamac et qui s'avait entendu toute la conversation.
                Aussitôt, Pédro y se l'aguiche par une patte et y se le fout par terre. Après vinga, vinga de lui donner sec avec un manche à balai qui se trouvait à côté le mur.
                Le petit il était à moitié mort. Pédro y se lui disait :
                - Ah ! bandit, tu as tout écouté. Tu vas nous vendre. Si tu fais ça, je te coupe la gargamelle comme à un poulet.
                Et Pédro y se brandissait en l'air le madone de couteau qui se l'avait décroché du mur.
                Le petit mousse y se tremblait comme une feuille.
                Y se leur jurait qui dirait rien et qu'il avait pas bien compris quoi y voulaient faire.
                N'ayant pas bezef confiance, Pastor y se prend une corde papasse, dure et tout et y s'attache solide, solide, le pauvre petit Henrico à le fond de la calle.
                Après chaque y se couche en se donnant le bonsoir prisa.

                C'était onze heures… La mer grondait toujours comme si on se lui avait mangé tous ses poissons.
                Le vent y soufflait avec force dans les cordages, le San Raphaël y se balançait si tellement que deux minutes après qui s'étaient couchés, les trois contrebandiers y se ronflaient comme des sourds.
                La nuit fut excellente pour tout le monde, sauf pour le petit Henrico qui s'avait souffert toute la nuit pourquoi la corde elle se lui rentrait dans les chous.

                Le matin chaque contrebandier y s'a levé pour nettoyer le pont, et Pedro y s'a détaché le petit mousse pour qu'y s'en aille faire vec Martinez les provisions de la journée en bas les magasins des quais de Palma.
                La journée terminée, Pedro y s'attache à nouveau Henrico pour pas qui se donne l'alarme, et les trois contrebandiers y soupent bien, y boivent beaucoup et y se font les préparatifs pour aller à la villa de M. Gomera accomplir leur forfait.
                Pour pas qu'un cocher y soit témoin du vol de la petite Mercédès, Pedro y s'avait loué une voiture fermée, vec deux chevaux, et y se l'a fait conduire par Martinez, qu'avant d'être contrebandier, il était embauché à Palma, comme camionneur, à chez un marchand de tramousses en gros.
                Pedro et Pastor y se grimpent et hue ! cocotte ! la voiture elle se prend le chemin du Pont de la Riéra.

                En route, nos deux contrebandiers y faisaient le plan du rapt.
                - Si elle crie fort, y disait Pédro, donnes-y une châtaigne sur la carabasse pour se l'étourdir ; moi je lui engantcherai les jambes et les bras, comme si c'était un saucisson.
                - Mais, poursuit Pastor, si quelqu'un qui nous entend, y vient faire saragate quoi y faut faire ?
                - Y faut pas hésiter. Tu sors ton couteau et tu frappes. Çuila qui sera touché y viendra plus se mêler des affaires qui se lui regardent pas !
                Y z'étaient en train de se faire le plan de la campagne, quand la voiture elle s'arrête. C'est Martinez qu'une fois arrivé à le Pont de la Riéra, y se connaissait plus la route et y venait se demander le chemin à suivre à Pédro, qui se le connaissait comme sa poche.
                - Nous sommes déjà à le Pont ? y dit Pédro. Eh bien, traverse-le au pas, Martinez, pourquoi le tablier il est fait vec du bois pourri et que nous se pourrions piquer la tête au fond le ravin si y venait à faire figua. Après, tu prendras la rue à droite, c'est la rue Santa-Catalina : tu la dépasseras un peu, pourquoi la villa San Lucia elle se trouve à l'extrémité. A la fin de la rue, tu tourneras à gauche et tu t'engageras sur le petit chemin qui se conduit à la Sierra de la Burquesa. Là, la voiture - qui ne sera rien qu'à cinquante mètres de la villa - elle sera à l'abri, pourquoi y a des grands arbres, des grosses platanes qui se font de l'ombre, comme si c'était un tunnel sous-marin. Tu as saisi ?
                - Oui, Pédro !
                - Alors, file vite, le temps y presse et le fils du Comte Luis de Placido y sera content de nous z'autes.
                Martinez remonte sur son siège et les deux chevaux, que le repos avait rendus légers, fendent l'air et traversent le pont - malgré les conseils de Pédro - avec une rapidité vertigineuse. On arrait dit que le temps leur pressait aussi.

                La voiture, à la même allure, traverse la rue Santa-Catalina et s'arrête à l'endroit indiqué par Pédro.
                Tout le monde descend de voiture. On attache les deux chevaux à une grosse platane et chaque y se met un masque de velours noir en devant les yeux.
                - Toi Martinez, dit Pédro, tu resteras en bas la porte du jardin pour faire la mata. Moi et Pastor, guidés par Vicentet, le domestique qu'il est l'espion du fils du comte Luis de Placido, nous entrerons dans la maison. Comme M. Gomera, il est pas là et que la fille, qu'elle se garde une vieille servante, elle a le sommeil dur, le travail y sera facile.
                " Une fois la petite bâillonnée et ligotée, toi, Martinez, on te jette un coup de sifflet et pressa, pressa tu retournes à la voiture, tu détaches les chevaux de l'arbre et tu fais les préparatifs pour se foutre la petite sur le coussin que j'a enstallé en dedans la calèche.
                " Après sans parler un mot, tu fouettes les chevaux et tu largues par la route qui mène à la Siéra de la Burquesa et de là aux falaises. Tu passeras au bord des moulins à vent du Molinar de Ponent et nous reviendrons à la petite crique à ousque le San Raphaël il est ancré.
                " C'est bien compris, les amis, c'est bien compris ?
                - Oui ! répondirent dans un souffle, qui démontrait l'appréhension, nos deux contrebandiers.
                - Alors, du courage et à l'ouvrage. Le premier qui fait falso je lui plante ce poignard dans la pantcha !

                Pédro, Martinez et Pastor, dans le calme de la nuit, avancèrent doucement vers la petite porte d'entrée qui se trouve sur le jardin de darrière. La lune semblant ne point vouloir assister à un étrange spétacle, elle se cachait prudemment darrière les gros nuages qui se roulaient dans le ciel, comme une papasse de boule elle se roule sur la neige.
                Une petite brise elle se soufflait doucement, doucement par intermittence, que les arbres du jardin y se balançaient tristement qu'on s'arrait dit qui z'avaient de la peine de se trouver en ce lieu où un crime il allait être commis.
                Une chouette, perchée au haut des toits de la maison, elle se faisait entendre un chant lugubre, qui se faisait traboquer le cœur de Martinez, pourquoi Martinez il est pas beaucoup courageux.
                Ce chant, il avait foutu le froid sur les contrebandiers.
                - Oiseau de malheur ! y s'écrie Pédro ! Si je te tenais, je te couperais la gargamelle pour t'apprendre à vivre.
                Et la chouette, comme pour narguer Pédro, recommençait son chant lugubre que répétaient au loin, dans la nuit, d'autres chouettes…
                … Nos trois contrebandiers, comme c'était convenu avec Vicentet, jetèrent contre la petite porte du jardin de darrière la maison de M. Gomera, des petits cailloux. Aussitôt, le domestique, qu'il était caché sous l'épais feuillage d'un grenadier nain, il apparaît et y s'ouvre doucement la porte.
                Tandis que Martinez y reste à son poste, les deux autres, chaussés d'espadrilles, y se franchissent doucement le perron qui conduit dans les appartements du riche négociant.
                Pédro, Pastor et Vincent n'étaient pas trop rassurés, car à côté de la villa San Lucia, il y avait d'autres villas habitées par de petits propriétaires palmaisans et le moindre bruit les éveillerait et les suites pouvaient être graves.
                Vicentet, muni d'une lanterne, ouvrait la marche.

                Ils traversèrent un long couloir. Sur le parquet, le domestique avait eu soin, le soir même, d'y placer un gros tapis arabe pour amortir le bruit des pas. Au bout du couloir, à droite, la chambre fermée de la vieille servante ; à gauche, celle de Mercédès, ouverte.
                Nos trois bandits y pénétrèrent et tandis que Vicentet posait la lanterne contre le mur, Pédro et Pastor se précipitèrent sur la belle Mercédès, plus belle encore plongée dans le sommeil.
                Un cri d'effroi s'échappa de dedans la gorge de Mercédès. Elle appela à son secours la vieille servante qui se roupillait ferme, dans la chambre en face.
                Comme elle criait et se débattait toujours, Pedro y se sort de la poche un papasse de mouchoir à carreaux bleus et blancs et y se lui bouche la bouche.
                Les cris comme ça y z'étaient étouffés.

                Avec une corde qui s'apportait Pastor on s'a emmaré les pieds et les mains de la belle Mercédès et Pedro y se la sarge sur les épaules pour se la porter à la voiture.
                Pendant ce temps Pastor y se tache bien fort Vicentet après son lit et y se lui pose sur la bouche une serviette à éponge pour faire voir que lui aussi il a été attaqué et qui l'a pas pu défendre la fille de son maître.
                Après Pastor, Pedro et Martinez, qu'il était assis en bas la petite porte du jardin, et qui faisait la mata, y s'en vont à la voiture et y déposent à moitié morte de peur, la jolie Mercédès, dont la blancheur se reflétait sous les rayons un peu humides de la lune qu'elle s'était subitement levée.
                Les chouettes y z'avaient repris leur cri de terreur et les chevaux, inconscients de leur complicité dans ce rapt, emplissaient l'atmosphère de leurs énissements joyeux d'avoir été détachés de l'arbre.
                On enstalle la jeune fille dessur un coussin qui y avait dedans la calèche. Martinez y remonte sur le siège et vingà, vingà de galoper par la route qui mène à la Siéra de la Burguesa.
                Comme le vent, les chevaux y marchaient. On s'arrait dit qu'eux aussi y z'avaient accompli le crime et qui voulaient se soustraire à la poursuite.
                Martinez, il avait tant la cagatche au cul, qui s'entendait pas le bruit qui se faisaient en cadence d'attaque, les moulins de Molinar de Ponent.
                Après une course vertigineuse sur la route qui se longe les falaises, la voiture s'arrête à environ cent mètres de la petite crique où il est ancré le San-Raphaël.

                Deux immenses rochers y se bordent les falaises. Un de ces blocs de mer on se dirait un tunnel. Martinez y rouvre la porte de la voiture et Pedro et Pastor y descendent vec leur fardeau.
                Y se mettent vite en dedans le rocher qu'il est troué fond, fond, et y z'entortillent Mercédès dedans une grosse couverture, pas pour qu'elle attrape froid non, mais pour que si le mouchoir y s'enlève de dessur la bouche elle puisse pas crier.
                Pastor - c'était à lui maintenant - y se la sarge sur le dos et, en courant, y se la porte à bord la balancelle qu'elle était accostée à côté d'un rocher plat qui arrivait jusqu'à la plage.
                Sanche que la mer elle était devenue calme comme de l'huile de foie de morue, trement z… ! y z'auraient pu accoster.
                Pendant que Pastor et Pedro y se grimpaient à bord le San-Raphaël, Martinez, au lieur de rendre la voiture au propriétaire, y se fouette les chevaux, en restant à terre et y se les laisse aller tout seuls.
                Aïe ma ! qué catastrophe ! les chevaux laissés libres y commencent à galoper pressa, pressa ; mais tout à coup au tournant d'une falaise qui se tient sur la route, les chevaux et la voiture y se tombe à la mer avec un bruit si tant épouvantable, que les maquereaux blancs, qui se trouvaient dans les environs y sont devenus tout bleus. C'est ça qui se disaient les types de là-bas.

                Martinez, qui s'attendait à ce suicide volontaire des deux pauvres bêtes y se frotta les mains avec joie et tout en regagnant, à son tour, le bord, y disait :
                - Taïba, voilà des preuves que les poissons rois y vont se manger. Les chevaux y parleront pas et la voiture non plus. Je le regrette pour le loueur, mais tant pis pour lui, il a pas demandé à nous z'autres aucune référence. Ça lui apprendra une autre fois.

                En arrivant à bord, il trouva Pedro et Pastor qui z'étaient en lutte avec Mercédès. On se l'avait détaché et enlevée le mouchoir à carreaux bleus et blancs de la bouche et la force, lui étant revenue, elle se grafignait à Pedro qui avait beau lui dire :
                - Tais-toi, petite, tais-toi, c'est pour ton bien qu'on t'a enlevée. Nous voulons te servir de témoins pour ton mariage vec le fils du comte Luis de Placido. Tu le connais çuilà, hein ! C'est un beau garçon, noble et qu'il a des rouillés en pagaille.
                " Lui y te donnera tout ce que tu voudras : son cœur et sa galetet. Quelle sanche que tu as. Je voudrais être à ta place.
                " Tu vois cette petite chambre que Pastor y t'a arrangé, eh bien, c'est là que tu passeras, demain, ta journée de noces avec Luis de Placido.
                " Si tu es sage, on te mettra des draps blancs et tout : si tu es méchante, vous ferez vos petites affaires sur le plancher du bateau. C'est pas moelleux, tu sais, je plains tes petits reins blancs.
                " Comme dans deux heures, y va faire jour, je t'autorise à dormir un peu. Martinez y veillera sur toi pour le restant de la nuit.
                Le boniment lancé en pleine poitrine, Pastor et Pedro y se sont couché, après avoir détaché le petit mousse qu'il était toujours couché à le fond de la calle, tandis que Mercédès, que veillait avec un soin jaloux Martinez, fatiguée, exténuée elle s'endort, accroupie contre un vieux banc en bois.
                La mer qu'elle était calme elle se battait doucement les flancs du San Raphaël. La lune, comme si elle avait honte à la figure, elle venait de se jeter à nouveau un voile dessur la face.
(A suivre)


LE MUTILE N° 61 du 15/09/1918 (Gallica)

L'ANNIVERSAIRE
De la VICTOIRE de la MARNE
                 Dans le décor féerique d'une splendide matinée estivale, où la clarté du ciel, les tranquilles eaux méditerranéennes un instant domptées par une de ces forces mystérieuses et insondables de la nature, qui ajoutaient encore à l'austérité des lieux, l'anniversaire de la Victoire de la Marne, célébré chaque année au Cimetière de St-Eugène, sous les auspices du journal " Le Mutilé de l'Algérie ", revêtu le 8 courant, une imposante grandeur.

       C'est qu'il s'agissait celte année, non seulement d'exalter la mémoire de nos Grands Morts qui se firent tuer pour arrêter la ruée des barbares dans les immortelles plaines de la Marne et accomplirent en 1914 ce miracle de sauver Paris, directement menacé et la France, d'apporter à leurs successeurs de gloire, morts aussi depuis dans ces mêmes lieux, pour sauver la civilisation, le même tribut d'admiration dans lequel nous réunissons leurs communs sacrifices.

       La Marne, distançant en effet les plus hauts faits d'armes inscrits dans notre histoire nationale, les fait grands parmi les plus grands et nous impose le devoir de nous souvenir toujours de leur héroïsme, de faire suturer aux lèvres mignonnes de nos bébés ce nom que nos générations ne prononceront qu'avec une légitime fierté parce qu'il nous a révélés tels que nous sommes : Français d'abord et Français surtout !

       Devant le monument du Souvenir Français dont le dévoué comité, sous l'habile présidence de M. Raby, entretient les tombes de nos militaires et marins morts pour la Patrie avec un soin tout particulier, se pressaient autour des notabilités civiles et militaires, une foule des plus denses et des plus attentives.

       A cette solennité assistaient M. le Capitaine Lesueur, représentant M. le Gouverneur Général, M. le Capitaine Mercier, représentant M. le Général Nivelle, M. le Lieutenant Royer, glorieux mutilé de guerre représentant M. le Général de Lartigue, M. le Lieutenant Desforges, représentant M. l'Amiral, M. le Colonel Delin, commandant la 19éme Légion de Gendarmerie, M. le Capitaine délégué, représentant M. le Colonel du 1er régiment de Zouaves, M. Guèrin, représentant M. le Préfet, M. Raffi, 2° adjoint au Maire, représentant M. de Galant, M. Bergeret, Conseiller Municipal, représentant la Municipalité de St-Eugène.

       Dans la nombreuse assistance, nous relatons la présence de M. le Consul des Etats-Unis, M. Voglé, Consul honoraire de Belgique, M. Filleul, Président de la Colonie Belge, M. Darbéda et Mmes Sésini et Voinot du Comité des Dames de France, Mme Vérola, Présidente de l'OEuvre des Vêtements Chauds, Mme Moinier Présidente de la Croix Rouge, M. Raby Président du Souvenir Français, M. Desmonte, ancien capitaine délégué du Souvenir Français de Paris, M. Tédeschi avoué représentant l'orphelinat Mutuel du Peuple et diverses personnalités qui nous excuserons de n'avoir pas retenu leur Nom dans la grande foule qui les dissimulait. Ajoutons que M. Sauriat Président de la Mutuelle des Anciens Zouaves retenu par une indisposition, s'était fait excuser.

       Aux premiers rangs dans une attitude des plus martiales, se tenaient la clique du 1er Régiment de Zouaves, la Nouba du 5° Régiment de Tirailleurs, une délégation de marins en armes sous la conduite d'un officier qui a été magnifique dans l'exécution de ses manœuvres, des délégations du 1er Régiment de Zouaves, du 5ème chasseurs d'Afrique, de la.19° Section de C.O.A., de 19ème section des infirmiers militaires et nos braves et dévoués pompiers avec leur clique, sous la direction dit sympathique Commandant Lucioni.

       C'étaient encore les sociétés de Médaillés Militaires de la Mutuelle des Anciens Zouaves d'Alger Touriste de l'avant Garde et de Guiseppe Garibaldi avec leurs drapeaux.

        L'Association des Réformés de Guerre était représentée par notre ami Spaenlé, son Président, accompagné des bons camarades Boronat, Palliser, Bongougnier, Lemercier, Maudosnier, Sauter, Georges, Glaise, Coin, etc..., porteurs d'une superbe Palme.

       La série des discours a été inaugurée par M. Spaenlè, Président, de l'Association des Réformés de Guerre de l'Afrique du Nord qui, dans un discours vibrant de patriotisme, a rappelé les sombres jours de 1914, au moment de la ruée sauvage d'une nation de proie, laissant enfin tomber le masque dans un déchaînement d'appétits monstrueux.
        Il a longuement évoqué notre Union Sacrée qui a permis à la France de se ressaisir et d'écrire en lettres de sang l'épopée de la Marne.

       En termes saisissants, il nous a fait revivre l'histoire de la tranchée, tombe ouverte pour recevoir des vivants, les cruelles souffrances endurées dans les taupinières inventées par la couardise boche qui craignait la guerre au ciel libre et enfin celle résurrection de l'armée française qui ne compte plus ses succès depuis qu'elle peut enfin combattre en rase campagne.
        Il a terminé en montrant que le soleil qui se léve lentement à l'horizon et irradie de la gloire de ses rayons naissants les tertres de ceux qui sont tombés donne à nos cœurs affermis la volonté de servir, de vaincre, car il est le Soleil de la Victoire.
        Son allocution a été couverte de vifs applaudissements.

       Après lui, M, Filleul, Président de la Colonie Belge, et présentant à l'assistance un drapeau belge, haillon glorieux, déchiré, noirci par la poudre, maculé de sang et de boue, volé aux vaillants belges par les barbares et repris à la baïonnette dans un furieux assaut par nos légendaires braves du 1er Régiment de Zouaves. Il nous a dit la reconnaissance infinie de son héroïque petit-peuple qui espère tout du courage de nos poilus et en attend, sous la belle allemande avec le sang-froid qui caractérise sa racé, la délivrance promise et la fin d'une odieuse tyrannie.

       M. Raffi, représentant M. de Galand absent, nous a lu un discours du plus pur patriotisme ou il compare nos héros de la Marne à ceux de Salamine. Ce rapprochement de ces deux héroïsmes désormais inscrits en lettres d'or dans l'histoire du monde, a été la plus heureuse inspiration et flatte agréablement notre amour-propre national, car si les Athéniens furent les plus, grands dans l'antiquité, les Français le sont dans le présent, ce qui n'enlève rien au courage de leurs glorieux alliés.

       M. Buzzy vice-président de la Société Guiseppe Garibaldi, dans une allocution émouvante, a rappelé la fraternité d'armes des Français et Italiens qui s'est affirmée à Solfèrino et Magenta, pour se renouveler à Dijon dans, les glorieux exploits de la légion conduite par le grand Garibaldi, dont les petits-fils viennent de mourir face à l'ennemi commun sur la terre française.
        Il a clamé bien haut les espoirs de notre sœur latine en la délivrance prochaine et affirmé que nulle paix n'est possible sans la punition dés odieux crimes allemands. Il nous a ensuite donné lecture d'une belle poésie dont les beaux vers écrits en italien étaient dédiés à nos martyrs.

       M. Claude-Maurice Robert, au nom du journal "Le Mutilé de l'Algérie " demande aux Vivants de continuer jusqu'au, bout la tâche admirable de ces " Grands Morts de l'Union Sacrée", de ces "Morts pour Nous" ; et, laissant parler son coeur, il supplie ses camarades d'infortune " d'ôter de leurs cœurs l'aigreur, la révolte, tout ce qui divise et peut altérer l'amour fraternel ; d'accepter sereinement la nécessaire immolation de lents désastres intimes, de leurs espoirs massacrés, de leurs rêves assassinés ; de reprendre la vie laborieuse et féconde, de servir quand même ! "
        Ces paroles, dites avec émotion et conviction, furent longuement applaudies.
        Au début de ce compte rendu nous avons associé à là gloire impérissable de nos martyrs de 1914 ceux de 1918 qui sont entrés dans la postérité pour avoir hérité de leurs traditions d'honneur et de leur volonté : immuable de vaincre un ennemi abhorré.

       Ils dorment leur éternel sommeil dans celle terre bénie qui est devenue leur linceul parce qu'ils l'ont aimée au point de donner leur vie pour la conserver à leurs descendants.
        Depuis longtemps ils ont rejoint les ombres héroïques des vaillants d'autrefois, des soldats redoutés, heureux d'avoir pu mourir pour une Patrie qu'ils aimaient jusqu'à l'adoration.

        Que leur sacrifice ne soit pas vain ! Qu'il engendre de nouveaux héroismes et surtout qu'il réduise sa silence, les honteux défaitistes grands vendeurs de la Patrie.
        Que stimulées demain par leur froide bravoure, nos légions foulent victorieusement le territoire ennemi dans la capitale duquel une paix définitive imposée par les armes, est seule admissible.

       " Le Mutilé de l'Algérie ", qui a eu l'initiative de la commémoration de la Victoire de la Marne a rencontré partout dans l'organisation et le renouvellement de celle grandiose manifestation, aussi bien auprès des autorités civiles el militaires que des sociétés et groupements de notre ville, l'aide la plus précieuse et les encouragements les meilleurs : A tous il adresse ses remerciements.
        Il y associe la noble population Algéroise tout entière qui lui manifesté tant de sympathie depuis sa fondation el dont l'ardent patriotisme s'est affirmé une fois encore à cette Fête du souvenir par l'attitude la plus digne. Il n'oublie pas ses confrères pour les remercier pareillement.

       Nous saluons bien bas nos frères d'armes, les grands mutiles de la Salpètrière qui ont tenu à témoigner par leur présence au cimetière de Saint-Eugène qu'eux aussi savaient se souvenir.
        A pareille époque l'an dernier, nous conviions les nombreux assistants à la même solennité celte année pour y célébrer la victoire finale.

        Douze mois se sont écoulés depuis avec des alternatives de victoire et de revers, mais les éclatants succès dès troupes alliées dont la domination s'affirme de jour en jour, nous permettent de dire bien haut, avec nos plus grands chefs militaires, que la fin de l'horrible cauchemar que nous avons vécu est proche.
        La victoire est en marche, rien ne peut plus, l'arrêter.
LE MUTILÉ.                 


Souvenirs... Souvenirs..
ECHO D'ORANIE - N°275
à Laetitia, Pascale, Eva et Fanny

         Il est des jours, ainsi, où le passé renaît
          Portant ces souvenirs que l'on croyait éteints
          Un peu de ce pays que l'on a trop aimé
          S'impose à notre esprit, le reprend, le retient...

          Et c'est, dans la mémoire, l'image de ces terres
          De ces si beaux villages au cœur du grand pays,
          De ces campagnes belles ou la foi de nos pères
          Avait, avec le temps, dessiné et construit.

          Dieu oui, qu'elle était belle alors NOTRE ALGERIE
          Dans l'amitié des hommes et leur enchantement
          A faire de cet anneau au doigt de la patrie
          Le bijou qu'il fallait à ses départements.

         " C'était un beau pays " chantait Serge LAMA
          Lui qui ne l'avait vu qu'au bout de son fusil,
          Moi, qui l'ai parcouru du Nord au Sahara,
          J'en ai cent mille images au regard, à l'esprit

          Mille lieux ravissants qui me parlent encore
          Un peu comme cet arbre, à mes pieds, étendu...
          Il fut fier, lui aussi, géant voyant l'aurore
          Par-dessus la forêt, sur les cimes, tendu
          Ces voix viennent à moi et me sont familières
          Elles bercent mon coeur de souvenirs puissants
          Qui parleront encore dans la nuit de la terre
          De ce morceau de vie qui fut éblouissant...

         De ce pays mourant de n'avoir plus voulu
          Des meilleurs de ses fils, arrachés un beau soir
          A leur ville, à leur champ, à ce pays perdu
          Auquel manque aujourd'hui ce grand peuple pied-noir !

Georges-Emile PAUL
Janvier I996


PHOTOS DE BÔNE
Envoyé par M. Jean Louis Ventura
   


HÔTEL D'ORIENT




VUE AERIENNE DU STADE PANTALONI


DIVERSES VUES DE BÔNE




VUE SUR LE PORT






























DESERTEUR !!!
Du MUTILE 62 - 1918


       Lorsque j'ai déserté, j'avais une raison.
       Vous m'avez condamné ; veuillez d'abord m'entendre.
       Je ne mérite pas ces dix ans de prison.
       J'ai déserte, c'est vrai, mais je veux me défendre.

       Je me suis bien battu sous les murs de Verdun
       Où j'ai reçu la croix pour actes de courage,
       Et la perte d'un bras. Il fallut que quelqu'un
       Me donnât le cafard. II parlait du carnage
       Et des atrocités que commet l'Allemand :
       Incendie et viol !... Il parlait… je vis rouge.
       Je croyais voir ma soeur violée et maman....
       Oh ! cette vision : ma mère dans un bouge !!!

       Je ne pus résister et j'ai fait mon Drapeau,
       Mes frères de combat, ma Patrie elle-même.
       N'avais-je pas raison ? Mettez-vous dans ma peau.
       Que ne ferait-on pas pour sauver ceux qu'on aime ?
       Je n'avais plus qu'un bras ; mais, sans plus réfléchir,
       Je saisis un flingot, et gagnai la frontière;
       Je crois avoir bien fait, car j'ai pu réussir,
       A fusiller tous ceux qui enchaînaient ma mère !

       Réhabilitez-moi ; je ne le ferai plus.
       Mais pourquoi pleurez-vous ? Est-ce ma délivrance ?
       Ah ! laissez-moi mourir au milieu des Poilus,
       Car je veux en mourant, crier : Vive la France !

Poésie de E. BROUEL         



La République se meurt
Envoyé par M. Christian Graille

          La République se meurt ! Nous dirons sous peu : la République est morte !
                  Et ce sont les républicains qui l'auront tuée ! Ils le comprennent aujourd'hui ; aussi essayent-ils de tous les remèdes pour ranimer sa vie. Mais :
                  - Exposition Universelle,
                  - revues,
                  - parade présidentielle,
                  - discours ministériels
                  Sont des élixirs impuissants à galvaniser cette pauvre République, à l'agonie aujourd'hui, cadavre demain.
                  Il ne faut pas s'y tromper ; ces fanfares, ces salves d'artillerie sont le glas le plus funèbre qui sonne sur elle. Tant pis si elle se meurt ainsi. Elle succombe sous le poids de ses fautes.
                  Sortie d'un désastre national, elle avait promis de fermer toutes les blessures faîtes au cœur de la Patrie, de reconstituer sa grandeur, de faire fleurir la paix et le travail au sein de nos populations. Elle avait promis aussi de nous faire jouir des bienfaits d'une sage liberté.
                  - Aucune expérience n'a été réalisée,
                  - aucun besoin satisfait,
                  - aucune réforme accomplie.
                  Au contraire ! Elle a fait plus de mal que les autres régimes. Elle a dépensé ses vingt ans d'existence dans de folles agitations. Ce n'est plus un gouvernement régulier : c'est une anarchie complète, un chaos épouvantable. Partout la République accuse sa faiblesse et son incapacité.

                  Sans lendemain ni prévoyance, vivant au jour le jour, elle passe son temps à trouver des expédients qui puissent prolonger son existence de quelques heures.
                  De là, ces lois d'exceptions, de circonstances qui rappellent les plus beaux jours de la tyrannie !
                  De là ces listes de proscriptions qui nous font souvenir des époques les plus troublées et les plus douloureuses de notre histoire. Et tout cela, vous ne l'oubliez pas s'accomplit sous le couvert et au nom de la liberté. Quelle sanglante ironie !
                  Notre parlement !
                  - Il est sans grandeur et sans dignité,
                  - il s'agite et s'épuise dans les luttes stériles,
                  - il ne constitue pas l'enceinte sacrée où se réunissent des législateurs pour élaborer et confectionner des lois.

                  C'est une vaste arène où les plus basses passions se donnent libre carrière. On s'y dénonce avec violence, on s'y bât même, des scènes de pugilat s'y produisent. Tel est le spectacle que la République française offre à l'Europe monarchique. Il est édifiant !
                  Nos ministres sont aussi petits que nos députés. Ce sont d'ailleurs des députés subitement improvisés ministres, chasse aux portefeuilles. Tout le monde est ministrable.

                  C'est une culbute perpétuelle de ministères ! Aussi, combien en avons-nous vu défiler, depuis 1870 ? Quinze n'est-il pas vrai ? C'est trop pour une époque où les talents sont si rares ; car, on en conviendra, pour être ministre il faut avoir quelque talent. C'est une mission périlleuse et délicate que celle de conduire les destinées d'un peuple ! Aussi, ces ministres sans valeur ont laissé, pendant leur passage aux affaires publiques, des traces bien néfastes ! Fautes ! Énormités politiques ! Nos finances ont été gaspillées, dilapidées avec une coupable légèreté ! Aussi, le déficit se chiffre à 600 millions tous les ans.
                  Cette effrayante rupture d'équilibre dans notre budget entraînera fatalement une banqueroute nationale. Nous marchons à l'heure qu'il est, sur un volcan qui gronde ; que de cendres et de ruines dans son éclat ! …

                  Une si lamentable situation a secoué jusqu'à la torpeur des républicains. Ils se sont décidés à opérer des économies pour combler le gouffre qui va nous engloutir. Mais quelles économies font-ils ? Ils " subtilisent ", grand Dieu ! Les appointements des petits, des gardes forestiers, par exemple ; mais ils se gardent bien de toucher aux gros appointements des préfets ou ministres.
                  Notre politique extérieure ! Le cœur nous saigne en abordant ce sujet ; notre patriotisme nous impose des réserves que nos lecteurs comprendront.
                  La France a perdu aux yeux de l'Europe ce prestige fabuleux qui faisait d'elle la première des nations.
                  La République française loin de calmer la méfiance inhérente à son origine même, n'a fait que froisser les sentiments de sympathie, d'amitié que certaines puissances avaient pour la France.
                  La République a si mal géré sa diplomatie qu'à l'heure actuelle presque toute l'Europe s'est coalisée contre notre nation. La France est isolée.
                  Pour un peu, nous perdrions encore l'amitié de la Russie ! La République n'a rien épargné pour nous aliéner sa sympathie.
                  La population française, avec son bon sens héroïque, a réparé toutes les fautes de son gouvernement. Nous avons témoigné, si bien et si fort, dans plusieurs circonstances notre profonde admiration pour ce grand peuple, que son Empereur n'a jamais tenu rigueur des griefs dont il pouvait se plaindre de la part de nos gouvernants.

                  Le bilan de la République est de plus en plus noir. Nous ne parlerons pas de l'aventure du Tonkin ! Il a été versé là-bas, sans profit pour la grandeur de la Patrie, un sang précieux qui crie vengeance. Malheur à Ferry et à ceux qui ont provoqué cette folle expédition … Mais ce qui a achevé la ruine de la République, ce qui l'a flétrie, discréditée, ce sont les révélations des derniers temps ! Les scandales seront une page bien triste de notre histoire.
                  Et ce qu'il y a de plus douloureux, c'est que ces scandales, loin d'être isolés, se tiennent et ont des ramifications si profondes que, de près ou de loin, ils touchent à tout ce qui est et a été au pouvoir. Wilson n'est pas un incident qu'on supprime ; c'est l'incarnation vivante d'une époque, d'un système gouvernemental ; c'est le reflet d'une société dans ses actes et dans sa conscience.

                  Depuis quelques temps, la République sentant sa fin proche, se roule dans les convulsions de l'agonie. Elle frappe à tort et à travers ; elle veut disparaître en faisant des victimes. Le boulangisme (1) est son cauchemar. Elle le poursuit partout : Aussi, l'exil est à l'ordre du jour.
                  Elle met en prison, elle révoque tout ce qui de loin ou de près touche à Boulanger.
                  Elle ne s'aperçoit pas, l'insensée, que le boulangisme est une fatalité qui la frappe ; un produit de ses fautes, le résultat du mécontentement général qu'elle a provoqué au sein des populations ; la France ne veut plus de la République, voilà pourquoi elle se jette dans les bras du premier venu qui lui déclare la guerre. Les boulangers surgissent toujours à la décadence, au déclin d'un régime.
                  La République a fait son temps. Qu'elle disparaisse ; elle ne sera pas regrettée. (1) Mouvement politique qui réunit sous le nom du général Boulanger un grand nombre d'opposants au régime ; c'est la première crise la plus grave du régime républicain.

Le Conservateur (12-05-1889)


Têtes de pipe du département d'Oran.
Envoyé par M. Christian Graille
Roidot

                 Directeur, du Républicain sud-oranais, Conseiller Municipal de Bel-Abbès.
                 Sa seigneurie Prince Caméléon, Haute Noblesse de Presse Roidot :
                 - maître imprimeur, papetier, gazetier,
                 - vend des couronnes mortuaires pour décès,
                 - des lampions tricolores pour le quatorze juillet et
                 - des masques pour le mardi-gras.
                 - Propriétaire et directeur … Politique … du Républicain sud-oranais, à Sidi-Bel-Abbès, envie les lauriers du prince Perrier et le tirage de l'écho d'Oran.

               Décoré des palmes académiques comme publiciste n'a, ce qui est très curieux, jamais écrit une traître ligne de sa vie, d'une intelligence très au-dessous de la moyenne en serait absolument incapable.
                 - Chevalier du Bengala, Grand Croix de l'Ours Blanc, Commandeur de la dinde grise, a préféré les imprimés de la mairie à la dignité d'adjoint, s'est fait faire depuis les élections un superbe trottoir goudronné … aux frais de la ville… " Charité bien ordonnée commence par soi ! ".

               Porte sur son blason, une immense plume d'oie sous un gigantesque zéro, " il n'y a pas de légendes ". Ses armes sont suffisamment parlantes. A largement et de tous temps en politique pratiqué la théorie bien comprise du porte-monnaie.
                 A été tour à tour :
                 - nationaliste, anti-juif avec Doumergues en 95,
                 - clérical avec Jouveau qui lui fit force vers religieux pour le baptême de sa fille Mireille,
                 - Républicain anti-juif avec Carrère 97,
                 - Républicain judaïsant avec Escande 98-99,
                 - indifférent avec Hubert- Jacques et
                 - combattit en mai 1908 comme socialiste à tous crins !

               Ô mince alors ! Mon vieux l'eusses-tu cru ? ? ? ?
                 - A passé par toute la gamme et représenté toutes les couleurs de l'arc-en-ciel,
                 - a fait cabrioles sur cabrioles avec une rare désinvolture,
                 - a trahi et est prêt à trahir tous les partis,
                 - donne le baiser de paix à Lisbonne dont il empoche avec amours et délices les annonces légales, mais est prêt à la première occasion à le faire éreinter dans sa feuille de choux.

               
                 Son canard devrait porter, au-dessous du titre, en manchette ceci : " A vendre au plus offrant. "
                 Est de cette race de directeurs qui exploitent sans vergogne leurs rédacteurs et sous couleur de principes politiques et moraux fermement établis remplissent consciencieusement leurs poches et ne voient dans les élections qu'un moyen bien simple d'acquérir de bonnes terres au soleil et de bâtir de solides maisons.
                 Changeant souvent d'opinion, a changé souvent de rédacteurs, a mis successivement à la porte Doumergues, Jouveau, Carrère et s'apprêtait à débarquer Hubert-Jacques au moment des élections, ceci n'est un secret pour personne. J'y reviendrai d'ailleurs dans un prochain article.

                 A acheté grâce à l'argent de Bastide et de Perret l'imprimerie de l'ancien sud-oranais à Morel, a montré en ces derniers temps à ses bienfaiteurs sa façon de comprendre la reconnaissance ; Etienne a dû lui aussi être enchanté de la ligne de conduite du Républicain en mai 1908 et se rappeler avec amertume les appointements payés par lui aux rédacteurs de Roidot.
                 - D'un égoïsme achevé et d'une nullité crasse,
                 - remplit le rôle de clown et de pitre au Conseil municipal et
                 - incline béatement la tête aux ordres du grand pacha ;
                 - Libraire à ses heures perdues en même temps que journaliste,
                 - a pignon sur rue.
                 Sa boutique est un véritable bazar ; on y débite :
                 - cierges,
                 - croix,
                 - images et eaux bénites aux catholiques,
                 - équerres et compas aux francs-maçons,
                 - bible aux protestants
                 - talmud aux Juifs.
                 Il passe avec cela pour un farouche anticlérical. Est jugé par les gens intelligents, je ne dirai pas comme un individu malfaisant, le mot serait faux, mais comme un être absolument insignifiant.
                 N'a d'autres excuses dans cette soif d'argent et ce dénuement de scrupules que son inconscience et sa bêtise.
Maurice Bernard
La Cravache oranaise (21-02-1909)

La sale besogne du Sieur Constans
Envoyé par M. Christian Graille

I

                 M. Constans est, sans contredit, l'individu le plus propre pour les sales besognes. Son éducation l'a préparé pour un tel rôle. En effet, le nez et la bouche constamment fourrés dans les tonneaux de vidange, il a pu s'habituer à faire, sans éprouver des haut-le-cœur les choses les plus malpropres.
                 Le Gouvernement de la République, se sentant crouler sur ses propres bases a pensé se raffermir en livrant à Constans le soin de sa défense. Constans, il faut l'avouer, met tous ses efforts pour répondre aux espérances que ses amis ont conçues de son cynisme et de son énergique lâcheté.

                 

                 
                 Il n'est d'actions mauvaises qu'il exécute sinon pour empêcher du moins pour retarder la chute de ce régime qui restera, dans notre histoire, comme un souvenir de honte nationale.
                 Placé à la garde de ce Gouvernement dont lui et les siens tirent seuls, les dignités et la fortune, il le défend désespérément.
                 Le Ministère Constans, Rouvier-Thévenet compte à peine quelques mois d'existence et il est déjà bien rempli, bien rempli d'actes infâmes, de ruines.
                 Le boulangisme, il faut le dire, trouble les veilles de Constans et agite son sommeil. Boulanger constitue son tourment éternel !

                 
                 Aussi pour étouffer l'idée boulangiste, sans cesse grandissante, pour arrêter ce vaste mouvement de protestation nationale, Constans fait appel à :
                 - tous les moyens,
                 - toutes les infamies,
                 - lois d'exception,
                 - lois de circonstances,
                 - atteinte au suffrage universel,
                 - changement de mode de scrutin,
                 - exil,
                 - liste de proscription,
                 - organisation d'espionnage,
                 - assassinat,
                 - corruption de haut en bas de l'échelle sociale :
                 - tout est mis en branle.

                 Mais s'apercevant que ces mesures sont impuissantes à régir contre l'immense manifestation du peuple, Constans éprouve les convulsions de la rage, les affres du désespoir.
                 Aussi il rentre maintenant dans la période des révocations ! Malheur, trois fois malheur pour celui qui ne pense pas comme lui ! Si c'est un fonctionnaire, la révocation ne se fait pas attendre.
                 - La révocation est une chose hideuse autant que sauvage !
                 - La révocation est un moyen de pression qui déshonore un gouvernement ; quand il en arrive là pour prolonger sa vie, il est condamné, il doit disparaître.
                 Vous traquez avec rage les personnes qui ne veulent et ne peuvent pas penser comme vous, vous brisez comme un verre le fonctionnaire qui se refuse à consacrer par son acquiescement toutes vos turpitudes.

                 Encore si vous vous arrêtiez aux fonctionnaires qui manifestent publiquement. Mais vous allez plus loin. Vous frappez seulement ceux qui pensent mais qui ne pensent pas comme vous.
                 - Qu'ont donc fait ces fonctionnaires
                 - ces victimes de votre frénésie ?
                 - Quel est leur crime ?
                 - Quel est leur forfait ?
                 - La plupart d'entre eux sont accusés d'avoir envoyé une carte de félicitation au général Boulanger, à l'élu de cent mille électeurs.
                 - Et depuis quand ce témoignage de sympathie est- il considéré comme un crime ?
                 - Est-ce là une raison suffisante pour révoquer de modestes employés, d'humbles fonctionnaires ?

                 La passion vous aveugle, la haine vous fait perdre la notion de ce qui est bien et de ce qui est mal. Croyez-vous abject Constans que ces fonctionnaires méconnus et auxquels vous venez d'enlever leur pain quotidien, en témoignant discrètement de leur dévouement pour le général obéissaient à une pensée d'intérêts ?
                 Oh ! Non ! Ils cédaient à un mouvement spontané de leur âme, à une impulsion subite de leur cœur.

                 Témoins attristés de toutes vos infamies, ils ont salué dans la personne du général l'apparition d'une ère nouvelle. Mais dans tout cela ils n'ont rien fait de blâmable ; c'est une spontanéité de sentiments qui n'est rien moins que légitime. Eh bien ! Dans votre rage inconsciente, vous frappez l'homme dans les secrets les plus délicats et les plus intimes de son cœur ; vous le frappez dans sa raison, dans sa personnalité.
                 Ignoble Constans, quelle sale besogne vous faîtes ! Que de haines vous amassez ! Que de légitimes indignations vous soulevez !

                 En frappant un fonctionnaire vous faites, la plupart du temps coup double, triple ; vous faites de nombreuses victimes ! Ce fonctionnaire, Constans, est père de famille !
                 - Sa femme, ses enfants que vous ont-ils fait ?
                 - Quel est leur crime ?
                 - Vous n'avez donc pas d'entrailles, vous, le parvenu gorgé, pour rester
                 - indifférent en face des cris de ces pauvres êtres sans pain ?
                 - Votre conscience demeure impassible en présence de ces profondes misères ?

                 Vous êtes une brute. Allez ! Entassez ruines sur ruines ; parsemez sous vos pas la misère ! De cet amas de ruines et de misère sortira terrible et implacable la vengeance et le châtiment de tous vous forfaits.
                 Constans, Thévenet, Rouvier ! Quel trio ! L'histoire enregistrera vos noms avec dégoût.
                 Mais il y a quelque chose qui nous serre encore plus le cœur ; c'est de voir la presse s'associer à cette besogne de Constans, d'applaudir à toutes ses exécutions, de l'encourager.

                 Pour ne parler que de la presse de la province de Constantine, on se sent l'âme soulevée d'indignation en voyant l'Indépendant et le Républicain accuser le Préfet de faiblesse à l'égard d'employés et fonctionnaires qui auraient des sentiments boulangistes. Ils vont plus loin ! Ils signalent, ou plutôt ils dénoncent les victimes ; ils semblent même avoir organisé un système d'espionnage.
                 L'indépendant, en agissant ainsi, est dans ses habitudes, continue ses traditions. Nous avons peine à le voir marcher dans une voie aussi malsaine, et certes, nous serions heureux si ses sympathiques rédacteurs, dont nous connaissons la noblesse de caractère et la générosité de sentiments, pouvaient répudier avec indignité un tel métier.
                 Qu'ils combattent le boulangisme, c'est leur droit ; mais l'ardeur de la lutte et la vivacité de la polémique ne doivent jamais faire perdre de vue que les fonctionnaires sont en dehors et au-dessus de toute attaque.
Miles.
Le Conservateur (18-08-1889)

Pour la France
Envoyé par M. Christian Graille

         " Je suis triste jusqu'à la mort " telle est la formule de ma pensée, en songeant à tout ce qui s'imprime sur l'Algérie en ce moment. Partout éclate un sentiment de mépris et de suspicion à notre égard.
                 Nos frères de France ne nous jugent plus en frères… leurs frères ce sont les indigènes !… dont ils nous créent les ennemis.
                 A vrai dire, on pourrait s'égayer de la chose. C'est, en effet, plaisant de voir raisonner et déraisonner sur la colonie des gens qui n'ont jamais passé la mer, comme fit Burdeau l'an dernier, ou qui, s'ils l'ont passée, n'ont vu que ce qu'une société " ad hoc " leur a laissé voir.
                 Pour juger des choses de l'Algérie, il faut y vivre un temps suffisant et y vaquer sans cornac. J'abomine les voyages à la Potemkine. Qu'en sort-il ?
                 Des inepties ! Car il n'y a pas à dire dans quelques années, nous ne verrons pas sans émotion le livre de Burdeau : ce sera le seul fruit bienfaisant d'une agitation d'où ne sortira rien de grand pour la France.

         Il est bien difficile de montrer que le colon opprime l'indigène quand les lois et l'administration ont toujours été plus douces pour celui-ci. Il y a 30 ans, les colons de la plaine rencontraient à Boufarik un coupeur de tête Hadjout qui fréquentait le marché et les cafés, racontant à qui voulait l'écouter les récits de ses exploits exercés sur les colons de la première heure !… Il s'appelait Brahim Ben Kouïled.
                 Sans doute, l'intelligent Inspecteur des écoles qui voit en Abd-El-Kader un émule de Vercingétorix, s'il découvre un jour le Brahim en question ne pourra moins faire que de le comparer à Bayard.
                 Celui-ci pénétrait seul dans Ravenne et, seul encore, barrait le pont de Garigliano à 200 Espagnols…
                 L'autre s'embusquait dans les jujubiers et plantait son flissa dans la gorge du fourrageur allant à sa prairie…

         Qui donc est brave, loyal, sans peur et sans reproche ?
                 N'hésitez pas on vous prendrait pour un colon !….
                 L'œuvre de ceux qui secouent les souvenirs de poudre et de gloire sanglante aux yeux de l'anti-français, est anti-algérien aussi.
                 C'est aux colons qu'on doit les progrès des indigènes dans le travail ; et venir refaire dans leurs esprits l'éducation du sens guerrier d'autrefois, c'est les tirer de la voie pacifique. C'est nous préparer l'insurrection et la ruine. Ils sont 10 fois plus nombreux que nous, si on les excite contre nous, si on les fortifie contre nous, il nous faudra bientôt monter la garde et combattre, pour mourir, les Algériens ne capitulent pas.

         Voilà où nous en sommes : Or, un royaume arabe est impossible. Les éléments indigènes vainqueurs ne conserveraient pas l'Algérie ; ils ont toujours été en ébullition : L'Angleterre ou l'Allemagne nous supplanteraient !

         Si la France continue d'oublier ce qu'elle doit aux Français de race qui ne la représente pas, qui sont elle-même en Algérie : son avenir colonial est perdu.
                 Ce qui est fait montre en tout cas que nos pires ennemis ne sont pas à Berlin. Au nom des soldats morts par le glaive, au nom des colons morts par la fièvre et le couteau, je proteste.

Jean Jacques.
Les Annales algériennes (11-12-1892)



Pour l'Algérie
Envoyé par M. Christian Graille

                 Je viens de lire avec un grand regret que, sur la demande de M. Thomson Le Comité institué à Paris pour secourir les mesquines a décidé qu'on viendrait en aide à tous les miséreux quels qu'ils fussent. C'est un pavé, le pavé de l'ours qui est asséné sur le crâne des Algériens par le député Je m'explique :
                 C'est le colon d'Algérie qui est, depuis quelques années, la bête noire d'un assez grand nombre de Français politiciens.
                 Le discrédit du colon s'étend à l'Algérie entière. Nous connaissons ces dispositions d'esprit ; nous protestons contre les " erreurs " de jugement de nos pères de France (je dis erreur par politesse) et nous allons leur tendre la main !…
                 J'estime que nous devrions être plus fiers.
                 Les Français de France sont-ils d'ailleurs beaucoup plus riches que nous ?
                 Hélas ! Non… et j'affirme que notre manque de fierté se complique d'une injustice et d'une sottise. D'une injustice dont nous devons nous tirer d'affaire nous-même.
                 Qui dit Algérien doit dire débrouillard ! Est-ce être débrouillard que de solliciter les secours d'un budget alimenté par de plus pauvres…

                 D'une sottise, car les secours ne font que des mendiants et le pain doit se gagner. On avait mieux à faire que de crier misère, cri qui résonnera par-dessus nos frontières, à la grande joie de nos ennemis….
                 Il fallait, M. Thomson, rappeler qu'il y a en Algérie des travaux d'État à effectuer :
                 - barrages pour lutter contre la sécheresse,
                 - reboisements pour assurer la réserve naturelle des pluies, le renouvellement des réserves dans les citernes naturelles du sol,
                 - ouvertures de chemin de fer et autre qui sont des fleuves colonisateurs (pour employer l'expression si juste de Burdeau),
                 - ouverture du Transsaharien surtout qui ferait affluer sur l'Algérie et la France les ressources incalculables et certaines de la région du Tchad…

                 Il fallait à cor et à cri demander l'ouverture non de souscriptions, non de loteries, non de fêtes dites de charité mais des chantiers de travaux utiles à la colonisation, conformes à l'intérêt national, auxquels on aurait appelé les miséreux pour leur faire gagner honorablement le pain, les nourritures que les divers comités de charité vont leur distribuer bénévolement et bassement.

                 Les indigènes sont fatalistes. Ils ne prévoient pas. L'orage passé, ils ne seront pas plus éclairés qu'en ce moment qu'ils ne le furent en 67-68.…
                 L'empressement de leur donner de la pâture leur fera croire qu'ils n'ont rien à réserver, rien à mettre de côté pour l'avenir et que c'est le beylik qui doit les nourrir quand ils n'ont plus rien à se mettre sous la dent… Il ne faut pas compter sur eux pour parer aux éventualités menaçantes. C'est donc à l'administration à prévoir, à organiser pour la sécurité future de l'Algérie des travaux assurant un avenir d'abondance, non de famine.

                 Autre point de vue : c'est toujours dans l'éloignement des colons, là où les colons sont rares qu'éclate la famine.
                 C'est là également que l'acridien dévore tout ce qui n'est pas détruit.
                 Qu'en conclure ? Qu'il faut détourner en Algérie le courant de l'émigration française, parce que le jour où la blouse du paysan français s'apercevra, mêlée aux burnous dans les douars, dans les tribus, sera le jour dernier des famines périodiques algériennes.
                 A l'œuvre donc ! Faisons la lumière ! Regardons le mal en face.
                 Ce ne sont pas les phrases qui le guériront mais un ensemble de mesures logiques qu'il faut réclamer à cor et à cri en attendant d'y mettre vivement les mains.
Jean Jacques.
Les Annales algériennes (15-04-1893)



Accident de moto !!
Envoyé par Annie

           Un belge raconte son accident de moto

           Alors que je conduisais ma moto, j'ai fait un écart pour éviter un chevreuil, j'ai perdu le contrôle et j'ai atterri dans un fossé, me frappant violemment la tête.
           Étourdi et confus, je suis sorti du fossé jusqu'au bord de la route quand une auto décapotable s'est arrêtée, et une très belle femme m'a demandé,
           "Est-ce que ça va? » Alors que je levais les yeux, je remarquai qu'elle portait un chemisier avec un décolleté à mourir ...
           Elle a dit: "Monte et je te ramènerai à la maison pour que je puisse nettoyer et panser cette vilaine égratignure sur la tête."
           "C'est gentil de ta part," répondis-je, "mais je ne pense pas que ma femme voudrais que je fasse ça!"
           "Oh, viens maintenant, je suis infirmière", insista-t-elle. "J'ai besoin de voir si vous avez encore des éraflures et ensuite les traiter correctement."

           Eh bien, elle était vraiment jolie et très persuasive. Étant un peu secoué et faible, j'ai accepté, mais j'ai répété: "Je suis sûr que ma femme ne va pas aimer ça."
           Nous sommes arrivés chez elle, à quelques kilomètres de là et, après quelques bières froides et le bandage, je l'ai remerciée et lui ai dit:
           "Je me sens beaucoup mieux, mais je sais que ma femme va être vraiment contrariée. Je ferais mieux d'y aller maintenant. "
           "Ne sois pas bête!" dit-elle avec un sourire tout en déboutonnant son chemisier, exposant ainsi le plus bel ensemble de seins que j'ai jamais vu.

           "Reste pendant un moment. Elle ne saura rien. Au fait, où est-elle? "
           "Toujours dans le fossé avec ma moto, je suppose."



Radical-Pochard
Envoyé par M. Christian Graille
Mostaganem le 1er avril 1893

               Dans son numéro d'avant-hier, notre confrère publie un tableau des états de service du nouveau préfet d'Oran, M. Malherbe.
               Il apparaît de ce document que M. Malherbe sort de la " carrière " et qu'il a été notamment Préfet des Deux-Sèvres, puis de l'Ariège.
               Quant à son passage dans le pays des maçons, notre confrère n'insiste pas, l'annuaire ne donnant aucun détail sur la dernière " performance " du Préfet.
               Inutile de rechercher si le Moniteur Officiel du pays a voulu pour la publication de ce tableau en tête de ses colonnes protester contre les commentaires assez désagréables dont les journaux d'Oran et d'Alger ont accompagné la nomination de M. Malherbe ; la note en question émanerait directement de la sous-préfecture que nous en serions nullement surpris.

               Nous ne voyons guère en effet que l'illustre organisateur des Garden party de la Vallée des Jardins y ait quelconque intérêt à prendre la défense du Préfet d'Oran.
               La publication de cette petite tartine ne fait que constituer un de ces exercices familiers aux fonctionnaires de " l'exécutif " et que l'on impose aux conscrits à leur arrivée au régiment sous le nom " d'exercices d'assouplissement ".
               Or le carabinier est passé maître en ce genre de travail et il rendrait volontiers des points à un huissier de ministère. C'est d'ailleurs là probablement qu'il finira sa noble carrière.
               Mais laissons là le nabab de la rue de la Victoire et contentons-nous de jeter un petit coup d'œil sur sa courte élucubration.
               M. Malherbe a été Préfet des Deux-Sèvres : ce serait quelque chose s'il n'avait pas été ensuite Préfet de l'Ariège : ce qui est peu. Je n'apprendrai rien à personne en disant que la Préfecture de Foix est peut-être la moins importante de France, et que quitter Niort pour venir dans l'Ariège ne constitue pas positivement un symptôme de grande capacité chez le fonctionnaire qui est l'objet de ce déplacement.

               Il est donc très probable que M. Malherbes n'est pas l'inventeur de la poudre sans fumée et que c'est un de ces fonctionnaires que l'on emploie pour l'exportation, laquelle, comme on le sait, comporte volontiers les articles de fabrication secondaire.
               Espérons toutefois que nous nous trompons et que M. Malherbe qui passe brusquement d'une Préfecture insignifiante à un poste considérable, sera cependant à la hauteur de sa mission.
               Les Oranais ont mauvaise tête mais bon cœur et ils oublieront sans peine leur mauvaise impression première si le nouveau Préfet fait à peu près leur affaire.

Raoul Besson.
L'Indépendant de Mostaganem (01-04-1893)


Notre politique musulmane
Envoyé par M. Christian Graille


               A la veille de voir se clore la triste affaire de Margueritte (1), il semble utile d'éclairer d'un certain jour, le sombre horizon de notre modeste politique musulmane et d'interroger notre conscience afin de juger si nous avons une fois par hasard " dépouillé le vieil homme ", si nous avons su contraindre nos appétits, si enfin, dans notre certitude de supériorité incontestée vis-à-vis des enfants d'Ismaël nous avons été à même de préserver nos agissements à leur égard, de cette façon ignominieuse qu'est la force abusive et la violence envers le vaincu. Et, allant plus avant, il serait peut-être bon de nous demander si nous n'avons pas fait preuve bien souvent d'une cécité incurable vis-à-vis de ceux de nos adversaires de la veille qui acceptaient de se recommander à notre sollicitude, donnant ainsi un gage plus dangereux à ceux qui prétendent qu'à chercher en Europe un peuple colonisateur, ce serait peine perdue de le quérir depuis Quimper jusqu'à Pont-à-Mousson, dût-on passer par Brive la Gaillarde.

               Les plaisantins de Cabinet pour qui les programmes ou les professions de foi sont motif à bel esprit, délivrent sans compter brevets de coquinerie aux individus qui ont l'air de leur déplaire.
               - Pour les uns les colons sont l'engeance malfaisante,
               - d'aucuns sont impitoyables pour les sujets de la perfide Albion,
               - Et ce point d'interrogation reste l'énigme encore plus cruelle pour les indigènes que pour nous, et cette sensation de malaise sera ressentie jusqu'au jour où notre indifférence coupable fera place à une recherche rationnelle des intérêts et du bien-être des populations musulmanes de nos deux colonies nord-africaines !

               Les vaincus d'hier sont traités par nous, sinon avec la désinvolture la plus étrange, du moins avec le parti-pris de gens qui se refusent à comprendre la mentalité orientale et s'efforcent de persuader à tous qu'arabe est synonyme d'ennemi irréductible, quand il n'est pas celui de bandit.
               Il est par trop de façon courante d'exposer ce dilemme bizarre que l'indigène ne peut s'assimiler à notre civilisation et que dans le cas où il y goûterait quelque peu, il y puiserait nos défauts mais jamais nos qualités !
               C'est supposer que nos vices sont remplis d'attraits pour ces faiseurs de paradoxe, et qu'à choisir, respect humain à part, eux-mêmes n'hésiteraient pas à leur accorder la préférence.
               Mille faits corroborent notre irréductibilité marquée, pour les musulmans qui viennent à nous.
               Ce n'est pas sans stupéfaction par exemple, qu'un confrère tunisien constate que les poursuites, les vexations dont les Algériens musulmans sont journellement les victimes dans la Régence furent la cause d'exodes de fractions entières qui nous étaient toutes dévouées et qui ont été en Syrie renforcer les adhérents à la cause d'un des fils de l'émir Abdelkader, aux sentiments francophobes bien connus.
               D'autres part, les rues de Tunis sont pleines d'Algériens que des services rendus sous une forme quelconque, parfois comme soldats, devraient recommander à notre sollicitude ; on les a écartés systématiquement, donnant ainsi un gage au moins inutile, sinon dangereux à l'hostilité tunisienne qui les poursuit.

               C'est avec le même étonnement que nous verrons les " naturalisés " musulmans les m'tourni, exposer leurs doléances au premier Magistrat de la République lors de son prochain voyage dans notre colonie !
               Ce sera la preuve la plus palpable de l'ingratitude générale vis-à-vis de ceux qui nous offrent avec un empressement digne d'éloge, leurs services désintéressés, leurs précieux conseils et quelques fois jusqu'à leur vie !
               Il faut remarquer toutefois que cette politique change complètement d'allure lorsque nous avons à faire à nos voisins de l'Est ou de l'Ouest : nos relations avec l'empire chérifien prennent ce caractère de diplomatie savante et courtoise que nous refusons d'employer avec nos sujets algériens et tunisiens.
               Eh bien ! Les errements de notre politique étrangère sont à suivre : nous avons montré tout le fruit de cette méthode dans un précédent article ; notre influence au Maroc est plus considérable que beaucoup ne le supposent.
               - A traiter les indigènes en parias,
               - à les considérer comme incapables de profiter de notre civilisation avancée,

               Leur mentalité rudimentaire nous oblige à montrer à leur égard une sévérité des plus intransigeantes ; à cette sévérité dans la punition, il est nécessaire de joindre la justice la plus impeccable et l'aménité la plus grande pour ceux d'entre eux qui voudraient profiter des bienfaits de nos institutions, des perfectionnements de nos procédés industriels ou culturaux !
               Cette ligne de conduite nous amènerait peut-être à estimer plus sainement les choses algériennes et à sourire des balourdises ridicules de généralisation dans le genre de celle-ci : " Il y a en Algérie trois fléaux :
               - les sauterelles,
               - la sécheresse
               - et les administrateurs. "
               Soyons d'ailleurs assurés que les admirateurs de cette calembredaine n'en attraperont certainement pas une méningite !

George Vang.
Les Clochettes algériennes et tunisiennes (08-02-1903)


Pas de scandale !
Envoyé par M. Christian Graille


                 Nous rencontrions, il y a quelques jours, un de nos amis qui nous dit :
                  " Eh ! Bien le Conservateur se vend-t-il ? " Nous répondîmes :
                  " - oui !
                  - Cela ne durera pas, reprit-il.
                  - Et pourquoi, s'il vous plait ?
                  - Passe que vous ne vous livrez pas à des attaques personnelles.
                  La malignité publique ne vit que de scandales ; les journaux républicains le savent très bien ; aussi, le scandale constitue leur aliment quotidien ".

                  Cet aveu, sorti d'une bouche républicaine, peint admirablement les habitudes et les mœurs de la presse locale : c'est le portrait le plus parfait. La presse républicaine d'ailleurs, par ces temps de République, se rapetisse comme tout le reste.
                  A toutes les époques, sous tous les régimes, elle restait seule, debout, au milieu de toutes les ruines ; aujourd'hui elle suit la loi commune, faîte à l'image de son gouvernement, elle devient servile et plate.
                  - Soit ! Nous répondîmes à notre ami, ou le Conservateur ne sera pas, ou il sera sans scandales !

                  Nous disions, en effet, dans notre programme, que nous répudiions toute polémique contre les personnes.
                  Nous tiendrons scrupuleusement notre engagement ; jamais nous ne lèverons le voile de la vie intime pour y surprendre ses secrets. Notre dignité personnelle nous fait un devoir impérieux de soigneusement éviter les violences directes et agressives.

                  Nous distinguerons toujours dans l'adversaire politique que nous attaquerons l'homme privé et l'homme politique. Le premier nous échappe tout entier, le second nous appartient sans réserve. L'homme privé ne relève que de sa conscience et de la justice, l'homme politique rentre, par ses actes et ses paroles, dans le domaine public.
                  - Que nous importe, à nous, que M. Bertagna se soit livré à telle ou telle combinaison commerciale !
                  - Que nous importe qu'il se soit lancé dans des entreprises plus ou moins véreuses, dans des spéculations plus ou moins délicates !

                  Nous ne voulons même pas nous arrêter à toutes ces accusations, qui, si elles sont fondées, n'engagent que sa conscience. Au préalable, nous voulons ignorer tout cela. Lorsque la presse descend jusqu'à colporter de si basses accusations, elle s'avilit, elle se dégrade. Et puis, celui qui remue la boue finit par s'y vautrer.

                  Par tempérament et par éducation, nous aimons la lutte, la discussion, mais la lutte qui n'exclut pas la courtoisie, la discussion dégagée de toute forme violente et ordurière.
                  L'invective et l'ordure, cependant, sur le ton habituel de la presse locale. Nous n'aimons pas ce genre de polémique. Le Conservateur y est et y demeurera complètement étranger.
                  Nous attaquerons vivement, sans détours, dans leurs actes politiques, les hommes en vue : nous trouvons, nous aussi, que l'administration de M. Bertagna a été et est funeste à la ville. Obérée de dettes et d'impôts, Bône marche à grands pas vers la banqueroute ; mais elle est fatale.

                  Nous sommes loin d'approuver M. Marchis dans ses actes. Nous ne pouvons néanmoins nous empêcher de le féliciter d'avoir supprimé l'école de filles.
                  En effet, si les républicains pensent s'en plaindre et lui en vouloir, nous, conservateurs, nous ne pouvons qu'applaudir de telles mesures qui sont précisément la condamnation du régime actuel.
                  En effet les républicains reconnaissent en agissant de la sorte qu'ils sont allés trop vite et qu'il faut revenir en arrière. Ils brûlent aujourd'hui ce qu'ils ont adoré hier.
                  Mais en dehors et au-dessus de la polémique locale, dans laquelle nous apporterons, on ne saurait trop le répéter, aussi bien de la courtoisie que de la vivacité, nous poursuivrons, avec tant d'autres, un but plus élevé : le renversement de la République. Car, après tout, qu'est-ce que cela peut nous faire, à nous, qu'à Bône et ailleurs les radicaux triomphent des opportunistes ? Les uns et les autres se valent. Les radicaux restent honnêtes tant qu'ils sont loin du pouvoir, mais sitôt qu'ils y arrivent, ils se transforment subitement en opportunistes.

                  Les effets du pouvoir, son contact ramollissent les cœurs les plus farouches. Floquet, le rigide Floquet, en est un exemple frappant. Le pouvoir l'a usé vite et misérablement. Quel opportuniste ! Comme il a assoupli ses principes radicaux ! S'il était encore resté quelque temps au pouvoir, il aurait atteint la célébrité de Ferry.
                  Radicaux et opportunistes sont impuissants à faire quelque chose de bon. Aussi nous les enveloppons dans la même confusion : nous les poursuivrons également.
                  Radicalisme et opportunisme sont deux branches du même tronc.
                  Ce tronc est pourri il faut le dire aux personnes qui voudraient nous voir entreprendre une polémique agressive et violente ; nous n'aimons pas cela ; notre journal, encore une fois, ou ne sera pas, ou sera sans scandales.

Milles.
Le Conservateur (26-05-1889)


  Manifeste du Comte de Paris
Envoyé par M. Christian Graille

                 Le manifeste de M. le Comte de Paris, dont nous donnons quelques lignes plus loin, est l'événement le plus considérable de ces derniers temps.
                 C'est aussi un monument de hautes vues et de profonde sagesse. Il résume, dans un style magnifique, la pensée, les sentiments de notre Prince.
                 Pénétré des nouveaux besoins de la société actuelle, il élargit généreusement le cercle des traditions en associant à son œuvre toutes les bonnes volontés et tous les dévouements.
                 Profondément ému de la douloureuse situation de la France et des grands dangers qui la menacent, il fait un appel désintéressé et patriotique à tous les bons Français, sans distinction de partis ; à tous ces braves Français qui, comme lui, souhaitent l'avènement d'un gouvernement qui rende à la France sa prospérité au-dedans, et sa grandeur au dehors.

                 Cet appel, nous en sommes convaincus, sera entendu par la France ; surtout par cette France chrétienne qui n'a pas vu, sans larmes et sans douleurs, son Dieu chassé de ses temples, sa foi humiliée et poursuivie par un gouvernement d'aventures.
                 - Il sera entendu et accueilli avec bonheur par tous ceux qui portent au fond de l'âme le culte des pieuses traditions, le souvenir des grandes choses accomplies par la Monarchie.
                 - Il sera aussi entendu par tous ceux qui, partisans d'une sage liberté, rêvaient un gouvernement républicain.
                 - Il sera aussi entendu par tous ceux qui croient à la liberté des consciences et au respect des opinions.

                 Mûrie par les leçons d'une longue et triste expérience, la France saura confier ses destinées à des hommes qui sont fermement décidés à lui accorder un gouvernement honnête et sage.

                 Miles.

                 Français,

                 Une lutte décisive est engagée ; il s'agit d'arracher le pouvoir à la faction qui vous opprime, qui a compromis la fortune publique et violé vos libertés les plus chères.
                 Que les bons citoyens marchent d'accord avec ce but ; rien ne doit les diviser.
                 Conservateurs, restez unis ; vous surtout partisans de la Monarchie, que la cause dont je suis le représentant a rassemblé autour de moi, donnez l'exemple de la concorde et du patriotisme.

                 Là où vous avez des candidats soutenez-les énergiquement ; ailleurs inspirez-vous ces nécessités de la lutte et ne traitez pas en ennemis ceux qui combattent les mêmes adversaires que vous.
                 Nos nouveaux mandataires auront une grande tâche à remplir. Après avoir, par des actes réparateurs, porté remède aux maux les plus pressants, ils rendront au pays le droit de disposer de lui-même.

                 En 1884, le parti républicain, au mépris de son principe et de ses engagements, a effacé des lois constitutionnelles la disposition qui réservait l'avenir.
                 Il a prétendu emprisonner la France dans la République et lui fermer toute voie légale pour en sortir.
                 Une révision nouvelle :
                 - mettra un terme à cette servitude,
                 - rendra la parole à la nation et
                 - préparera ainsi l'avènement d'un régime qui rétablisse la paix religieuse, qui apporte à nos institutions la stabilité, à notre société démocratique le calme dans l'exercice de la liberté.

                 Lorsque l'heure sera venue, vous vous rappellerez ce que la Monarchie a été dans le passé. Je vous ai dit ce qu'elle serait dans l'avenir.
                 Catholiques, chrétiens, pourriez-vous hésiter ?
                 Quel gouvernement vous donnerait plus de garanties que la Monarchie pour l'éducation de vos enfants et le respect de vos consciences ?
                 Quel gouvernement saurait mieux honorer la religion, sans le compromettre et assurer à ses Ministres l'indépendance dont ils ont besoin pour l'accomplissement de leur mission ?

                 Impérialistes, je ne vous demanderai pas de renier vos souvenirs.
                 Mais refuseriez-vous votre appui à la Monarchie, forte de l'assentiment national, le jour où il sera établi que, seule, elle est le salut ?
                 Vous qui, de bonne foi, avez cherché à fonder une République honnête, une République conservatrice, vous ne continuerez pas à défendre indéfiniment contre l'expérience une forme de gouvernement condamnée par ses résultats.

                 Vous tous, enfin, qui voulez le relèvement de la France, au-dedans et au dehors, vous le demanderez vainement à des Gouvernements d'un jour. La Monarchie seule vous le donnera. Ce sera l'œuvre de demain ; celle d'aujourd'hui vous allez l'accomplir. V
                 otez sans craindre les menaces d'un pouvoir qui ne durera plus assez pour les exécuter. Ayez confiance, Dieu remet entre vos mains les destinées de la Patrie.

Philippe, Comte de Paris.
Scheen-House, 28 août 1889
Le conservateur (08-09-1889)


L'Algérie n'est pas la France
Envoyé par M. Christian Graille

                 Bien souvent dans les discours officiels nous avons entendu cette phrase :
                 - L'Algérie, c'est la France !
                 - Eh bien non, l'Algérie n'est pas la France.
                 - On aura beau bâtir au Nord de l'Afrique des immeubles qui ressemblent à ceux de Nantes, Montauban ou Pézenas,
                 - on aura beau sur les monuments publics faire flotter le drapeau aux trois couleurs,
                 - on aura beau même graver sur leur fronton la noble devise qui est aussi bien celle de la France que celle de la République,
                 - tant qu'il y aura à La Calle, à Nemours 5 millions d'Arabes au milieu desquels sont comme noyés deux à trois cent mille Français, l'Algérie ne sera pas la France.

                 Et la preuve que l'Algérie n'est pas la France, c'est qu'il se commet en Algérie un genre de crimes qu'on ne connaît pas en France.
                 Si en France vous avez un ennemi et que vous voulez, vous en défaire par l'assassinat vous serez obligé d'opérer vous-même. Vous ne vous risqueriez pas à aller trouver un individu de mauvaise réputation pour lui dire :
                 - Si vous voulez m'aider à me défaire d'un tel il y a telle somme pour vous.
                 Si vous agissiez et si vous parliez ainsi, il est infiniment probable que l'individu à qui vous proposeriez ce mauvais coup refuserait tout net et qu'il irait vous dénoncer de surcroît.
                 Si cependant vous étiez tombé sur une nature d'exception, sur un chenapan capable de tuer un homme pour de l'argent et s'il tuait réellement celui que vous lui désigneriez, le misérable devrait préparer et perpétrer son crime dans le plus grand secret. Il saurait qu'il y aurait pour le découvrir et pour le châtier une entente générale et s'il fuyait personne ne lui donnerait asile.

                 En Algérie il ne va pas en être de même. Si vous avez besoin de l'un de ces braves qui, au moyen âge dans les petites républiques italiennes louaient leur poignard au plus offrant, vous en trouverez autant que vous en voudrez. Vous allez trouver Kaddour, Ali ou Ahmed et vous lui dites :
                  - Tu connais un tel, à tel endroit ?
                  - Oui
                  - Eh bien, si un soir d'une balle ou d'un coup de couteau tu peux l'étendre à terre, il y aura milles francs pour toi. Et pour commencer voici cent francs d'arrhes.
                  Il y a gros à parier que Kaddour, Ali, ou Ahmed acceptera et qu'avant deux semaines le menuisier du village devra prendre la mesure du vêtement de sapin que votre ennemi revêtira pour son grand voyage.

                 Un soir de la semaine dernière à Durandbourg, près de Guelma, un jeune ingénieur, M. Bachelay, neveu de M. Marcel Lavie, était assis dans sa demeure avec sa femme et sa fillette. La porte était ouverte et sa silhouette se détachait crûment dans la lumière de la salle à manger. Un bandit était embusqué à dix mètres de là ; un bandit qui n'avait absolument rien à craindre car d'abord l'ombre le protégeait et l'endroit était complètement désert.
                  Si cependant il était surgi quelqu'un et si ce quelqu'un avait vu l'embusqué, à moins de le surprendre épaulant et faisant feu, qu'aurait-il pu dire ? …
                  Mais avant de tirer le misérable s'assura qu'il n'y avait personne. Il tira et M. Bachelay tomba. Quand on le releva, il avait cessé de vivre.

                 On lui fit des obsèques importantes, la consternation et l'indignation se traduisirent dans les harangues où on célébra ses qualités d'homme et de citoyen.
                  On parla du bel avenir qui lui était réservé et on flétrit le crime abominable qui avait anéanti la joie d'un foyer et ses espérances.
                  Pendant ce temps l'assassin ricane ; il sait qu'on ne le découvrira jamais. On ne le découvrira pas parce que toute une région est tacitement complice ; quand on fera des recherches, quand on interrogera tous les individus d'un douar ils répondront par ces mots qui résument dans la froideur apparente avec laquelle il est prononcé tant d'ironie haineuse.
                  - Manarf… (je ne sais pas)
                  Je ne sais pas, telle est la phrase qu'on a entendue dans vingt instructions ouvertes à la suite de vingt crimes exactement semblables à celui d'hier et qui, depuis quelques années ont ensanglanté le département de Constantine.
                  On n'a jamais trouvé les assassins et on ne les retrouvera jamais. Pourquoi ?
                  Parce que comme je vous l'ai dit, l'Algérie n'est pas encore la France et que l'on y commet cette erreur de rechercher les assassins exactement comme on les recherche en France, alors qu'on les trouverait toujours si on s'y prenait d'une autre façon.
                 
Paul D'Atys.
L'Écho de Tiaret (18-09-1910)

Les femmes ont toujours raison …
Envoyé par ElianeAlbert

           «La voiture ne veut pas démarrer, dit la femme à son mari, il y a de l’eau dans le carburateur»
           «De l’eau dans le carburateur ?» répond l’homme.
           «Mais comment diable peux-tu savoir cela, tu ne sais même pas ce que c’est qu’un carburateur»
           «Je te répète, dit la femme, qu’il y a de l’eau dans le carburateur, j’en suis absolument certaine»

           L’homme, sourire en coin, lui dit :
           «Ok, d’accord, je vais aller voir ce que je peux faire, où est la voiture ?»

           «Dans le canal», répond alors sa femme.



Marron sculpté
Envoyé par M. Christian Graille

Le député poivrot Caesar Trouin

                 Le journalisme mène à tout, mais il faut en sortir. On pourrait appliquer la noble formule à la noble carrière du capitaine de pompiers.
Trouin en est un exemple frappant.
                 Annibal, Alexandre, Charlemagne, Clovis, Caesar Trouin pour la foule, boule-de-gomme pour les intimes ; vieille noblesse du rhum ou plutôt noblesse du vieux rhum, " six quartiers et un tonneau de Madère, sur fond de gueules ", ex capitaine des pompiers de la ville d'Oran.
                 - Grand,
                 - gras,
                 - bouffi,
                 - la face comme une pleine lune,
                 - le nez rouge et bourgeonné,
                 - les yeux sans expression,
                 - un triple menton,
                 - les cheveux plats et luisants, collés sur le crâne genre dolichocéphale, allongé,
                 - Les oreilles rouges et énormes, tout cela lui donne vaguement l'air à distance d'un pot de chambre cabriolant entre ses deux anses.

                 Figure bestiale et repue d'un monsieur gavé de truffes sortant d'un banquet ou d'une série d'apéritifs, se tient mieux à la table qu'à cheval et ce n'est pas peu dire car les Oranais se rappellent avec une légitime fierté l'allure martiale et la silhouette élégante de leur fier capitaine de pompiers, craquant d'orgueil dans sa tunique flamboyante ornée des palmes académiques ; car Trouin comme Roidot est palmé.
                 Ces cavalcades à la Boulanger sur son grand cheval noir, tout le long du boulevard Séguin et à travers les squares enflammaient les petites bonnes et faisaient des désastres dans le cœur des nounous.
                 Dieu Mars quoi ! " et il n'avait qu'un képi … juge un peu, mon bon s'il avait eu son casque ! Et … ce jour de grande revue, où il prononça ces mots qui passeront à la postérité : " Ralliez-vous à Trouin et à son panache blanc ".

                 Dans sa soif d'arrivisme, il a lui aussi jeté son fameux : " alea jacta est ! " (Les dés sont jetés). Mais cette fois les bateliers des loges (loges Tartempion et loges du Delta) ne se doutaient pas en lui faisant franchir le Rubicon que sa fortune était dans son gosier. Tout à tour :
                 - fripier,
                 - bistrot,
                 - coiffeur,
                 - capitaine de pompiers,
                 - diplomate,
                 - ambassadeur,
                 - marchand de vivres,
                 - a abandonné toutes ces dignités terrestres pour aller au-delà des mers siéger au Palais Bourbon.
                 - N'a jamais manqué l'occasion de faire gaffe sur gaffe,
                 - est de ceux qui perdent constamment de belles occasions de se taire,
                 - a failli par son intervention stupide, renverser un ministère qu'il avait voulu défendre et s'est attiré de Clémenceau ce sanglant affront : " Vous ne dîtes que des bêtises " !

                 A cru prudent d'arrêter là ces succès oratoires, mais s'est follement rattrapé à Alger au banquet Mascuraud où il a résumé en quelques lignes, les dix plus belles monstruosités que l'on puisse trouver.
Les Oranais ne se doutent pas de la réclame monstre que leur a ait leur député dans les deux autres départements.
Quand on parle de Trouin à Alger comme à Constantine on se sert toujours de la même formule " ah ! Ce crétin de Trouin " suivi de l'éternel et immuable commentaire : " ce vieux poivrot " et l'on répète partout n'en déplaise à MM. Renaudin et Lisbonne ses meilleurs amis :
" C'est une honte d'avoir un pareil abruti pour représenter l'Oranie à la Chambre ".

                 Si personne n'a vu Trouin à la tribune, nous sommes par contre une foule qui l'avons vu sous la table, les jours de banquets, ayant bu et mangé comme un porc, les yeux hors des orbites roulant dans les crachats et les vomissements ; et voilà l'élu du peuple, celui qui représente trente mille électeurs.
                 C'est un spectacle écœurant et l'on se demande avec stupeur qu'elle a été l'aberration de la population oranaise le jour de l'élection pour que cet âne rouge, ce baudet d'Arcadie, ce roussin aux longues oreilles puisse aller défendre ses intérêts.
                 D'ailleurs on ne le rencontre qu'à la buvette gratuite du Palais Bourbon où il fait une consommation effrayante de spiritueux. Le Conseil Municipal d'Oran lui a voté, paraît-il, pour ses étrennes un stock d'ammoniaque.

                 Négociant en vins et en mistelles … a laissé d'excellents souvenirs aux colons d'Hamman-Bou-Hadjar et après y avoir fait pour lui seul de très bonnes … affaires, fut obligé de s'enfuir et au plus vite quoique capitaine de pompiers et très belliqueux pour éviter quelques coups de trique bien mérités.
                 Est certain après ces opérations délicates … de trouver dans ce centre un nombre considérable de voix pour son élection en dix-neuf-cent-dix … ! ! !

                 La majorité de ses fidèles et de ses plus chaleureux partisans est composé du ban et de l'arrière ban des piliers de cantine et des bois-sans-soif du pays. Cercle d'étude sociale et jeunesse républicaine ! ! ! …
                 Ce qui explique le fameux télégramme qui lui fut envoyé au début d'un banquet où il s'était excusé de ne pouvoir assister et dont les vides-bouteilles professionnels lui adressèrent le télégramme mémorable : " Ave caesar, soulagraphituri te salutant ".
                 Tout compte fait. Un ivrogne doublé d'un idiot.

Maurice Bernard.
La Cravache oranaise (21-03-1909)


Après la séparation
Envoyé par M. Christian Graille
Un gredin politique :
Le sieur Gay, Secrétaire général de la mairie d'Oran.
Rédacteur en chef du " Républicain sud-oranais "

                 Le clergé catholique au cours de la campagne électorale qui vient de finir n'a cessé de critiquer la loi de séparation. Il en bénéficie cependant dans une large mesure. Sous le régime du Concordat les évêques, qui malgré cela ne s'en privaient guère, n'avaient point le droit de quitter sans autorisation, le siège de leur évêché. Il leur était également interdit de se concerter et de se réunir.
                 Depuis que la loi de séparation est promulguée ces différentes interdictions n'existent plus. Aussi le corps épiscopal a-t-il pris l'initiative de provoquer une sorte de concile, réunion de tous les évêques de France qui vient de se tenir à Paris.
                 De graves décisions, paraît-il, ont dû être prises par cette assemblée. On a dû y discuter la question de savoir si l'Église Catholique accepte la loi de séparation ou au contraire entend lui résister.

                Formera-t-on ou ne formera-t-on pas d'associations cultuelles ?
                 Ce sont les évêques actuellement réunis qui décideront sur ce point.
                 La question a son importance et le parti républicain a le droit de s'inquiéter de la solution qui sera adoptée. D'elle, en effet, dépendra en grande partie la paix politique pour ce pays.

                 Ce ne sont pas les représentants de l'Empire ou de la Royauté qui sont assez nombreux et assez influents pour être actuellement une cause de troubles.
                 Toutes les fois que des attaques dirigées contre la République, au premier rang de ses adversaires, s'est toujours trouvé le clergé catholique. Ce clergé enfin instruit par les circonstances, éclairé par les échecs successifs qu'il a subis, consentira-t-il désormais à vivre en dehors de la politique ?

                 La chose n'est point probable, le contraire même est à peu près certain. Mais son hostilité peut être plus ou moins violente, et suivant qu'il acceptera la loi de séparation ou entrera en rébellion contre elle, le parti républicain peut être amené ou à le dédaigner ou à prendre à son égard des mesures de rigueur.

                 Si les évêques actuellement réunis, admettent la constitution des associations cultuelles et si le Pape sanctionne cette manière de voir, la dévolution des biens aura lieu partout sans le moindre incident, les églises seront mises à la disposition des associations, le culte catholique partout continuera de s'exercer normalement et les fidèles se seront à peine aperçus de la transition entre les deux régimes.
                 Il n'est pas douteux que les politiques parmi les évêques préconisent une telle attitude. Seront-ils suivis ?
                 L'Église jusqu'à présent a toujours eu des tendances à suivre les conseils des violents. Cela ne lui a guère réussi. Mais il est difficile de dire si elle voit enfin quel est son véritable intérêt.
                 Au cas où les avis les plus sages ne l'emporteraient pas quelle serait alors la situation ?

                 Il est certain, si l'on s'en tient au texte même de la loi, qu'en l'absence d'associations cultuelles régulièrement constituées,
                 - la dévolution des biens ne pourrait avoir lieu,
                 - les églises ne pourraient être laissées à la disposition du culte,
                 - les prêtres n'en pourraient recevoir les allocations ou pensions prévues en leur faveur.

                 Les catholiques se trouveraient ainsi atteints dans l'exercice de leur culte, et c'est précisément ce que souhaitent, ceux qui espèrent susciter ainsi, dans tout le pays, des troubles dont ils pensent pouvoir bénéficier.

                 Les associations cultuelles n'ont rien de contraire au dogme catholique ; elles existent en Suisse où elles fonctionnent avec l'assentiment du pape. A moins de proclamer que ce qui est vérité au-delà des Alpes est erreur au-deçà, comment les pourrait-on souscrire en France ?
                 Si donc les associations cultuelles ne se forment pas, il faut que l'on sache bien que la faute en sera uniquement à l'Église, que son refus provient uniquement du désir qu'elle a d'entretenir l'agitation et le trouble dans ce pays.

                 Sachant cela, les républicains n'hésitent pas à prendre contre le clergé et le parti clérical toutes les mesures susceptibles d'assurer le respect de la loi. Ils savent par la consultation nationale récente que le pays est avec eux, que la démocratie en a assez des prétentions du parti clérical et qu'elle entend poursuivre en paix son œuvre de réformes sociales.

                 Par la loi de séparation, la République victorieuse offre la paix à l'Église ; aux évêques actuellement réunis en concile il appartient de déclarer s'ils l'acceptent ou si au contraire ils veulent la guerre. La France républicaine est prête pour l'une ou l'autre éventualité.

Alfred Massé.
                 L'Écho de Bougie (10-06-1906)


Le commerce des citadins
Envoyé par M. Christian Graille

                  La grande occupation des citadins en dehors d'une industrie très simple limitée à l'artisanat :
                 - tisserands,
                 - teinturiers,
                 - Fabriquant de chaussures et de tapis,
                 - industries du fer, du cuir, et du cuivre,
                 - C'est le commerce.

                 Si l'on peut voir dans les rues de Fez, des indigènes traiter de grosses affaires " d'import et d'export " au fond de leurs fondouks où apparaissent déjà, à côté de la grande balance romaine destinée à peser les charges des caravanes, le téléphone et la machine à écrire, la plupart des commerçants africains ne conçoivent pas " les affaires " avec notre fièvre européenne ou américaine, mais avec l'aimable philosophie que Fromentin sut si bien analyser :
                 "Tu sais ce qu'un Maure aisé, de bonne souche et de principes honnêtes, entend parfaire le commerce ; c'est tout simplement avoir sur la voie publique, le seul rendez-vous des hommes pendant le jour, un endroit dont il soit propriétaire et qu'il puisse habiter sans désœuvrement.
                 - Il y reçoit des visites ;
                 - sans descendre de son divan, il participe au mouvement de la rue,
                 - apprend les nouvelles qu'on lui apporte,
                 - Se tient au courant des choses, du quartier, et, si l'on pouvait employer un mot dénué de sens quand on l'applique à la société arabe, je dirai qu'il continue de vivre dans un monde sans sortir de chez lui.

                 Quant au négoce, c'est une occupation accessoire. Les clients sont des gens qu'il oblige en leur fournissant les objets dont ils ont besoin.
                 Il n'y a jamais, avec lui, de prix à débattre. Combien ? Tant.
                 Prenez ou laissez ; la seule chose qui puisse être désagréable au marchand, c'est d'être occupé quelques minutes de trop d'une affaire dont il n'a souci. Il ne comptait pas : pourquoi regretterait-il un argent qui, venant par hasard, s'en va par hasard ? "
                 Généralement dans les cités que l'Occident n'a pas transformées, les marchands sont groupés par spécialités dans des rues distinctes :
                 Il y a le marché (le souk) :
                 - du cuivre,
                 - du cuir,
                 - des vêtements,
                 - Des tapis.

                 Je me rappelle quel émerveillement furent pour moi à vingt ans les souks de Tunis, les tasses de café offertes d'une façon souriante en marchandant un bibelot.
                 (" Tu ne voudrais pas que je te le vende à ce prix, on se moquerait de moi, s'il te plaît, prends-le, je te le donne mais ne m'en offre pas un petit prix etc. ") et, depuis, ces causeries dans tel coin des souks de Marrakech chez le marchand de reliures qui siège sur une petite place à l'ombre d'un figuier, ou chez tel marchand de tapis de la place Nedjarine, à Fez, dont les vœux m'arrivent chaque année, fidèles, les premiers de tous, le 20 décembre ! Voici Marrakech :

                 Des quartiers couverts de roseaux qui menacent de vous tomber sur la tête, comme tout le reste de la ville, abritent du soleil une activité primitive qui n'a pas varié depuis des centaines d'années.
                 Depuis des centaines d'années :
                 - les vendeurs de babouches, brodées comme des mitres, sont accroupis dans leurs armoires semblables à des tabernacles étincelants d'argent et d'or,
                 - les dévideurs de soie font tourner leurs roues légères au milieu de leurs écheveaux couleur d'oiseaux des îles,
                 - Les teinturiers suspendent au-dessus de la rue leurs laines et leurs soies encore fumantes de la cuve.

                 Depuis des centaines d'années le marchand :
                 - de dattes,
                 - de noix,
                 - d'amandes,
                 - de henné,
                 Pareil à quelque idole rustique, trône.

                 Des forgerons dignes de Velázquez, le torse nu, les cuisses nues, déjà sombres de peau, rendus tout à fait noirs par la poussière du charbon, ruissellent de sueur devant leur forge et dépensent la force d'Hercule pour battre quoi ? Le petit fer d'un âne. Des enfants pleins d'adresse, gracieux en dépit de la teigne qui les ravage presque tous, tiennent jusqu'au milieu de la rue l'extrémité des longs fils avec lesquels leur patron, assis dans l'ombre de l'échoppe, fabrique la couture d'un burnous. Depuis des centaines d'années ! Et peut-être demain toute cette petite activité va s'effondrer en poussière … Je ne sais pourquoi les peintres, éternellement tourmentés de vastes ambitions, dédaignent, comme des sujets trop au-dessous de leur génie, ces petits métiers charmants.

                 Ah ! Puisse- t-il venir tout de suite, l'humble peintre génial de ce vieil Orient familier ! Tous les petits métiers l'attendent ; et dans le moment même où j'écris, j'entends la voix de cet autre artisan de la vie marocaine, la voix de l'âne qui l'appelle. ! Parmi ces trafics puérils, sous ces treillages de roseaux dont les lumières et les ombres font les délices du photographe, circule une foule prodigieusement :
                 - vivante,
                 - fruste,
                 - primitive,
                 - souple et
                 - Brutale à la fois, d'une familiarité présente que rien de vulgaire n'enlaidit, l'œil éveillé, les dents blanches, le corps divinement à l'aise dans sa demi-nudité ou ses lainages aux grands plis.

                 Tout le monde vaque à ses affaires, le poignard au côté, avec des pensées, des désirs, des besoins que je traverse sans les comprendre ".
                 Et voici encore les souks de Marrakech la nuit : perspective obscure de la ruelle entre deux rangs d'alvéoles dont chacun, sous l'auvent, est un creux de clarté chaude autour de trois flammes, des flammes nourries d'huile, en des lampes de type antique, sur un rude candélabre.

                 Et derrière la procession d'ombres, on ne voit que les immobiles figures des marchands, chacun seul, indifférent aux passants, accroupi, et plus souvent à demi couché près de sa lumière, au-dessus de ses dattes, de ses menus pots de graisse, de khol (1) et de goudron, parmi ses pains de sucre, ses cordes, ses épices. 1) Poudre d'antimoine utilisé comme produit de beauté pour souligner les yeux.

                 Ou bien il trône, éclairé d'en bas, devant sa longue balance qui pend de travers juché tout au sommet d'une pyramide de fruits secs, entre deux talismans protecteurs : la main de Fatma et l'hexagone multicolore, barbouillé sur la chaux du mur.
                 Quelle apathie ou quelle ataraxie de ces visages musulmans, si pâles (la pâleur des fumeurs de kif), anémiés, dans leurs graves colliers de barbe noire !
                 Quel dédain, semble-t-il, des possibles clients, quel parti pris de retranchement en soi ! C'est à croire qu'ils ne sont venus là que pour se mieux abstraire, pour goûter au-dessus de la foule, au plus populeux de Marrakech, une solitude, une paix plus profonde.

                 Mais sans doute, rien ne correspond en eux à l'énigmatique des physionomies et des postures ; désœuvrement total de l'esprit, comme en ces chats qui s'immobilisent, s'absorbent en de nobles attitudes.
                 Justement, j'en vois un, au fond de sa cellule, tout en haut d'un immense tas de raisins séchés, qui caresse un chat d'une main nonchalante, et sans le regarder, sans rien regarder des humains qui passent à ses pieds. Le parfait accord de la bête et de l'homme ! Et comme tous deux se suffisent, supérieurs, inaccessibles en cette retraite !

                 A contre-jour, devant le rang d'échoppes et de petites lampes, se presse la procession d'ombres. Elles :
                 - vous touchent,
                 - vous poussent,
                 - vous coudoient,
                 - Vous dépassent.
                 - Tout d'un coup surgissent de hautes oreilles noires, des oreilles de mulet, et sonnent alors les bâlek ! Bâlek ! Clamés à voix impatiente.

                 Et voici, par terre, dans un carrefour couvert comme le reste du souk, les femmes qui vendent le pain du soir.
                 Devant leurs lampes à trois mèches et leurs plateaux de galettes, elles se tiennent tassées les unes contre les autres, en rang, enveloppées de la tête aux pieds d'une seule pièce de laine, bas et volumineux paquets, fendus de noir à la hauteur des yeux et d'où ne sortent que de maigres bras cerclés d'argent épais, de colliers de douros, un peu de la chemise, dont apparaît la bordure soutachée.
                 Dans le halo des flammes posées devant elles, luit cette barbare bijouterie ; et le grain rude et magnifique du haïk s'éclaire, les pannetées de galettes se dorent. Elles ne se parlent pas.
                 Elles attendent aussi passives que les marchands, mais combien différentes ! On dirait d'une autre race, primitives, archaïques par les épaisses cassures de leurs draperies, par la simplicité de leurs volumes. Prostrées là, repliées dans la poussière du souk, les genoux au menton, et les mains aux genoux …
                 Si humbles et si parées … Elles forment, devant leurs flambeaux, une longue masse de clarté dans la nuit qui règne par en bas.

Cahiers du centenaire de l'Algérie X
par Pierre Deloncle, ancien élève diplômé de l'école des Chartres, Membre du comité national du centenaire.



 Le commerce des paysans
Envoyé par M. Christian Graille

                  A la campagne, dans un lieu d'accès commode, absolument désert six jours sur sept, se tient une fois par semaine une sorte de foire. Quand vous passez en auto vous voyez sur la carte beaucoup de lieux appelés ainsi Souk el Arba, Souk el Rhemis, etc. ce qui signifie marché du 4e jour (mercredi), marché du 5e jour (jeudi) etc.
                 Si vous n'êtes pas au jour fixé, vous ne voyez personne, mais si vous êtes tombé juste, voici le spectacle qui s'offre à vos yeux : Un marché arabe ressemble à nos foires de villages ; mêmes usages ou à peu près :
                 - même personnel de campagnards,
                 - de marchands ambulants,
                 - de colporteurs,
                 - de maquignons.

                 Changez les races, substituez les chaouchs armés de cannes et les cavaliers du beylik aux gardes champêtres et aux gendarmes, la tente mobile du Caïd à la maison communale du maire, imaginez des denrées africaines au lieu de denrées françaises, des troupeaux de chameaux mêlant leur physionomie et leurs grognements, qui n'ont pas d'analogue, à l'aspect, au mouvement connus d'un parc de bétail composé :
                 - de chèvres,
                 - de moutons,
                 - d'ânes,
                 - de mulets,
                 - de chevaux,
                 - de vaches et
                 - de bœufs maigres, et vous aurez une première idée du marché du sebt (ville du Maroc).

                 Reste à supposer maintenant :
                 - la grandeur du lieu,
                 - l'étendue de la plaine environnante,
                 - la beauté propre aux horizons de la Mitidja,
                 - la gravité d'une lande algérienne,
                 - l'éclat de la lumière,
                 - l'âpreté du soleil insoutenable même en octobre,
                 - enfin une réunion de tentes, avec la forme conique des pavillons de guerre ou de voyage, emblème intéressant quand il est l'expression des mœurs d'une société primitive, usage absurde en Europe, où la tente est la maison toujours suspecte des gens sans profession légitime, où l'homme errant est présumé n'avoir ni feu ni lieu, où le nomade est plus ou moins un vagabond.

                 Qu'on suppose encore, pour approcher du vrai, le murmure particulier des foules arabes, la nouveauté des costumes, tous à peu près pareils et presque tous blancs, enfin certaines industries locales et bizarres, surtout à cause de leur extrême simplicité :
                 - Les bouchers y viennent avec leurs étaux garnis de viandes saignantes,
                 - les maréchaux-ferrants,
                 - les cordonniers,
                 - les cafetiers,
                 - les rôtisseurs avec leurs ustensiles et leur matériel on ne peut plus réduit, les grains,
                 - les montagnards avec leur huile, leur bois et leur charbon.
                 - Les jardiniers de Blidah apportent les fruits et tous les légumes cultivables, depuis les oranges et les cédrats jusqu'aux pois chiches rôtis qui sont le grain rôti de l'Écriture Sainte, jusqu'aux lentilles, dont on a fait un potage rouge en souvenir du plat d'Ésaü (1). (1) Ésaü, fils d'Isaac et de Rébecca, aurait donné contre un plat de lentilles son droit d'aînesse à son frère jumeau mains néanmoins cadet, Jacob

                 Les colporteurs juifs ou arabes vendent :
                 - la mercerie,
                 - la droguerie,
                 - les épices,
                 - les essences,
                 - les cotonnades de tout pays et
                 - tissus de toute fabrique, etc.
                 Chacun a son étalage en plein vent ou couvert, et dans les deux cas les dispositions sont fort simples.
                 Une ou deux caisses ou bien des paniers pour contenir les marchandises, une natte pour les exposer, un carré d'étoffe en manière de parasol, voilà, je crois, le seul mobilier nécessaire au marchand forain.

                 Celui des artisans n'est guère plus compliqué. Le maréchal-ferrant, que je prends pour exemple, est un homme en tenue de voyage, coiffé du voile, en jaquette et les pieds chaussés de sandales à courroies, qui porte avec lui dans le capuchon de son manteau tout le matériel d'une industrie qui semble un art de fantaisie, tant elle a peu d'occasions de s'exercer.
                 Ce sont des morceaux de fer brut ou préparés d'avance :
                 - un marteau,
                 - des clous,
                 - un chalumeau,
                 - une minime provision de charbon de bois,
                 - enfin l'enclume, c'est-à-dire un instrument portatif semblable lui-même à un marteau dont le manche sert de tige et de point d'appui.

                 Trouve-t-il un cheval à ferrer, aussitôt il s'installe.
                 Il fait un trou dans la terre et y établit son fourneau de forge. Il plante son enclume à côté du fourneau, s'accroupit de manière à la saisir entre ses genoux, choisit un fer dans sa provision, et le voilà prêt. Un apprenti, un voisin, le premier passant venu rend à l'industriel le service de souffler le feu et lui prête obligeamment le secours de ses poumons.
                 Le fer rougi et façonné, le reste se pratique comme en Europe, mais avec moins d'effort, moins de précaution, moins de perfection surtout.
                 Le fer est rarement autre chose qu'une sorte de croissant très mince, à moitié rongé de rouille, qui ressemble à du cuir taillé dans une vieille savate hors d'usage.

                 Quand le charbon manque, on le remplace alors par de la tourbe, ou plus simplement par du fumier de chameau, combustible actif, qui se consume à petit feu sourd, comme un cigare, et se reconnaît tout de suite à des combinaisons d'odeurs végétales absolument fétides.
                 - Boutiques,
                 - acheteurs,
                 - marchands,
                 - gens à pied et à cheval,
                 - bêtes de service et bêtes d'achat,
                 - tout se trouve aggloméré sans beaucoup d'ordre, ni de prudence.

                 Les grands dromadaires se promènent librement et se font faire place, comme des géants dans une assemblée de petits hommes ; le bétail se répand partout où il peut ; l'âne au piquet fraternise avec l'âne mis en vente, et dans ce pêle-mêle, où les intérêts seuls savent se reconnaître, il est assez malaisé de distinguer les gens qui vendent de ceux qui achètent.

                 Les affaires se traitent à demi voix, avec la ruse du campagnard et les cachotteries du trafiquant arabe ; on fume des pipes afin d'en délibérer ; on boit du café comme un moyen amical de se mettre d'accord ; il y a, de même qu'en France, des poignées de mains significatives pour sceller les marchés conclus.
                 Les payements se font à regret, l'argent s'écoule avec lenteur, avec effort, comme le sang d'une plaie ouverte, tandis qu'au fond des mouchoirs (le mouchoir tient ordinairement lieu de bourse), on entend résonner, longtemps avant qu'elle se décide à paraître, cette chose mystérieuse, si bien gardée, si bien défendue, si bien cachée, qui s'appelle ici le douro ".

Les cahiers du centenaire de l'Algérie X
par Pierre Deloncle, ancien élève diplômé de l'école des Chartres,
membre du comité national du centenaire.


L'Afrique du Nord
sans frontière
Carthage antique
Envoyé par M. Christian Graille

                  Inscrit par l'UNESCO au " patrimoine mondial de l'humanité ", le site antique de Carthage fut redécouvert au XIXème siècle et les " antiquaires " puis, plus scientifiquement, les archéologues l'ont fouillé pour reconstituer l'histoire de la ville, plusieurs fois détruite au cours des siècles, fondée, selon la légende, par Didon, princesse phénicienne, en 814 avant notre ère.

                  Le protectorat français, institué en 1881, permit les premières mesures de sauvegarde ; un décret beylical interdit en 1882 les destructions de monuments et les fouilles privées. Les études et explorations se poursuivent de nos jours.

                  La ville actuelle, au charme tranquille, fait partie des faubourgs résidentiels de Tunis. Jusqu'à la proclamation de la République en 1957, le bey y avait son palais d'été ; le palais présidentiel s'y élève depuis les années 1960.
                  C'est une grande partie de l'histoire de la Méditerranée que le visiteur parcourt en arpentant les ruines célèbres de ce site portuaire Libyque, punique, romain, vandale, byzantin, arabe.

Carthage, puissance maritime et commerciale

                  1. La fondation

                  En concevant son tableau intitulé " Didon construisant Carthage ", le peintre anglais William Turner (1775-1851) avait sans aucun doute en mémoire le chant IV de " L'Enéide " du poète latin Virgile (70-19 av. JC) où Didon-Elissa déclare " Urbem praeclaram statui " " J'ai fondé une ville illustre " alors que la quitte Enée, prince troyen qui vient d'admirer cette ville superbe. Il va fonder Albe, et en -753 Romulus fondera Rome : les deux cités, l'Africaine et l'Italienne, s'affronteront cinq siècles plus tard car il n'y a pas de place pour deux hégémonies dans le bassin occidental de la Méditerranée.

                  Mais au IXème siècle ce sont les colonies grecques, d'Italie du sud, de Sicile, qui inquiètent les Phéniciens. Ce peuple sémite navigateur et commerçant avait établi bien des comptoirs, notamment Utique, sur la côte nord-africaine et dans quelques îles. Peut-être est-ce pour les protéger qu'il fut décidé que des Phéniciens de Tyr et de Rhodes fonderaient Qart Hadasht " la ville neuve " (Carthage), sur une presqu'île dans le golfe de Tunis, au débouché d'un arrière-pays important, face aux îles de Sardaigne, de Sicile, de Malte. Site clef sur la côte pour surveiller les routes maritimes, le passage entre les deux bassins de la Méditerranée, exporter les productions agricoles et artisanales, importer métaux et marchandises précieuses, y jouer, de façon lucrative, le rôle d'intermédiaire commercial, de la Phénicie et de la Grèce à l'Espagne, la Grande-Bretagne, au Sénégal même, Carthage allait devenir un état puissant.

                  2. L'expansion

                  Le pays était peuplé de Libyques, ancêtres des Berbères ; le contact entre cette population autochtone et les nouveaux arrivants créa une civilisation originale où se mêlaient les traditions, la culture, les cultes des deux peuples, donnant naissance à la civilisation punique, que l'archéologie nous fait mieux connaître, malgré les destructions : nécropoles et mobilier funéraire, objets de la vie quotidienne, divinités… D'origine phénicienne Baal-Hammon, Tanit étaient honorés(1) ; des historiens antiques relatent le sacrifice d'enfants premiers-nés en offrande(2).

                  1 Baal Hammon, dieu solaire, assurait prospérité et bien-être. Tanit formait avec lui, le couple divin suprême ; déesse de la fécondité, la suprématie de son culte coïncide à partir du Vème siècle avant notre ère avec le développement d'une agriculture prospère. Son attribut le plus célèbre est le signe dit de Tanit : un triangle surmonté d'une barre horizontale et d'un disque.
                  2 Si Diodore de Sicile et Plutarque citent de tels sacrifices, comme pour diaboliser les Carthaginois, les historiens anciens les mieux renseignés n'en disent rien, d'Hérodote à Tite-Live. Dans les années 1920 fut dégagé à Carthage un vaste espace sacré à ciel ouvert, d'époque punique, que l'on appela le tophet (terme hébreu désignant un espace sacrificiel) de Salammbô (en référence au roman de Flaubert qui relate cette " coutume "). Sur plusieurs étages, le plus ancien datant du VIIIème siècle, le plus récent de 146, sont disposés des milliers d'urnes contenant des ossements d'enfants ou de jeunes animaux. Rien ne prouve qu'il s'agisse d'enfants sacrifiés ; des études ont montré qu'ils étaient extrêmement jeunes. Les Carthaginois réservaient peut-être cet espace aux bébés et aux enfants trop tôt disparus, qu'ils plaçaient, comme le prouvent stèles et cippes, sous la protection de Baal Hammon et de Tanit.


                  Les Carthaginois luttèrent pour conquérir un vaste territoire de terre ferme, qu'ils surent remarquablement mettre en valeur. Le Traité d'agronomie de Magon (IVème s. av JC) était célèbre dans tout le monde antique, traduit intégralement en latin et en grec. Vin, céréales, huile d'olive, salaison étaient exportés largement. L'arboriculture était très développée. Meubles, céramique commune, tissus, parfums, teintures, objets manufacturés de toute sorte contribuaient à assurer une balance commerciale excédentaire. Carthage avait besoin de métaux : fer, plomb, argent de Sardaigne, argent d'Andalousie mais aussi étain de Cornouailles ; d'Afrique noire venaient ivoire, esclaves, or du Soudan, animaux sauvages.

                  L'on sait par les historiens anciens que de hardis navigateurs carthaginois étaient partis explorer les côtes bien au-delà des colonnes d'Hercule (détroit de Gibraltar). Vers 500, Hannon avait longé la côte occidentale de l'Afrique et des comptoirs y furent fondés, dont le nom nous est parvenu, jusqu'au golfe de Guinée. Sans doute s'agissait-il de découvrir des terres inconnues, leurs populations, leurs richesses, leurs besoins, en vue d'intensifier le commerce. Himilcon, quant à lui, avait reconnu les côtes des îles britanniques, dont les richesses en métaux étaient indispensables.

                  La puissance carthaginoise fondée sur le commerce, dut aussi se doter d'une flotte de guerre et d'une armée, de mercenaires essentiellement, pour protéger ses routes maritimes et terrestres (3)
                  3 Les célèbres ports ont été repérés : le port marchand rectangulaire, dissimulé par la hauteur de longs murs, et le port de guerre, circulaire, invisible du précédent ; au centre, sur une île s'élevait le palais de l'Amirauté.

                  Après le déclin de sa métropole Tyr, Carthage devint, dès le VIème siècle, l'unique métropole phénicienne-punique de la Méditerranée occidentale : elle regroupa autour d'elle les colonies de Tyr et créa ou développa des comptoirs, voire des villes, dans les îles méditerranéennes les plus grandes : Corse, Sardaigne, Sicile ou les plus intéressantes stratégiquement : les Baléares, Malte.

                  En effet, en 480 avant notre ère, l'année même où les Grecs refoulèrent à nouveau les Perses, l'archipel maltais passa sous le contrôle de Carthage, qui s'assurait ainsi un avantage sur les Grecs. Relais important pour le commerce vers les îles britanniques et les îles du Cap Vert, près du Sénégal, l'archipel abrita même des chantiers de réparation navale. Détail intéressant : deux cippes (petites colonnes) datant du IIème siècle avant notre ère trouvés à Malte permirent en 1758 à l'abbé Jean-Jacques Barthélémy de déchiffrer, grâce à leur inscription bilingue phénicien-grec, la langue phénicienne.

                  Les affrontements avec les Grecs d'Occident furent marqués de défaites (Himère en 480) mais surtout de succès ; grâce à l'alliance avec les Etrusques, les Carthaginois chassèrent les Grecs de Marseille, de Corse, de Sardaigne. En Sicile, outre les fondations de Motyé, Solonte, Panormos (Palerme), les vestiges dégagés à Eryx, Sélinonte, Lilybée confirment la présence ou l'influence carthaginoise.

                  Les colonies bénéficiaient d'une certaine indépendance puisque quelques-unes pouvaient battre monnaie, comme l'atteste la numismatique (Gadès, Ibiza, Motyé…) ; leurs institutions étaient en partie calquées sur celles de Carthage (assemblées et deux suffètes élus annuellement). Les territoires des autochtones étaient dirigés par un gouverneur et surveillés par une armée. Des révoltes se produisirent, parfois attisées en Sicile, en Espagne, peut-être en Afrique par les Grecs.

                  En Afrique même, les nombreuses villes côtières relevaient de l'empire carthaginois : Utique, Bizerte (Hippo), Tunes (Tunis), Sousse (Hadrumetum), Monastir (Ruspina) etc. mais aussi des cités méridionales comme Sfax, Gabès… A l'intérieur des terres vers le désert ou l'actuelle Algérie orientale, les preuves ne manquent pas pour attester la présence punique.

                  Ainsi, Carthage réussit à se constituer un empire, de la Tunisie à l'Espagne actuelle, îles incluses, dont les territoires intérieurs étaient dans l'ensemble bien développés.
                  Puissance maritime et commerciale, Carthage devait affronter, tôt ou tard, l'ambitieuse ville de Romulus, Rome.

L'affrontement avec Rome

                  Rome en effet, fondée soixante ans après Carthage, avait au fil des siècles étendu sa domination terrestre sur toute l'Italie ; le dernier roi chassé en 509 avant notre ère, elle était devenue une république dirigée par un Sénat, deux consuls élus pour un an évitant tout retour de la royauté. A Carthage, les deux suffètes dirigeaient l'Etat pendant un an, suivant le Conseil permanent de 30 membres, émanation du Sénat de 300 membres, essentiellement des marchands ; il s'agissait d'un gouvernement oligarchique où les rivalités entre familles pouvaient être importantes.

                  La politique extérieure de Rome la conduisit à s'intéresser de plus près à la Méditerranée, la Sicile et ses blés réputés lui devenant indispensables.

                  L'affrontement était inévitable. En un siècle, et trois guerres, la puissance de Carthage et la ville elle-même furent anéanties.

                  1. Défaite et nouvel atout

                  La première guerre punique (264-241) se termina par la défaite de Carthage, qui fut chassée de Sicile ; la crise financière engendrée par cette guerre conduisit à la révolte des mercenaires, que Carthage ne pouvait plus payer ; l'Etat punique dut céder la Corse et la Sardaigne. Les Carthaginois entreprirent alors de consolider leurs positions en Espagne en fondant vers 223 Carthagène (Carthago nova). La famille des Barcides avec son chef Hamilcar y eut une sorte d'empire ; les Barcides s'appuyaient sur la plèbe des artisans et des marins et non pas sur les marchands. L'œuvre d'Hamilcar fut poursuivie par son gendre Hasdrubal et son fils Hannibal.

                  2. L'épopée d'Hannibal

                  Les évènements de la deuxième guerre punique (218-201), si magistralement exposés par l'historien latin Tite-Live (vers 64-10 avant JC), sont bien connus.
                  Hannibal, parti d'Espagne, franchit les Pyrénées, traversa, tantôt pacifiquement tantôt en guerroyant, le sud de la Gaule, franchit encore les Alpes avec ses éléphants qui terrifiaient les populations, remporta successivement, en quelques mois, les victoires du Tessin, de la Trébie, du lac Trasimène et, finalement, de Cannes en 216. Mais il n'osa attaquer Rome, qui se croyait perdue, et prit ses quartiers d'hiver à Capoue. En Afrique, à Carthage, la jalousie animait certains sénateurs contre les Barcides ; aussi Hannibal n'obtint-il ni les subsides ni les renforts nécessaires.

                  Au cours de ces années, l'habile jeune proconsul romain en Espagne, Publius Cornelius Scipio, avait compris que sans cette province Carthage serait affaiblie : il conquit Carthagène puis l'Andalousie et assura la domination de Rome sur l'Ibérie. Il parvint à faire approuver par le sénat son projet de débarquement en Afrique : c'est ainsi que l'armée romaine écrasa l'armée carthaginoise commandée par Hannibal, à Zama, en Numidie, en 202. Le général romain reçut le cognomem (surnom) de " Africanus " (l'Africain).

                  3. Résurrection et anéantissement

                  Cependant la cité carthaginoise, que Rome voulait anéantir, n'était pas complètement abattue. Une fois encore elle se redressa : elle remboursa en dix ans seulement l'indemnité de guerre, construisit un nouveau port de guerre, recréa des réseaux commerciaux et redevint une puissance économique.
                  A Rome Caton l'Ancien s'inquiétait fort de cette résurrection et, alors que les Romains, engagés dans d'autres conquêtes en Orient, oubliaient le péril africain, il le rappelait régulièrement au sénat, martelant " Delenda est Carthago " " Il faut détruire Carthage ".

                  Vint donc le temps de la troisième guerre punique, qui fut relativement brève (149-146 avant notre ère) et s'acheva tragiquement. Scipion Emilien (petit-fils adoptif de Scipion l'Africain) s'empara de la ville et la rasa totalement (4) ; le massacre fut considérable, les survivants réduits en esclavage. Scipion Emilien reçut le surnom de Africanus ; il est parfois dénommé " le second Africain ".
                  4 Carthage punique est cependant de mieux en mieux connue grâce à l'archéologie. Sur la colline de Byrsa s'élevaient de riches maisons dont on a retrouvé des frises, des corniches aux décors égyptisants de couleurs vives. De magnifiques sarcophages en marbre, des coffrets en calcaire contenant les cendres de défunts et surmontés d'une stèle sont dégagés dans les nécropoles. L'architecture punique, d'abord marquée par des influences phéniciennes et égyptiennes, s'occidentalisa au contact des peuples grec puis romain.

                  En 146 Rome venait d'assurer, en Orient et en Occident, son hégémonie sur la Méditerranée et les peuples voisins.

Carthage romaine ; capitale de l'Africa


                  1. Un site à occuper

                  Les Romains n'avaient plus à craindre Carthage ; en revanche, s'ils n'occupaient pas ce site majeur, un autre peuple ambitieux s'en emparerait. C'est pourquoi, dès 122 y fut installée la Colonia Junonia, sous la protection de la déesse Junon ; mais elle périclita rapidement. César lui-même envisagea d'y recréer une ville ; après son assassinat (15 mars 44 avant notre ère) son projet fut repris et achevé par son fils adoptif Octave, futur empereur Auguste. La Colonia Julia Concordia Karthago se développa au point de devenir plus importante qu'Utique, capitale politique et économique de la province d'Afrique créée en 146. Tunes (futur Tunis), cité de marins et de marchands phéniciens, resta une simple banlieue de la nouvelle Carthage.

                  Il reste peu de vestiges de la Carthage punique que la ville romaine recouvrit en partie. Mais en Afrique du Nord des traits de la civilisation punique persistèrent malgré l'occupation romaine, la langue (encore parlée au IVème siècle), des coutumes, des cultes : Baal Hamon et Tanit furent honorés encore pendant les premiers siècles du christianisme (5)
                  5 Baal-Hammon fut assimilé à Cronos-Saturne, Tanit à Héra-Junon-Caelestis, sa puissance féconde étant représentée par des figues, des amandes, des grenades, des palmiers, ainsi que par des colombes et des poissons. Les principales divinités romaines, Apollon, Mercure, Minerve furent accueillies comme l'avaient été auparavant Mithra, Isis, Cybèle, divinités orientales ou égyptiennes. Eschmoun s'assimila à Esculape, dieu guérisseur, et Melqart à Hercule.

                  2. Une ville admirée

                  Seconde ville du monde après Rome, d'après le poète gaulois Ausone, Carthage comptait environ 300 000 habitants au IVème siècle. Son centre se situait au sommet de la colline de Byrsa, où s'élevait le Capitole ; ses rues étaient larges, elle n'était pas fortifiée, ses monuments nombreux et somptueux suscitaient l'admiration. Le célèbre marbre de Chemtou y resplendissait.

                  Les Romains avaient construit au nord-ouest un cirque et un amphithéâtre, où furent martyrisées en 203 sainte Félicité et sainte Perpétue. A l'est s'élevaient un théâtre, et un odéon construit sous le règne de l'empereur Septime-Sévère (193-211). Le théâtre est de nos jours chaque été le centre d'un festival de théâtre, de danse, de musique. Au nord se trouvaient les énormes citernes de la Malga. Au sud s'étendaient les grands thermes offerts par l'empereur Antonin (138-161), parmi les plus vastes du monde romain ; les citernes de Bordj Djedid (30 000m3 d'eau) ; les ports et les docks. Il avait fallu reconstruire les ports puniques obstrués par le limon (6.) 6 L'on peut voir aux environs de Tunis et de Carthage une partie aérienne des 132km de l'aqueduc édifié, en quarante ans, après 122, sur l'ordre de l'empereur Hadrien. L'eau était captée dans le djebel Zaghouan. Le débit est estimé à 370 litres par seconde.

                  3. Une capitale intellectuelle et spirituelle

                  La vie littéraire et intellectuelle y était intense, ses maîtres réputés : Carthage était à tous égards la capitale de la Province d'Afrique Proconsulaire.

                  L'auteur du roman " Les métamorphoses ou l'âne d'or ", Apulée, né vers 125 à Madaure (près de Thagaste-Souk-Ahras) et mort à Carthage vers 170, proclame cette ville cosmopolite et active " muse céleste de l'Afrique ".

                  C'est à Carthage qu'Augustin, futur évêque d'Hippone, alla poursuivre ses études supérieures ; plus tard il y participa à la controverse entre catholiques et donatistes.

                  En effet, dès le début du christianisme dans cette province, Carthage fut un centre spirituel essentiel. Tertullien (155-220), premier écrivain latin chrétien et apologiste virulent, y naquit et y mourut. Saint Cyprien de même, évêque en 249 et Père de l'Eglise, y mourut en martyr en 251. La ville et sa région connurent les persécutions impériales contre les chrétiens.
                  Plusieurs conciles y furent réunis, au IIIéme siècle et au Véme ; en 416 et 418 les conciles condamnèrent le pélagianisme.

                  Les chrétiens, surtout des petites gens, des esclaves, des ouvriers agricoles, ou des marins les premiers temps, devenaient très nombreux dans la bourgeoisie, l'armée et même la noblesse, aussi les persécutions affectèrent-elles toutes les classes sociales.

                  4. Les monuments chrétiens

                  Les fouilles archéologiques ne révèlent pas de cimetières chrétiens antérieurs à la fin du IVème siècle, lorsque le christianisme devint religion d'Etat, tous les autres cultes étant interdits par l'empereur Théodose en 392. De même les édifices du culte chrétien ne sont pas antérieurs à cette époque.

                  Les Carthaginois consacrèrent trois basiliques à leur évêque martyr saint Cyprien. Un grand bâtiment conventuel jouxtait la basilique de Damous el Karita, la plus vaste d'Afrique avec ses onze nefs, derrière laquelle s'élevait un baptistère. Les textes dénombrent dix-huit basiliques, toutes n'ont pas été identifiées.

La fin de Carthage

                  1. Vandale. Byzantine

                  En 439 Genséric, roi des Vandales, envahit la région et fit de Carthage la capitale de sa nouvelle possession. Arien, donc hérétique, il promit cependant la tolérance aux catholiques.

                  Un siècle plus tard les Byzantins à leur tour vainquirent les Vandales. Le 15 octobre 533 le général byzantin Bélisaire entra solennellement dans Carthage, évitant ainsi le sac de la ville. L'empereur d'Orient Justinien y installa le siège de son diocèse d'Afrique. A la fin du VIème siècle Byzance n'avait plus que deux territoires en Occident : Ravenne et Carthage.

                  L'on a récemment dégagé les vestiges d'une basilique édifiée à l'époque byzantine sur les restes d'un monument (probablement déjà chrétien) de la fin du IVème siècle ; peut-être s'agit-il de la Restituta, la cathédrale de Carthage. La basilique byzantine de 900m² comporte cinq nefs. La mosaïque (7) au paon de la chapelle annexe est visible dans l'antiquarium paléochrétien réalisé par une équipe américaine dans le cadre de la campagne de sauvegarde de l'UNESCO.
                  7 Dans le domaine artistique, une des plus grandes réussites de l'Afrique romaine fut la mosaïque, à tel point que l'on parle d'école de mosaïque africaine.

                  2. La destruction

                  Byzance avait consolidé sa reconquête africaine mais se sentait elle-même menacée ; elle délaissa Carthage que l'aristocratie quitta. La ville se dépeupla, s'affaiblit, en sorte que la muraille construite en hâte au début du Vème siècle ne la défendit pas plus des Arabes que des Vandales.

                  Au VIIème siècle, les conquêtes arabes s'étendaient en Afrique. Carthage résista en 647 et aux attaques de 670-683. Mais en 698 Hassan Ibn Noôman, de Kairouan, à la tête de 140 000 hommes, détruisit la ville comme l'avaient fait les Romains en 146 avant notre ère. L'Islam se propagea ; Kairouan devint capitale et Tunis une ville très importante. Carthage ne fut plus qu'un village (8)
                  8 Au cours de la VIIIème croisade, le roi Louis IX (saint Louis) ne put s'emparer de Tunis mais il prit Carthage, où il mourut de la peste ou de dysenterie en 1270, sans avoir réussi à convertir le sultan au christianisme. Les Français furent autorisés au XIXème siècle à lui édifier un monument commémoratif. Quant à la cathédrale Saint-Louis, élevée sur la colline de Byrsa, elle est due au cardinal Lavigerie, au début du protectorat. Avec le retour de chrétiens, Français et Italiens, l'évêché de Carthage fut reconstitué. Notons que les Pères Blancs, ordre créé par le cardinal, contribua de façon très importante à la redécouverte de la ville antique.

                  Véritable mégapole cosmopolite d'abord punique puis romaine, Carthage rayonna sur la Méditerranée occidentale et sur l'Afrique du Nord pendant dix de ses quatorze siècles d'existence. Tel le phénix elle sut renaître de ses cendres, se releva plusieurs fois. Grâce aux découvertes archéologiques nous connaissons et admirons également les arts qui s'y pratiquèrent, de la sculpture à la verrerie, de la tabletterie et de la céramique à l'illustre mosaïque.
Recherches et rédaction de Josette Zevaco-Fromageot

Bibliographie :
- Michel Mourre Dictionnaire encyclopédique d'histoire éd.Bordas 1983
- Encyclopedia Universalis.
- Sites en ligne Tunisie ; Carthage ; etc.
- Guides touristiques de Tunisie ; revues d'histoire et d'Archéologie.


Un vrai politicien
Envoyé par Mme Annie

         Un politicien parti faire campagne dans un village demande aux villageois de lui dire deux de leurs principaux problèmes.
         - Notre premier problème est le manque d’ infirmier qualifié dans notre dispensaire, disent les villageois.
         - Le politicien prend son portable, compose un numéro, murmure des mots, puis leur dit :
         - Le problème vient d’être résolu. Quoi d’autre ?

         - Les villageois lui répondent :
         - Notre second problème est que nous n’ avons pas de réseau mobile dans le village...


QUELQUES PAGES D'UN VIEUX CAHIER

Source Gallica

Souvenirs du Général Herbillon (1794 - 1866)
Publiés par son petit-fils

        CHAPITRE XIX
Arrivée à Lyon. - Portrait du maréchal de Castellane.
Visite du Prince Président à Lyon (19 septembre 1852). Proclamation de l'Empire (novembre 1852).
Commandeur de Saint-Maurice et de Saint-Lazare.
Entrée de l'Empereur à Paris (2 décembre 1852).
Mort du général Bouscarens (30 décembre).
Lettre au général Canrobert, promu général de division (janvier 1853). - Le fils du général Herbillon est nommé lieutenant.

        Ce n'est pas sans une certaine appréhension que le généra Herbillon se rendit à Lyon, mais cette impression peu favorable du début ne tarda pas à se modifier. Le caractère très droit du général de Castellane, la façon dont il prenait très à cœur les intérêts de ses subordonnés, la confiance et la sympathie qu'il témoigna vite au général Herbillon furent cause qu'une véritable amitié se créa entre ces deux hommes et, comme on le verra plus tard dans la suite de ces récits, jamais le général Herbillon n'eut de plus fidèle allié et de plus chaud protecteur que celui dont, au début, il appréhendait le commandement d'autant plus que lui-même n'avait pas toujours le caractère très commode.
       On raconte à ce sujet l'anecdote suivante :
        Plus lard, quand un village de la province de Constantine reçut le nom de " Herbillon, " un de ses amis dit : " On a bien fait de donner son nom à ce pays ; il est comme lui : il est inabordable. "
        Mais, en fait, il s'entendit très bien avec le maréchal de Castellane, et dans ses Souvenirs on trouve les lignes suivantes :


        Nommé au commandement de la division d'infanterie à Lyon, je me rendis à mon poste, non sans éprouver un peu d'inquiétude de me trouver sous les ordres du général de Castellane qui, de longue date, avait la réputation d'être très exigeant dans le service, d'une sévérité outrée et peu convenable, disait-on, avec ses subordonnés. Ajoutez à cette renommée ses excentricités dont tout le monde s'entretenait. Je ne pouvais donc que réfléchir sur la nouvelle position qui m'était donnée et qui peut-être allait me mettre dans le cas de lutter à la fin de ma longue carrière avec cet officier général; il n'en fut rien.

        Une fois de plus je reconnus qu'il ne faut pas se fier aux réputations qui parfois sont faites très légèrement. Elles sont établies bien souvent à la suite de contrariétés éprouvées, d'impressions subies; elles sont aussi le résultat des idées et de l'opinion des gens avec lesquels nous avons vécu ou de nos goûts qui ne sont nullement en harmonie avec ceux des personnes que nous jugeons.
        Ainsi, le maréchal de Castellane a en horreur l'habit bourgeois, il ne le permet sous aucun prétexte. Dès le matin, il est lui-même en uniforme et, donnant l'exemple, il exige que tous les officiers sans exception soient en tenue. Beaucoup qui ne peuvent supporter cet assujettissement clabaudent et tournent le maréchal en ridicule.

        D'autres, en grand nombre, aiment leurs aises, ne montent à cheval que quand ils ne peuvent faire autrement ; l s'en suit que les nombreuses prises d'armes les contrarient et les fatiguent; aussi se plaignent-ils des exigences du Maréchal et ne lui pardonnent-ils pas sa ténacité dans l'exécution précise de tout ce qui a rapport au service.
        D'autres, enfin, qui ne sont militaires que par les épaulettes qu'ils portent, ne voient dans le maréchal que sa constitution physique, sa manière de s'habiller, sa manie de porter même dans le monde son bâton de maréchal, son amour excessif de l'ostentation; ils parlent de ses travers, l'accablent de leurs plaisanteries et cherchent en société à le rendre insupportable aux personnes qui ne le connaissent pas.

        Mais le militaire consciencieux, observateur et qui aime son métier juge le maréchal différemment; il passe rapide-ment sur tous ses défauts, et, même en le jugeant sévèrement, il ne peut que lui rendre justice.
        Car on ne peut s'empêcher d'admirer la manière dont le service est fait à Lyon. Où y a-t-il une tenue plus uniforme et plus belle que dans ce corps d'armée? Dans quel camp, dans quelle localité voit-on moins de punitions?
        

        On blâme, on critique, on le maudit, mais on obéit. Dans les nombreuses prises d'armes qui font tant crier, l'empressement des généraux et des officiers supérieurs à exécuter ses ordres est admirable, tous ont le plus grand respect de sa personne et si, entre soi, on rit de sa tournure fatiguée, on s'incline devant sa dignité, devant son nom, on oublie ses faiblesses qui ne détruisent pas en lui les qualités militaires.
        Évidemment il a ses manies et malheureusement il les exagère, ce qui lui nuit et permet à ses ennemis de le tourner en ridicule. Aimant à se donner en spectacle, il multiplie les parades. Tous les dimanches, suivi d'un nombreux état-major, il se rend à la place Bellecour, salue avec son bâton tous les curieux, passe au galop devant les rangs, les fait ouvrir, puis, descendant de cheval, passe l'inspection de la troupe en lorgnant surtout les fenêtres. Puis il fait un peu manœuvrer et enfin défiler.

        Il a aussi la passion des petites guerres. On Se fusille, on brûle énormément de cartouches. Il se porte partout, fait avancer, reculer, dirige tout sans rien diriger, mais on fait feu et flamme et l'effet est produit sur la population. Quant aux manœuvres, il n'y en a pas eu l'ombre. On rentre dans les quartiers et un seul homme est enchanté : cet homme, c'est le maréchal.
        Il n'aime ni la conversation, ni les visites; il faut en être très sobre et le meilleur moyen d'être bien avec lui est de le voir rarement. Il ne supporte pas la contradiction ni les observations sur les ordres donnés.

        Son bonheur est de se trouver avec de jeunes et jolies femmes; dans les salons, on ne le voit que très rarement causer avec celles d'un certain âge. Tous les soirs, à Belle-cour, à l'heure de la musique, il ne manque jamais de s'y trouver; il parcourt à pas lents les allées où les femmes sont assises, et, armé de son lorgnon, il en passe l'inspection, s'arrête quelquefois. Alors, tous les gamins, les bonnes d'enfants l'entourent au point d'obstruer le passage, et cette presse, au lieu de lui déplaire, l'enchante car son but est rempli, celui de se faire voir et de produire de l'effet.

        Malgré tous ces travers qui tiennent de l'enfantillage, le maréchal n'en est pas moins aimé à Lyon; les ouvriers le craignent, le respectent et le voient avec plaisir. Les gens du monde aiment en lui le gentilhomme, le grand seigneur qui donne de l'entrain à la société. Ses bals d'hiver qui ont lieu tous les lundis, très brillants, sont le centre où se réunissent administrateurs, magistrats, militaires, autorités civiles, banquiers, négociants et les plus jolies femmes de la ville. Il fait les honneurs de sa maison avec une courtoisie remarquable et une amabilité charmante. Par son accueil aux différentes sociétés et son empressement à se rendre lui-même aux nombreuses invitations qui lui sont faites, le maréchal a montré un exemple qui a été suivi par les grandes maisons de Lyon qui ont tenu à honneur de donner de très belles soirées où beaucoup d'officiers sont admis, chose qui se faisait peu avant lui.

        Cassé avant d'être âgé, car il n'a que soixante-six ans, le maréchal n'en monte pas moins tous les jours à cheval. Il n'est pas porté sur les innovations et tient même trop aux anciens usages qui finissent par dégénérer en routine. Mais il est avant tout homme de devoir, et comme il ne souffre pour lui-même comme pour les autres aucune négligence dans le service, il en résulte que les régiments de son commandement sont remarquables par leur discipline et leur tenue et qu'en cela il rend et peut rendre encore de grands services au Gouvernement.
        Quelques mots à présent sur la venue du Prince-Président à Lyon, première étape de ce voyage triomphal qui devait terminer par l'Empire.

        Le Prince Président était attendu à Lyon pour le 19 septembre; des préparatifs furent faits pour le recevoir, des arcs de triomphe furent dressés, les municipalités des cantons voisins furent réunies, enfin la ville faisait tous ses efforts pour que la réception répondît à la grandeur de la cité.
        Le 19, à 2 h. 30 après-midi, le Prince arriva à l'embarcadère; immédiatement il monta à cheval et parcourut les quais du Rhône jusqu'à la place de la Charité, pour se rendre à l'Hôtel de la Préfecture. Une population nombreuse s'entassait sur les trottoirs et aux fenêtres. Le Président fut reçu aux cris de " Vive l'Empereur! "
        Le soir, au bal, il y eut le même enthousiasme.

        Le 20, il passa la revue des troupes sur la place Belle-cour, puis se rendit sur la place Napoléon pour l'inauguration de la statue de l'Empereur. Sur son passage, même cris que la veille, mais le soir, au spectacle, il y eut de la froideur.
        Son départ eut lieu le 21. Le faubourg de la Guillotière montra un grand enthousiasme. Nous le conduisîmes jusqu'au-delà du faubourg où il nous fit ses adieux.
        Quoique la réception de Lyon fut peut-être moins chaleureuse que dans les autres villes qu'il a parcourues, il semble cependant que cette ville ait donné le premier élan qui fut suivi par les villes du Midi et de l'Ouest. On avait les yeux sur Lyon et son attitude a servi d'exemple aux autres populations.

        Il ne faut pas se le dissimuler, ces grandes démonstrations, quoiqu'elles prouvent combien on craint le régime républicain, ne détruisent pas l'esprit d'affiliation et l'animosité des gens des clubs qui espèrent toujours que leur parti reprendra le dessus.
        Il faut maintenant sagesse, prudence et fermeté dans la direction du pays. Il faut par une bonne administration faire oublier les gouvernements précédents; il faut enfin que des gens d'expérience, de savoir, de probité et de confiance soient chargés de la conduite des rouages de toute cette machine immense qui renferme encore une foule de principes de désordres.

        Il y a dix mois, l'esprit public était partagé entre la Chambre et le Président qui à cette époque, n'était pas assis et qui n'a conquis le pouvoir unique que par un coup d'État. Aujourd'hui, on porte le Prince à l'Empire; il est arrivé poussé par les clameurs des populations. Mais qu'il ne se fie pas à toutes ces ovations, et qu'il dise : Marchons, mais ne nous y fions pas. Les ambitions se réveillent de nouveau pour arriver aux grands pouvoirs de l'État; le choix des hommes est délicat; tous veulent parvenir, tous se croient capables. Il faut donc tact et jugement pour discerner les plus aptes, et surtout les plus loyaux.
        Un peu plus loin, nous lisons :

        Le Sénat a adopté aujourd'hui 7 novembre 1852, un senatus-consulte qui défère l'Empire héréditaire à S. A. I. le Prince Président sous le nom de Napoléon III, et lui donne le pouvoir de régler dans sa famille l'ordre de succession au trône.
        Que de chemin parcouru depuis un an, quel changement dans les idées des masses, quel réveil pour le Chef de l'État ! Élu deux fois par le peuple, il devait hésiter encore à monter sur le trône qu'avait occupé son oncle. Rien ne paraissait encore consolidé, la Constitution pouvait être considérée comme un essai, le Sénat, le Corps législatif pouvaient encore douter de leur existence.

        Un voyage est décidé. Il se fait avec une certaine inquiétude sur les réceptions qui seront faites. Mais l'instinct de la Nation est porté vers un pouvoir fort et unique, la crainte de la dissolution de la société, le désir de la stabilité sont dans tous les esprits; petits et grands comprennent qu'il faut rompre avec les utopistes, les idéologues. Tous se rassemblent autour du neveu de l'Empereur, et le proclament Empereur. La France sort enfin de cette période de troubles où, dans la lutte acharnée et intestine des partis elle s'épuisait. Espérons que, dans le calme et la tranquillité, nous verrons régner la paix, la concorde et la prospérité. La tâche n'est pas finie, elle commence; mais il faut espérer que le nouveau souverain saura choisir des hommes loyaux et intègres qui mèneront son œuvre à bonne fin. Le peuple tout entier qui l'a poussé au pouvoir dans un superbe élan de confiance ne lui pardonnerait pas de trahir ses espérances.

        Au passage du Prince à Lyon, les ministres de la Guerre et des Affaires étrangères du royaume de Sardaigne vinrent pour lui présenter leurs hommages. Le général Gado, d'origine piémontaise, les invita à dîner et me convia à cette réception. Je fis ainsi la connaissance du comte de la Marmora et du duc de Bormida.
        Le 19 novembre, me parvint la lettre suivante du duc de Bormida :

        Turin, le 14 novembre 1852.
        Monsieur le Général,
        J'ai l'honneur de vous annoncer que le Roi, mon auguste Souverain, voulant vous donner une marque de sa bienveillance et de son estime pour vos talents militaires, vient de vous conférer, sur la proposition du ministre de la Guerre, la croix de Commandeur de l'Ordre royal de Saint-Maurice et Saint-Lazare.
        Je me réserve de vous faire parvenir, par l'entremise de votre Gouvernement, la décoration de cet ordre, qui vous est destinée ainsi que votre titre de nomination, et je vous prie de recevoir en attendant, avec mes félicitations bien sincères, l'assurance de ma considération très distinguée.
        
DA BORMIDA.

        Cette faveur, que je dois au comte de la Marmora, m'a causé une surprise d'autant plus agréable que je n'avais fait aucune démarche pour l'obtenir.
        Appelé quelque temps après à Paris pour le Comité d'infanterie, j'y passai tout le mois de décembre. Ne pouvant monter à cheval faute de monture, j'assistai comme spectateur à l'entrée de Sa Majesté dans la capitale, qui eut lieu le 2 décembre. Les troupes étaient dans une tenue magnifique, l'escorte, composée d'une grande quantité de généraux, était resplendissante. Le parcours de la Barrière de l'Étoile aux Tuileries fut franchi au milieu d'une population enthousiaste et avide de voir le nouvel Empereur qui, maniant son beau cheval avec dextérité, répondait par ses saluts aux vivats et aux acclamations.

        Le soir, il y eut grande réception. Les salles restaurées à neuf sont fort belles; la salle du Trône, celle des Maréchaux sont remarquables, et l'on à peine à croire que ce palais a servi pendant de longs mois de logis à d'ignobles gens qui, après une dévastation totale, y avaient élu domicile.
        A peine installé aux Tuileries, l'Empereur forma sa Maison militaire. Des grands dignitaires furent nommés, des maréchaux complétèrent le nombre voulu, des bienfaits sans nombre furent la part de ceux qui approchèrent du Trône. Comme toujours des largesses répandues sur les mêmes personnes ont excité le blâme des uns, l'envie, la jalousie et l'ambition des autres. Peut-être un peu moins de précipitation eût-elle mieux consolidé les bases du nouvel Empire, eût-elle donné patience à tous, et calmé la soif insatiable d'honneurs qui se fait voir et qui probablement et malheureusement va devenir inextinguible.

        Le 30 décembre, j'appris la mort du général Bouscarens, qui a succombé à la suite d'une blessure reçue à, Laghouat. Généreux, brave, cœur excellent, tête vive, habitudes créoles, Bouscarens était spirituel, aimable, d'un physique militaire; joli homme, bien tourné, d'une bravoure admirable, il avait tout pour plaire. Parfait honnête homme il jugeait ses semblables d'après ses belles et nobles qualités, aussi très confiant et prodigue en tout, il se trouva souvent dans une position fort gênée. Il est regretté par tous ceux qui l'ont connu, et laisse en Afrique de beaux et glorieux souvenirs.

        Le général Canrobert est nommé général de division. Dans le siècle actuel, et surtout à l'époque où nous vivons, la loyauté, la franchise, la générosité sont choses si rares que l'on peut les compter comme exceptionnelles et que l'on doit applaudir quand la fortune jette ses faveurs sur un militaire tel que le général Canrobert.
        En février 1850, quand les sales passions et une disgrâce imméritée m'accablaient, lui seul eut la loyauté de prendre ma défense, non seulement près de M. le ministre d'Hautpoul, mais encore près du Président, et, en leur présence, il me rendit justice en disant à haute voix que c'était à ma ténacité, à ma persévérance que l'on devait le succès de Zaatcha, et que j'avais donné à tous l'exemple des vertus guerrières. Toutes les fois que l'occasion se présenta
        Il tint à honneur de répéter le même langage. Aussi ce fut pour moi une véritable joie que d'apprendre sa nomination, et je m'empressai de le féliciter en ces termes :

        " J'ouvre à l'instant le Moniteur, et j'y vois, que par décret du 14 janvier, vous êtes promu au grade de général de division. Je m'empresse donc de vous adresser mes félicitations bien sincères, car elles sont basées sur l'estime et l'amitié que je vous ai vouées. Je n'ai pas oublié que, pendant que j'étais méchamment miné et sous le coup d'une disgrâce injustifiée, vous avez été reconnaissant, franc, loyal et généreux. Aussi, je suis heureux, très heureux, de votre nomination. "

        Au milieu des nombreuses sollicitations dont il est assiégé, le ministre de la Guerre ne m'a pas oublié, et il m'apprend que mon fils est nommé lieutenant. Cela m'a fait grand plaisir. Entré au service très tard, il vient par sa conduite, son zèle et son assiduité au travail, de rattraper une partie du temps perdu. Son avenir est entre ses mains, et je puis espérer le voir arriver chef de bataillon avant d'entrer moi-même au cadre de réserve. L'année -1853 commence bien.
        
A SUIVRE


 ÉVOCATION HISTORIQUE DE LA BATAILLE DE L’ÉTENDARD DU 24 JUIN 732 
Envoyé par M. Albert Hamelin
Olivier MONTEIL, à BASSOUES, le 22 juin 2019

                 Comme s’ils étaient mus par une envie de déconstruction de notre Mémoire nationale, les gouvernements de la France depuis près de 40 ans s’acharnent à enseigner de moins en moins à nos enfants l’Histoire de France, mais de plus en plus l’Histoire du monde, de l’Afrique, du Moyen Orient ou de l’Asie.
                 Cette déconstruction de la Mémoire a pour effet de rompre petit à petit le lien millénaire qui lie les Français d’aujourd’hui à leurs ancêtres, à leur Histoire, leurs racines, à leur civilisation.
                 Si l’on n’y prend garde, l’effacement de la continuité historique de la France depuis 2 000 ans provoquera l’effacement de notre Identité nationale.
                 Sans Identité, aucune Nation n’a ni solidarité nationale, ni perspective commune, ni avenir.
                 Ainsi est-il d’autant plus important d’être ici, aujourd’hui, à BASSOUES, pour faire vivre notre Mémoire et perpétuer son souvenir, si riche d’enseignement pour notre temps.

                 Alors, souvenons-nous !

             Souvenons-nous qu’en 711, à peine 80 ans après la mort de MAHOMMET, l’Islam conquérant envahissait l’Espagne. Dès 719, donc en moins de 8 ans, les musulmans ont envahi toute la péninsule ibérique et atteignirent les Pyrénées et le Languedoc.
                 Arrêtés par le duc EUDES d’AQUITAINE en 721 devant TOULOUSE, les musulmans reprirent l’offensive et conquirent NIMES et ARLES en 725, puis effectuèrent des razzias jusqu’à AUTUN en Bourgogne.
                 En 732, les troupes d’ABD EL RAHMAN marchèrent à nouveau depuis les Pyrénées en direction du Nord, dans le but d’aller piller BORDEAUX mais aussi TOURS et son abbaye ST MARTIN DE TOURS, réputée pour sa beauté et ses richesses. Ils ne seront définitivement arrêtés que lors de la fameuse bataille de POITIERS, le 25 octobre 732, par la victoire du grand-père de l’empereur CHARLEMAGNE, le célèbre Charles MARTEL, qui n’est d’ailleurs même plus enseigné aujourd’hui dans les programmes d’Histoire de collège.
                 Début 732, dans leur marche vers TOURS et POITIERS, les armées musulmanes envahirent la Gascogne. FRIS, neveu de Charles MARTEL et fils de RABBOD, roi des Frisons, décida de planter son étendard ici-même, sur ce plateau qui deviendra le « plateau de l’Etendard », pour regrouper et remotiver les troupes franques chassées par les Sarrasins à LUPIAC, village situé à quelques encablures d’ici.

             La bataille contre les Sarrasins fit rage mais les Francs en sortirent victorieux. L’arrière garde (ou l’avant-garde selon les rapports historiques) de la colonne d’ABL EL RAHMAN avait été écrasée.
                 Mais FRIS, héros de la bataille, fut mortellement blessé à la cuisse par une flèche. Son cheval l’emporta à 2 km d’ici, près du petit pont qui enjambe la rivière GUIROUE, pont renommé depuis « Pont du Chrétien » car en effet, le chevalier FRIS était converti au Christianisme.
                 Il expira là, près du pont, au soir de la bataille et ses soldats l’ensevelirent à la hâte.

             Le souvenir de la bataille de l’Etendard resta longtemps dans l’esprit des villageois des alentours, mais en revanche l’emplacement de la tombe du prince FRIS fut complètement oublié.
                 Ce n’est que 200 ans plus tard, vers 950, que la tombe fut découverte par des paysans, par un miraculeux hasard. Et là commence la légende de SAINT FRIS.ÉVOCATION HISTORIQUE DE LA BATAILLE DE L’ÉTENDARD DU 24 JUIN 732

                 En effet, un paysan des environs fut à cette époque très intrigué par le comportement d’une de ses vaches : jamais cette bête ne prenait de nourriture et pourtant elle était la plus belle du troupeau. Il la suivit un jour et constata qu’elle allait lécher une pierre dissimulée dans les broussailles. Le paysan dégagea la pierre et découvrit un sarcophage. Sarcophage que l’on peut voir d’ailleurs dans la basilique de BASSOUES, au bout du village près du cimetière, où se trouvent également les reliques de SAINT FRIS conservées dans une vitrine.

                 Ayant soulevé le couvercle, il se trouva le corps intact d’un chevalier encore recouvert de son armure, avec son casque et toutes ses armes. Une source jaillit miraculeusement du sol à l’instant même. Vous trouverez toujours cette source près du Pont du Chrétien, au bord du petit lac qui s’est formé et où une chapelle a été érigée, avec l’indication « source miraculeuse ».
                 Le paysan se rappela la bataille de 200 ans plus tôt et reconnu la dépouille du prince FRIS.

             Avec des voisins, il décida de lui bâtir une sépulture digne du fils du roi des Frisons, à quelques centaines de mètres au lieu-dit « du Tapia », où fut construite une église. En 1020, cette église devint une basilique, un temps occupée par des moines bénédictins.
                 La basilique fut très fréquentée et agrandie durant 500 ans, avant que les Protestants calvinistes ne l’incendient en 1570 puis que des Révolutionnaires ne la saccagent en 1793. Cette basilique fut consacrée en 1888 et le 16 janvier, jour anniversaire de la découverte du corps intact de SAINT FRIS, fut déclaré fête liturgique de SAINT FRIS.
                 Depuis le Xème siècle, donc depuis plus de 1.000 ans, de nombreux pèlerinages s’organisèrent jusqu’au XXème siècle, avant de tomber en désuétude.
                 Cependant, depuis quelques années, les pèlerinages reprennent, comme cette année en présence de l’évêque d’AUCH le 20 janvier dernier.

             Au-delà de la légende, la mort en martyr du prince frison, le chevalier SAINT FRIS, pour défendre la Chrétienté face à l’invasion islamique, est un évènement historique exemplaire de l’Histoire de France, notre Histoire.

                 1.287 ans après, nous devons aussi faire face à la barbarie islamiste qui a tué plusieurs centaines des nôtres dans des attentats commis en France depuis quelques années.

                 L’esprit de Résistance de nos ancêtres, morts ici en héros pour protéger les habitants et préserver la civilisation française, doit guider notre action aujourd’hui devant les menaces de notre époque.

             C’est en souvenant de tous les sacrifices de nos Anciens, depuis la bataille de l’Etendard en 732 jusqu’à la Résistance de 1940 ou les guerres d’Indochine et d’Algérie, que nous trouverons aujourd’hui la force nécessaire pour défendre nos populations et notre civilisation face aux périls qui, comme il y a 13 siècles, les menacent de disparition.



Cinquième République
De Hugues Jolivet


NICOLAS SARKOSY

      
       Face à la candidate Ségolène Royal,
       Est élu Président de notre République,
       Nicolas Sarkosy, à l'attitude martiale,
       Au caractère trempé, a la forme olympique !

       Est-ce une faute de jeunesse ce dîner au Fouquet's
       Pour fêter sa victoire ? Il souhaite sauver son couple,
       Offrir à son épouse le plus tendre des bouquets.
       Mais tous ses adversaires le transforment en un scoop !

       Ils aggravent son cas : est "Président des riches",
       Quand l'un prète son yatch pour un séjour à Malte !
       La Gauche lui reproche, qu'au grand jour, il s'affiche.
       "Tonton" était discret ! Sarko, trop voyant. Halte !

       Durant les cinq années que dure son septennat,
       L'Opposition l'éleva sur le haut piédestal
       D'un Président "Bling bling" et elle se déchaîna
       Contre la mise en oeuvre du "Bouclier Fiscal"!

       Et,"Casse-toi, pauv'con!", telle l'injure de Cambronne,
       Est attachée à vie aux basques de son auteur,
       Est même proposée, virulente et bougonne,
       Pour une démission en propos peu flatteurs !


NICOLAS SARKOSY


       Brillant élu de Droite, notable de la Sarthe,
       Est pilote émérite, fan de compétition,
       Homme équilibré, méthodique comme Descartes,
       Fillon devient Premier Ministre de la Nation.

       Unique, cinq années, chef du Gouvernement,
       Est rompu aux méthodes et arcanes du Pouvoir.
       Procède par trois fois à des remaniements
       Désignant le meilleur au poste à pourvoir.

       Il ouvre sa sélection à la diversité :
       De la Gauche modérée, du Centre, mais peu d'énarques,
       Et, pour la première fois, respecte la parité.
       Rama et Rachida, ces femmes se remarquent,

       L'une aux Droits de l'Homme, l'autre Garde des Sceaux,
       Car, toutes deux issues de familles immigrées,
       N'avaient pas une carrière tracée dès le berceau !
       Ministres respectées, rarement dénigrées.

       Politique générale : François Fillon annonce
       Une diminution du chômage concrète.
       Réduire le déficit, l'une de ses réponses :
       Le non-remplacement, lorsqu'ils prennent leur retraite,

       D'un fonctionnaire sur deux. Le bouclier fiscal,
       Pour contrer l'évasion, serait l'arme fatale !
       Il crée le RSA, une aide aux démunis :
       Chômeurs et licenciés ne peuvent être punis !


NICOLAS SARKOSY


       Victime du socialisme, des cohabitations,
       L'Etat est affecté par une longue maladie,
       Et le Premier Ministre sait, dans ces conditions,
       Que, devant les Français, jouer la comédie

       Serait hors de propos. Oui, la France est malade,
       Soumise à un régime. Réduire la Dépense
       Réformer les structures, supprimer la pléiade
       Des mille feuilles régionaux, surveiller les finances,

       Tels sont les handicaps dont souffre notre France
       Et dont François Fillon, présent à son chevet,
       Etablit l'ordonnance pour lui donner la chance
       D'abandonner ses vices et de se relever !

       La rigueur budgétaire est le régime standard
       Auquel doit se plier chacun des Ministères.
       Pharmacopée licite et unique rempart
       Pour maintenir hors d'eau une nation de misère!

       Quand, tel un tsunami traversant l'Atlantique,
       La crise des subprimes déferle sur l'Europe.
       Pour la France et l'Union, situation critique,
       Et notre Nicolas évite qu'elles y achoppent.

       Président de l'Union, Sarkosy s'investit
       Dans la proposition de mesures drastiques
       Communes aux nations, saines ou moins bien loties,
       Tant au plan financier qu'au plan économique.



NICOLAS SARKOSY


       Appuyé dans sa quête par Angela Merkel,
       Nicolas Sarkosy se heurte à l'attentisme
       Des autres Etats d'Europe qu'un retard éventuel
       Ruinerait sans délai à cause de leur autisme !

       La Grèce en est victime, l'Espagne bien malade.
       Et notre Président se bat sur tous les fronts,
       Car il souhaite éviter, à l'Europe, la noyade :
       La tête en surface, tous les membres suivront !

       Est-ce un signe précurseur, un encouragement
       Au seul resserement des liens communautaires ?
       Nicolas Sarkosy a choisi ces moments
       Pour que Carla devienne son épouse salutaire !

       François Fillon poursuit sa lutte rigoureuse
       Dans un environnement critique, défavorable,
       Propose des solutions sévères et courageuses :
       Un plan d'économies, des taxes supportables.

       Le Parlement cautionne, en agréant les textes
       Des lois sur le travail et le pouvoir d'achat,
       La réforme des retraites, ce, malgré le contexte
       De la crise financière frappant tous les Etats !

       Le quinquennat s'achève, Fillon devient le chantre
       Du Président sortant et tire à boulets rouges
       Sur l'adversaire PS, contre qui il concentre
       Le manque de rigueur de la gauche, qu'il reprouve !


Hugues Jolivet         
Le 3 janvier 2015          

A SUIVRE



Seconde Guerre mondiale :
Par M.José CASTANO,

Les marins de l’Empire français oubliés…

« L’Histoire brûle les hommes. Après, il faut recueillir les cendres et raconter » (Commandant Hélie Denoix de Saint-Marc – « Les champs de braises »)
L’Odyssée du sous-marin «Le Souffleur»

« L'âme de nos marins plane sur l'Océan, je l'ai vue ce matin, sous l'aile d'un goéland » (Freddie Breizirland)

       L’armistice franco-allemand du 25 juin 1940 consacre l’échec de nos armées sur terre ; notre flotte, une des plus puissantes -qui n’avait pas été vaincue- est libre. Ni l’amiral Darlan, ni le général Weygand n’ont l’intention « …de livrer à l’ennemi une unité quelconque de notre flotte de guerre » et de Gaulle le dira, le 16 juin à Churchill en ces termes « La flotte ne sera jamais livrée, d’ailleurs, c’est le fief de Darlan ; un féodal ne livre pas son fief. Pétain lui-même n’y consentirait pas ».

       Les Anglais, de leur côté, désirent que notre flotte, riche en unités lourdes et légères, se rende dans leurs ports. Elle aurait pu le faire, le 16 juin 1940, mais personne ne lui en donne l’ordre et la Marine reçoit l’assurance, « qu’en aucun cas, la flotte ne sera livrée intacte », mais qu’elle se repliera probablement en Afrique ou sera coulée précise l’Amiral Darlan. Hitler ne demande pas livraison de notre flotte (le projet d’armistice ne le prévoyant d’ailleurs pas), pas plus que de nos colonies, sachant qu’il n’est pas dans nos intentions d’accepter de telles exigences.

       Le 27 juin, Churchill, en dépit des assurances données par le gouvernement Français du Maréchal Pétain, décide, dans le plus grand secret, de mettre « hors d’état de nuire » la marine française. Cette opération aura pour nom Catapult… et conduira, le 3 juillet 1940, à la destruction totale, à Mers El-Kébir, de notre flotte au mouillage et désarmée, causant la mort de 1380 marins Français. Le 6 juillet 1940, 24h seulement après l’inhumation de nos marins, l’aviation britannique, par vagues successives, largue sur la rade de Kébir des mines magnétiques et prend pour cibles les navires rescapés du premier assaut. 205 tués seront de nouveau dénombrés, soit au total 1927 morts et des centaines de blessés, la plupart atrocement brûlés.

       Ce qui est horrible, c’est que nos « alliés » Anglais ont tué en deux jours plus de soldats français que la Flotte allemande pendant toute la seconde guerre mondiale. Nous ne sommes pas loin des 2403 morts du drame de Pearl Harbor, l’un des grands événements de ce conflit puisqu’il décida de l’entrée en guerre des Etats-Unis d’Amérique. Mais les Japonais étaient leurs ennemis, les Anglais étaient nos alliés. C’est là un crime inqualifiable… impardonnable.

       Le 31 Août 1940, soit près de deux mois après cette lâche agression, la force navale M (M comme « Menace ») britannique où se trouvait de Gaulle quitta l’Angleterre et se présenta devant Dakar le 23 septembre, à l’aube, dans le but de s’emparer de la garnison française fidèle au Maréchal Pétain.

             Face à l’armada britannique qui se préparait au combat, la France disposait, cette fois, de solides moyens navals ainsi qu’une sérieuse défense côtière. On en n’était plus aux conditions dramatiques de Mers El-Kebir où la flotte désarmée avait été littéralement assassinée. Cette fois, les marins français étaient prêts au combat et animés, de surcroît, d’un esprit de revanche parfaitement perceptible… et compréhensible. Avant la tragédie de Mers El-Kébir, la flotte française était la 4ème plus puissante flotte du monde ; elle était décidée à le prouver et cela d’autant plus qu’elle n’avait jamais été vaincue…

             Durant deux jours, les échanges de coups d’artillerie de marine entre les deux flottes firent rage. Les navires de la force M s’approchèrent afin de poursuivre leur œuvre de destruction, mais se frottèrent aux bâtiments français (Vichystes, diront les gaullistes !) qui leur infligèrent de sérieux dégâts et cela d’autant plus que l’aviation française était maîtresse du ciel.

             C’en était trop ! De Gaulle écrira sur cette bataille : « L’amiral Cunningham décida d’arrêter les frais. Je ne pouvais que m’en accommoder. Nous mîmes le cap sur Freetown. »

             L’armée française sortait vainqueur de cette confrontation en dépit de ses 203 morts et 393 blessés. Les 1927 morts de Mers-El-Kébir étaient en partie vengés.

             Pour autant, les ambitions britanniques de s’emparer de ce qu’il restait encore de la flotte française ne faiblissaient pas… Celle-ci au mouillage dans les ports du Liban et dans la région, était considérée comme une menace par la Royal Navy.

       Le 8 Juin 1941 débuta l’attaque des Alliés contre le Liban et la Syrie occupés par les troupes françaises. Auparavant, la Division navale du Levant que commandait l’amiral Gouton avait dû affronter au prix de lourdes pertes, une puissante force aéronavale britannique. A cette date, les sous-marins Caïman, Souffleur et Marsouin de la 9e Division de sous-marins de Bizerte, patrouillaient le long des côtes pour intercepter les bâtiments britanniques menaçants.

       Dans la nuit du 24 au 25, le Souffleur, en surface près de Beyrouth, faisait route pour recharger ses batteries, avec à son bord 57 marins. Cinq hommes se trouvaient sur la passerelle. Quatre sillages de torpilles, lancées par le sous-marin anglais HMS Parthian, furent aperçus à bâbord. L'enseigne de vaisseau Morange, officier de quart, fit immédiatement mettre la barre toute à droite, mais le sous-marin ne put éviter l'une des torpilles : celle-ci explosa sous l'avant du kiosque et coupa en deux le sous-marin qui coula instantanément entraînant dans la mort cinquante deux marins. Les cinq hommes qui se trouvaient sur la passerelle furent éjectés vers la mer et tentèrent de regagner la côte à la nage située à quatre kilomètres. Seuls quatre y parviendront.

       Les historiens, les politiques, les « moralistes » et les censeurs qui ont eu à juger des hommes, des gouvernants, et à écrire l’Histoire, ont dédaigné de prendre en considération le traumatisme dévastateur que la tragédie de Mers El-Kébir avait produit dans les esprits…

       Mers El-Kébir explique en grande partie l’attitude de bon nombre de nos gouvernants de Vichy durant le conflit comme elle explique aussi celle des autorités civiles et militaires d’Algérie en 1942-1943 et d’une population acquise au Maréchal Pétain mais volontaire pour poursuivre la lutte avec Darlan et Giraud contre les puissances de l’Axe.

             NB : Ces tragiques évènements confirment bien que si la France métropolitaine était vaincue, l’Empire ne considérait nullement l’être. Si la France métropolitaine avait capitulé, l’Empire s’y était refusé et la marine française (ce qu’il en restait), comme elle s’y était engagée, avait rejoint les ports africains composant l’Empire afin de poursuivre le combat.

             - Les alliés ayant débarqué le 8 Novembre 1942 en Afrique du Nord (opération « Torch »), les autorités Vichystes d’AOF, convaincues par l’amiral Darlan, signèrent le 7 décembre 1942, un accord avec les alliés, qui remit l’empire colonial français dans la guerre en formant « l’Armée d’Afrique ».

             « Le devoir de mémoire incombe à chacun... rendre inoubliable. Ceux qui sont morts pour que nous vivions ont des droits inaliénables. Laisser la mémoire se transformer en histoire est insuffisant. Le devoir de mémoire permet de devenir un témoin... »
José CASTANO       
e-mail : joseph.castano0508@orange.fr
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"BIS REPETITA PLACENT"
Par Hugues Jolivet


            Course présidentielle menant à l'Elysée,
             Le Candidat Macron, dans sa voiture balai,
             Avait récupéré les démobilisés
             Et de Droite et de Gauche, pour le suivre au Palais !

             Et, deux années plus tard, scrutin européen :
             La Droite Républicaine, torpillée, sombre en mer,
             Son Commandant vaincu ! Dilemme cornélien :
             Sauvetage par En Marche ? ou descente aux Enfers ?

             Beaucoup de rescapés sont Maires de grandes cités,
             Souhaitant garder leur siège pour ne point le céder
             A leurs rivaux "En Marche", toujours prêts, excités,
             A conquérir l'espace et à tout posséder !

             Annihiler ce risque en honorant Macron
             Du titre de meilleur Président de la Droite,
             Place ces élus LR dans le camp des poltrons
             Face à leurs électeurs. Une option maladroite !

             Les cars de ramassage, aux sièges confortables,
             Drainent Maires titulaires et colistiers En Marche
             Vers les Municipales ! Grogne inéluctable
             Des électeurs adultes face aux jeux de "potaches" !

Hugues JOLIVET
16 juin 2019
 


 Comment est né l'islam bedouin en Europe ?
Envoyé par M. Pierre Barisain

        Les bavardages, les commentaires, les réactions vidéo et les débats sur les réseaux sociaux autour de la religion, la religiosité, la femme, la liberté individuelle et les zones en guerre où le terrorisme menace la vie, nous apprennent la leçon-conclusion suivante : aujourd’hui, le terroriste vivant dans les pays occidentaux est plus sauvage que celui qui vit en terre d’islam. D’où, quand et comment ces deux catégories, en Occident et en Afrique-Orient, sont-elles nées ?

       Au début du siècle dernier, la société arabe et maghrébine était favorable pour un changement structurel à l’occidental. Et l’Occident signifiait une issue pour sortir du sous-développement, respect de la valeur du travail productif, adhésion à la recherche scientifique, la richesse matérielle et symbolique, la culture et la valorisation de l’espace public. Le rêve individuel comme collectif arabe et maghrébin était occidental. Rêves d’élites comme ceux du peuple. Cette société, citadine soit-elle ou rurale, avait un modèle civilisé à emboîter le pas.

       L’Occident c’était aussi la force militaire et économique. Dès le début du XXe siècle, l’intelligentsia arabe et maghrébine s’est engagée farouchement dans le combat pour la modernité. Une partie de cette élite est partie à la recherche de cette modernité dans les pays occidentaux. Même si cet Occident fut le colonisateur. Chercher un nouveau mode de vie moderne. Chercher les belles lettres modernes (la poésie arabe libre). La traduction. Les partis. L’administration. Les banques. L’agriculture. La gestion de la cité. L’école.
       Cette intelligentsia, citadine soit-elle ou rurale, n’avait qu’un seul rêve, comment faire de la vie privée ou commune chez soi une autre vie, lui tracer un autre destin.
       Et l’histoire arabe et maghrébine contemporaine est marquée par l’aventure d’un ensemble de noms d’écrivains, de pédagogues, d’artistes, d’historiens, de politiciens, qui ont osé le voyage vers l’autre rive afin de revenir chez eux avec une expérience, avec des idées qui poussent à se changer et à changer le monde autour.
       Parmi ces noms symboliques et phares, nous citerons entre autres Mohamed Abdou, Attahtaoui, Taha Hussein, Tewfiq El Hakim, Mohamoud Messadi, Mohamed Bencheneb… Partir voir l’autre chez lui, penser cet autre dans son quotidien, repenser le soi-même dans le miroir de cet autre.

       Cette intelligentsia avait l’Occident en modèle à suivre dans le travail, le respect de la femme, les libertés individuelles et d’opinion. Et cet Occident n’était pas le parfait ou angélisme absolu, tout est proportionnel. Mais dès la création du parti politique des Frères musulmans égyptiens, en 1928, le rêve de la modernisation est assassiné.
       Les Frères musulmans ont renversé le sens du rêve dans l’imaginaire du musulman-citoyen. Endoctriné par l’idéologie fasciste des Frères musulmans, le musulman est rentré dans l’équation politique : comment faire de l’Occident un musulman ! Comment faire d’un monde moderne un autre sous-développé. Et la nahda est devenue foutouhat ! La modernisation s’est transformée en islamisation. L’autre, c'est-à-dire le monde moderne-modèle est devenu un kafer à combattre chez lui, chez nous ou ailleurs.
       Ainsi l’idéologie des Frères musulmans et leur dérive politico-religieuse ont contaminé le peuple du Maghreb et celui de Bilad Acham. Puis, par un jour, le wahhabisme a vu le jour en Arabie Saoudite porteuse d’une idéologie islamiste bédouine et primitive.

       La société arabe et maghrébine s’est retrouvée en proie à ces deux tendances politico-religieuses passéistes, les Frères musulmans égyptiens d’un côté et le wahhabisme de l’autre. Les deux idéologies ont déclaré la guerre contre toute modernisation, contre le rêve porté par l’intelligentsia éclairée et occidentalisée à l’instar de Taha Hussein, Tewfik Hakim, Ali Abderrazak, Ibn Badis, Ben Achour, Tahar Haddad, Khalil Kabbani, Nazik El Malaika, Badr Chaker Essauyyab… L’ère de l’anathème qui frappe les intellectuels éclairés a commencé.

       Avec le temps, profitant de la découverte du pétrole en Arabie Saoudite, ces deux idéologies n’ont pas pris en otage uniquement la société musulmane arabe et maghrébine mais aussi les musulmans d’Europe et des USA. Ainsi, l’islam bédouin sauvage occidental est né dans les mosquées, les centres islamiques et les écoles coraniques créés par l’Arabie Saoudite en Europe et aux USA. Mais si les guerres civiles et religieuses perpétrées au Maghreb et dans les pays arabes ont poussé à une prise de conscience dans les milieux des fidèles de ces pays, de l’autre côté, dans les milieux des communautés musulmanes en Europe et aux USA, le fidèle est resté dans son coma religieux extrémiste.

       Le musulman comateux, endoctriné par le wahhabisme et l’idéologie des frères musulmans, fasciné par la religion bédouine, ne voyait en cette société occidentale où il vit qu’une porcherie, pays des cochons, ne cherchant qu’à faire du pays occidental d’accueil ou d’adoption un pays islamisé à l’image des pays musulmans comme l’Afghanistan, le Yémen, le Soudan, la Libye, la Syrie ou l’Irak ... pays ravagés par la guerre religieuse.
       Et jusqu’au jour d’aujourd’hui, le terroriste européen est plus dur, plus violent, plus sanguinaire que celui des pays du Sud. Cet état d’esprit on le constate, entre autres, à travers les bavardages, les débats et les commentaires sur les réseaux sociaux, dès qu’il s’agit de l’islam, de la religiosité ou de la guerre sainte, el jihad !
A. Z.
aminzaoui@yahoo.fr

https://www.liberte-algerie.com/chronique/comment-est-ne-lislam-bedouin-en-europe-455


« Quand mon ami est borgne, je le regarde de profil »
par Bekhti Ould Abdallah Envoyé par M. P. BARISAIN
Chronique livresque. Dans son ouvrage « Autopsie d’une guerre »*, Ferhat Abbes rapporte un entretien édifiant qu’il avait eu avec Abane Ramdane.


           Les deux hommes, deux intellectuels, sans être de grands amis, se respectaient et s’appréciaient même si le caractère entier et direct d’Abane s’accordait mal avec celui plus consensuel et modéré d’Abbes.

           En fait, s’il faut chercher à Abane un ami, allié qui a autant un caractère trempé dans l’acier comme lui, il faut alors regarder du côté de Ben M’hidi qui l’a appuyé de tout son poids et son autorité lors du Congrès de la Soummam. Ils avaient tous deux cette soif d’absolue des purs qui pensaient que la Révolution transcendait les hommes. Il n’en fut rien. Abane l’apprendra à ses dépens.
           « Je ne peux pas les approuver quand ils débitent des âneries »

           Ferhat Abbes est dans hôtel Tunisois. Il reçoit Abane Ramdane très en colère. Et pour cause, il avait été exclu des réunions du CCE à Tunis. Abane exclu ! Écoutons Abbes : « Krim, me dit-il, qui se plaignait à Alger du comportement de Benkhedda et de Dahleb, n’avait jamais été exclu de nos délibérations. Les colonels sont allés trop loin. Ils ne respectent plus les décisions du CNRA ».
           Les colonels ? Abane visait principalement la troïka Boussouf, Bentobbal et Krim Bekacem.

           Revenons sur les propos d’Abane pour préciser que le CCE (Comité de Coordination et d’Exécution) qui siégeait à Alger était composé de 5 membres : Abane, Ben M’Hidi, Krim Belkacem, Dahleb et Benkhedda. Les trois meneurs du CCE étaient Abane, Ben M’Hidi et Benkhedda. Belkacem qui n’avait pas la même culture politique que les quatre, en ajoutant Dahleb, se sentait marginalisé. Il attendra son heure pour se venger. Son heure était venue d’autant que ni Bentobbal, ni Boussouf n’appréciaient Abane.
           Ferhat Abbes semble ne pas être surpris par les propos d’Abane : « Pourquoi, lui ai-je demandé, les colonels ont-ils ce comportement ? Qu’as-tu pu faire contre eux ? » Abane n’avait rien fait, sinon critiquer ce qui était critiquable.

           « Je ne peux pas les approuver quand ils débitent des âneries, me dit-il. Je lui fis le reproche de manque de générosité et d’oublier les recommandations que je lui avais faites au Caire. Je lui rappelais le mot de Vauvenargues : « Quand mon ami est borgne, je le regarde de profil ». « Le travail en commun, lui dis-je, réclame de l’intelligence et du savoir-faire. Mais il réclame aussi des qualités de cœur. La guerre a réuni des hommes venus de toutes les couches sociales. Et tu veux que ces hommes aient la même opinion et les mêmes vues sur nos problèmes ? » Paroles de sage. Mais Abane était trop blessé pour les entendre. Abbes encore : « Il me dit : « Je te demande d’arranger encore cette affaire. Sinon je prends ma mitraillette et j’en descends quelques-uns. » Je réplique : « C’est pour me dire des sottises de cet ordre que tu m’as envoyé à l’extérieur ? Veux-tu mon sentiment ? Tu as besoin de repos. Nous allons t’envoyer en Europe, te soigner et te faire opérer le cas échéant. Et quand tu reviendras, bien des choses auront changé ».

           Abane qui souffrait d’un ulcère et d’un goitre refuse cette éviction qui ne dit pas son nom. Selon Mohamed Harbi, ces conseils d’Abbas étaient sans doute inspirés par les colonels qui l’avaient chargé de les lui transmettre.
           Krim Belkacem : « Je ne regrette rien »

           Ferhat Abbes ajoutera qu’Abane Ramdane n’était pas animé par la volonté de dominer la révolution, mais d’apporter simplement sa contribution. « Il vivait pour cela ». Dans ces 4 mots tout Abane est résumé. Quoi qu’il en soit, à la réunion du CCE, Abbes, soutenu par Mehri et Debaghine, défendra Abane obligeant ainsi les colonels à revoir leur position sur le proscrit qui reprit ainsi sa place au sein du CCE.

           Abane mort, Ferhat Abbes ne croira guère à la fable du martyr tombé au champ d’honneur comme le ressassaient ses assassins jusqu’au jour où Krim Belkacem passa aux aveux. « Abane est mort, me dit-il, et je prends la responsabilité de sa mort. En mon âme et conscience, il était un danger pour notre mouvement. Je ne regrette rien ».

           Terribles aveux qui font sortir le modéré Abbes de ses gonds : « Qui t’a autorisé à être juge ? Ai-je répondu. Et qui te jugera à ton tour ? Ne crains-tu pas que la mort d’Abane retombe un jour sur ta tête et celle de tes enfants ? ». C’est sur l’Algérie indépendante qu’est retombée la mort d’Abane. Ironie du sort, Krim Belkacem finira lui aussi étranglé. Par des Algériens. Comme Abane l’incorruptible.

Bekhti Ould Abdallah



QUE DIRE !
Envoyée par Mme B. Leonelli

        "L’homme ne vit pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu" (Matthieu 4.4)

        La France a quitté la maison de son Père et son Fiancé pour se donner à des brigands de passage qui l’ont mise sur le trottoir.

        Réflexion :
        La cathédrale Notre-Dame de Paris sinistrée par le feu en avril 2019.
        A présent (avril 2019) que l’émotion retombe un peu, de nombreux signaux me soufflent que cet incendie de Notre Dame s’inscrit dans un contexte sinistre, et l’on voit les démons grouiller de tous les côtés. Notre président, pendant son discours, a soigneusement évité de parler de foi, de religion, et promet la restauration en 5 ans de ce que l’on avait mis 200 ans à édifier. Son premier ministre envisage un concours pour choisir l’architecte de la future flèche. Un journal américain souligne qu’il faut oublier la France blanche et chrétienne qui n’a jamais existé (sic) et se tourner vers une vision multiculturaliste et mondialiste des choses. Les oligarques français font assaut de millions. On ne parle plus de rénovation mais de "reconstruction" dans un "esprit moderne".

        Et tout doit être fini avant les JO, youpi !
        En plus des soupçons, ou plutôt de la certitude intérieure que j’éprouve depuis le début au sujet de cet événement, qui tombe tout de même à pic, juste avant les élections et sur fond de gilets jaunes indomptables, des témoignages confirment qu’enflammer une pareille charpente en chêne de 800 ans ne pouvait se faire si facilement, qu’il a fallu insister, et que ce n’est donc pas accidentel. Certains trouvent que j’exagère, mais c’est leur faiblesse de ne pas arriver à comprendre que nous sommes aux mains de malfaiteurs qui font ce qu’ils veulent de nous, de notre pays, de nos lieux saints, de notre destin, sans que nous puissions les en empêcher. Je suis presque certaine que la cathédrale a pu être sacrifiée à une manœuvre politique, et qu’on va nous la refaire façon Disney-land, avec des innovations et des messages qui seront une profanation de plus.

        Le père Valentin qui m’avait appelée pour me faire ses condoléances, m’a dit que nous ne méritions plus nos églises, comme les Russes ne méritent plus les leurs. Et qu’on ait mis ou non le feu volontairement, Dieu a laissé faire, Dieu a repris ce qu’il nous avait donné. Il y a eu, dans le cours tragique des choses, ce moment où la cathédrale qui a accompagné toute notre histoire s’est magnifiquement illuminée, devant ce qu’il nous reste de chrétiens agenouillés et chantant des cantiques, où toute cette histoire de la France est partie avec son âme, notre âme collective, dans la mémoire éternelle, portée par la fumée de cet énorme brasier, finalement, pour la France, c’est une belle mort. Ce que feront les cloportes de son cadavre sera naturellement douloureux à voir, mais ce qu’ils profaneront ne sera plus qu’un cadavre.

        Partout, en France, en Ukraine, en Russie, au Moyen Orient, en Afrique brûlent les églises comme autant de cierges et de lampes sur la planète surexploitée et martyrisée . Ou bien elles sont profanées, ou confisquées, leurs fidèles et leur clergé molestés. Ou bien elles s’écroulent, faute de soins, avec tout ce qu’elles ont encore à nous dire car chacune d’elles est un livre que nous ne savons plus déchiffrer, mais les imbéciles ricanent que ce ne sont jamais là que des poutres et des briques, ou des pierres, et la beauté s’efface, elle se retire avec Dieu et ses anges, nous ne saurons déjà plus ce que c’est, nos enfants ne sauront plus ce que c’est que la beauté et son sens, car même la nature est sans cesse profanée, souillée, ensanglantée, maltraitée, toute notre tragique histoire qui fut cruelle mais souvent grandiose, s’achève dans le grouillement nauséabond de la vermine, sur des montagnes d’ordures, avec des ricanements et des chansons ordurières, des incantations hagardes, des danses obscènes et des bouffonneries déshonorantes.

        J’ai su tout de suite que ce Macron serait le clou de notre cercueil, et j’aurais plutôt voté pour un crocodile, mais il y a longtemps que notre vote n’est plus qu’une formalité. La France a quitté la maison de son Père et son Fiancé pour se donner à des brigands de passage qui l’ont mise sur le trottoir, et d’une certaine façon, c’est aussi ce qui est arrivé à la Russie, quand devant les intellectuels patibulaires qui lui martelaient des slogans en jouant sur ses pires sentiments, elle a laissé sacrifier son tsar sur l’autel de la modernité satanique. Chez nous comme ici, des gens ont résisté, et même beaucoup et désespérément. Mais une fois piégée et déshonorée, privée de son protecteur légitime et attentif, que peut faire une pucelle séduite ? Elle prend quelques bonnes baffes dans la gueule, et, malgré ses larmes et ses regrets, elle va au taf, et au bout de plusieurs passes, et de plusieurs souteneurs, elle a du mal à se souvenir de son propre nom, et du moment où elle était encore pleine de fraîcheur et de beauté, pleine d’espoir et de confiance, une fiancée honorable…

        Donc, dans cette France qui n’est plus, ceux qui résistent n’auront plus qu’à retourner dans les catacombes, tandis que les souteneurs de leur pays le livreront à l’Afrique et à la finance mondialiste. La page est tournée de notre existence en tant que peuple. Dieu en a repris la couronne, pour lui éviter de tomber dans la boue.

        Des Russes et des Ukrainiens s’indignent qu’on parle tant de Notre Dame, et jamais de leurs églises martyrisées. Moi-même, quand j’ai vu que le patron de la Sberbank et autres lançaient une souscription pour Notre Dame, j’ai écrit sur un site orthodoxe : « Et pour vos églises qui disparaissent tous les jours dans les flammes ou s’écroulent, pas de souscription ? »

        Non, parce qu’à mon avis, Notre Dame fait partie d’une opération de propagande et de publicité, mais pas leurs églises, alors même leurs oligarques, qui n’ont, comme les nôtre, pas de patrie, n’en ont rien à foutre ; mais ce qu’il faut voir, ce qu’il est important de voir, c’est que tout est lié, et commencer à gémir dans un coin : « on s’en fout, c’est pas chez nous, et nous alors ? » ou « c’est bien fait pour vous, vous vous fichez de ce qui nous arrive, ou vous l’avez provoqué », c’est une réaction à courte vue.
        D'abord que veut dire ce « vous », qui ? Le citoyen lambda en larmes devant sa cathédrale et son pays qui partent en fumée ? Il est coupable de manque de curiosité, d’indifférence, d’excès de confiance en sa presse et son pouvoir, mais ceux qui le lui reprochent sont exactement, au fond, dans le même cas, et ceux qui incendient et profanent, eux, sont au dessus de nos petites querelles et nous réunissent tous dans la même exécration et le même plan apocalyptique, car ils se connaissent tous très bien, et ils savent ce qu’ils font.

        J'aurais mieux vécu de voir brûler Versailles, cet endroit élégant mais vain, avec ses divinités païennes artificielles.
        Le diable ne s'y est pas trompé, il a bien choisi sa victime.
        Et à y bien réfléchir, Dieu ne s'est pas trompé non plus en le laissant faire: le meilleur de la France, ce qu'elle avait de plus profond et de plus sacré, c'était Notre Dame, et pas le palais du roi Soleil ou autre bâtiment officiel anecdotique.
        C'est donc elle, avec sa forêt dont on ne verra plus jamais l'équivalent, et l'humble et magnifique travail communautaire dont elle était le fruit, les événements qu'on y fêtés, les prières et les chants qui montaient sous ses voûtes, que Dieu a pris là où le ver ne ronge pas et où la rouille ne détruit pas, là où est le trésor de notre cœur.
Laurence Guillon


5 mai 1942… La Bataille de Madagascar
Par M.José CASTANO,


« Le verdict de l’histoire doit être qu’en ignorant l’avis de l’Amirauté et en provoquant une guerre non déclarée contre la France, Churchill a porté atteinte à la cause alliée. Son refus de croire les promesses des Français qu’ils ne permettraient jamais aux Allemands de s’emparer de leur flotte fut presque sa plus grave erreur politique de la guerre. » (Richard LAMB – Historien anglais)

       Colonie Française depuis 1896, l’île de Madagascar était restée, après l’armistice franco-allemand du 25 juin 1940, fidèle au gouvernement de Vichy et représentait, dans l’Océan Indien, une position stratégique importante.

       La vaste baie de Diego Suarez assurait un mouillage qui en faisait le meilleur port de l'Océan Indien. On pouvait y loger toute une escadre. Elle était quasiment fermée et ne communiquait avec la mer qu’à l’est, par un étroit goulet appelé la passe d’Orangea. Celle-ci étroite mais profonde présentait donc un accès maritime plus facile et permettait aussi de bonnes possibilités de défense. La France, dès 1895, avait reconnu la valeur de l'endroit et y avait édifié des installations portuaires et maritimes. Plus au sud de la Baie de Diego Suarez, se trouvait également la baie de Rigny qui aura son importance dans ce conflit. L’organisation de la défense de toute cette zone avait été conçue et réalisée presque un demi-siècle auparavant. En 1897 ce furent le Maréchal Lyautey et le futur Maréchal Joffre, artilleur, qui mirent en place l’essentiel de la défense de la région de Diego Suarez, en s’appuyant sur quelques points de défense conçus pour protéger des secteurs d’approche jugés essentiels : Antsiran, la presqu’île d’Orangea et la presqu’île de Diego Suarez, juste au nord d’Antsiran.

       En 1942, les défenses de l’époque sont toujours pratiquement en l’état et n’ont été ajoutées comme défenses fixes qu’une batterie d’artillerie de 138mm vers la Baie du Courrier, et une batterie d’artillerie de 164mm dans la presqu’île d’Orangea, face à l’est, pour protéger l’entrée de la Baie de Diego Suarez.

       Fidèle à sa promesse de neutralité, le gouvernement de Vichy n’avait pas, pour autant, retenu les tragiques leçons de l’agression britannique sur Mers El-Kébir, le 3 juillet 1940 et sur Dakar, le 23 septembre 1940… C’est ainsi que Madagascar (composante de l’Empire colonial) n’était défendue que par 8 000 soldats, dont 6 000 Malgaches et Sénégalais. La garnison française de Diego Suarez comptait 4 000 hommes (3 200 Malgaches appelés aussi Malagasy et 800 Européens), tous fidèles au Maréchal Pétain et placés sous le commandement du général Guillemet et du capitaine de vaisseau Maerten.

       L’infanterie, démunie de blindés et faiblement armée, se composait de deux Régiments Mixtes Malgaches, d’un Bataillon de Tirailleurs Malgaches et d’un nombre relativement important de tirailleurs sénégalais dirigés par quelques cadres Français,

       Le 5 mai 1942, craignant que l’île Rouge ne soit utilisée comme base dans l’Océan Indien par le Japon, allié de l’Allemagne, les Britanniques, forts d’une imposante escadre de plus de cinquante bâtiments, dont le cuirassé « Ramillies » et deux porte-avions, « Indomitable » et « Illustrious » emportant plus de 80 avions, déclenchèrent, par surprise, l’opération Ironclad en bombardant (comme à leur habitude) les bâtiments de guerre français au mouillage puis en débarquant sur la partie Nord de l’Île, ainsi qu’à Majunga.

       Ce sera la bataille de Madagascar ou bataille de Diégo-Suarez (actuellement Antsiranana), le troisième plus grand port naturel du monde, qui durera jusqu’au 8 novembre 1942.

       Pour l’Amirauté britannique, détenir Madagascar permettait d’avoir une base prête à soutenir la 8ème Armée dans le nord de l’Afrique comme d’avoir un tremplin pour renforcer la 14ème Armée en Birmanie. L’île Rouge et son administration favorable à Vichy était -bien que neutre selon les clauses de l’armistice- considérée comme « tenue par l’ennemi » et une opération amphibie fut décidée pour s’en emparer.

       Le 5 mai, à 5h10, un déluge de feu s’abattit sur les installations portuaires et infrastructures militaires, détruisant l’aviation française et ce qui restait de la flotte au mouillage (anéantie en partie à Mers El-Kébir par ces mêmes « alliés »), dont le croiseur Bougainville. Néanmoins, l’aviso colonial d’Entrecasteaux riposta fermement puis s’échoua sur la côte. Harcelés par les tirs ennemis, un officier et quinze officiers mariniers et matelots perdirent la vie.

       Deux sous-marins français « Le Héros » et le « Monge » furent coulés au large entraînant la mort de leur équipage. Un troisième, le « Bévéziers » fut attaqué par trois avions « Swordfish » alors qu’il tentait de sortir de la rade. Comme il était sérieusement endommagé, le commandant fit faire surface et tout l'équipage évacua le sous-marin qui sombra. C’est alors qu’un des trois Swordfish vira, revint sur le lieu de l’attaque et mitrailla les naufragés, faisant cinq tués et de nombreux blessés parmi les marins rescapés du « Bévéziers ».

       Au soir du 5 mai, la Marine et l’aviation française, entièrement surprises car se considérant très loin du conflit mondial, avaient perdu la totalité de leurs moyens. Pour les défenseurs de Madagascar, il ne pouvait plus y avoir de combat que pour l’honneur.

       Le 6 mai, les troupes britanniques débarquèrent en plusieurs points de l’île, s’emparant de la plupart des points stratégiques et réduisant au silence les batteries côtières.

       Le 7 mai, après de violents combats, les forces françaises se retirèrent vers le sud et Diego-Suarez fut prise par les Britanniques.

       Dans une déclaration adressée sur les ondes au peuple Français, le Maréchal Pétain s’éleva contre ces attaques qu’il jugeait inexcusables… cela d'autant plus qu'il avait prononcé la neutralité de l'Empire et assuré que la flotte ne tomberait jamais aux mains de l'Axe… ce qui, à cette date, était vrai et le restera (1).

       Depuis l’armistice, nombreuses furent les manifestations de loyalisme de la population malgache envers le Maréchal et son gouvernement. Dans ces moments difficiles, elle le prouvait (comme l’avaient fait avant eux les Sénégalais) en se battant jusqu’au bout, selon le mot d’ordre lancé par le Maréchal dans son message. De Majunga à Tananarive, la Grande Île, jadis donnée à la France par Gallieni, restait fidèle. Aux glorieux défenseurs de l’Ile, l’Amiral Darlan proclamait : « Défendez l’honneur français, un jour viendra où l’Angleterre paiera pour ses crimes ».

       François DARLAN, alors commandant en chef des forces de Vichy, ordonna de résister jusqu’au bout, y compris par des actions de guérilla, ce qui amena les Britanniques à se renforcer considérablement par l’apport de nouvelles unités combattantes...

       Néanmoins leur progression en terre malgache demeurait lente, tant ils étaient harcelés sans répit par les soldats européens, sénégalais et malgaches. Ces derniers, connaissant admirablement le terrain, faisaient merveille, ne laissant aucun répit aux assaillants.

       La disproportion des forces en présence finit par entraîner la chute de la capitale Tananarive, puis la ville d’Ambalavao avant que ne tombe, le 18 octobre, Andramanalina.

       Le 6 novembre 1942, un armistice prévoyant notamment le maintien d’une souveraineté française fut signé à Ambalavao et le 8 novembre, le gouverneur général Armand Annet capitula près d’Ihosy, dans le sud de l’île. Il fut mis aux arrêts et évacué vers l’Afrique du Sud. Le 21 mars 1947, la Haute Cour de justice le condamnera à l’indignité nationale à vie.

       Les forces françaises sur Madagascar, fidèles au gouvernement de Vichy, avaient appliqué sans faille et jusqu’au bout les consignes de résistance. Elles avaient mené un combat de guérilla, battant en retraite sur toute la longueur de l'île, faisant sauter 58 ponts sur leur passage, pendant une campagne qui dura 56 jours.

Ces combats entraînèrent la mort de près de 200 soldats francophones. Parmi eux, l’aviateur Jean Assollant, âgé de 37 ans, comptant parmi les pionniers de l’aviation française. Il s’était rendu célèbre pour sa participation comme pilote au vol de l’Oiseau Canari en 1929, marquant la première traversée française de l’Atlantique Nord entre les États-Unis et la France. Il fut abattu et tué le 7 mai 1942 aux commandes d’un « Morane-Saulnier MS.406 », premier avion de chasse moderne des années 1930 à entrer en service dans les unités de l’Armée de l’air et, sans doute, l'un des avions de combat français les plus connus de la Seconde Guerre mondiale.

       L’armistice signé, les Britanniques gardèrent le contrôle de l’île jusqu’en janvier 1943, date à laquelle les Forces Françaises Libres, sous la direction du général Paul Legentilhomme, se virent confier le pouvoir à Madagascar. Legentilhomme sera remplacé en mai par le gouverneur général Pierre de Saint-Mart.

       Sur les 1200 Français faits prisonniers, 900 acceptèrent de rejoindre la France libre et certains s’enrôleront dans le Régiment Blindé de Fusiliers Marins de la 2ème DBFL du Général Leclerc. Quant aux aviateurs, ils préféreront rejoindre en majorité l’escadrille Normandie-Niemen, pour ne pas avoir à combattre aux côtés des Britanniques.

       Si les Malgaches ou Malagasy avaient été fidèles au Maréchal Pétain et au gouvernement de Vichy (comme le furent les Sénégalais lors de l’attaque sur Dakar), il en fut différemment auprès des dirigeants de la France libre du général de Gaulle et des gouvernants suivants…

       En mai 1946, débutèrent de nombreuses manifestations. L’opinion malgache, influencée par le mouvement de décolonisation qui débutait alors en Indochine, ne cachait pas sa rancœur et sa colère contre la France.

       Le 29 mars 1947, une violente insurrection entraîna une répression sanglante de l’armée française qui fit plusieurs milliers de victimes. Le divorce entre la France et Madagascar était consommé. La population n’aura désormais de cesse de demander son indépendance…

       Dans « Illusions perdues », Honoré de Balzac écrivait : « Il y a deux Histoires : l'Histoire officielle, menteuse, qu'on enseigne puis l'Histoire secrète, où sont les véritables causes des événements, une histoire honteuse ».

       L’Histoire étant toujours écrite par les vainqueurs et la vérité historique faite du silence des morts, c’est une page qui fut littéralement occultée… comme celle de l’invasion britannique.

       Madagascar accéda, dans la douleur, à son indépendance le 26 juin 1960 et fut admise à l’ONU le 20 septembre 1960.
José CASTANO       
e-mail : joseph.castano0508@orange.fr
-o-o-o-o-o-o-o-

       (1) Pour preuve : conformément à l’engagement qu’avait pris l’Amiral DARLAN « qu’en aucun cas, la flotte ne sera livrée intacte à l’ennemi, mais qu’elle se repliera en Afrique ou sera coulée », le 27 novembre 1942, sur l’ordre de l’Amirauté du régime de Vichy, l’escadre française se sabordera à Toulon pour ne pas tomber aux mains de l’ennemi. Près de 90 bâtiments –dont les plus importants- seront détruits… ce qui met à mal l’argument fallacieux de Churchill (et des « idiots utiles ») de prétendre que notre flotte basée à Mers El-Kébir aurait été livrée aux Allemands si elle n’avait pas été détruite.
       En acceptant ce sacrifice, la Marine de Vichy respecta son serment de 1940, de ne jamais livrer la Flotte a des mains étrangères. Dans ce désastre qui vit la disparition d'une des plus belle escadre que la France ait jamais comptée, tout fut perdu, fors l'honneur !

Anecdote :
       Le capitaine d’un bâtiment de la Royale Navy s’adresse à Robert SURCOUF, le corsaire français :
       « Vous, Français, vous vous battez pour l’argent tandis que nous, Anglais, nous nous battons pour l’honneur ! »
       Et Surcouf de répliquer :
       « Chacun se bat pour ce qui lui manque ».


LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini


                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.

             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens d'ajouter Petit, Clauzel, Gelât Bou Sba, Héliopolis, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.

             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.

             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Duvivier, Duzerville, Herbillon, Kellermann, Millesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Penthièvre, Randon, Kellermann et Millesimo, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :

CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net

             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :

http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P.Bartolini.
 


NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers

Guelma

Envoyé par Raymond
https://www.liberte-algerie.com/est/une-recolte-cerealiere-de-plus-de-2-millions-de-quintaux-attendue-316651

Par Liberté Algérie par APS le 26/05/2019

Une récolte céréalière de plus de 2 millions de quintaux attendue

             La récolte céréalière attendue cette saison dans la wilaya de Guelma devrait atteindre les 2,78 millions quintaux, a-t-on appris dernièrement de la Direction locale des services agricoles (DSA).
             Par variétés de céréales, cette récolte se répartit à raison de 2,121 millions de quintaux de blé dur, 381 075 quintaux de blé tendre, 279 180 quintaux d'orge et 4905 quintaux d’avoine, a indiqué la chargée de communication auprès de la DSA, Leila Hamouche qui a attribué cette bonne prévision de récolte aux conditions météorologiques favorables de cette année.
             Elle a ainsi fait savoir que toutes les surfaces dédiées à la céréaliculture au titre de la saison 2018-2019, soit 90 505 hectares, sont concernées par la campagne moisson-battage, dont le lancement est prévu en juin prochain depuis les communes de Bouchegouf et Oued Fragha.

             En plus de la mobilisation de pas moins de 498 moissonneuses batteuses pour la réussite de cette prochaine campagne moisson-battage, la coopérative des céréales et légumes secs a mis à la disposition des agriculteurs 14 points de collecte d’une capacité théorique de stockage de 900 000 quintaux, a-t-elle ajouté. Par ailleurs, afin de préserver les surfaces cultivées des incendies tout au long de la campagne moisson-battage, la DSA en coordination avec la direction des forêts et la Protection civile, organise depuis le début du mois courant une campagne de sensibilisation ciblant les 34 communes de la wilaya, a-t-on conclu.
APS           


Tomate industrielle à Oum El-Bouaghi

Envoyé par Josiane
https://www.liberte-algerie.com/est/previsions-en-hausse-de-la-production-318866


Liberté Algérie   l Par M. APS - 29 juin 2019

Prévisions en hausse de la production

        Une hausse de plus de 10 000 q dans la production de la tomate industrielle est attendue dans la wilaya d'Oum El-Bouaghi, au titre de la campagne agricole en cours, a-t-on appris jeudi de la direction locale des services agricoles (DSA).
        La production de la tomate industrielle devrait atteindre 44 400 q au titre de l'actuelle saison agricole, soit une hausse de plus de 10 000 q en comparaison avec l'année précédente, a indiqué le responsable du service de l’Opat (Organisation de la production et de l'appui technique) de la DSA, Samir Messaili.
        Cette hausse sensible de la production est due à l'extension des superficies dédiées à la culture de la tomate, passées de 83 ha l'an dernier à 111 ha actuellement, mais aussi à l'affluence de nombreux agriculteurs de la wilaya de Guelma au périmètre irrigué de Ksar Sbahi (wilaya d'Oum El-Bouaghi).

        Eu égard à l'expérience des agriculteurs de la wilaya de la Guelma dans cette filière, la production de la tomate industrielle au périmètre irrigué de Ksar Sbahi devrait connaître une hausse sensible au cours des prochaines saisons, a ajouté la même source. Évoquant les ambitions du secteur pour élargir les superficies dédiées à la tomate et augmenter la production, ce responsable a fait savoir qu'il était possible pour les agriculteurs producteurs de tomate industrielle de bénéficier du programme de soutien à l'irrigation agricole goutte-à-goutte en se rapprochant de la direction des services agricoles.
APS           


21 ans déjà : pour Matoub Lounés, le griot

Envoyé par Louis
https://www.liberte-algerie.com/chronique/21-ans-deja-pour-matoub-lounes-le-griot-458


par liberté Algérie, A. Z. 27/06-2019 , A. Z.


           “Pour toucher le ciel, il faut durer debout”, Jean Sénac, Azul fallawen Lounès. Parce qu’il était chanteur, il était simple comme une carte postale noir et blanc. Parce qu’il était chanteur, ivre de promesses, de joies et de rêves, il était comme la fleur qui aimait l’intimité et la terre. L’enfant de quarante ans qu’il était adorait sa maman chanteuse et “transmetteuse” de poésie berbère, son Algérie inachevée – une Algérie qui commence dans le rêve ou dans l’enfance pour finir dans l’infini de la chanson sans bord, sans fin et sans fatigue.

           En lui, lui l’enfant de quarante ans, une voix le pressait pour vivre, et une autre lui chuchotait : “La vie est courte.” Un Amazigh courageux, une voix ou une guitare, en lui, lui le chanteur, se dressent mille et un soldats-remparts contre l’oubli qui nous agresse, nous menace. Mille et un soldats-remparts contre la fatigue de vivre. En lui, lui le poète, la voix et le Djurdjura, mille et une Kabylie contre les ruines sans fin et sans fond. L’homme qu’il était vibre pour une corde ou pour une miette ou une sainte poussière de la terre sainte de la Kahina, grande dame berbère, Balkis de l’Afrique du Nord. Les enfants du célèbre Mohand-Ou-Mohand, poète d’amour, de liberté et de foi, de Da L’Mouloud, écrivain et défenseur farouche de la cause berbère. Azul fallawen Lounès. Sur ton corps, il y a encore des taches de sang, des taches d’encre et des taches de musique et le parfum de la fleur des noces.

           Permets-moi, mon ami le chanteur, le poète et le griot sur la place publique du pays des Amazighs, Tamazgha, de dire aux bourreaux islamistes : “En Kabylie, si les hommes ne parlent pas, les pierres crieront fort.” Azul fallawen Lounès. Comme toi, souvent au bord du déséquilibre et du feu, je me demande : “Pourquoi les oiseaux et les chanteurs partent-ils si vite ? Pourquoi les chanteurs et les oiseaux grandissent-ils, en nous, si vite ?” Et le poète répond : “Les oiseaux, comme les chanteurs, sont faits de miel et de lumière. Les oiseaux, comme les chanteurs, ne meurent pas ; ils voyagent en nous, vers nous, dans nos pays de mémoire, de songes, de langues et de liberté. Ils voyagent pour revenir le printemps prochain, demain.” Azul fallawen Lounès. En toi le chanteur, somnole la rose habillée – ou plutôt habitée par l’abîme et par l’alphabet de tifinegh sur une tablette sacrée d’Histoire.

           Toi, en mille voix, en mille sonates, qui a donné à la rose son nom et à la Kabylie le mot et le sens du mot. Toi, mon ami le chanteur et poète, de quel enfer sacré volais-tu tes mots ? De quel Dieu, de quel péché, de quelle belle femme, ou de quelle belle terre forgeais-tu ta voix sublime, notre voie possible mais pénible ? Toi, le chanteur, qui ce soir, rejoindras la fête où il y a les autres âmes, les assassinés-vivants : Cheb Hasni le Julio Iglesias oranais, cheb Aziz le rossignol de Constantine, Alloula, Djaout, Medjoubi, Mgr le poète Pierre Claverie et les enfants de Bentalha, Sidi Moussa, Chlef… Azul fallawen Lounès. En toi, la chanson, comme le pays de la Kahina, de Lalla Fadhma N’soumer ressemble à une belle femme qui, à son tour ressemble à un chemin, qui à son tour ressemble à un conte – ou plutôt à un cheval ailé-bouraq – ou plutôt à un papillon. Mon ami le poète, serre contre toi la fleur, la liberté et l’Algérie – plutôt “LES ALGÉRIES”. Oui LES ALGÉRIES. Rentre dans ce pays pluriel, plus grand, plus vaste que les rêves.

           Les chanteurs comme les prophètes, délirent dans la pleine raison. Raisonnent dans le plein délire ! J’entends le bruissement de la mort ou de la mer, qu’importe. J’entends la grisaille d’une femme blessée qui crie ou qui nous chante : “Pour ne pas mourir, je suis plurielle.” Géographies de caresses blessées, mais les doigts ne sont pas aveugles ! Ô mon ami qui part ce soir, reste, une heure de plus, une heure encore – nous partageons le reste de ce peu d’ombre de cet olivier centenaire, de ce dernier arbre orphelin, de ce dernier arbrisseau ; nous partageons la pomme de la mort, la tentation. Nous partageons un verre de vin, Cuvée de Mascara ou Cuvée de Président, qu’importe.

           Le terroir ! Ô mon ami qui part ce soir de ce premier jeudi de l’été 1998, reste le temps de finir cette tasse de café, de chanter cette chanson – ensemble nous partageons les rues pleines de rien, de rien et de rien, nous partageons l’exil et nous tatouons sur nos écrits, nos peaux et nos chansons : “Toute cette terre, féroce et belle, est faite pour juste y mettre un lit pour une chanson, pour un pays libre ou pour une femme appelée la Kahina.” Fi Lamen, Filamen Lounès. Adieu, adieu le poète, fils de sa mère, adieu Matoub Lounès. (Note : ce texte a été écrit après l’annonce de l’assassinat de Matoub Lounès, repris dans mon livre intitulé La culture du sang : fatwas, femmes, tabous et pouvoirs, publié en 2003 aux éditions Le Serpent à Plumes, Paris).
          
aminzaoui@yahoo.fr                      


Kamel Daoud. Ecrivain et journaliste

Envoyé par Vincent
https://www.elwatan.com/edition/culture/le-salut-de-lalgerie-viendra-le-jour-ou-la-pluralite-sera-acceptee-29-06-2019


 Liberté Algérie - Par Cherif Lahdiri - 29 juin 2019

«Le salut de l’Algérie viendra le jour où la pluralité sera acceptée»

           Le journaliste et grand écrivain, Kamel Daoud, qui vient de décrocher le célèbre prix mondial Cino-Del-Duca, s’est livré à El Watan. Dans cet entretien, il estime que «le régime algérien est biologiquement fini». Il appelle le mouvement citoyen, qui se mobilise depuis février dernier, à se doter de délégués qui assumeront la fonction de la représentation politique, «car, dit-il, la rébellion doit être transformée en construction». «Il faut en finir avec la culture du rebelle assisté. On fait certes une révolution avec de la passion, mais après, il faut faire de la politique. Or, la politique n’est pas la radicalité. On ne peut pas faire de la politique sans compromis. Il faut casser le cycle des ruptures violentes. Le plus important maintenant est de mettre en place une instance qui arbitrera la transition», tranche-t-il.
           – Votre brillante carrière est marquée par plusieurs prestigieuses distinctions, dont notamment le prix Goncourt du premier roman en 2015 et tout récemment, le prix mondial Cino-Del-Duca. Vous êtes un écrivain sous les feux des projecteurs, doté d’une visibilité médiatique accrue. Votre renommée internationale et votre consécration littéraire vous mettent devant une responsabilité sociale et politique. Que ressentez-vous et comment exercez-vous cette immense responsabilité ?

           L’idée d’un écrivain responsable est une tradition. Depuis la guerre d’indépendance, l’écrivain algérien s’est retrouvé engagé. Il luttait pour un idéal. On en est sortis avec l’idée d’un écrivain responsable. C’est une idée qui a ses raisons, mais qui a aussi son piège. Un artiste est quelqu’un qui est responsable parce qu’il produit, mais dont on doit absolument respecter l’indépendance totale.

           Une société qui ne respecte pas l’indépendance insolente de ses artistes et de ses écrivains ne peut pas évoluer. Elle aura des écrivains utilitaires, et à ce moment-là, ce n’est plus de l’art, mais de la propagande. C’est quelque chose d’assez contradictoire. Un écrivain est responsable parce qu’il a de la visibilité.
           Sa parole a du poids et du retentissement. D’un autre côté, un écrivain doit être vu comme quelqu’un d’absolument indépendant. Il n’est ni militant au sens strict, ni ministre, ni délégué, ni un politique, mais il est libre d’avoir un engagement. Le danger est de faire prévaloir une vocation sur une autre. Je fais passer la liberté que me procure l’écriture avant toute chose.

           C’est quelque chose d’absolu que je défends toujours. J’écris à partir de l’idée que je suis libre. Si on me conteste cette liberté, je n’ai plus de raison d’écrire. Au même temps, puisque l’écrivain défend sa liberté, il se retrouve militant de cette même liberté qui est un enjeu fondamental dans les luttes dans notre pays. Parce qu’on nous refuse cette liberté, nous sommes obligés de nous battre pour cette dernière.
           Je dis souvent, quand je suis en voyage dans les pays étrangers, que si j’étais libre d’écrire comme je le voulais et que j’avais accès à la parole dans l’espace public dans mon pays, je m’occuperais à écrire des livres au lieu de défendre le droit d’écrire ces livres.

           Nous sommes dans une situation où la notion de liberté de croyance et d’accès à la parole est contestée. Je me retrouve, dès lors, en tant qu’écrivain, fatalement engagé. Je n’ai pas le choix. Si j’étais libre, j’aurais écrit des contes pour enfants.
           Par rapport à la responsabilité, l’écrivain du Sud, qui a une visibilité médiatique internationale, se retrouve fatalement piégé. Parce que les champs éditoriaux ont chacun une nécessité. Tu es écrivain algérien, tu écris pour le public algérien.

           Tu as des codes, des parlers, des façons, des métaphores, des images que tu perds quand tu écris pour un public à l’international, et donc tu te retrouves piégé. En plus, ta parole se retrouve sur-interprétée. Elle dépend du lecteur qui réceptionne ce que tu dis. Je suis né en Algérie. Je suis un enfant d’Octobre 1988.
           On m’a volé les meilleures années de ma vie durant les années 1990. Ma perception de l’islamisme est virulente. J’ai vu des membres de ma famille et des amis mourir. Mon discours sur l’islamisme est radical. J’écris sur les dangers de l’islamisme.

           Je me suis retrouvé avec une question qui s’est posée pour les écrivains qui venaient de Russie dans les années 1940 : Est-ce qu’au nom de la défense de la liberté, je dois parler du goulag (organisme gérant les camps de travail forcé et de terreur en Union soviétique, NDLR) ou est-ce que pour ne pas faire le jeu de l’impérialisme, je dois taire ces crimes commis sous Staline ?

           Je convertis : Est-ce que je dois me taire sur l’islamisme dans mon pays pour ne pas faire le jeu de l’islamophobie dans les autres pays ou est ce que je dois défendre la liberté de ma fille qui a dix ans pour quelle fasse ce qu’elle veut et qu’elle vive comme elle veut. Le choix n’est jamais facile.
           – C’est ce que vous appelez «une fabrique du traître»…

           L’Algérie est un pays paranoïaque, parce qu’elle a subi une multitude d’agressions tout au long de son histoire. On soupçonne tout ce qui vient de l’extérieur. Que ce soit un touriste, un coopérant, un étranger ou un succès qui vient de l’extérieur, provoquent de la méfiance. Au lieu d’en être fier, le succès international est perçu comme une trahison chez nous. Nous avons une fabrique du traître.
           Je lis souvent des choses sur ma propre personne dans la presse qui me font sourire : J’ai visité Israël, je vis en France où j’ai eu mes papiers parce que j’ai eu ceci ou cela….) Il est difficile d’avoir du succès et d’être perçu comme quelqu’un de légitime en Algérie. Nous sommes même arrivés à un point où on vous reproche d’avoir des distinctions. C’est tout de même paradoxal ! Si je suis sorti de mon village c’est pour être le premier.
           Alors que dans tout le reste du monde on court après la distinction, l’Algérie est le seul pays où quand vous gagnez des prix à l’international, on vous le reproche. La réussite ne doit pas être un complexe. La différence n’est pas une traîtrise. Le monde extérieur n’est pas toujours un ennemi. On ne peut pas fonder une nation saine sur l’idée que le reste du monde veut nous voler notre pays.

           Cela vient peut être aussi du fait ce que j’appelle la «néo-bleuite», où l’intellectuel est accusé de trahison dès le début de la guerre d’indépendance. La guerre d’indépendance est un mouvement rural et populaire. Depuis 1962, le pouvoir a tout fait pour discréditer l’élite. Dès lors que vous faites partie de l’élite, vous faites partie de la trahison.
           – L’Algérie vit une révolution démocratique historique, saluée dans le monde entier. Que peuvent apporter les intellectuels (écrivains, hommes de culture…) pour le pays, notamment dans cette période de luttes démocratiques ?

           La première chose essentielle est que les intellectuels peuvent apporter la lucidité. La force de toute révolution est la passion et c’est en même temps sa faiblesse, car la passion rend aveugle. On fait certes une révolution avec de la passion, mais après il faut faire de la politique. Si on continue dans le mouvement de la passion, on sera des gens admirables, mais on ratera le coche politique.
           Et le propre des mouvements populaires, contre le régime en Algérie, c’est qu’ils sont toujours forts au début, mais après, ils n’ont jamais su se structurer en mouvement politique par faiblesse interne, mais aussi par le fait que le régime n’a jamais laissé ces mouvements se structurer. Les intellectuels ne sont pas la cinquième roue de la charrette.

           Ils sont au cœur de la réflexion sur ce qu’on doit faire demain. Parce qu’une révolution n’est pas uniquement un soulèvement, mais aussi un apaisement.
           Il faut construire après. Et on ne peut pas construire uniquement avec la rue ou un mouvement de foule. Nous avons besoin d’élites structurantes dans tous les domaines. Actuellement, nous vivons un moment incroyable, un moment qui m’a fait pleurer. Je n’ai jamais pensé vivre ce moment-là. En même temps, on se dit que si on rate ce coche-là, on est foutus et on va tout perdre.

           Ce qui me fait peur, c’est la passion. Il y a trop de passion dans la rue et pas assez de politique. Le régime peut saisir cette occasion. Il faut se remettre à travailler et déléguer la fonction de la représentation politique à d’autres personnes. On ne peut pas faire de la politique sans compromis.
           On en est obligés. Parce qu’on n’a pas un pays à deux étages. On a un pays composé d’un seul rez-de-chaussée. Le consensus est une réflexion intellectuelle. Il faut rétablir l’élite dans sa fonction, dans son honneur, dans son statut et arrêter avec ce que j’appelle la religion du peuple : «Le peuple, le peuple, le peuple …» Moi je suis fatigué de ce mot. Les élites ne sont pas des traîtres et ne sont pas accessoires.
           – C’est le populisme…
Cherif Lahdiri                      


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Envoyé par Jean Pierre
       Comprendra qui peut !!!

       Formidable avancée que représente cette loi :
       Je m'appelle Charlotte, un couple d'hommes m'a adoptée quand j'étais enfant.
       J'ai maintenant 18 ans un père adoptif “Jean” et une mère adoptive “Pierre” car c'est lui la “femme” du couple ; ils sont mariés, bien sûr.

       J'ai vite senti une certaine attirance physique aussi bien avec Jean qu'avec Pierre.
       Ce qui devait arriver, arriva et j'ai eu un garçon avec mon père adoptif “Jean” (sans qu'il y ait d'inceste ), puis une fille avec ma mère adoptive “Pierre”.

       Ce qui n'est pas encore défini, c'est la position de ma mère vis-à-vis de l'enfant que j'ai eu avec mon père, son mari, et vice-versa.
       Par contre ce qui est bien, c'est que la loi permettra à mes enfants, ma fille et mon garçon, de se marier ensemble.
       Si vous n'avez pas bien compris, merci de relire encore une fois ou bien de téléphoner à votre ex président François le scooter-man qui en est à l'origine.


Si vous avez des documents ou photos à partager,
n'hésitez-pas à nous les envoyer. D'avance, Merci.

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Notre liberté de penser, de diffuser et d’informer est grandement menacée, et c’est pourquoi je suis obligé de suivre l’exemple de nombre de Webmasters Amis et de diffuser ce petit paragraphe sur mes envois.
« La liberté d’information (FOI) ... est inhérente au droit fondamental à la liberté d’expression, tel qu’il est reconnu par la Résolution 59 de l’Assemblée générale des Nations Unies adoptée en 1946, ainsi que par les Articles 19 et 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), qui déclarent que le droit fondamental à la liberté d’expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».

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