N° 168
Janvier

http://piednoir.net
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Janvier 2017
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
http://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
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EDITO
MEILLEURS VOEUX 2017


         Chers Amis,

         Une année s'est écoulée, une nouvelle année se déploie telle une fleur encore en bouton et frappe à la porte avec ses lendemains à découvrir ensemble.

         Par ces vœux, je tiens à vous remercier de la confiance dont vous m'honorez depuis de nombreuses années. Je tiens aussi à remercier chaleureusement tous ceux qui ont participé à La Seybouse en me faisant parvenir, leur travail, leurs photos, leurs documents, leurs histoires (petites et grandes). Je ne peux les citer tous sans en oublier donc, je leur dis simplement MERCI.

         Profitons de ce jour d'espoir pour souhaiter à ceux que l'on aime le plus de bonheur possible et durable, de la santé, de la douceur, des petits plaisirs et de grandes joies de vivre.

         Que 2017 vous apporte de la prospérité et du succès dans vos projets.

         Que vous puissiez trouver, comme chaque habitant de la Terre, grâce à la magie du nouvel an, l'étoile infaillible qui vous guidera vers la sérénité, la lumière, la paix, et la vérité.

         Que le chemin de l'année 2017 soit parsemé d'éclats de rire, de pétales de plaisir, qu'il soit éclairé par l'étincelle de l'amour et la lueur de l'amitié.

         Beaucoup de personnes attendent le Jour de l'An pour prendre un nouveau départ. Trouvez de nouveaux horizons. Pavez de nouvelles routes, de nouveaux chemins. Explorez de nouvelles destinations. Répondez à de nouveaux désirs. Nourrissez de nouveaux espoirs et découvrez la force en vous pour apporter des changements positifs dans votre vie. Mais surtout n'oubliez pas tous vos vieux amis.

         Puissent ces vœux témoigner de cette belle amitié avec la Seybouse et contribuer un peu à agrémenter l'année qui se profile.

         Cette amitié n'est pas naît comme ça, tout simplement du jour au lendemain sans qu'on n'ait besoin d'y investir un peu de soi. En réalité, il faut y mettre de la confiance pour l'apprivoiser, du temps bien entendu pour la fortifier et de la disponibilité en plus, afin de lui permettre de s'épanouir pleinement et de se développer également. Merci à vous Amis-lecteurs d'y avoir contribuer.

         Le site de la Seybouse qui n'est pas strictement Pieds-Noirs, en lecture, sert aussi pour des jeunes en recherche d'identité, pour des moins jeunes en recherche de souvenirs qui les font revenir dans le giron de la communauté et des plus vieux qui retrouvent leur jeunesse à son contact. C'est un vecteur important de notre mémoire d'avant 1962 mais aussi d'informations plus récentes. De même, chacun peut proposer un texte, des photos ou sa contribution sur un thème de cette mémoire. Nous attendons vos contributions avec impatience. Les anecdotes, les documents historiques pourront aussi être partagés.

         2016 s'éloigne avec les morts et les souffrances des attentats ; avec la perte d'un être cher ; la perte d'un emploi pour certains ; la misère qui frappe à nos portes sans que cela n'émeuve les politiques au pouvoir qui eux ne connaissent pas ces souffrances, mais…

         Enfin, un petit ouf de soulagement. 2017 était attendu depuis longtemps et il aura fallu toute notre ténacité, notre patience et notre courage pour tenir. Bientôt le cauchemar hollandais 2012-2017 sera terminé. Que chacun fasse le bon choix pour l'avenir de nos enfants et petits-enfants afin qu'ils ne connaissent pas eux-aussi un dramatique et douloureux exode.

         Voir, entendre, aimer, rêver, évoluer, bien choisir, prendre la bonne voie, en se gardant du piège de l'extrémisme radical, de la lâcheté et de la cupidité de certains, sont donc aussi des vœux pour 2017.
Bonne et heureuse année à tout le monde!
Bonne lecture, JPB                   
         Diobône,
         A tchao.
       


Les Voeux de chez nous
Offerts par Henriqué PALLES
Voeux de M. Henri Palles

         MES CHERS AMIS
         En cette saison festive, toutes mes pensées oranaises vous rejoignent. En passant par mes Chers et Grands "Bas-quartiers de la Marina" jusqu’aux plus petits de nos villages de l’Oranie, j’espère une fois de plus que mes bons souhaits pour NOEL vous parviendront.

         Et si mes vœux voguent sur la toile dépassant parfois les frontières de notre département 92 pour aller toucher aussi nos frères et nos sœurs piénoirs du 90 et 91 éparpillés de par le monde, sachez que nos amis « Camembert & Va et vient » sont toujours ravis de servir d’attachés culturels à nos ambassadeurs de tous poils.
   JE VOUS SOUHAITE UN JOYEUX NOEL ET UNE BONNE ANNÉE 2017


TRES AMICALEMENT, HENRIQUÉ DES BAS-QUARTIERS



LA CRECHE DE FALICON
De Hugues Jolivet



         Merci, Conseil d'Etat d'autoriser les Crèches,
         En période de Noël, dans les salles publiques.
         Messieurs libres-penseurs, halte à vos anti-prêches,
         Laissez nous exprimer nos coutumes pacifiques.
         La fête de Noël est période de trêve
         Pour l'accueil d'un message d'espérance et de paix.

         Une équipe d'artistes réalisant le rêve
         De chacun et de tous, mérite notre respect.
         Pour la septième fois, innovant chaque année,
         Marie-Jo et Muriel concrétisent leur projet :
         Une crèche provençale, santons enrubannés
         Qui conduisent à l'Enfant après un long trajet !

         L'adresse et la technique de Morgan et François
         Apportent la lumière, l'eau et le mouvement
         Au calme d'une oasis telle qu'on la conçoit.
         Participent au bonheur, à l'émerveillement
         D'un village serein qu'on aime, qui vous reçoit
         A la crèche de Jésus, bien fraternellement.
Hugues Jolivet         
Le 10 décembre 2016          




CRÊCHES 2016
Envois Divers
Crêche de M. Palles
Photo M. Palles H.
Crêche de M. Léon
Photo M. Leon R.

Crêche de M. Zammit
Photo M. Zammit M.

Photo M. Zammit M.



Photo M. Zammit M.


Photo M. Zammit M.



Crêche de M. Lucas
Photo M. Lucas B.


Photo M. Lucas B.



Photo M. Lucas B.

Photo M. Lucas B.



Crêche de Mme Madelaine
Photo Mme Madelaine B.

Crêche de M. Rochas
Photo M. Rochas C.


Photo M. Rochas C.


Photo M. Rochas C.

Photo M. Rochas C.
Crêche de M. Barbato
Photo M. Barbato P.


Crêche de M. Lunardelli
Photo M. Lunardelli N.


Crêche de M. Picard
Photo M. Picard C.



Crêche de M. Duchene
Photo M. Duchene N.


Crêche de Mme Pantéri
Photo Mme Panteri F.


Crêche Bandeau
Photo inconue


Crêche de Mme Bartolini
Photo M. Bartolini J.P.

Photo M. Bartolini J.P.


Creche de M. Rossi
Photo M. Rossi J.


Fables Bônoises
De M. Edmond Brua
Envoyé Par M. Carpy Dominique

LE MOUSQUETAIRE ET LE COLON

                Un marchand de tableaux vendit
                A certain colon riche et ladre
                Une peinture (avec son cadre),
                Un Franz Hals presque garanti
                Représentant un Mousquetaire,
                Avec son cadre (l'ai-je dit ?)
                Plus la ficelle et la patère,
                Le tout pour douze mille francs.
                Ne vous récriez point : c'étoit avant la guerre.
                Il avoit à moins cher proposé deux Rembrandt,
                Prévenant toutefois l'amateur de peinture
                Qu'il leur manquoit la signature.

                Notre colon rentré chez lui
                Accroche dans sa galerie
                Le Mousquetaire qui reluit.
                Il se prend, en son euphorie,
                Pour le Chauchard de l'Algérie,
                Quand un quidam survient qui d'autre état n'avoit
                Que celui de Franz Hals : peintre et peintre authentique.
                (Vit-on jamais un faux navet ?)
                Le colon étant sa pratique,
                Mal en prit au chef-d'œuvre. Il en fait la critique,
                Trouve à la toile maint défaut,
                Pèse le milligramme, aune le millimètre,
                Met un Roybet beaucoup plus haut.
                - Et pourtant, dit-il, c'est d'un Maître !
                Cher ?-Hé ! hé ! - Mais encor ? - Tant. - Parbleu, c'est un faux !

                - Un faux, vraiment, un faux ? Prouvez-le ! - Bien facile !
                Surtout, laissez-moi faire et soyez attentif.
                Le colon demeure imbécile.
                L'artiste s'arme d'un canif,
                Attaque la peinture à l'huile,
                Gratte le Mousquetaire et dessous le soudard
                Découvre en sa retraite un autre personnage.
                C'est un Monsieur d'un certain âge,
                Mou, banal, effacé, rebelle à l'œuvre d'art,
                Bref, un avorton de peinture
                Autant qu'un raté de nature,
                Tout honteux de porter, aux lambris d'un salon,
                Parapluie et chapeau melon.

                Une lettre recommandée
                L'eut bientôt reconduit vers de nouveaux malheurs.
                Je laisse à deviner les fleurs
                Dont elle étoit enguirlandée !
                " Monsieur, répondit le marchand,
                Monsieur et cher propriétaire,
                Ce Portrait d'Inconnu ne fait point mon affaire.
                Si vous avez le goût changeant,
                Renvoyez-moi mon Mousquetaire,
                Je vous renverrai votre argent. "
               
Edmond Brua


LE MUTILE N° 40, 25 novembre 1917 (Gallica)
A UN CAPORAL DE L'INTENDANCE.
A la Caserne des " Isolés " à Alger
                 Sous ce titre notre éminent confrère Ernest Mallebay des Annales Africaines publie un "petit billet" si doux, si spirituel et si mordant que nous ne pouvons résister à la tentation de le reproduire :
        " Le 22 Août à l'arrivée du train de Constantine, une douzaine de permissionnaires du front, se présentent, nu bureau des " Isolés " à Alger, pour y faire viser leur permission.
        Ces braves poilus, couverts de brisques, et dont quelques-uns portent la croix de guerre, entrent dans le bureau, qu'ils encombrent un instant.
        Assis derrière son bureau, un petit caporal, à la mine réjouissante, frais et rose, comme un bébé en nourrice, sanglé dans une vareuse à la coupe parfaite, lève la tête et s'écrie :
        - Qu'est-ce que c'est, qu'est-ce que c'est ! Sortez dehors, moi j'étouffe ici. Attendez à la porte.
        Il étouffe, le pauvre ! Oui, ce fils à papa craint la chaleur, parait-il ? Aussi, c'est pour ça qu'on le conserve soigneusement, dans un bureau bien aéré, à l'ombre et surtout bien à l'abri de la " chaleur des marmites "
        Les poilus eux, c'est une autre affaire ; ils ne craignent pas la chaleur. " Sortez dehors " ; il y fait 45° de chaleur, mais vous pouvez bien supporter ça. Et les poilus soumis et disciplinés, (il y avait même des gradés) obéissent et sortent dans la cour.

        A ce moment, un officier entre dans le bureau et apercevant les permissionnaires dans la cour : " Que faites-vous là, en plein, soleil, leur dit-il. Entrez ici, vous serez bien mieux. "
        Inutile de dire que ce nouvel ordre est exécuté avec un ensemble parfait. Quelques-uns uns rient de satisfaction, en contemplant la mine renfrognée du petit caporal.

        Je regrette de ne pas connaître le nom de ce brave officier qui, en cette occasion a montré qu'il était un bon chef et un père de famille. C'est avec de pareils procédés, bien simples pourtant, qu'on se fait aimer de ses hommes et que le poilu, tiendra.
        Quant à la conduite du caporal, ce monsieur qui craint la chaleur, mais qui s'en moque pour ses camarades qui vont se faire tuer peut-tire, et dont quelques-uns uns hélas I ne reverront plus Alger ; elle se passe de commentaires.

        Toutefois, j'espère bien que la loi Mourier donnera satisfaction à ce monsieur qui a si chaud à Alger. Il y à en effet. sur le front, certaines petites tranchées, notamment aux Eparges ou en Belgique, où ce caporal pourra villégiaturer avec de l'eau jusqu'aux genoux et la neige sur les épaules. II sera là dans son élément, et pourtant, je gage qu'au bout de quinze jours de ce régime, il préférera le climat d'Alger où il étouffe pourtant, le pauvret.
Sans commentaires                  
Le Mutilé                  

 Bulletin - Oeuvre de saint Augustin et de sainte Monique, patronne des mères chrétiennes  
N° 14 et 15 1875 - Brochure trouvée à la BNF


L'ARMEE D'AFRIQUE
ET LA MISSION LA FRANCE EN AFRIQUE

               
Discours prononcé le 25 avril dans la cathédrale d'Alger par Sa Grandeur Mgr l'Archevêque pour l'Inauguration du service religieux dans l'armée d'Afrique.

Ecce ego aperiam tumulos vestros et educam vos de sépulcres vestris ; it scietis quia ego Dominus locutus sum, et feci.
J'ouvrirai votre tombe et je vous rappellerai à la vie mais vous n'oublierez pas que c'est moi, votre Dieu, qui l'ai voulu et que votre résurrection est mon œuvre! (Ezeeh, xxxvn, 12. 14.)
               

                Messieurs,

                C'est ainsi que Dieu parlait, par ses prophètes, aux Juifs courbes sous le joug des rois superbes de Babylone c'est ainsi qu'il parle aux descendants des antiques races africaines ensevelies depuis de longs siècles dans les ténèbres de la barbarie et de la mort. Et, de même que pour arracher son peuple à la servitude il choisissait une armée, l'armée de Cyrus de même pour rendre à la vie la terre illustre des Cyprien, des Augustin, de tant de saints, de tant de grands hommes, il a choisi une armée, l'armée de la France.

                Ne vous étonnez pas de ces choix de la Providence. Avec les apôtres de la vérité, les hommes de guerre sont ceux que Dieu associe le plus visiblement à son action dans le monde. Aux premiers, il confie les desseins de sa miséricorde, aux seconds les arrêts de sa justice; et les uns et les autres sont appelés à payer cet honneur suprême d'un même prix, qui est celui de leur sang.

                Si donc il n'est rien de plus digne de l'exécration des hommes que les passions qui allument la guerre et les malheurs immérités qui la suivent, il n'est pas de spectacle plus auguste que celui des conseils éternels, par lesquels Dieu, respectant la liberté que nous tenons de lui, conduit nos luttes et leurs crimes mêmes, au point précis qu'a marqué sa sagesse. Soit qu'il veuille fonder les empires et enchaîner les peuples à leur fortune, soit qu'il châtie des races coupables et leur fasse expier par la ruine l'obstination de leur décadence, soit qu'il retrempe leur vigueur dans les épreuves et dans le sang, la guerre est l'instrument redoutable de sa Providence et la terre des champs de bataille est cette terre mystérieuse dont parlent nos saints livres où sa main écrit les noms des peuples qu'il appelle à la vie et les noms de ceux qu'il a voués à la mort !
                Vous ne le nierez pas, sans nier votre gloire, vous dont la gloire des siècles a résumé l'histoire dans cette parole magnifique les Actes de Dieu par les Francs !

                Sans doute, les conseils d'en haut échappent souvent à nos faibles regards. Ne pouvant percer les profondeurs de l'avenir nous ne saurions juger toujours de la portée des coups du présent. Mais il est cependant des caractères où il est impossible à l'homme de méconnaître l'esprit et la main même de Dieu.
                Lorsqu'une nation s'arme pour servir les grandes causes de l'humanité et de la justice, lorsqu'elle porte avec elle la lumière et le nom de Jésus-Christ au milieu des ténèbres de la barbarie, lorsque dans le sentiment élevé du devoir elle s'impose le sacrifice de ses trésors et de son sang pour arracher un peuple à la mort, lorsqu'elle souffle sur ses ossements arides et que peu à peu elle leur rend la vie, il faut proclamer dans une si généreuse entreprise, une action supérieure à celle de l'homme, et confesser, avec le Prophète que c'est Dieu même qui inspire ces courages désintéressés et appelle du tombeau ces autres Lazare.

                A ces traits, qui ne reconnaîtrait l'histoire de notre conquête africaine, et si jamais la France a reçu une mission d'en haut, quand fut-elle plus évidente? J'en trouve partout, ici, la marque assurée dans les causes, dans les premiers pas, dans les progrès, dans les obstacles, dans la valeur des chefs, dans la patience des soldats, dans la persévérance et le dévouement de tous, dans ce qui est fait déjà et dans ce que l'avenir réserve à cet immense continent dont vous avez ouvert les portes, en sorte que faire cette histoire, c'est moins encore parler de vous, que constater à chacune de ses pages, la main de Dieu qui vous guidait.

                Et voilà pourquoi, voulant célébrer aujourd'hui par de publiques actions de grâces, le rétablissement du culte chrétien dans l'Armée Française, en Afrique, j'ai pensé ne pouvoir rendre à Dieu un plus excellent hommage qu'en rappelant en présence de ces autels ce que vous avez fait pour répondre à la mission providentielle dont la France a confié la préparation à votre valeur.
                Seigneur, soyez béni de ce que je puis, avec justice, placer aujourd'hui le nom de la France à côté du vôtre, puisque pour préparer ces jours dont nous voyons déjà l'aurore, vous avez emprunté son bras et son cœur! Soyez béni de ce que la mission qu'elle a reçue de vous, peut devenir, si elle le veut, un gage de votre miséricorde, et de ce qu'au milieu même de ses douleurs, elle peut trouver encore sur ces lointains rivages, dans le souvenir des actes de ses fils, une moisson de gloire !

                Le seizième siècle commençait, lorsque sur les débris des principautés arabes de l'Afrique du Nord s'éleva une puissance nouvelle qui devint bientôt la terreur du monde chrétien.
                Deux pirates, dont la légende populaire a immortalisé le nom, les Barberousse, établissent à Alger, par la trahison et par le meurtre, un royaume qui restera jusqu'à la fin digne d'une telle origine. Sans foi, sans pitié, unissant à la plus audacieuse bravoure le génie du pillage, ils forment autour d'eux cette terrible milice composée de Turcs, récemment arrivés en Europe du fond de la Tartarie, et de renégats chrétiens ramassés pour une vie de brigandage et de débauches sur toutes les côtes de la Méditerranée. Le premier soin de ces hordes barbares est de dompter les Arabes, et de noyer dans le sang toute pensée de résistance; puis maîtres absolus de la terre, ils se tournent triomphants vers la mer et pendant trois cents ans ils courent à la curée du monde !

                Durant ces tristes siècles, aucun navigateur chrétien ne peut être certain un seul jour ni de sa vie ni de son honneur! A chaque moment, des extrémités de l'horizon, du milieu dés rochers, il peut voir s'élancer d'audacieux pirates qui, poussant des cris inconnus et le menaçant de leurs armes, lui enlèvent d'un seul coup ses biens et sa liberté. Chaque nuit les villes, les villages placés à la portée d'une incursion de ces sauvages agresseurs, peuvent voir leurs portes renversées, leurs maisons envahies, et leurs habitants, hommes, femmes, enfants, massacrés ou entraînés par la violence. Vainement la crainte universelle a-t-elle multiplié les défenses, vainement a-t-on établi sur les côtes de l'Italie, de l'Espagne, de la Provence, des îles de la Méditerranée, ces hautes tours que nous voyons encore debout comme un lugubre témoignage de tant d'abominables entreprises; la ruse, l'audace, la persévérance triomphent de tout, et chaque année des milliers de victimes viennent grossir la troupe infortunée qui gémit dans les bagnes algériens.

                Là, vendus comme un vil bétail, livrés à des maîtres avides, torturés souvent jusqu'à la mort ou pour les forcer au travail que refuse leur faiblesse, ou pour les contraindre à l'apostasie, ou pour les soumettre à d'infâmes exigences, ils ne trouvent d'autre adoucissement à leurs maux que le dévouement de ces religieux intrépides voués au rachat, ou pour le dire d'un mot que l'admiration des siècles a consacré, à la Rédemption des captifs.

                Ceux d'entre vous, bien rares désormais, qui sont, en Algérie, les contemporains de la conquête, savent ce que je dis. Ils ont vu les dernières victimes de ces supplices. Ils ont vu les instruments qui les livraient à la mort les crocs de fer qui garnissaient les remparts et sur les pointes desquels on jetait les esclaves pour les laisser mourir de douleur, de soif et de faim aux rayons ardents du soleil. Ils ont vu les humides cavernes où ils agonisaient lente-ment privés d'air et de lumière. Ils ont entendu l'horrible histoire des cent dix Français tombés, à la veille même de notre expédition, entre les mains de ces barbares et dont les cent dix têtes, empilées dans des sacs immondes, furent livrées par le Dey stupide aux outrages de la multitude.
                A de semblables récits sans cesse renouvelés, l'Europe se soulevait de douleur et de rage. Les princes rougissaient du sanglant tribut payé à la barbarie. Les plus puissants, Charles-Quint, Louis XIV avaient tenté vainement de l'anéantir.

                Fiers de tenir en échec les maîtres du monde, défendus par des côtes inhospitalières, appuyés sur les barbares populations de l'Afrique, enrichis par leurs pillages, les pirates se proclamaient et se croyaient invincibles. "Les eaux l'environnent, la mer est la source de ses richesses, les flots sont ses forteresses, l'Afrique et la Libye ses auxiliaires". Ainsi parlaient autrefois d'Alexandrie les peuples de l'Orient, ainsi parlaient d'Alger les peuples de l'Europe, désespérant de le jamais vaincre, et, pour échapper à ses corsaires, se résignant, l'un après l'autre, à acheter honteusement à prix d'or une paix chaque jour violée.
                Dieu cependant a déjà choisi le bras auquel il va confier sa vengeance. Mais la France ne s'y portera pas d'elle-même. Il faut, si je l'ose dire, qu'on l'aille chercher, et que des coups répétés triomphent de sa longue résistance.

                C'est d'abord l'acte insensé par lequel le Dey d'Alger inflige à notre représentant le dernier des outrages, et lui déclare, par surcroît, n'avoir nul souci ni de son roi, ni de sa nation. C'est la destruction violente de notre commerce et de nos comptoirs dans là Régence. Il semble que cela doive suffire pour nous précipiter sur ces barbares et cela suffit, en effet, dans les conseils du souverain, où un soldat et un prêtre font partager à ceux qui les entourent l'émotion de leur foi et de leur vieil honneur. Je les nommerai tous deux, car ils ont droit à notre reconnaissance. Le soldat était un Clermont-Tonnerre que sa noble devise autorisait à relever la tête devant l'injure, alors même que tous eussent voulu la laisser impunie; le prêtre était l'éloquent évêque d'Hermopolis.
                Mais ils comptaient sans les résistances calculées d'un parti déjà redoutable qui repoussait une guerre d'où la religion devait sortir vengée, et le prestige des rois très-chrétiens entouré d'une auréole de gloire. Devant cette opposition menaçante, il fallut que l'honneur de la France attendît trois ans.

                Mais, c'est en vain, ô politiques, que vos calculs cherchent à se soustraire à des desseins plus hauts. En vain, proposerez-vous au pacha musulman de l'Égypte de se faire le champion de votre querelle, en vain invoquerez-vous l'autorité de la Sublime-Porte, en vain, dissimulant le dépit de ces insuccès, et tremblant de mécontenter une nation puissante, enverrez-vous humblement demander à ce chef de brigands qui vous brave, une démarche ambiguë dont la France abaissée se contentera. Il va frapper enfin un coup qui brisera vos résistances. A votre ambassadeur qui attend dans la rade d'Alger, sa réponse à votre prière, il enverra pour toute excuse, avec l'insolence superbe d'un barbare, une bordée de ses canons chargés à mitraille.
                C'est le coup de tonnerre par lequel la Providence déchaîne la tempête.

                La France se réveille au bruit des canons d'Alger. Elle sent qu'elle cesserait d'être elle-même si elle ne vengeait un tel outrage. Le vieux roi Charles X déclare aux représentants de la nation qu'il ne saurait le laisser impuni. En un instant, l'ardeur guerrière, si longtemps comprimée, se manifeste de toutes parts. On voit des officiers, des généraux même, solliciter de faire, comme simples soldats, la campagne d'Afrique. L'enthousiasme éclate surtout dans les provinces méridionales, victimes séculaires de la piraterie musulmane. Ce fut au bruit des cloches, avec l'accompagnement des chants sacrés et des bénédictions de l'Église, aux acclamations d'un peuple qui mêlait les ardeurs de sa foi au souvenir de ses souffrances, que l'armée, conduite par Bourmont, monta sur la flotte qui lui était préparée, et lorsqu'un descendant de saint Louis, l'héritier même du trône, vint traverser à Toulon les longues lignes des vaisseaux où les soldats de la France juraient d'être dignes de leurs pères, où les matelots sur leurs vergues faisaient monter jusqu'aux cieux l'antique cri de guerre de la patrie, il sembla aux témoins de cette scène sublime qu'un souffle des croisades vint soulever nos drapeaux

                C'est ainsi que notre flotte prend sa route au milieu des sympathies ardentes de tous les pays chrétiens qu'elle laisse derrière elle. L'Espagne, l'Italie, les îles de la Méditerranée, se rappelant leurs villes incendiées, leur commerce ruiné, les morts tombés sous les coups des barbares, les esclaves sans nombre, hommes, femmes, enfants, arrachés violemment de leurs rivages et gémissant encore dans les bagnes, unissent leurs vœux pour son triomphe, et notre armée s'avance vers le sanglant repaire de la piraterie, soutenue dans son entreprise vengeresse par les bénédictions du présent et les longues malédictions du passé.

                Vous la voyiez et vous la bénissiez du haut du Ciel, ô Dieu protecteur de la faiblesse et vengeur de l'iniquité Vous reconnaissiez dans ces chefs intrépides, dans ces soldats qui marchaient à la mort pour le triomphe de l'honneur, de l'humanité, de la justice, sur la plus monstrueuse barbarie; vous reconnaissiez les fils des guerriers de Clovis, de Charlemagne, de saint Louis, les fils de cette France que vous avez armée pendant tant de siècles, pour être en votre nom l'appui de tous ceux qui invoquent ici-bas ce nom sacré contre l'injustice triomphante. Seigneur, aux jours mauvais, vous vous souviendrez de la fidélité des anciens jours vous n'oublierez pas le pacte séculaire qui nous avait fait partout les soldats de votre cause, et vous sauverez les fils, même coupables, en souvenir des vertus de leurs pères.

                Enfin, le 13 juin 1830, au lever du jour, la terre d'Afrique apparaît aux yeux impatients de l'armée qui vient y chercher tant d'épreuves et tant de gloire. Elle leur apparaît avec ses hautes montagnes qui semblent soutenir le ciel, ses collines qui baignent dans les flots leurs pieds couverts de verdure, ses maisons éparses au-dessus du rivage, la lumière pure de son soleil et les teintes de sa mer qui rappellent aux vétérans de l'armée d'Egypte l'azur des mers de Syrie, ce spectacle dont les climats du Nord ne peuvent donner une idée, qui nous a tous charmés quand nous l'avons contemplé pour la première fois et que les vieux soldats regrettent encore jusque sous le ciel de la patrie.
                Mais ces splendeurs d'un monde nouveau s'illuminent d'un éclat plus vif par l'espoir, désormais prochain, du combat et de la victoire.
                Le lendemain, anniversaire de Marengo et de Friedland, l'armée, qui compte plus de trente mille hommes, prend terre, à six lieues d'Alger, au point précis qu'avait marqué, longtemps par avance, un officier des armées de Napoléon. Le débarquement, contre toute attente, ne rencontre point d'obstacle. Le Dey a donné l'ordre de laisser aborder librement nos soldats afin, disait-il dans son orgueil, qu'il n'en pût échapper un seul, pour apprendre à la France la destruction de son armée.

                Il comprendra bientôt Sa folie.
                Déjà tout se prépare pour l'attaque. La presqu'île de Sidi-Ferruch est occupée. Une redoute qui s'appuie, de chaque côté, sur la mer, défend le camp français contre les surprises. L'ennemi se masse à notre vue sur les collines de Staouéli. Il réunit bientôt autour de ses drapeaux sans nombre cinquante mille combattants. Le lieutenant du Dey d'Alger, celui du Bey d'Oran, le Bey de Constantine, en personne, commandent cette armée où des nuées de cavaliers indigènes appuient la milice turque. Les nôtres brûlent de se mesurer avec l'ennemi. Mais le sage comte de Bourmont ne veut rien laisser au hasard. Il retient l'impatience universelle. Lui-même, établi sur une élévation qui domine la mer, près des ruines d'une vieille tour bâtie par les Espagnols, à l'époque de leur domination passagère, procède aux premiers préparatifs.
                C'est là que, sur un autel improvisé, seize prêtres de la France, qui ont accompagné l'armée, offrent solennellement le sacrifice et ressuscitent le culte chrétien sur la terre africaine.

                A cette même place s'élevait, dans les premiers siècles, une Église épiscopale ( Casae Favenses.). A quelque distance, auprès de la mer, on apercevait et on voit encore parmi les ruines, toujours debout, malgré les injures du temps et de la barbarie, la basilique de Tipasa.
                C'était sous les voûtes de ces temples que retentissait autrefois la prière catholique. Le temple où priait aujourd'hui l'armée de la France n'avait d'autre voûte que le ciel, d'autres bornes que l'immensité. Il convenait qu'il en fût ainsi et qu'avant la voix des armes, Dieu par la bouche de ses ministres pût faire entendre sans obstacle à ces rivages, dans la langue où ils les entendaient autrefois, les paroles de résurrection et d'espérance.
                Enfin, après cinq jours d'attente, le 19 juin se lève et avec lui l'aurore de nos victoires.
                Au signal parti de leur camp, les troupes barbares s'ébranlent et s'avancent, avec des cris, contre les redoutes que garde notre armée.
                Berthezène, Loverdo, Des Cars, qui commandent nos divisions, sont à la tête de leurs troupes sous les yeux de Bourmont. Lahitte et Valazé les appuient. Un vieux général de l'empire, Porret de Morvan, occupe le poste du péril avec toutes les ardeurs de sa jeunesse.

                Vous étiez là, attendant de donner vos premiers coups, obscurs encore, mais portant déjà vos victoires dans la mâle fierté de vos regards, capitaines futurs des grandes guerres de ce siècle, Lamoricière, Changarnier, Duvivier, Damrémont, qui deviez attacher vos noms à nos batailles africaines Pélissier, vainqueur de Sébastopol Mac-Mahon, soldat intrépide de Malakoff et de Magenta; Baraguey d'Hilliers, Vaillant, Magnan, Chabaud-Latour et vous, brave Dumesnil qui deviez écrire cette noble histoire, et vous, digne fils des croisés, Quatrebarbes, qui deviez demander à la France, dans ses assises solennelles, de terminer par la croix cette conquête commencée par l'épée, et subir à Ancône une défaite plus noble que les plus nobles victoires!

                Mais la bataille est engagée. Nos soldats ont vu, pour la première fois, accourir en rangs confus du fond de la plaine, à travers les broussailles et les hauts aloès, ces cavaliers arabes que nous devions trouver devant nous durant vingt années. Leurs longs vêtements blancs soulevés par la course, semblant voler au-dessus des obstacles, rapides comme l'aigle, brandissant leurs longs fusils, ils se précipitent, arrivent à notre portée, s'arrêtent soudain, tirent et s'enfuient pour recharger et revenir encore.
                C'est un immense tourbillon où hommes et chevaux partagent la même furie et se communiquent leurs passions. Il s'élance, disait Job en parlant du cheval de l'Arabie, il s'élance dévorant l'espace, dès que retentit le bruit des armes. Il entend le signal du combat et il dit Yah! De loin, il sent l'odeur des batailles, il comprend les excitations des chefs, les clameurs de l'armée (1)". Tel le peignait il y a cinq mille ans, l'écrivain sacré, tel nos soldats le voient sous leurs yeux, comme une apparition de cet orient immobile jusque dans ses ardeurs.
                (1) Fervens et fremens sorbet terrain. Ubi audietit buccinam, dicit;
                vahl Procul odoratur bellum, exhortationem ducum, et ululatum exercitus. Job, xxxix, 24, 25.


                Mais l'armée doit lutter contre un adversaire plus redoutable c'est la milice turque qui, depuis trois siècles, fait trembler les populations de la Régence. Elle nous aborde avec une énergie farouche et l'assurance d'une vieille troupe qu'animent la rage religieuse et la conscience de n'avoir jamais subi de défaite. Le choc est terrible. Un moment une de nos ailes est ébranlée; mais les chefs ramènent leurs soldats. On voit l'intrépide Monnier entraînant les siens, lutter seul avec quelques braves contre une multitude d'ennemis qui l'entourent; un mouvement offensif le délivre. Partout le combat est engagé. Nos vaisseaux qui se sont approchés du rivage appuient l'armée du tir de leurs canons et portent le désordre dans les rangs ennemis. Enfin, un cri, un cri terrible, ce cri de l'infanterie française qui fait trembler les champs de bataille, sort à la fois de toutes les poitrines En avant! à la baïonnette! en avant!

                C'est fait! Le torrent vainqueur se précipite. Tout ce qui résiste est renversé. Les cavaliers arabes se dispersent aux quatre vents du ciel, allant annoncer à leurs montagnes qu'elles vont recevoir de nouveaux maîtres. Les Turcs seuls tiennent encore et se font tuer avec courage; mais ils sont désormais trop peu pour notre nombre, nos soldats les écrasent. Ce n'est plus qu'une déroute; ils ne s'arrêteront que sous les murs d'Alger, et nos soldats franchissent en les poursuivant les deux lieues qui le séparent du camp de Staouéli, dont ils s'emparent et où ils couchent sous les tentes de l'ennemi.

                Collines de Staouéli, vous avez été les témoins de leur victoire, vous avez entendu leurs cris de triomphe et les premiers accents de cette langue qui était celle de la France et qui vous annonçait l'avènement d'un monde nouveau. Vous les avez vu s'incliner devant l'autel dressé sous vos palmiers antiques! C'est là qu'au nom de leur Dieu, de leur patrie, du monde chrétien tout entier ils prirent possession de la terre qu'ils allaient conquérir. C'est là que le plus grand de nos capitaines, le père de l'Algérie, a voulu que la prière fixât sa demeure sanctifiée par la pénitence et par le travail et fît monter sans cessé vers le ciel, par les lèvres qui lui sont consacrées, un hymne de reconnaissance! Seigneur, que cette prière monte jusqu'à votre cœur Qu'elle en fasse descendre vos bénédictions sur notre France nouvelle Qu'elle obtienne la rosée à ses champs, la fécondité à ses travaux, la vigueur aux bras de ses fils, la vertu et le courage à leurs âmes. Qu'elle inspire toujours au vainqueur l'humanité et la justice! Qu'elle donne au vaincu l'intelligence des biens que lui assure sa défaite, qu'elle fasse de tous un seul peuple et que ce peuple soit digne de vous!

                On eût pu poursuivre et tenter d'entrer, le jour même, dans la capitale épouvantée. Mais il faut attendre l'artillerie que les ordres du chef de la flotte ont retenue dans la haute mer. Ce retard rend le courage à l'ennemi à qui notre prudence semble de la crainte. Il se présente devant notre camp, mais les nôtres le poussent de proche en proche jusqu'aux collines qui cachent encore Alger à notre vue. Là se livrent des combats nouveaux. Là tombe mortellement blessé d'une balle qui a brisé sa poitrine, le fils du comte de Bourmont.

                Héros chrétiens, l'un et l'autre, ils s'étaient agenouillés auprès des autels avant de quitter la France pour recevoir, des mains du Pontife, comme des croisés d'un autre âge, le Dieu de l'Eucharistie. Et maintenant, le fils se sentant mourir et parlant des grandes causes de la religion et de la France auxquelles il sacrifiait sa vie, disait en montrant sa blessure "Elle est bien placée, là. Elle est près du cœur! " Le père, averti de ce coup terrible, ne veut prendre que le temps d'embrasser et de bénir un fils si digne de sa tendresse, puis calme, tout entier au devoir, il retourne au poste du combat et il trouve pour annoncer son malheur des paroles que Sparte eût admirées
                Les Turcs restent à Sidi-Khalef ce qu'ils étaient à Staouéli. On voit un de leurs janissaires s'élancer sur une batterie, et rejeté dans le fossé, recevoir dix blessures sans cesser de combattre, puis une main coupée, s'enfoncer de l'autre un poignard dans le cœur pour ne pas tomber vivant au pouvoir des Chrétiens.
                Mais tant de valeur sera impuissante. L'armée s'est mise en marche de nouveau, et vingt jours après celui où elle a vu pour la première fois la terre d'Afrique, elle domine enfin les crêtes du mont Bouzaréah sur les pentes duquel Alger est bâti.

                Elle est sous ses yeux, cette ville fameuse où tant de captifs encore chargés de fer n'attendent leur salut que de sa victoire. Le voilà ce port où les pirates trouvaient leur refuge et où ils se partageaient les dépouilles sanglantes du monde chrétien; dans la rade la flotte française qui appuie nos troupes par sa présence; au loin, du côté du soleil qui se lève, les riches plaines de la Mitidja sur toutes les collines, des maisons sans nombre avec leurs jardins d'orangers et leurs terrasses orientales, et sur les chemins qui bordent la mer, la population qui s'enfuit épouvantée !
                Les acclamations de l'armée saluent ce grand spectacle qui lui promet enfin sa proie.
                Mais entre l'armée et la ville, vers le milieu de la montagne dominé par nos soldats, commandant Alger, se trouve un dernier obstacle un fort dont le nom rappelle, comme pour augmenter la fierté légitime de notre triomphe, la défaite de Charles Quint.

                Ses canons tirent sur nos troupes. Notre artillerie les réduit au silence. Bientôt ses murailles sont battues en brèche. Elles vont céder sous nos coups. Déjà nos soldats se préparent à l'assaut, lorsqu'une scène affreuse et sublime vient les frapper d'horreur et d'admiration. La garnison qui défend la forteresse sort en bon ordre, par une poterne, en emportant ses blessés. On voit un nègre rester seul, impassible sur les murs ébranlés, au milieu des boulets qui pleuvent de toutes parts. Il disparaît enfin et mettant le feu au magasin des poudres s'ensevelit sous les ruines qui vomissent au loin, comme un volcan, des flammes et des débris. Ce noir représentant des races africaines semblait renverser devant le monde chrétien, les dernières barrières de la barbarie.
                Toute lutte est impossible désormais. Le Dey tremblant au fond de sa casbah, doit subir la loi du vainqueur. Bientôt Bourmont se présente en maître, dans ce palais où la France avait reçu l'outrage que nos mains venaient de venger.

                Alger est à nous ou pour mieux dire il est au monde civilisé.
                Ils la nommaient "la bien gardée." Mais ils auraient pu apprendre de nos Saints-Livres qu'il n'y a de bien gardées que les villes gardées par Dieu (2). Au jour qu'il a marqué pour leur ruine, rien ne les défend plus ni les tempêtes ne dispersent les flottes ennemies, ni les flots ne protègent les côtes inhospitalières, ni les remparts ne sont un sûr asile. Leurs pensées se confondent et l'antique courage qui veillait sur elles n'est plus que folie. Et Dieu s'est enfin lassé de tant de violences et de tant de crimes. Il a eu pitié d'une terre baignée de tant de sang et de tant de larmes, consacrée par la foi de tant de martyrs ! Les voilà dans sa main ces fiers pirates Ils avaient dit dans leur orgueil superbe, que nous importe la France La France vient de leur répondre et de leur montrer son pouvoir!
                (2) Nisi Dominus custodierit civitatem frustra vigilat qui custodit cam. Ps. cxxvi, 1.

                Mais, en nous donnant le triomphe, il semble que Dieu s'en montre jaloux.
                Le drapeau de la monarchie qui a guidé nos soldats, tombe au lendemain du jour où il était arboré comme un signe de victoire sur les murs de la casbah; le vieux roi qui a préparé la conquête prend le chemin de l'exil; Bourmont quitte Alger en fugitif, n'emportant avec lui, sur une barque étrangère, que le cœur de son fils.

                Et tandis que les noms des princes, des capitaines qui ont pris part à nos guerres africaines sont restés attachés à nos villes, à nos villages, tandis que nous leur avons élevé des colonnes et des statues, aucun hameau ne garde les noms de ces premiers vainqueurs. Rien d'humain n'a survécu à leur victoire, et le seul monument qui .soit resté d'elle, est la croix qu'ils ont replantée sur ces rivages comme un signe de pardon et de vie.

                Qu'on cherche à cet oubli des raisons humaines, j'en pourrais trouver moi-même et je sais que la Providence n'a pas toujours besoin de miracles pour se faire entendre de nous. Mais je n'en vois pas moins que le seul signe qui soit resté de la conquête est un signe divin et que Dieu n'a voulu, durant un demi-siècle, laisser inscrire, à côté du sien, le nom d'aucun autre vainqueur. C'est moi, semble-t-il Nous dire, c'est moi qui par les mains de ces vaillants hommes ai ouvert ce sépulcre où un monde était enseveli !

                Le sentiment chrétien de l'honneur. a\ait présidé, dans l'expédition d'Alger, aux résolutions de la France. Devant les menaces d'une nation rivale, elle avait hautement affirmé ce qu'elle regardait comme un droit et comme un devoir venger l'injure nationale et, les humiliations du monde chrétien, conquérir la Régence, et travailler à nous l'assimiler un jour, par son libre retour à la civilisation et à l'ancienne foi ( Rapport du duc de Clermont-Tonnerre au roi Charles X)

                Quelle page eût ajoutée à nos annales l'histoire de notre conquête, si rien n'eût arrêté ces premiers élans si nous avions pu, sans obstacle, poursuivre les succès, qui, en vingt jours, avaient mis entre les mains de. Bourmont, Bône, Oran, et même la lointaine province de Titteri par l'investiture de leurs chefs; si, sans laisser aux Arabes le temps de douter de notre puissance, nous avions remplacé le gouvernement des Turcs par le nôtre; si, en assurant aux populations indigènes l'ordre, la paix, la prospérité, nous les avions gagnées peu à peu par nos bienfaits, par "les exemples d'un peuple chrétien! C'eût été une croisade, la dernière, la plus noble, la plus digne de la France et des inspirations de l'Évangile.

                En un jour tout change d'aspect. La France ébranlée tremble sous les coups de la révolution, de nouveau déchaînée. Au-dedans, l'esprit d'impiété se réveille et repousse toute pensée religieuse, pendant que notre faiblesse encourage les exigences jalouses du dehors. Il semble qu'une entreprise si glorieusement commencée doive avorter dans l'impuissance et dans la honte, et que Dieu en va retirer sa main.

                Mais c'est le secret de la Providence de se servir des obstacles pour montrer, comme en se jouant, la faiblesse de nos pensées. De même qu'aux jours de l'hiver, nous voyons, sur nos côtes, les vaisseaux battus par les tempêtes qui menacent de les engloutir; mais le nautonier dispose ses voiles, tient le gouvernail d'une main ferme, et c'est la tempête qui l'amène plus promptement dans le port; de même la Providence se sert de nos déchaînements et de nos ardeurs pour conduire nos destinées. Nous la verrons, après des résistances de dix années, réaliser à la fin notre conquête par ceux mêmes qui l'auront le plus longtemps combattue.
                Ces incertitudes ne retarderont pas seulement la conquête; elles la rendront plus sanglante, en permettant à de formidables obstacles de se dresser contre nous.

                Rien n'a remplacé, dans la Régence, l'administration cruelle, mais forte des Turcs, et les indigènes, délivrés du joug, sont en proie à la plus affreuse anarchie. Se ruant partout sur leurs anciens maîtres et sur leurs fils, les Coulouglis, les Arabes et les Kabyles. ensanglantent, par leurs massacres, Médéa, Miliana, Mascara, Tlemcen, toutes les villes de l'intérieur. Les tribus se livrent à leurs goûts de guerre et de pillage, tantôt luttant entre elles pour venger d'anciennes injures, tantôt s'alliant pour se jeter sur nos postes, pour piller nos transports, n'écoutant encore, dans ce premier délire de l'indépendance, que les instincts de sang, de brigandage, de courses guerrières, qui animaient leurs chefs de hasard.
                Nous pouvions profiter de ces désordres, et tenir divisées des races alors irréconciliables, Maures des villes qui cherchent à dominer par la ruse, Arabes qui courent les plaines, Kabyles qui gardent sur leurs montagnes leur antique indépendance. Mais, qu'attendre des yeux inattentifs, sans cesse tournés vers la France, pour y surprendre le signal du retour? Le nom musulman couvre également, pour notre ignorance, le vainqueur, dont nous avons rompu le joug séculaire, et le vaincu, dont nous avons brisé les fers.

                Et cependant, sur les sommets de l'Atlas, formant, avec les restes des Libyens et des Berbères, la masse des populations indigènes, se trouvent les descendants des chrétiens ( Nettement, Histoire de la conquête. de l'Algérie, p. 7.). C'est le Liban de l'Afrique, mais un Liban que l'Europe a délaissé, et où peu à peu le christianisme a disparu, après la destruction de son sacerdoce. Laborieux, sobres, pleins de courage, exempts de fanatisme pour une religion imposée par de longues violences et quatorze fois reniée par eux, séparés des Arabes par le ressentiment de l'opprimé contre l'oppresseur, n'ayant pas subi la loi des Turcs, conservant encore, dans quelques tribus, le signe sacré de la croix, et, dans toutes, le code, ou, comme ils disent, le canon de leurs lois civiles, les Kabyles semblaient destinés à notre alliance. C'est un de leurs chefs qui, dans les premiers temps, disait ces paroles remarquables, rapportées par Bedeau "
                Nos ancêtres ont connu les chrétiens, plusieurs étaient fils des chrétiens, et nous sommes plus rapprochés des Français que des Arabes "
                Voici comment le général Daumas, celui de tous les généraux algériens qui a le mieux connu la société indigène parle des Kabyles, dans son livre Mœurs et coutumes de l'Algérie. (4e édit.) p. 255 " Si l'on approfondit spécialement les mystères de la société kabyle, plus on creuse dans ce vieux tronc, plus sous l'écorce musulmane, on trouve de sève chrétienne. On reconnaît alors que le peuple kabyle, en partie autochtone, en partie germain d'origine, autrefois chrétien tout entier, ne s'est pas complètement transfiguré dans la religion nouvelle. Sous le coup du cimeterre, il a accepté le Coran, mais il ne l'a point embrassé il s'est revêtu du dogme ainsi que d'un burnous, mais il a gardé, par-dessous, sa forme sociale antérieure, et ce n'est pas uniquement dans les tatouages de sa figure qu'il étale devant nous/à à son insu, le symbole de la croix."

                L'Europe voit, en ce moment, une nation infortunée, déchirée par les serres de l'aigle moscovite. Selon toute apparence humaine, elle perdra son nom, sa langue, sa foi, tout ce qui constitue la vie d'un peuple. Mais si, après de longs siècles de martyre et de mort, il était donné à la Pologne de renaître à l'indépendance, si une nation sœur, ayant la même foi, les mêmes ardeurs généreuses, revenait lui dire "Lève-toi, et reprends le nom et la gloire de tes pères; " est-ce que les fils des martyrs qui ont inondé le sol de leur patrie d'un sang magnanime ne tressailleraient pas à cet appel? Est-ce que, réveillés peu à peu de la servitude, ils ne salueraient pas leurs libérateurs par des cris d'allégresse?

                Et nous, je le dis avec tristesse, nous avons trouvé devant nous, sans le reconnaître, une autre Pologne, les restes de ce peuple qui eut pour pasteurs et pour maîtres .les Cyprien, les Optat, les Augustin, les Fulgence. Nous devions, dès le premier jour, jeter à ses montagnes et à ses vallées le cri de la délivrance. Nous devions lui dire Afrique chrétienne, sors du tombeau. Réunis tes débris épars sur tes monts et dans tes déserts. Reprends ta place au soleil des nations, tes sœurs dans la civilisation et dans la foi; que tes enfants, apprenant de nouveau ton histoire, sachent que nous ne venons à eux que pour leur rendre la lumière, la grandeur, l'honneur du passé

                Cette pensée ne nous est pas venue, tant étaient grandes notre ignorance et notre insouciance du spectacle qui frappait nos regards tant était puissante en quelques-uns la haine hypocrite qui poursuivait la foi jusque dans ses plus anciens souvenirs, haine infernale qui sacrifiait, qui sacrifierait encore à son impiété, pour des siècles peut-être, les intérêts de la patrie et le sang des chrétiens
                Lorsque nous reconnaîtrons plus tard notre erreur, avec les progrès de la conquête, avec la science plus exacte de l'histoire, avec le réveil de la foi il ne sera plus temps. Nos coups auront porté sur l'Arabe et sur le Kabyle, et leur sang également versé par nos mains les auront unis dans une haine commune contre leur commun agresseur.

                Après avoir tracé à grands traits l'histoire de la conquête de l'Algérie, par l'armée française, et rendu à la valeur de nos généraux, particulièrement à Lamoricière un éclatant hommage, Mgr Lavigerie termine ainsi son discours :
                "Telle est l'œuvre de la conquête. Jamais peuple ne dépensa plus généreusement son sang et ses trésors; jamais armée n'acquit plus de gloire. Et néanmoins,. l'œuvre répondrait-elle à de si nobles efforts, si elle devait s'arrêter aux résultats qui sont sous nos yeux?

                Des travaux immenses et magnifiques, des villes, des monuments, des routes, de vastes entreprises; mais au fond, un pays, qui a coûté à la France plus d'or qu'il n'en aurait fallu, il y a quatre années, pour payer sa rançon, et qui ne peut jusqu'ici se suffire à lui-même; une colonie, qui compte moins d'habitants Français qu'elle n'a coûté d'hommes à la France; des terres, qui ont donné moins de richesses, malgré leur admirable fécondité, que celles que l'on eût obtenues des terres de la Mère-Patrie, avec les mêmes efforts.

                Est-ce donc pour cela que nous avons vu la Providence tout conduire comme par sa main? Est-ce là ce qu'elle voulait, lorsqu'elle précipitait ces barbares, lorsqu'elle contraignait la France à la suivre, malgré tant de résistances, lorsqu'elle donnait tant d'invincible ardeur à ses soldats, tant d'aveuglement à ses ennemis, et à la fin, tant de sagesse à ses capitaines, et qu'elle forçait le plus grand de tous à confesser publiquement qu'il ne se rendait qu'à sa voix? Et ne l'avons-nous pas vue, nous-mêmes, se servir des moyens qu'elle seule emploie, parce que seule elle les tient dans sa main puissante? Il y a quelques années, lorsque, par un triste retour, nous voyions, au lieu de la France nouvelle que notre armée était venue conquérir, se dresser devant nous je ne sais quel royaume barbare, par quels tonnerres ne fûmes-nous pas réveillés, et quelles sinistres lueurs ne frappèrent pas nos regards?

                Les fléaux des anciens jours, les mêmes qui domptaient, entre les mains de Dieu, l'aveuglement des Pharaons, les sauterelles, la famine, la peste, ouvrirent les yeux aux plus incrédules, et forcèrent d'abaisser toutes les barrières; et, hier encore, l'insurrection formidable qui semblait devoir nous perdre, n'est-elle pas devenue, entre les mains d'un homme (M. l'amiral comte de Gueydon.) dont vous n'oublierez ni l'énergie, ni l'intégrité, ni la haute intelligence, et dans celles d'un successeur (M. le général Chanzy.) illustre à tant de titres, et dont la modestie a seule le pouvoir de fermer aujourd'hui mes lèvres, un moyen de reprendre l'œuvre interrompue et de guérir tant de blessures?
                Non, l'éternelle Sagesse, qui proportionne toujours les moyens à la fin qu'elle veut obtenir, ne se proposait pas, par de si grands coups, des effets jusqu'à présent si précaires. D'ailleurs, en empruntant la main de la France, Dieu ne voulait-il pas faire entendre au monde qu'il avait de plus grands desseins?

                Ce n'est pas ta mission, ô France chrétienne, d'arracher, pour prix de ton, sang et de ta gloire, les trésors des peuples vaincus; ce n'est pas ta mission de les chasser devant toi pour te faire place, en les livrant à la mort ton génie, est de communiquer, au prix du sacrifice, tes sentiments et tes lumières. C'est là ce que tu as fait pendant tant de siècles pour la vérité; c'est là ce que tu as fait même pour tes erreurs; c'est là ce que tu as fait encore par tes écrits, par ta parole, par ta langue restée celle du monde civilisé.
                C'est là ce que tu es venue faire dans ce monde barbare. Tu es venue, non pas seulement y chercher de l'or, mais y porter la justice non pas seulement y récolter de plus riches moissons, mais y semer la vérité; non pas y fonder ton pouvoir sur la servitude et la destruction des vaincus, mais y former un peuple libre et chrétien. Et si tu doutais de ma parole, parce qu'elle pourrait te paraître inspirée par mon ministère, quoique je sois le successeur de ces Évêques qui ont formé ton âme, et que je connaisse ton âme aussi bien que toi-même, j'emprunterais celle d'un soldat, de celui qui a connu également tes ardeurs nouvelles et ton ancien cœur, de Lamoricière, qui, parlant de ta conquête et des desseins de Dieu sur elle, a renfermé en ces simples mots tout ce que je viens de dire : LA PROVIDENCE, QUI NOUS DESTINE A CIVILISER L'AFRIQUE, NOUS A DONNÉ LA VICTOIRE (KELLER. Lamoricière, sa vie, etc.,).

                Voilà ta mission. Elle est belle, elle est digne de toi, et tu ne l'as payée trop cher ni par tes trésors, ni par le sang dé tes fils, ni par votre gloire, ô soldats de l'Armée d'Afrique Et maintenant laisse dire ceux qui s'étonnent Le soleil, lorsqu'il s'élance dans sa course à travers les cieux, s'arrête-t-il, en répandant sa lumière, aux plaintes de ceux qu'inquiètent ses ardeurs? Avance par la pratique de l'humanité et de la justice, par l'exemple des nobles vertus qui sont l'apanage des nations chrétiennes, par la charité envers les faibles, par les inspirations de l'Évangile; car si tu as promis de respecter, dans ce peuple, le sanctuaire de la conscience, tu n'avais pas le droit d'humilier, comme tu l'as fait durant tant d'années, la croix devant le croissant, en paraissant oublier ton culte, et le renier même quelquefois, par les insultes dont tu le laissais couvrir; tu n'avais pas le droit d'enchaîner la vérité et d'empêcher nos lèvres de la répandre. Et ne crains pas que pour ressusciter la foi sur ces rivages, je demande les armes sanglantes par lesquelles le Coran l'a étouffée, il y a de longs siècles. Je sais que si, pour la liberté de son ministère un Évêque doit être prêt à Donner sa tête, il doit garder en tout les règles de la sagesse et de la douceur. Je sais que ma poitrine devrait, s'il le fallait, être la première à se placer devant les vaincus, pour protéger, contre d'injustes violences, leurs âmes autant que leurs corps.

                Mais ce n'est pas assez d'un peuple. Montez en esprit, avec moi, sur ces cimes inaccessibles qui bornent notre horizon, et jetez vos regards sur l'immensité qui nous entoure. Auprès de nous, les débris d'une nation autrefois chrétienne, mêlés ceux des invasions barbares. Au-delà, sur la surface de ce continent immense, la plus affreuse barbarie, l'ignorance, le sang, l'anthropophagie, l'universel esclavage. Déjà le monde chrétien, l'Espagne, le Portugal, l'Angleterre, la Hollande, les missionnaires de tous les peuples, assiègent ses côtes de toutes parts. Des pionniers intrépides ont pénétré dans ses profondeurs inconnues, et l'univers étonné se passionne pour leur courage, comme il se passionne pour les conquérants. Ces efforts lointains seront longtemps stériles. Les pacifiques conquérants de l'Afrique doivent être à portée de recevoir, d'une main, de l'Europe chrétienne, ce qu'ils donneront, de l'autre, à tant de races déchues. C'est vous qui ouvrirez les portes de ce monde immense, et les clés de ce sépulcre sont ici dans vos mains. Déjà il est ouvert par votre conquête. Un jour, si vous êtes, par vos vertus, dignes d'une mission si belle, la vie y renaîtra avec la lumière, et tous ces peuples, aujourd'hui perdus dans la mort, reconnaîtront qu'ils vous doivent leur existence; et en apprenant votre histoire, votre gloire, votre valeur, ils seront fers de leurs ancêtres.

                Pour moi, mes yeux ne verront pas ce jour; mais je l'attendrai, du moins, avec une ferme confiance, qui me suivra jusque dans la mort. Là, si Dieu fait miséricorde à mon âme, mes prières chercheront encore à en hâter la venue. Prosterné devant le trône de l'Agneau, dont le sang a racheté tous les peuples du monde, j'unirai ma voix à celle des Martyrs, des Docteurs, des Pontifes de l'ancienne Afrique, qui implorent, depuis tant de siècles, la résurrection de leur patrie. Lorsque enfin ces vœux seront exaucés, ma cendre refroidie tressaillira au fond de sa tombe, et, déjà perdu dans les clartés éternelles, j'entendrai, avec des transports nouveaux, mêlés à l'hymne de l'action de grâces, les noms que je viens de vous redire et que je veux porter sans fin, gravés dans mon cœur, l'Église, la France, la terre Africaine l'Église, dont je suis le ministre; la France, dont je suis le fils; l'Afrique, que vous avez conquise et dont Dieu m'a fait le Pasteur "
                Ainsi-soit-il !
                                  
A SUIVRE



Á TOUS NOS ENFANTS...
Envoyé par Mme Annie Bouhier

Texte d'origine inconnue avec sa préface.

            Je fais suivre ce récit parce qu'il est beau, émouvant et criant de vérité. Mais, hélas, sans conviction, car, malheureusement, la France s'est acharnée à effacer l'œuvre magnifique accomplie en Algérie par des femmes et des hommes aussi bien musulmans, juifs que chrétiens, parmi lesquels il y avait des espagnols, des italiens, des mahonnais, des maltais, des siciliens, etc, etc ... devenus, parce qu'ils le souhaitaient, français de nationalité, d'âme et de cœur.

             Il ne restera de nous Pieds-Noirs et de l'armée française que quelques mensonges dans les livres d'histoire, des mensonges que certains ressassent à l'envi et qui ne font qu'accentuer la haine que la plupart des nouvelles générations d'origine maghrébine, entretient dans le seul but de se venger d'un passé qu'ils n'ont même pas connu.

             Mais enfin, puisse l'auteur de ce récit, rétablir une vérité que certains d'entre nous ont, plus ou moins, enseignée à nos enfants et petits-enfants emportés dans le tourbillon de la vie et leur faire prendre, enfin, conscience de ce que fut notre belle Algérie !!!

  LETTRE OUVERTE Á TOUS NOS ENFANTS
ET PETITS ENFANTS PIEDS-NOIRS  

             Quelques jours avant ou quelques jours après l'indépendance de l'Algérie, anciens Départements Français, vos parents ont du se décider à quitter cette terre pour rejoindre dans leur grande majorité la métropole, pour rester Français et échapper bien légitimement à de grands dangers.

             Souvenez-vous de l'expression "la valise ou le cercueil."

             Pour vous sauver du cercueil, Chers Enfants, nous avons choisi la valise et par avion ou navire nous avons rejoint cette encore grande inconnue pour certains d'entre nous, que nous portions dans nos cœurs "LA FRANCE". Inconnue territorialement s'entend, à part pour ceux qui y étaient venus y faire leur service militaire, pour y combattre l'ennemi en 14/18, et pour la libérer au cours de la deuxième guerre mondiale de 1939/1945, guerres dans lesquelles vos grands-pères et pères ont connu l'honneur de ne pas avoir déposé leurs armes et de les avoir portées haut et fiers, comme des lions courageux jusqu'à la victoire de 1945, et pour d'autres qui avaient eu le plaisir d'y venir en vacances ou en voyages d'affaires. Cette France nous la connaissions à travers les récits de nos grands-parents et parents et par nos études scolaires et universitaires et nous portions son histoire dans nos pensées comme un symbole de "LIBERTE, EGALITE, FRATERNITE" sous l'étendard de la République Française.

             Vous êtes arrivés enfants en France où vous y êtes nés, et parfois vous vous interrogez sur cette expression Pieds-Noirs que l'on utilise pour nous qualifier et que nous utilisons aussi entre nous. Vos parents ont dû garder une petite pointe de cet accent enjoué et les expressions qui nous caractérisent. Une certaine pudeur nous empêche parfois, pour vous éviter le passage de la guerre d'Algérie et ses souvenirs douloureux, de vous enseigner exactement qui nous sommes vraiment.

             D'abord des Français de souches et des Français par option volontaire, de toutes origines européennes. Nos ancêtres lors de la conquête de l'Algérie arrivaient de France, d'Espagne, d'Italie, des Baléares, de Corse et d'autres pays d'Europe, pour s'établir sur ce pays dont les terres en friches s'offraient à nos travaux ...

             Pourquoi la France a-t-elle conquis l'Algérie ?.... Dans un raccourci, indiquons que par suite d'un incident diplomatique insultant à l' égard du Consul de France de la part du le Dey d'Alger,( ville qui se trouvait sous domination turque) pour relever notre honneur, mais surtout parce que les pays d'Europe en expansion étaient persuadés de devoir, au nom de l'humanité et de son bien-être économique, de porter le flambeau de leur civilisation et de leur savoir-faire, dans des pays que l'on pourrait considérer de nos jours comme des pays hyper sous-développés. Il était important aussi pour notre commerce d'assainir la méditerranée des pirates qui abordaient et pillaient quantité de navires et de nous assurer une place forte en Afrique du Nord.

             Une fois établis dans le pays, vers 183O environ, peu à peu au fil du temps nous nous sommes mariés entre Français - Italiens - Espagnols - Corses, etc…, et tous autres européens et on nous appelait bien souvent les Européens d'Algérie. Pour ces raisons de mariages entre européens, nous avons dans une même famille des blonds aux yeux bleus, des châtains roux aux yeux verts et des bruns aux yeux noirs.

             Sur nos tables familiales se présentent tous les plats d'Europe, nous sommes gourmets : paëlla, rizotto, pâtes en sauce tomate, civets, tomates - poivrons - aubergines - courgettes farcis ou finement cuisinées, petits pâtés au fromage, à la viande, ou à la soubressade, beignets salés ou sucrés, cocas et pizzas à la tomate et aux poivrons ... viandes rôties ou en sauce fines, etc... je ne peux pas tout citer, mais je n'oublierai pas notre gourmandise pour les fruits de mer et les poissons, sans oublier les délicieuses pâtisserie parfumées à la fleur d'oranger, les mounas de Pâques, les mantécaos à la cannelle, les oreillettes bien dorées, etc...Nous sommes de bons mangeurs et nous aimons aussi les fruits frais, pastèques, melons, raisins, abricots, prunes, oranges, mandarines et les confitures, sans oublier tous les fruits secs ; Enfin nous savons aussi tenir nos verres à l'apéritif avec l'anisette et la khémia, et nous apprécions les bons vins pendant le repas et les liqueurs à la fin, avant le caouah !

             Nous sommes comme on dit "des bons vivants", nous avons une bonne fourchette et savons lever notre verre dans les bonnes occasions. Ah ! j'allai oublier le couscous...... aujourd'hui servi sur les plus prestigieuses tables françaises.

             La cuisine, comme la littérature et les arts, fait partie de notre culture et c'est autour d'une bonne table que l'on fait plus ample connaissance, que les langues se délient et que finalement on s'aperçoit que patos ou Pieds-Noirs c'est du pareil au même pour ce qui est de l'appréciation des mets et des bons vins. Pour l'appréciation de nos idées politiques c'est parfois autre chose ... Mais enfin en gens bien éduqués nous sommes tolérants des deux côtés, mais nous avons le souci d'informer et de remettre poliment les pendules cérébrales et intellectuelles à l'heure quand il le faut.

             Enfants et petits-enfants de Pieds-Noirs vous appartenez à une dynastie de travailleurs, vos ancêtres en Algérie ont défrichés de leur mains des terres incultes et des marais pestilentiels ou sur des boues et eaux infestées régnaient la malaria, le paludisme et bien d'autres maladies mortelles à l'époque et dont des centaines sont morts quelques temps après leur arrivée et pendant quelques décennies ensuite, en attendant que tout le pays fût assaini.

             Puis peu à peu ces travailleurs ont planté des cultures, céréales, vignes, jardins potagers, jardins fruitiers, plantes et fleurs, des arbres venus de France et ils ont construit des maisons, des routes, des villages, des écoles, des hôpitaux, établit des commerces et des entreprises, créer des musées, des théâtres et des opéras, des lieux de cultures et de distractions. Tout cela ne s'est pas fait en un jour ... il a fallu beaucoup de sueur et d'huile de coude. Ils y avaient aussi des médecins, des pharmaciens, des ingénieurs, des hommes d'affaires et de lois, des fonctionnaires, des marins, des transporteurs, des travailleurs artisans, maçons, mécaniciens, tailleurs et spécialistes de tous les métiers qui ne ménageaient pas leurs temps pour édifier l'œuvre commune.

             Certains villages de basse Kabylie, construits par les Alsaciens et les Lorrains arrivés en Algérie vers 1870 ressemblaient comme deux gouttes d'eau à certains villages anciens que vous pouvez visiter en Alsace et en Lorraine. D'autres villages ou hameaux du début de la conquête, construits par les Espagnols et les Mahonnais au cœur de leur cultures, rappelaient l'Espagne et les Baléares. Je pense tout particulièrement au Hameau de Bou Hamédi, près du Fondouk, avec ses maisons basses aux murs blanchis à la chaux.

             Les arbres que vos ancêtres avaient plantés et acclimatés venaient de France et des pays d'Europe et peu à peu cette terre hostile, fertilisée et caressée par leurs mains travailleuses était devenue notre Belle France d'Algérie.

             Les habitants originaires du pays ont acceptés pour certains d'entre eux, de travailler avec nous, d'autre pas. Pour ces derniers, nos mœurs étaient trop occidentales et ils craignaient qu'à l'exemple des européennes leurs femmes ne s'instruisent et s'émancipent et c'est pourquoi tout en vivant en bonne entente socialement dans la vie publique de tous les jours, nous vivions de façon parallèle nos vies privées, nous dans nos coutumes et traditions et eux dans les leurs ; les différences de religions, éléments qui comptaient à l'époque, rendaient tout mariage impossible entre les deux communautés. Cela n'a pas empêché de solides amitiés de se forger. Il y a eu très peu, presque pas, de mariages mixtes Français et musulmans, sauf dans quelques rares grandes familles évoluées et tolérantes.

             Mais pour le travail et les affaires, grandes et petites, nous nous étions habitués progressivement à travailler ensemble en bonne efficacité et entente.

             Nous avons vécu là-bas pendant cinq, six générations en moyenne ; vos grands-pères et pères sont venus à deux reprises en France et en Europe faire leur service militaire et surtout faire la guerre de 14/18 et celle de 39/45 pour défendre la France (la Mère Patrie) contre ses ennemis de l'époque, et ceux qui n'y sont pas morts tués au combat sont revenu chez eux en Algérie, quelquefois avec une fiancée Française "de France" qu'ils n'ont pas manqué d'épouser.

             Nous étions citoyens à part entière et quand la France était en danger nous étions tous présents sous le même drapeau tricolore. C'est ce que l'on appelle le patriotisme et ce que j'appelle moi "l'honneur d'être un homme".

             Les valeurs militaires, celle du courage et de l'honneur ont été injustement bafouées par des politiciens de bas étages, incapables et félons : ne vous laissez pas intoxiquer par leur propagande de faux-intellectuels.

             Mais vous, que feriez-vous si votre pays et votre famille étaient attaqués par un ennemi féroce ? Laisseriez-vous égorger vos pères, mères, épouses et enfants, Laisseriez-vous envahir votre pays les bras croisés .... Je suis sûre que non. Il ne s'agit pas d'attaquer, nous sommes pacifistes, mais de savoir se défendre.

             Pour le moment ici nous sommes relativement en paix. Alors, chacun d'entre vous selon votre personnalité, vos qualités, vos goûts, vos tendances et possibilités, choisissez un but ; profitez de votre temps d'enfance, d'adolescence et de jeune adulte pour vous instruire, apprendre un métier ou un art, sans oublier de vous distraire sainement. " la fête fait aussi partie de la vie "

             Tout est utile pour votre avenir et pour le pays. Ne perdez pas votre temps précieux, évitez les excès de verbiage pseudo-intellectuels ou politiciens, les polémiques oiseuses, n'entrez pas dans de vaines querelles partisanes, utiliser vos forces et votre intelligence pour vous livrer à des actions concrètes, constructives, utiles pour vous-mêmes, pour votre entourage et l'environnement. Il vous faut comme l'on dit "se situer dans le paysage" Vous faites partie d'un ensemble qui demain formera l'Europe nouvelle. Notre Belle Algérie de France par ses divers composant en était le prélude, nous avons déjà tous travaillé ensemble... Vous avez votre mot à dire, qu'il soit de vérité et de justice ; vous êtes en France et dans tous les pays d'Europe légitimement chez vous, par descendances, coutumes et traditions. Ne vous laissez pas marchez sur vos pieds-noirs, soyez fiers de vos ancêtres proches et lointains.

             Nous les vieux Pieds-Noirs, de l'ombre de notre soir, nous vous tendons le flambeau. Avec des gestes et des mots tout simples qui peuvent vous paraître dépassés dans notre époque moderne, mais les modes passent et l'esprit demeure. Nous sommes la génération "mémoire-relais", et avant de partir vers notre nuit, nous vous souhaitons : Bonne vie et longue route enfants et petits-enfants Pieds-Noirs.

             Á vous la charge, maintenant, de transmettre cette précieuse mémoire

Inconnu             


NOËL
ECHO D'ORANIE - N°260

               C'était à Bethléem, il y a deux mille ans,
               Par une nuit très claire où brillaient les étoiles,
               Dans le ciel du désert, calme et impressionnant.
               Joseph le charpentier et Marie, sous son voile,
               Après avoir cherché vainement un logis,
               Dans une pauvre crèche, entrèrent pour la nuit.
               Il y avait le bœuf, la brebis, son agneau,
               Et l'âne de Marie compléta le troupeau.
               C'est sur un lit de paille que naquit l'Enfant-Dieu.
               Joseph dit: c'est Jésus, Marie lui mit un lange.

               De partout, en Judée, arrivaient les hébreux,
               Guidés par une étoile, ou par la voix d'un Ange,
               Portant quelques offrandes et rameaux d'olivier.
               A genoux, sur la paille, ils venaient adorer
               Cet enfant qui devait nous sauver du pêché,
               Souffrir parmi les hommes et nous donner sa vie
               Pour que chacun de nous, croyant ou bien athée,
               Survive après sa mort au sein du Paradis.

               Mais le temps a passé, surtout sur nos mémoires,
               Nous avons quelque peu transformé cette histoire,
               Remplaçant les palmiers par des sapins dorés
               Sur lesquels de la neige tombe à flocons serrés,
               Effaçant la beauté des sables du désert.
               Mais, pas la grande Etoile, éclairant l'Univers,
               Cette étoile qui luit, au fond de notre cœur
               Pour cet Enfant-Jésus qui fait notre bonheur
               Chaque année, à Noël pour fêter sa naissance,
               Et faire naître en notre âme la fleur de l'espérance.
              
C. de Vito                    


Récompenses à l'E.G.A.
Journaux envoyés par M. Marc Donato

Au cours d'une grande manifestation
des récompenses ont été attribuées

aux plus anciens employés
Extrait de la Dépêche de Constantine du vendredi 4 janvier 1956.

               Chaque année à pareille époque une belle fête réunit dans une commune allégresse dirigeante et employés d'E.G.A. non seulement pour faire le bilan des mois écoulés mais encore pour évoquer le programme d'action à entreprendre. Au cours de cette réjouissance les plus méritants recevaient les distinctions que leur valaient leurs longs et loyaux services.
               Cette année la manifestation a eu lieu hier matin au restaurant Majestic. Mais la joie n'était pas au rendez-vous. Parmi la très nombreuse assistance qui se pressait dans la vaste salle personne n'oubliait, en effet, qu'à l'usine et qu'à la Centrale les drapeaux étaient en berne. Et le personnel tout entier partageait l'immense douleur d'une famille qui pleurait en ce jour un être cher le caporal réserviste Gilbert Méloni, employé d'E.G.A. lâchement assassiné au domaine Chaudon.
               La fin tragique de celui qui fut un des meilleurs collaborateurs d'E.G.A. à Bône excluait hier toutes réjouissances. La manifestation qui était organisée à 8 h. 30 n'en a été que plus imposante. Elle a permis aux grands patrons de rendre un solennel hommage à la mémoire du si regretté disparu.
               Le pieux devoir accompli, les personnalités les plus éminentes ont félicité le personnel de Bône pour le courage, le sang-froid et le dévouement dont il a fait preuve aux heures les plus difficiles et au cours des missions les plus périlleuses.
               Enfin, les plus anciens employés ont reçu des distinctions dont ils peuvent être légitimement fiers.
               Répondant à l'invitation des Bônois. M. Weckel, directeur général en Algérie avait bien voulu venir présider cette cérémonie. M. Weckel avait auprès de lui MM. Dou, administrateur des Services Civils, représentant M. le Préfet de Bône ; Breton, directeur régional d'E.G.A.; Dugast, chef de groupe de la production ; Bouat, directeur de la Centrale Bône II ; Pierre Paul, ingénieur en chef ; Albert Guisti, chef de service ; Domergue, ingénieur d'exploitation ; Malvardi, Lahore, ingénieurs d'exploitation de la Centrale ; Bouigas, ingénieur des travaux et d'autres encore dont les noms nous échappent.

Les allocutions
               Avant la remise des récompenses plusieurs allocutions furent prononces. M. Breton, directeur régional prit le premier la parole et excusa M. le Préfet Ellia qui, absent de Bône, n'avait pu assister à la réunion.
               L'orateur salua ensuite M. Weckel et dit combien les Bônois étaient heureux et fiers d'avoir le Directeur général en ce jour.
               La pensée de M. Breton alla ensuite vers Gilbert Méloni, dernière victime des tueurs terroristes dont e souvenir sera fidèlement conservé à E.G.A.
               - Méloni, poursuivit le Directeur a connu la mort des braves. II est tombé pour la France. Mais c'est pour la France aussi, pour que se poursuive l'œuvre entreprise au prix de tant de sacrifices que nos équipes travaillent chaque jour bien souvent loin de Bône dans des conditions pénibles et dangereuses. Tous ces hommes qui acceptent des risques certains méritent notre gratitude ".
               M. Breton parla enfin du rendement d'E.G.A., rendement qui s'est manifesté en 1955 dans tous les domaines et espéra que l'année 1956 entraînera avec une situation plus normale une prospérité plus grande encore.
               M. le Directeur général Weckel comptait, en venant à Bône participer à une joyeuse fête familiale de début d'année.
               - Hélas ajouta-t-il, la mort a frappé l'un de vous et je partage votre peine comme je m'associe au deuil de la famille Méloni si cruellement éprouvée.
               " Ce deuil ne doit pourtant pas vous décourager. Au contraire Le sacrifice du caporal Albert Méloni vous dicte aujourd'hui votre conduite.
               " Nous avons les uns et les autres une mission à accomplir et nous l'accomplirons. Nous redoublerons d'efforts pour donner toujours plus de rayonnement à notre entreprise. Et c'est la France que nous servirons en donnant l'exemple d'une féconde activité ",

              En terminant, le Directeur général Weckel annonça qu'en raison des conditions dans lesquelles s'effectuait le travail, un contingent spécial d'avancement était prévu et les primes de productivité doublées.
               M. Dou, administrateur des Services Civils, exprima les regrets de M. le Préfet de Bône de n'avoir pu venir dire personnellement le très grand intérêt qu'il porte à E.G.A. et à tout son personnel.
               Vos équipes, ajouta l'administrateur, méritent des éloges. Leur dévouement et leur courage doivent être soulignés. Je sais que bien souvent, pour effectuer certains travaux urgents, ces équipes sont parties sans attendre une escorte, dans des zones périlleuses. Tous doivent être associés dans les félicitations que j'adresse volontiers à tout le personnel d'E.G.A.
               C'est un devoir pour nous de maintenir la présence française dans ce pays. E.G.A. est un des leviers de cette noble tâche.

La remise des distinctions

               Après ces allocutions M. Weckel et M. Dou remirent avec le cérémonial traditionnel les distinctions suivantes :

Médailles d'E.G.A. (promotion 1955)
               Médailles de Vermeil. - MM. Giusti Albert ; Vidal Henri ; Grima Louis ; Rippol Vincent.
               Médailles d'Argent. - MM. Sarnelli Robert ; Bertrand Auguste ; Bussetta Noël ; Esposito Ange ; Pace François L. ; Rachedi Amar ; Rachedi Tahar ; Rolland Charles ; César Frédéric ; Baissa Amar ; Petit Jean ; Benrebia Tahar ; Buttigieg François ; Diana Joseph ; Discala Joseph ; Merdas Allaoua.
               Médailles de bronze. - MM. Sarnelli Dominique ; Fanutza Giovanni ; Magro Georges ; Mazzoni Joseph ; Pépé Auguste ; Garguillo Georges ; Menu Dominique : Rafes Lakdar ; Gourgues Armand ; Attard Charles ; Bertrand Robert : Sasaccia Dominique ; Chalouch Mbarek ; Charif Abdelkrim ; Greck Antoine ; Kellali Emberek ; Melias Joseph ; Muscat Auguste ; Spitteri Roger.

Médailles d'honneur du travail
               Médailles de vermeil. - MM- Marcecca Joseph : Sammut Salvator.
               Médailles d'argent. - Mazzoni Joseph ; Rafes Lakdar ; Gourgues Armand ; Okki Salah ; Benniou Mohamed ; Bertrand Robert ; Charif Abdelkrim ; Umile Joseph . Farris Auguste ; Farrugia Francis ; Magro Georges ; Magliuli Raymond ; Sorbara Gérard ; Kaila Ahmed ; Casacia Dominique ; Gauci Joseph ; Rosinetti Charles.
               Nous ne saurions terminer sans exprimer aux nouveaux médaillés, nos plus cordiales félicitations.
               (Extraits des journaux de Bône et de Constantine)

  Ceux qui sont loin de chez eux,
Envoyé par Mme Jocelyne MAS
               Voici un texte pour nos vieux Pieds-Noirs qu'on rencontre sur les bancs d'un square, leurs mains noueuses où les veines bleues palpitent, posées sur leurs genoux, les yeux dans le vague, revoyant leur terre, ils se racontent leur vie là-bas et des larmes coulent sur leurs joues maintenant ridées..

" Ceux qui sont loin de chez eux,                          
Ceux qu'on oublie peu à peu.              
  Ceux qui ont dans leurs yeux,
               Quelque chose qui fait mal. "

               Michel BERGER aurait-il écrit cette chanson en pensant aux Pieds-Noirs ?
               J'en doute, mais ces phrases s'appliquent bien aux exilés que nous sommes et que nous resterons jusqu'à notre mort.


               Ecoutez donc cette histoire :

               Il y a longtemps, bien longtemps quelques braves avaient une patrie. On leur avait dit : " Plus vous travaillerez et plus vous aimerez ce nouveau pays ".
               Et ils avaient travaillé dur, très dur. Presque sans outils et sans argent, ils avaient épierré à main nue, cette terre aride, cherchant l'eau, source de vie. Travaillant sans relâche, sans un seul jour de repos. Résistant aux fièvres, à la malaria, à la typhoïde, aux pillards.
               Pauvres et malades, ils chérissaient cette patrie, pour eux c'était le monde entier. Leurs ancêtres l'avaient fécondée, leurs mères l'avaient parée, leurs sœurs en avaient fait un paradis embaumé. Enfin ils vivaient tranquilles. Ce pays là était heureux, il était riche et généreux.

               Mais ce pays fut bientôt la proie de la folie des hommes.
     Les garçons robustes et intrépides succombèrent, périrent dans les combats.
     Des femmes et des enfants moururent.
     Des maisons, des villes, des villages disparurent.

               Qu'y a-t-il de plus de plus misérable qu'un malheureux chassé de son pays ?
     Chassé du pays où Dieu l'a fait naître.
     Son devoir, s'il ne peut y vivre, est de mourir au pays de ses pères.
     Mais cela aussi lui fut ravi.
     Il aime son pays plus que sa vie.
     Peut-on livrer son pays à ses ennemis tant qu'il vous reste une goutte de sang dans les veines ? non ! n'est-ce pas ?
               Maintenant, ils sont loin de chez eux, et on les oublie peu à peu.
               Mais ils ont toujours dans leurs yeux,
               Quelque chose qui fait mal, qui fait mal.

Extrait de : " De la Côte Turquoise à la Côte d'Azur "
Dessin de Mme J. Mas

Jocelyne MAS
Poète-Ecrivain - Conférencière

Site Internet : http://www.jocelynemas.com


Les premiers Colons Algériens
L'Effort Algérien N° 143 du 28 juin 1830

Les de Vialar, de Tonnac et Baudens
         
              En cette année du Centenaire, ce qu'il y a de plus intéressant à connaître, ce sont les débuts de la Colonisation à l'époque héroïque.
           Car il y eut une période héroïque que beaucoup ignorent, avant la période de la colonisation administrative; ce fut celle d'une poignée de braves qui certes n'avaient pas peur et qui savaient se passer la plupart du temps des secours de l'armée et défendre eux-mêmes leurs propriétés.

           Parmi ces hommes héroïques issus de l'ancienne noblesse de France, nous en signalerons spécialement deux. Ce sont M. le baron de Vialar d'une part, et M. de Tonnac d'autre part.

           Antoine Etienne Auguste de Vialar était né à Gaillac en l'année 1799.Sa famille appartenait à la grande noblesse du Languedoc. Son père avait épousé une des filles du fameux médecin de Louis XVI, le baron de Portal. Devenu auditeur au Conseil d'Etat, puis substitut à Mantes et Procureur du roi à Epernay, la révolution de 1830 le décida à quitter la magistrature.

           Il quitta la France voulant se diriger vers le Levant, mais en route, il s'arrêta à Alger et décida de s'y fixer. " Je vis, dit-il que le sol était fertile et l'insalubrité du climat à peu près chimérique." Ceci se passait deux années après la prise d'Alger.

            Dès son arrivée M. de Vialar fit la connaissance de M. de Tonnac qu'il ne devait plus désormais quitter et dont les opérations agricoles allaient devenir communes.

           " Je crus, nous rapporte Edouard Cat dans ses biographies algériennes, entrevoir le temps où cette belle contrée algérienne, magnifique don de la Providence, actuellement stérile, serait par la suite fécondée par le travail, et où plus de vingt départements français accroîtraient les richesses et la puissance de mon pays. "

            C'est avec cette confiance magnifique que le baron de Vialar entreprit de concert avec son ami de Tonnac la mise en culture de nombreuses terres incultes en Algérie.

           Les environs d'Alger en l'année 1833 n'étaient pas encore très sûrs. Il acheta à Tixérain, près du camp, un petit domaine d'environ 85 hectares qu'il cultiva avec de Tonnac, puis, il en acheta un second à Kouba de 180 hectares et d'autres de moindre importance dans les environs.

           Pour mettre en valeur leurs propriétés, nos deux colons firent venir du Languedoc une trentaine d'ouvriers agricoles, puis ils utilisèrent la main-d'œuvre de métayers français, mahonnais et indigènes se trouvant sur place.

            Ils produisaient surtout du fourrage pour nourrir le bétail d'abord, des céréales et des légumes pour la nourriture de leur personnel, et ils n'essayèrent les cultures coloniales qu'à simple titre d'essai.

           Un an après, jetèrent un coup d'œil au-delà du Sahel, sur cette immense plaine de la Mitidja, qui vue de loin paraissait être un marécage infect, mais qui promettait, une fois drainée et cultivée, de devenir une plaine très féconde.

           Dès 1834, de Vialar acheta avec un de ses amis, Baudens, le domaine de Baraki et avec de Tonnac celui de Khadra situé entre l'Arba et le camp de Fondouk près de l'endroit où fut créé quelques années plus tard le village de Rivet.

           C'était une propriété indigène située bien avant nos postes. Ce ne fut que le 30 juin 1834 que, pour la première fois, le Chef de bureau arabe Pélissier de Raynaud, accompagnant le baron de Vialar et de Tonnac, fit son entrée dans le marché de Boufarik où jusqu'alors aucun européen n'avait encore pénétré, et où il était très dangereux de se faire voir, attendu que ce marché n'était fréquenté que par nos pires ennemis, les Hadjoutes.

            Ils passèrent donc tous les trois au milieu des indigènes sans être l'objet d'attaques ouvertes, mais les regards des arabes étaient chargés de haine et pleins de menaces.

           Nos trois courageux colons voulurent, acheter quelque chose aux indigènes mais ces derniers ne voulurent rien leur |céder, sauf un chien.

           Voyant cette animosité et désirant faire cesser cet état de choses, le baron de Vialar donna en juillet 1834 les fonds nécessaires pour fonder deux prix : le premier de deux cent francs pour le colon qui le premier conduirait au marché de Boufarik une voiture chargée de marchandises et un autre prix de cent francs à celui qui mènerait trois fois de suite un cheval ou un mulet chargé. Mais, malgré cet encouragement ces deux prix ne furent décernés que sept mois après, en février 1835.

            Le baron de Vialar fonda ensuite la société Coloniale d'Algérie; c'est dans cette société que fut lu le 17 novembre 1834, le premier l'apport sur l'état de la culture aux environs d'Alger, et le 14 avril 1835 le second mémoire fournissant les renseignements les plus précis sur l'état des exploitations du Sahel d'Alger, et le régime des ventes de terrains les contrats des fermages avec les indigènes et la sécurité.

           Ce mémoire a été imprimé à Paris. Il se compose de 38 pages et est intitulé : Simples faits exposés à la Réunion Algérienne du 14 avril 1835 par M. le Baron de Vialar délégué des Colons.

           C'est aussi cette même année qu'il fut nommé Maire de Birmandreis.

            De son côté, son ami et collaborateur, de Tonnac, ne restait pas oisif ; il avait appris assez rapidement l'arabe, était entré en relations avec de nombreux indigènes et portait fréquemment le burnous. Il acheta la propriété de l'Aïn-Kadra, c'est-à-dire " Verdure".

           Cette propriété se trouvait située presque au pied de l'Atlas. Le Gouverneur auquel il avait demandé quelques hommes pour prendre possession de son domaine les lui ayant refusés, taxant son projet d'imprudence, il se décida à partir seul, bien armé, avec un cuisinier arabe et une forte provision de café.

            Arrivé sur sa nouvelle propriété de l'Aïn-Kadra, de Tonnac fait préparer le café, campe et attend les indigènes qui étaient cachés dans les broussailles. Les uns viennent les uns après les autres, d'abord ce sont les enfants, puis les hommes, qui s'approchent peu à peu. Alors la conversation s'engage. De Tonnac leur explique en arabe qu'il a acheté l'Haouch, mais qu'il ne veut rien changer aux usages établis, et qu'il traitera les habitants de l'endroit comme les traitait l'ancien propriétaire.

           Il les rassure, créé des associations avec eux pour la culture, puis, fait réparer un de leurs marabouts qui tombait en ruines, et enfin se fait bâtir une maison assez forte et assez grande pour y réunir tous ses voisins. Il devient ainsi une sorte de chef reconnu par les indigènes des environs, partageant avec eux les frais et les profits de l'exploitation, les traitant avec justice et bonté.

            En avril 1835, voici ce que de Tonnac écrivait au baron de Vialar son ami, son associé: " nos prairies ont été bien gardées, l'herbe y est très belle et de première qualité. J'ai donné une étrenne à deux laboureurs de l'Haouch qui avaient pris soin de les garder, et je leur ai promis une récompense double, si dans trois semaines les foins sont préservés. Je leur, ai dit que mon intention était de venir faucher, ils m'ont répondu que je pourrai le faire en toute assurance, et pourvu que j'emmenasse deux ou trois faucheurs, qu'eux-mêmes apprendraient ce travail et nous aideraient dans celle opération. Sous ce rapport, je crois qu'ils promettent plus qu'ils ne pourraient tenir, car nous savons assez quelle est leur adresse, mais cela prouve du moins leurs bonnes intentions. Je n'ai d'ailleurs eu qu'à me louer de l'accueil que j'ai reçu de tous les gens de la ferme et des dispositions dont ils sont animés à notre égard. Nous aurons plus de facilités que nous espérions pour l'établissement de notre village, l'avance des fourrages serait un immense avantage...

            " Pour moi les criailleries des journaux de Paris ne me découragent pas ; au lieu de me refroidir, elles m'animent davantage, et je te jure que quand nous serons à l'exécution, je te seconderai avec persévérance et acharnement."


           L'on voit sur le vif, d'après cette lettre, quelle était la mentalité des colons héroïques de cette époque. Ils n'achetaient pas des terres par spéculation, mais bien pour les faire valoir et avec la volonté bien arrêtée de créer des villages. Il faut remarquer aussi leur attitude loyale vis-à-vis des indigènes, hardie en même temps que pleine de générosité et de justice, ce qui arrivait à leur concilier leurs métayers indigènes et leurs ouvriers. Ainsi se faisait un rapprochement entre les vainqueurs et les vaincus.

            Malheureusement, il y avait un point noir, c'était l'Administration. Celle-ci secondait mal leurs efforts et arrivait à les contrarier.

           Elle travaillait à les détourner de leurs entreprises, leur refusait toute espèce de secours, les volait même quand elle leur achetait leurs fourrages. Il ne fallait pas compter sur cette dernière, car elle en était arrivée à refuser même des munitions aux colons qui avaient à défendre leurs vies et leurs propriétés contre les arabes pillards de la montagne.

            Il fallait que le colon se défendit lui-même ou abandonnât son bien. En voici un exemple pris parmi plusieurs. Malgré son personnel dévoué et armé, Tonnac était obligé de veiller sur ce poste avancé de la colonisation. Un jour ayant appris qu'une tribu devait venir l'attaquer, il alla avec tous ses gens, métayers et Khammés, l'attendre à une dizaine de lieues dans une gorge de la montagne.

           Dans l'escarmouche qui s'y livra, la troupe de Tonnac fit plusieurs prisonniers et enleva même deux belles juments. Comme on avait à craindre un retour offensif des arabes contre le bordj de Kadra, de Tonnac envoya demander des munitions à Alger. Le Général Négrier plus généreux que ses prédécesseurs lui délivra 500 cartouches et avec ce secours Sidi de Tonnac ainsi appelé par les indigènes, pût ne pas trop redouter une nouvelle attaque.

           Il arriva même à signer des traités avec ses voisins notamment avec le Caïd Ben Salem, le khalifat d'Abd-el-Kader.
Henri MURAT.
Ingénieur Géohydrologue.
           



INDICATEUR GÉNÉRAL
DE L'ALGÉRIE

Par VICTOR BERARD 1867
Envoyé par M. R. Levrat
 DESCRIPTION GÉOGRAPHIQUE, HISTORIQUE ET STATISTIQUE de TOUTES LES LOCALITÉS COMPRISES DANS PROVINCE de CONSTANTINE
L'arrondissement de Bône embrasse huit communes :

I BONE, II BUGEAUD, III DUVIVIER, IV DUZERVILLE, V LA CALE, VI MONDOVI, VII PENTHIÈVRE, VIII SOUK H'ARRAS.

             I. COMMUNE DE BONE (1).

             SITUATION.
             Bône est située sur la côte septentrionale de l'Afrique, par 5°50' de longitude E., et par 36°52' de latitude N., dans le fond d'une baie, à 162 kilom. N.-E. de Constantine, à 84 kilom. E. de Philippeville, à 440 kilom. E. d'Alger.

             BAIE DE BONE.
             La baie de Bône est terminée à l'E. par le cap Rosa, et à l'O. par le cap de Garde, qui n'est qu'une ramification des monts Edour'. A l'extrémité de ce dernier, on a construit un phare, dans les environs duquel se trouve une carrière de beau marbre statuaire rouge, exploitée de toute antiquité.
             (1)Nous devons une grande partie de ces renseignements à M. Jesp et à M. Dagand, imprimeur à Bône.

              Lorsque l'on a doublé le cap de Garde, on arrive à la hauteur du fort Génois, vieille construction qui, depuis le choléra de 1849, sert de lazaret provisoire.
             Au pied du fort, il y a une rade qui offre aux navires un refuge pendant le gros temps. De là, jusqu'au mouillage des Caroubiers, la côte incline du N. au S. ; elle incline à l'O., et, à partir de celte inflexion, elle change complètement d'aspect. Le paysage s'anime: Ce sont des collines couvertes d'une riche végétation, des maisons de campagnes bâties jusqu'au bord de la mer. La côte, à partir de la batterie du Lion, est défendue par des roches presque perpendiculaires; elle court droit au S.-O. A un demi-mille, elle rentre vers l'O. et forme une petite crique, où se trouve la plage du Caserin.
             La rade de Bône s'étend jusqu'à la pointe du fort Cigogne, aujourd'hui remplacé par une forte batterie qui domine à l'O. une jetée en pierres sèches, servant à prolonger le port. Cette baie, d'un excellent abri contre les vents du N., fait face au côté oriental de la ville. De ce côté s'étend une falaise élevée, baignée par la mer : c'est là qu'est le mouillage.
             A l'O., de grands jardins étendent leurs tapis aux couleurs variées. Au N., les pentes d'un monticule s'élèvent à 105 mètres par des gradins successifs, et portent au sommet, sur un large plateau la Kasba ou citadelle, qui domine la rade et la plaine de Bône.

             PLAINE DE BONE.
             La plaine de Bône, dont le sol est un mélange de sable, d'argile et de marne, et qui n'a pas moins de 100,000 hect., est bornée au N. et à l'E. par des montagnes, formant des ramifications du mont Edour'; à l'O., par les collines de Msour, et au S., par la Bou Djema. Cette rivière coule lentement du N.-E., au S.-E., et vient se jeter dans la mer, à peu de distance de Bône. Un autre cours d'eau, le Ruisseau d'Or, ramassant dans son parcours tous les petits ruisseaux, vient alimenter la Bou Djema qui, grossie pendant l'hiver par les pluies torrentielles, et quelquefois aussi par le reflux de la mer, déborde dans la plaine, et laisse, en se retirant, de grandes flaques d'eau croupissantes, dont les émanations morbides ont souvent été la cause de ces épidémies connues sous le nom de fièvres paludéennes. De là cette réputation d'insalubrité que la ville de Bône a conservé si longtemps. Mais, grâce à la sollicitude de l'administration supérieure, le danger n'existe plus. Des travaux sérieux d'assainissement, se résumant dans un vaste système de canalisation, ont été exécutés depuis quelques années, et Bône a repris son aspect riant à la faveur de la salubrité.
             Un canal de ceinture, tracé du N. au S. au pied du mont Edour', réunit toutes les eaux qui en découlent, et joint l'oued El-Farcha qui formait autrefois un marais, au Ruisseau d'Or, un peu avant qu'il ne se jette dans la Bou Djema. Un large canal remplacé également le Ruisseau d'Or, dont les contours marécageux étaient une cause permanente de maladies.

             Un autre canal de dessèchement part de l'angle N.-O. de la ville, parcourt toute la partie marécageuse qui s'étend de l'ancien parc aux fourrages à la colonne Randon, et va aboutir à la Bou Djema, au S. Enfin, un dernier canal de dérivation a mis cette rivière en communication avec la Sebouse. On a construit aussi des exutoires à vannes, destinés à recevoir les eaux de ces canaux pour les jeter à la mer, et empêcher la mer d'entrer dans ces mêmes canaux, dans les moments où elle s'élève au-dessus de leur niveau.
             C'est par ces moyens qu'on a circonscrit, loin de la place, le foyer d'infection, et fait disparaître totalement les fièvres endémiques.
             La plage qui borde la ville, tourne au S. après l'avoir dépassée, et correspond, dans cet endroit, à une vallée dont le sol bas paraît entièrement formé d'alluvions.
             C'est dans celte petite plaine que se jette la Sebouse, rivière assez large et assez profonde pour que les grosses embarcations puissent la remonter jusqu'à une grande distance. Les ensablements sont arrêtés, de sorte que les navires peuvent accoster par tous les temps.
             De l'embouchure de la Sebouse au cap Rosa, la côte est bordée de dunes. Au-delà sont de vastes plaines habitées par des Arabes, vivant des produits de la terre et de leurs troupeaux.

             NOTE HISTORIQUE.
             A environ 2 kilom. au S.-O. de la ville, entre la Sebouse et la Bou Djema, sur une colline couverte d'oliviers et de jujubiers, on trouve quelques vestiges de constructions romaines. Des décombres, -les arches éparses d'un aqueduc, qui amenait de l'eau des monts Edour' dans de vastes et gigantesques citernes dont les murs sont encore debout, les traces d'un quai sur la rive gauche de la Sebouse,-voila tout ce qui reste d'une grande cité ; c'est là qu'était Hippone.
             Hippone fut fondée par les Carthaginois, sous le nom d'Ubbo.
             Elle était groupée au S.-E. de Bône, sur une étendue de 60 hectares, au pied de deux mamelons désignés par les Indigènes, sous le nom, l'un de Bounah, l'autre de Gharf el-Antran. Des fouilles faites en cet endroit, à diverses époques, ont amené la découverte de médailles, de mosaïques, de fragments de monuments funéraires et de débris humains. En s'emparant de cette ville, les Romains changèrent son nom en celui Hippo-Regius.
             L'an de Rome 707, Sittius, lieutenant de César, était dans le port que formait la Sebouse au pied de la ville, lorsque Scipion. Fugitif et battu par la tempête, vint pour y relâcher avec sa flotte qui fut détruite.
             La principale illustration d'Hippone est due à Saint Augustin, né à Tagaste, à 99 kilom. Converti depuis quatre ans, Augustin fut ordonné prêtre à Hippone, en 390, à l'âge de 36 ans, par Valérius qui le prit pour coadjuteur en 395. L'année suivante, l'évêque d'Hippone étant mort, Augustin lui succéda. Ses confessions datent de 397; c'est de 413 à 426 qu'il a écrit sa Cité de Dieu. En 429, Hippone fut assiégée par les Vandales, et le 28 août de la même année mourut saint Augustin, après quarante ans de séjour dans cette ville, qui fut prise en décembre 430. Les Vandales y détruisirent tout, hors l'évêché et la bibliothèque de saint Augustin.
             Bélisaire reprit Hippone en 534, et les Arabes s'en étant rendus maîtres en 697, sous le troisième calife Othman, la détruisirent pour toujours, et la transportèrent à 2 kilom. au N.-E. où elle reçut le nom de Annâba, à cause de la grande abondance de jujubiers qui croissent aux environs.
             Les rois de Tunis oui étendirent leur puissance sur ce point, y firent bâtir la Kasba en l'an 1300. Les Génois faisaient la pêche du corail sur la côte ; pour se défendre, ils construisirent près du cap de Garde, le fort qui porte leur nom. Les Catalans leur succédèrent en 1439, et les Barcelonais en 1446. En 1535 Charles-Quint, maître de Tunis, envoya André Doria, avec 30 galères et 2,000 hommes, à la poursuite de Barberousse, qu'il venait de chasser de cette ville, et qui s'était réfugié à Bône ; mais l'amiral ne l'y trouva plus. Les troupes espagnoles évacuèrent la position, et les Tunisiens voulurent en vain s'y maintenir à leur place. Les Turcs en devinrent les maîtres.
             Le 2 août 1830, l'amiral Rosamel débarqua le général Damrémont, qui entra sans combat dans la ville qui comptait a peine 1,500 habitants et venait de refuser hautement d'être défendue par le lieutenant d'Ahmed-Bey. Le 4 août, les tribus attaquèrent; le 6, le général Damrémont les chassa d'Hippone, où elles avaient pris position. Les journées des 7, 10 et 11, furent marquées par de nouveaux combats. Enfin, le 18 août arriva l'ordre d'Alger d'évacuer ce point. Le 13 septembre 1831, le commandant Houder et 125 zouaves, sur la demande des habitants, prirent de nouveau possession de la Kasba, d'où les intrigues du perfide Ibrahim, ex-bey de Constantine, parvinrent à nous évincer. Le 5 mars 1832, Ben Aïssa, lieutenant d'Ahmed, se présenta devant les murs qui lui furent ouverts et qu'il remplit de carnage et de ruines. Les Français appelés de nouveau, arrivèrent, et les deux capitaines d'Armandy et Jusuf s'étant introduits avec 130 marins dans la Kasba, restée au pouvoir d'Ibrahim ennemi d'Aïssa, ils y aborèrent le tricolore, drapeau qui n'a pas cessé d'y flotter depuis (26 mars 1832). Le général Monk d'Uzer, à la tête de troupes suffisantes, vint occuper la ville le 26 juin et battre les Arabes d'Ibrahim. En septembre 1833, les Merdâs, tribu voisine, essuyèrent un châtiment qui fut le dernier qu'on ait eu à infliger dans les entours.
             Le 6 juin 1865, l'Empereur venant par mer de Philippeville, a visité Bône et reçu les compliments du Prince Si Taïeb, ambassadeur de son frère, S. A. le Bey de Tunis.

             IMPORTANCE POLITIQUE.
             Une organisation civile avait été donnée à Bône, dès 1832, par l'arrêté du 20 avril, et une Commission provinciale fonctionnait depuis le 5 janvier 1835. Le territoire communal et civil de la ville de Bône a été constitué par l'arrêté du 31 janvier 1848. Bône est aujourd'hui le chef-lieu d'un arrondissement de la province de Constantine. C'est le lieu de la résidence d'un Général de brigade, commandant la subdivision ; le siège d'un tribunal de première instance, d'une Sous-préfecture, d'une Justice-de-Paix, d'une Chambre de Commerce, d'un Conseil de guerre.
             La population est de 3,961 Français, 6,558 Étrangers, 674 Juifs, en bloc 1,419. Il y a aussi 5,229 Arabes.

             ENCEINTE.
             La ville de Bône est un pentagone irrégulier de 16 hectares, qu'enferme un mur haut de 8 mètres, avec tours carrées sans terrassement. Le mur a une longueur totale d'environ 1.600 mètres. Il est entouré d'un fossé sec, peu profond ; du côté de la mer, il suffit pour protéger la ville. La batterie du fort Cigogne est la seule fortification importante qui soit reliée directement au système général de défense de la ville.
             Six portes donnent entrée dans Bône : ce sont les portes Randon, de la Marine, des Karoubiers, de l'Aqueduc, des Karésas, d'Hippone.
             Une nouvelle enceinte, donnant à la ville une plus grande étendue, est achevée. Des travaux de terrassement considérables ont en outre été exécutés, des chemins de ronde avec glacis ont été établis, de nombreuses plantations ont été faites ; enfin, le mamelon de la Kasba a été coupé. Une large voie a été ouverte sur la route des Caroubiers, et les ravins qui bordent la mer ont été comblés avec les déblais.

             PHYSIONOMIE LOCALE.
             Bône est aujourd'hui d'un aspect très-gai ; ses rues sont propres, et pour la plupart bien alignées. Quelques-unes sont assez escarpées, ce qui tient à la position de la ville, bâtie sur un terrain inégal.
             En entrant dans Bône, par la porte de la Marine, on arrive sur la place du Commerce. Cette place n'est pas d'une grande étendue, mais elle est bordée d'arbres, et ornée d'une jolie fontaine en marbre blanc De toutes les maisons qui l'entourent, la principale est l'hôtel du Général commandant la subdivision. En face s'élève un grand corps de bâtiment composé de plusieurs parties, affectées aux services de la Direction du port, des Domaines et de l'Enregistrement. Sur la gauche, et directement opposée au bureau de la Douane, s'ouvre la rue de l'Arsenal. On y remarque de jolies maisons. L'hôpital est en haut de la rue Philippe. Au bas de la rue Suffren est la place d'armes. Elle est plantée d'arbres, en forme de quinconce ; au milieu s'étend un petit jardin circulaire dont le centre est occupé par une jolie fontaine en pierre, avec jet d'eau et bassin. La place est de forme quadrangulaire, elle est entourée de belles maisons, dont les rez-de-chaussées sont des galeries en arcades.
             L'édifice le plus remarquable est la Mosquée. Construite, dès l'origine, des débris de temples d'Hippone, elle a été considérablement augmentée et embellie par une façade, sur le côté E. de la place. Cette façade, composée d'arcades avec galeries, dans le style mauresque, est du meilleur effet.
             Les rues de Constantine, Saint-Augustin et Damrémont, aboutissent à la place. La rue de Constantine est large et bien alignée. Elle est en grande partie habitée par des marchands et des débitants. La rue Neuve-Saint-Augustin est une suite non interrompue de maisons de belle apparence occupées par de magnifiques magasins. La rue Damrémont traverse le quartier le mieux fréquenté de la ville. A l'entrée, à droite, est une petite place du nom de Rovigo, ornée d'un jardin et d'une fontaine. Ces bouquets de verdure, ces jets d'eau, contribuent à égayer la ville, et à rafraîchir la température.
             La ville est pourvue de bornes-fontaines, mises en communication avec un grand réservoir ou château d'eau. Des travaux récents et considérables ont triplé le volume d'eau fourni à la ville par les sources de l'Edour'.
             Tout le côté méridional de la ville est bordé par une charmante promenade, composée de plusieurs avenues plantées d'arbres, et désignées sous le nom de Cours Napoléon. Une plantation d'eucalyptus a doublé l'espace ouvert aux promeneurs. Le cours Napoléon est orné de constructions modernes, parmi lesquelles il faut citer le Théâtre, le Cercle de Bône, l'Hôtel d'Orient.

             MONUMENTS DU CULTE.
             Il y a à Bône deux églises pour le culte catholique, un Temple protestant, une Mosquée principale et une Synagogue complètement neuve, où les juifs conservent un exemplaire de la Bible en hébreu auquel se rattachent des faits légendaires et miraculeux.
             L'église catholique élève sa masse quadrangulaire à l'extrémité N. du cours Napoléon, près des beaux arbres des allées. Le portail elles côtés appartiennent à l'ordre byzantin, tandis que la coupole, qui termine l'édifice par derrière, est construite dans le style grec. Le portail est surmonté d'une tour carrée, qui s'en détache assez légèrement.

             CONSTRUCTIONS MILITAIRES.
             Bône possède un Hôpital militaire, rue d'Armandy 400 lits. Le local en est vaste et bien aéré. Deux Casernes servent à loger les troupes de la garnison ; l'une est située rue d'Orléans, l'autre à cent pas de la porte Damrémont; c'est le quartier de cavalerie. L'Intendance a ses bureaux dans la rue d'Armandy. Au S -0. de la ville, sur un gradin de la montagne, on voit la redoute Damrémont; plus loin, sur un plateau élevé de 63 mètres, le fort des Santons, servant de poudrière; plus haut encore, au N.-E., et à 400 mètres de la ville, est la Kasba, affectée à la prison centrale des militaires condamnés aux fers. Les casernes peuvent loger environ 3,000 hommes de toutes armes.
             Sur les bords de la Bou Djema, tout près du pont, se trouve le Parc aux fourrages, et plus loin, sur une hauteur devant Hippone, un établissement disciplinaire pour les condamnés militaires.

             ÉTABLISSEMENTS CIVILS.
             Les établissements civils sont tous réunis dans l'intérieur de la ville. Indépendamment des services administratifs qui y sont tous représentés, on y trouve un hôpital civil pour les femmes, un télégraphe électrique communiquant avec les localités de l'Algérie et avec la France par le moyen du câble sous-marin. La prison civile est placée près du Tribunal. On en construit une plus vaste à gauche de l'église. Une Société de recherches scientifiques et d'acclimatation a pris le titre d'Académie d'Hippone. L'enseignement primaire et l'enseignement secondaire sont donnés à la jeunesse. Un Collège communal prépare les élèves à des cours plus élevés. Une Maîtrise donne aux enfants les connaissances nécessaires pour entrer au Petit-Séminaire d'Alger. Une école presbytérale réunit les enfants du culte réformé. Citons encore l'école israélite et l'école arabe-française. Il existe trois Zaouïas. Un établissement dirigé par les Sœurs de la Doctrine chrétienne, comprend un pensionnat pour l'éducation des jeunes filles, des classes communales gratuites et une Salle d'asile. L'institution d'un Bureau de bienfaisance a été confirmée par arrêté du 13 juillet 1853. Il y a aussi une Caisse d'épargne. Un Journal, sous le titre de la Seybouse, parait tous les huit jours. Il existe un Cercle et une Loge maçonnique, ainsi qu'un Bureau de charité.
             Le Théâtre est une jolie salle, décorée avec goût par M. Abel de Pujol. Ce bâtiment, construit d'après le meilleur modèle, peut contenir 800 spectateurs. Une troupe vient y donner des représentations pendant trois mois de l'année.

             COMMERCE ET INDUSTRIE.
             Les principaux hôtels sont :
             L'hôtel d'Orient; de France, place d'Armes ; Mayer, rue Bélisaire ; de Paris, place d'Armes. On remarque aussi le café de Paris et le café chantant de la Renaissance, rue Neuve-Saint-Augustin.
             Les principales productions du pays consistent en céréales. Les autres articles d'exportation sont : les huiles, les cuirs, les laines, la cire, le miel, les bestiaux, et les minerais de fer, d'une richesse égale au moins à ceux de la Suède, dont la France a jusqu'à ce jour été tributaire. Le Marché aux grains, où se font à peu près toutes les transactions commerciales, est à l'extrémité de la ville, prés de la route de Constantine. Il a lieu tous les jours, dans un vaste enclos, et présente l'aspect le plus animé.
             Le Marché aux légumes se tient, tous les malins, sur la place Eugénie, derrière le Théâtre. Le Marché aux poissons et le Marché arabe, pour les produits indigènes, les fruits, etc., se tiennent au même lieu. Ces marchés sont suffisamment approvisionnés d'objets de première nécessité, en raison des besoins de la population. Le poisson est excellent ; la qualité des fruits et des légumes s'améliore de jour en jour.
             Un moulin à vapeur et une dizaine de moulins à manège, convertissent le blé en farine. A part la fabrication des pâtes, la sellerie, la pelleterie et la confection des vêtements et des chaussures, l'industrie manufacturière est encore peu développée à Bône. On tire de l'intérieur quelques étoffes à l'usage des Arabes, des burnous et des tapis. Les Indigènes fabriquent également, au moyen de l'argile et du bois de frêne, des ustensiles de ménage de première nécessité. Ils font, avec le palmier-nain et le jonc maritime, de jolis paniers, des nattes et des chapeaux imperméables. Le palmier-nain a servi également à des essais de crin végétal.
             En revanche, l'art de bâtir a fait des progrès remarquables ; outre la pierre dure et le marbre, on trouve abondamment sur les lieux, la chaux, la brique et la tuile. Les nouvelles constructions sont faites avec solidité, et ne manquent pas d'élégance.
             Le chêne-liège est exploité sur une grande échelle par la Société des Béni Salah.

             MINES.
             Les minerais de fer sont appelés à former une source de richesse inépuisable pour le pays. Les gisements de la Bélélita, des Kharezas, et principalement ceux de Mokta-el-Hadid, à 33 kilom. de Bône, sont d'une puissance remarquable, et ses produits ont obtenu une médaille d'or à l'exposition universelle de1855. Les trois concessions des mines de fer d'Ain Mokhta, des Kharezas et du Bouhamza, ont été réunies par décret du 11 février 1865. Elles fournissent à la France des éléments de fonte d'une qualité supérieure. Une voie ferrée, partant de Mokta el-Hadid, après avoir longé les Kharezas, vient aboutir à la Sebouse et assure désormais l'exploitation des mines. Ainsi Bône, avec ses mines de fer, est appelée à occuper un des premiers rangs dans la colonie. Le port, dont les travaux sont poussés avec vigueur, sera terminé dans un avenir prochain et servira d'escale pour la ligne de Suez. Il est déjà très fréquenté. On y fait des chargements importants de minerais.

             ROUTES.
             Trois routes partent de Bône, savoir :
             1° La route du cap de Garde, au N.;
             2° la route de Guelma, au S., qui se bifurque au sortir de la ville, et pousse vers l'E. un rameau sinueux qui contourne la plage et atteint le port de la Calle;
             3° la route de Philippeville au S.-O., qui se déroule sur les bords du lac Fezzara.

             TRANSPORTS.
             Des voitures journalières font le service de Guelma, de Souk H'arras et de Philippeville.

             ENVIRONS.
             Les environs de Bône sont charmants. Le hameau de Sainte-Anne, Hippone, la vallée des Kermiches, celle des Caroubiers, celle de l'oued Kouba, puis la forêt de l'Edour', si sauvage et si majestueuse, avec ses cascades, ses sources glacées, ses sentiers perdus, et son aqueduc romain, offrent des promenades très agréables.
             Hippone, dont nous avons donné la situation dans la note historique de cet article, est l'endroit où le plus illustre docteur de l'Eglise latine, Augustin, le saint évêque, fit entendre sa voix éloquente. Un peu au-dessus des ruines, sur un tertre verdoyant, on a élevé un monument simple et sans ornement. C'esl un petit autel de marbre blanc, surmonté de la statue en bronze de saint Augustin, et environné d'une grille de fer. Le 28 octobre 1842, Mgr Dupuch, Évêque d'Alger, accompagné de six Évèques députés de l'épiscopat français, transporta en grande pompe sur cet autel, des reliques du saint docteur (le cubitus du bras droit).

             Depuis celte époque, chaque année, le clergé suivi de la population se rend en procession solennelle au mamelon d'Hippone, pour y célébrer une messe commémorative.
             Ce lieu digne d'un pèlerinage a été visité par S. M. l'Empereur le 6 juin 1865.
             Alelik est un village de la banlieue de Bône, à 6 kilom., dont la création remonte au 30 juillet 1851. C'est là qu'est le dépôt des étalons du Gouvernement, pour la province de Constantine, et que se trouve l'établissement de la Société anonyme des hauts fourneaux de l'Alélik fondée en 1847, et visité par l'Empereur en 1865. De nombreuses fermes sont exploitées sur ce territoire.

             Le pays était autrefois riche en chasse. Le gibier tend à disparaître. Cependant en hiver, les oiseaux de passage, et surtout les oiseaux aquatiques, s'y rencontrent en abondance, notamment sur les bords du lac Fezzara (vaste étendue d'eau, de 40 kilom. carrés, située à 18 kilom. S.-O. de Bône), où la chasse est louée, et qui fourmille de cygnes et de grèbes, dont les peaux préparées fournissent de fort belles fourrures. On y trouve encore des poissons en grande quantité.
             A 3 kilom. de Bône, existe un Orphelinat de cent jeunes filles, élevées par une Religieuse.

             II COMMUNE DE BUGEAUD.

             Bugeaud est un village entouré d'une muraille, créé par ordonnance royale du 3 juin 1847, sur la montagne de l'Édour', au lieu dit Aïn Barouaga, à 12 kilom. de Bône, à l'entrée d'une forêt où l'on exploite le chêne liège, et où s'élèvent quelques habitations occupées par la brigade forestière. La commune est entrée en plein exercice par décret du 22 août 1861. Il y a une église, un lavoir couvert et un abreuvoir. - Population 300 habitants. 195 Français, presque tous bûcherons lorrains. Il y a 100 Étrangers.

             III. COMMUNE DE DUVIVIER.

             Sur la route de Souk H'arras, et à 34 kil. en avant de ce point, au lieu dit Bou Chagouf, un décret du 27 mai 1857 a créé sous le nom de Duvivier un centre qui est entré en plein exercice communal, par décret du 22 août 1861. - Population : 107 Français, 23 Étrangers, 121 Arabes.
             La circonscription en dehors du périmètre communal comprend 6 Français et 57 Arabes.

             IV. COMMUNE DE DUZERVILLE.

             Duzerville fut créé par l'arrêté du 12 février 1845, au lieu connu sous le nom de Bouzaroua, près du pont de Constantine, sur la Meboudja, à 11 kilom. de Bône, et à mi-chemin de Mondovi, au point de séparation de la route qui se bifurque pour aller à ce village et à Guelma.
             Cette commune est entrée en plein exercice le 22 août 1861. Les plantations publiques sont nombreuses. Il y a deux puits à pompe, un lavoir et un abreuvoir. Les habitants, au nombre de 109 Français et 146 Étrangers, exercent l'industrie du roulage. Il y a 31 Arabes.
             La section communale de Duzerville est :
             EL-HADJAR, créé par décret présidentiel du 30 juillet 1851, à 12 kilom. de Bône, à 5 kilom. de Duzerville, sur la route conduisant à Penthièvre. Les habitants, au nombre de 36 Français, 21 Etrangers, 10 Arabes, ont fait de belles plantations de mûriers. Leurs cultures sont belles et variées.

             La circonscription en dehors du périmètre communal, comprend 27 Français, 31 Etrangers et 1,253 Arabes,

             V. COMMUNE DE LA CALLE.
             SITUATION.

             La Cale est situé sur la côte septentrionale de l'Afrique, par 6°15' de longitude orientale, et par 36°90' de latitude N., à 146 kilom. N.-E. de Guelma, à 82 kilom. E. de Bône, à 214 kilom. N.-E. de Constantine, à 10 lieues marines de l'île de Tabarca.

             ASPECT EXTÉRIEUR.

             Un roc déchiré par les vagues, et quelques constructions, ne peuvent guère impressionner agréablement quand on vient de Bône à La Cale par mer. Cependant, une fois à terre, on se réconcilie un peu avec la laideur apparente de la pointe que forme la presqu'île où est bâtie la ville, et des rochers couronnés du fortin, dit du Moulin, qui ferme l'entrée du port, de l'autre côté, vis-à-vis, au S.-O. La Cale n'a qu'un horizon très-restreint du côté de la terre. Un plateau peu élevé, couvert de bruyères, de palmiers nains, de myrthes et de quelques bouquets de chênes lièges, et dont le versant septentrional vient finir à la plage, ne laisse au regard que l'immensité de la mer et les côtes, du cap Gros au cap Roux.
             La Calle est à deux milles du cap Gros. M. Lieussou, ingénieur hydrographe, dans ses études sur les ports de l'Algérie, dit que le port consiste dans un petit bassin oblong, dont l'entrée regarde l'O.-N.-O. Ce bassin, resserré à son entrée, a 120 mètres de largeur moyenne, sur 300 mètres de longueur. Cette calanque est abritée du N. et du N.-E. par une presqu'île, sur laquelle étaient bâtis tous les magasins. Les bateaux corailleurs et les petits caboteurs peuvent s'y mettre à l'abri ; mais pendant les vents frais du N.-O., ils doivent se tirer à terre, car ces vents y donnent en plein et la mer y est très grosse. Le peu de largeur de la passe, et le brusque ressaut de fond qu'elle présente, y occasionnent, dans les gros temps, une barre ou brisant difficile à franchir. Cette disposition rend l'entrée dangereuse.

             NOTE HISTORIQUE.

             Ce que les anciens ont pu faire à La Calle et aux environs est entièrement ignoré. Elle portait, sous les Romains, le nom de Tunilia. Il existe près de La Cale, ainsi que dans le voisinage de ses trois lacs, des monceaux de pierres qui sembleraient avoir appartenu à des établissements agricoles, en raison de leur peu d'étendue et de la situation des terrains où ils gisent. Quelques-unes de ces pierres, creuses et de forme ronde, ont dû servir à des moulins à huile. Aucune autre marque caractéristique ne vient en aide pour assigner une origine certaine à ces décombres qui paraissent remonter à une époque reculée.
             En 1390, Aboulfeda parlait de la pêche du corail que faisaient sur la côte les Génois conduits par Louis de Clermont, duc de Bourbon, auquel on attribua la fondation première du Bastion de France. En 1439, les Catalans achetèrent le droit excluait de cette pêche aux souverains de Tunis. En 1446, les Barcelonais affermèrent cette industrie jusqu'à Bougie. En 1520 le privilège de la pêche du corail de Tabarca à Bône, fut concédé à la France, et nos rois François I" et Henri II, commencèrent à l'exploiter. On rebâtit alors, sur la côte, à 48 kilom.de Bône, le petit fort connu sous le nom de Bastion de France.
             A peine terminé, en 1560, il avait été détruit de nouveau par les Barbaresques, lorsque le sultan Selim II confirma avec Charles IX les traités anciens, et y ajouta, en sa faveur, le monopole du commerce de l'intérieur de la régence, par les ports de Malfacarel, La Cale, Collo, le cap Roux et Bône, Les deux négociants marseillais Carlin Didier et Thomas Linches, vinrent relever le Bastion; mais ils n'y firent pas de bonne affaires, et ce dernier s'y ruina. Le sultan Amurat III, le 50 mai 1604, renouvela les traités d'amitié avec Henri IV, qui céda nos concessions à la famille de Guise; ces princes les laissèrent dépérir. Richelieu, en 1624, obtint d'Amurat IV, en toute propriété pour la France, les places du Bastion, de La Cale, de Bône, le cap Roux et le cap Nègre.

             En 1626, Samson Napollon fut envoyé à La Cale dont il fut le fondateur, et y établit un comptoir plus large qu'aucun de ceux encore ouverts sur ce rivage. Les Turcs d'Alger soucieux d'obéir au sultan de Constantinople, détruisirent le Bastion en 1637. Les ducs de Guise, perdant tout intérêt au profit incertain dont ils avaient le privilège sur ce point, en cédèrent les avantages éventuels à Napollon, pour 10 chevaux barbes par an (1663), et ce dernier, abandonnant tout-à-fait cet ancien poste reconnu malsain, concentra à 24 kilom. à l'E. tout le commerce à La Cale, en 1677. Sur la porte de terre est encore inscrit ce millésime, époque d'une nouvelle ère. La Cale parvint bientôt à un état des plus florissants: un grand nombre de beaux magasins, des quais, une église, un hôpital, un lazaret,
             Quatre postes militaires, une mosquée pour les Maures employés par la Compagnie. Elle eut tout ce qui était indispensable au bien-être, à l'approvisionnement et à la défense de 2,000 âmes. L'occupation de ce rocher avait un intérêt politique durant les querelles entre les maisons de France et d'Autriche. L'abaissement de l'Empire rendit à La Cale son importance purement commerciale. Duquesne en retira tous les habitants, avant le bombardement d'Alger, en 1683. Pierre Hély, en 1694, fut reconnu, par le gouvernement, cessionnaire et propriétaire incommutable des places, du commerce des cuirs, céréales, cire et miel, et de la pêche du corail, moyennant la charge de payer au Divan une redevance de 105,000 livres. Les dispositions de ce traité furent renouvelées, plus tard, entre la France et Alger, en 1714, 1731, 1768, et 1790. En 1701 et 1709, la disette s'étant fait sentir en France, les concessions expédièrent à Marseille 200,000 hectolitres de blé. La Compagnie des Indes qui, en 1719, prit la ferme de ces établissements, ne fut pas plus heureuse en Afrique qu'en Asie, et la Compagnie Auriol les releva durant le bail de 10 ans qu'elle obtint, à partir de 1730. En 1741 se constitua à Marseille, la Compagnie d'Afrique, avec un capital de 1,200,000 fr. La ruine était imminente, et le capital était tombé à 474,000 fr., lorsqu'en 1766, M. Martin fut envoyé en qualité de directeur. Cet homme probe et entendu rendit la prospérité à La Cale, qu'il maintint en paix au milieu de 16 tribus de la Masoule, dont le cheikh, nommé par le bey de Constantine, n'était confirmé qu'après son assentiment. Un capitaine, aux appointements de 360 francs par an, et 14 soldats, aux gages de 108 francs, lui suffisaient pour garder les postes protégeant la ville. 50 coralines, montées chacune de sept hommes engagés pour trois ans, faisaient la pêche dans ces parages. En 1789, la Compagnie d'Afrique obtint que son monopole exclusif lui serait maintenu, au milieu de la chute de tous les privilèges. Mais le décret du 21 juillet 1791 lui fit perdre une partie de ces avantages et la força de souffrir 50 gondoles corses, qui firent la pêche et occasionnèrent un tort notable à la Compagnie, en allant vendre le corail à Livourne.
             L'arrêté du Comité de Salut public, du 19 pluviôse an II (janvier 1794), prononça la suppression de la Compagnie. La Convention fit verser au Trésor 2,048,000 fr., provenant de la liquidation du fond social, ainsi amélioré par les soins et le dévouement du directeur Martin. La Cale n'était alors habitée que par 600 hommes. Les édifices ne pouvaient pas en contenir davantage, et toutes les femmes en étaient exclues. Il en provenait des désordres dont l'abbé Poiret avait été scandalisé en 1785.La position était gardée par 30 vétérans et 6 pièces de 4. Le gouvernement français, voulant alors diriger la pêche par lui-même, arma 200 bateaux corailleurs et parvint à épuiser presque tous les bancs. Les redevances ne furent pas payées au dey qui, invité par le sultan de Constantinople à nous déclarer la guerre, au moment de l'expédition d'Egypte, s'empara des concessions françaises. Le gouvernement consulaire, par le traité du 17 décembre 1801, obtint la restitution des privilèges, à charge de liquider la dette des grains achetés par la France à la Régence, et gui traînait en longueur. M. Raimbert vint reprendre la pêche avec des Corses et des Italiens. Mais les lenteurs nouvelles apportées aux paiements arriérés indignèrent le dey qui, en 1807, nous enleva nos concessions, et les loua pour dix ans aux Anglais, moyennant une rente annuelle de 267,000francs. En 1816, à la faveur de la paix générale, nous rentrâmes dans nos possessions. Le privilège commercial fut abandonné à M. Paret, négociant de Marseille, et le département des affaires étrangères dirigea seul la pêche du corail. 240 bateaux y concouraient.
             Les Français étaient exempts de tous droits que les Anglais avaient divisés en deux : droit de pêche d'été, du 1er avril au 30 septembre, et de pêche d'hiver, du 1er octobre au 31 mars; ce dernier, moindre presque des deux tiers. Ce règlement continua à régir ce genre d'industrie. En 1820 et 1824, les Indigènes et les Tunisiens attaquèrent nos établissements ; en 1827, et le 27 juin, les Turcs du dey Hussein incendièrent les édifices qui venaient d'être évacués par nos compatriotes. Il y avait alors 24 coralines françaises en rade et 139 bateaux étrangers. La pêche ne fut reprise qu'en 1832, par des Italiens.
             Dès 1831, une reconnaissance avait été ordonnée par le Général commandant l'armée d'occupation d'Afrique; elle eut lieu au mois de mai. On ne trouva plus à La Cale que des masures inhabitables, quelques merlons restés intacts, des pans de murailles, noircis et lézardés par l'incendie. Ce ne fut que le 22 juillet 1836, que l'on occupa définitivement, au moyen de 50 zouaves indigènes, commandés par le capitaine Berthier de Sauvigny, et apportés par le brick le Cygne. Un arrêté du 21 décembre1842 a érigé La Cale en Commissariat civil. Une ordonnance du 13 décembre 1846 lui a assigné une banlieue civile d'environ 8,500 hectares.
             La Calle, constituée en commune par le décret du 31 décembre 1856, est un chef-lieu de district, résidence d'un Commissaire civil. Elle compte 3,176 habitants, dont 440 Français, 1,718 Étrangers, 55 Juifs. Il y a aussi 831 Arabes et une population en bloc de 132 individus.
             La ville de La Calle est assise sur un banc de rochers de 420 mètres de long, sur 60 à 80 de large, qui court dans la direction O.-N.-O., parallèlement à la côte. La roche, qui présente une superficie de 3 hectares, est d'un grès à contexture lâche. Quand la lame déferle un peu vivement, on entend, au son creux qu'elle rend jusque sous le pavé, combien son action à déjà pénétré loin dans les couches les plus friables. Ce rocher, presqu'entièrement entouré par la mer, se rattache au continent par un isthme de sable, à son extrémité orientale, et défend du large une nappe d'eau qui communique avec la mer. 180 bateaux corailleurs peuvent s'y mettre à l'abri. Ce petit port ne pourrait admettre un navire de plus de 100 tonneaux. 200 maisons, environ, sont bâties sur cette presqu'île, avec assez de régularité, le long d'une rue. Le Pavillon des officiers, ancien comptoir de la Compagnie française, est une maison de belle apparence. Un mur de 2 mètres de hauteur 50 centimètres de large, qui court de l'E. à l'O., protège au S. ce groupe d'habitations, et s'ouvre par la porte de Terre ou de la Presqu'île. Un autre mur de défense, qui commence à l'embouchure d'un ruisseau se déversant dans une petite anse à l'E., enveloppe le quai et le faubourg Saint-Martin, répandu sur la plage. Ce mur va joindre à l'O. le pied du coteau où s'élève le fort du Moulin, commandant l'entrée du port, et se termine derrière la caserne des spahis, située de ce côté. Une solution de continuité dans ce prolongement est appelée porte de l'Avancée. Entre le mur de défense et le magasin du matériel des Ponts-et-Chaussées, à l'E., se tient un marché qui n'a pas de jours fixes.
             C'est surtout le corail qui constitue l'importance industrielle de La Cale. L'article 5 du traité du 8 août 1830, avec le bey de Tunis, confirmé par celui du 24 .octobre 1832, reconnaît à la France le droit de la pêche, moyennant une rente de !3,500 piastres de Tunis, dans les eaux de ce royaume, jusqu'au cap Nègre, à 7 lieues de l'île de Tabarca.

             L'arrêté du 31 mars 1832 a pourvu aux mesures de police que ce genre d'exploitation exige. L'ordonnance royale du 9 novembre 1844 a fixé à 800 fr. par an, sans distinction de saison, la rétribution payée par chaque bateau étranger qui se livre à la pêche du corail sur les côtes de l'Algérie. En conséquence de la décision impériale du 10 avril 1861, le droit des bâtiments corailleurs français n'est que de 400 fr. D'autres exemptions ont été obtenues par le décret du 1er juin 1864. En cette année là, 186 bateaux français et 141 bateaux étrangers ont fait la pêche. Ils ont péché pour plus de 2,300,000 fr.de corail.
             Le corail de La Calle est porté à Livourne, où il occupe plus de 700 personnes. Les Juifs centralisent ce commerce qui s'est relevé à la faveur du retour des modes impériales. D'ailleurs on ne peut trop recommander l'usage des ornements de corail; il est sain, dit-on, et il va fort bien aux brunes. Les dames le savent assez.
             Il y a trois Casernes : une dans la presqu'île, pour 400 soldats ; une au faubourg, dite des Spahis, où 40 hommes peuvent loger ; une troisième au fort du Moulin, poste militaire, assis sur un plateau au S.-O. C'est aussi dans ce fort que se trouve la prison militaire, et civile au besoin. Dans la presqu'île encore, le service des Subsistances militaires a son magasin, aussi bien que le service du Génie. L'Hôpital renferme 70 lits. Station télégraphique.
             Dans la presqu'île est une petite église qu'on dit être celle bâtie par l'ancienne Compagnie française d'Afrique, dans l'hôpital que desservaient quatorze frères de l'ordre de Saint-Jean-de-Dieu. Mosquée. Synagogue.
             Il y a deux écoles : l'une pour les garçons, l'autre pour les filles, et une salle d'asile. L'ancienne tour du Phare est restaurée ; on y a placé un appareil catadioptrique. Un grand puits, sur la plage, sert à l'alimentation de la population, et à l'approvisionnement des corailleurs. Il existe un autre puits assez abondant, dans l'ancien jardin de la Compagnie. Tout autour de l'enceinte actuelle on peut trouver une promenade que le sable vient disputer. Quelques cantines, où les prix sont exorbitants pour le peu qu'on y prend, sont les seuls lieux qui puissent prétendre au titre d'auberges.
             Le sol des environs de La Calle est généralement accidenté. Il existe dans la banlieue, où l'on voit beaucoup d'arbres fruitiers et de la vigne, de nombreux jardins et cinq fermes. L'on y cultive la pistache de terre (arachide). Si l'on gravit un des points les plus culminants du plateau qui domine la ville, on a un horizon assez étendu. En laissant la mer derrière soi, on découvre, à une distance de trois à quatre myriamètres, un demi-cercle de montagnes peu élevées, renfermant, entre elles et la mer, trois lacs. Le lac des Poissons (Guera-el-Hout), plus connu à La Cale sous le nom de Tonga, d'où nos pères avaient fait Tonègue, s'étend à l'E. Il est profond et communique avec la mer par un beau chenal, débouchant dans une crique où les petits bâtiments peuvent s'abriter. Le lac Supérieur ou du Milieu (étang d'el-Garah, Guera-el-Garah, Oubeïra, qui portait aussi le nom de lac de Beaumarchand, au temps de l'ancienne Compagnie), occupe une étendue de quatre à cinq mille hectares, à 2,000 mètres du lac des Poissons. Il est d'un accès facile, dans la plus grande partie de son contour.
             L'élévation de ses eaux est de 30 mètres 73 centimètres au-dessus du lac Salé, qui s'étend à 1,000 mètres à l'O. Le lac Salé (Guera-el-Malah), connu sous le nom de lac du Bastion, à cause de l'établissement français qui existait auprès, sur le bord de la mer, occupe 2,500 hectares, et pénètre à 2 lieues dans les terres. Son extrémité méridionale est un taillis marécageux. Le canal de communication de ce lac avec la mer, semblable à l'entrée d'une rivière, a une longueur de 1,000mètres environ. Il se dégarnit d'eau pendant l'été, et laisse établir près de son embouchure une sorte de barre qui se détruit pendant l'hiver. Les exhalaisons délétères qui se dégagent aux mois de juin et de septembre, causent les fièvres qui ont chassé les Français du poste dit le Bastion.
             C'est principalement dans le voisinage de ces trois immenses réservoirs qu'existent les belles forêts de chênes lièges qui viennent, en suivant les sinuosités de petits vallons, finir auprès de La Cale. Les couches minéralogiques sur lesquelles reposent ces parties boisées, appartiennent, pour la plupart, au grès bigarré.
             Sur plusieurs points on trouve, à la surface du sol, une assez grande quantité de sables siliceux, mélangés de parcelles de mica. L'établissement forestier de Mêla, est à environ 9 kilom. de La Cale. A 26 kilom., sur la route de Bône, est le caravansérail de Bordj Ali Bey.
             Le paysage est vraiment africain, et si des lopins de culture qu'on voit çà et là sur un revers de montagne, dans une clairière, n'indiquaient l'existence de tribus, on se croirait dans une solitude éternelle. Il n'y a, comme moyen de transport à travers ces tristes déserts, que le cheval qu'un spahis prête pour quelques heures, avec l'agrément de l'officier. La seule route tracée qui aboutisse à La Cale, est celle de Bône, qui s'embranche à celle de Constantine, par Guelma. Il y en a une encore qui mène à Kef oum el-Theboul, établissement fondé par la Compagnie concessionnaire de la mine de plomb argentifère de ce nom, située sur la frontière de Tunis, à 22 kilomètres E. de La Cale.
             Les balancelles de corailleurs qui vont jusqu'à Bône, et le steamer qui vient de Tunis deux fois par mois, forment le lien de communication de ce morne séjour avec le reste du monde. En quatre heures de voyage sur le bateau à vapeur on arrive à Bône, qui est à 82 kilom. par terre.

             VI. COMMUNE DE MONDOVI.

             Mondovi, créé en exécution de la loi du 19 septembre 1848, à 24 kilom. S. de Bône, sur la rive gauche de la Sebouse, sur la route de Bône à Tébessa, possède un territoire fertile en tabac et en plantes légumineuses.
             Le bétail s'y élève avec succès. Le village a un marché couvert. Trois puits, dont un creusé par les Romains, donnent de la bonne eau. On a trouvé des vestiges d'établissements antiques et beaucoup de médailles du Bas-Empire. Il y a une église, une Justice de paix depuis le 21 novembre 1860. Le décret du 22 août 1861 a reconnu la commune en plein exercice. La population, y comprise celle de Barral, section communale, est de 823 Français, 134 Etrangers, 85 Arabes.

             BARRAL,

             Colonie agricole créée en 1848, appelée d'abord Mondovi n° 2, à 0 kil. environ au-delà de Mondovi, à 157 kil. de Constantine, au bord de la Sebouse, a trois puits et un marché couvert, et possède un territoire fertile. Les habitants ont une église.
             La Circonscription en dehors du périmètre communal, comprend 6 Français et 58 Arabes.

             VII COMMUNE DE PENTHIÈVRE.

             Penthièvre, peuplé en partie de familles allemandes, a été créé par ordonnance du 26 septembre 1847, à 134 kilom. de Constantine, à 43 kilom. de Bône et de Guelma, sur la route de ces deux villes, au confluent de l'oued Mouïa Berda et de l'oued Dardara. Le village, qui a une église, est pourvu de fontaines, lavoirs, abreuvoirs. On y cultive les céréales et les plantes légumineuses. La population, y comprise celle de sa section communale Nechemeya, est de 146 Français, 274 Etrangers, 265 Arabes.

             NECHEMEYA :

             Celui qui aurait vu l'ancien camp de ce nom, en 1837,à 124 kilom. de Constantine, à 43 kilom. de Bône, sur la route de cette ville à Guelma, où même qui aurait considéré vers la fin de 1853, les gourbis élevés par une population allemande qui était venu débarquer dans la province de Constantine, serait émerveillé de voir aujourd'hui ce que les bienfaits de l'Administration et les travaux du Génie militaire ont faits pour ce centre de population qui est doté de tous les avantages communaux. Les villages de Oued Touta et de Guelaa bou Sba, ont été dans les mêmes conditions. Le décret impérial du 28 février 1857, a constitué Nechemeya.
             La circonscription, en dehors du périmètre communal, comprend 763 Arabes.

             VIII. COMMUNE DE SOUK H'ARRAS.

             Souk H'arras, située à 99 kilom. au S. de Bône, à 40 kilom. de la frontière tunisienne, est l'ancienne Thagaste, patrie de St-Augustin, près de la rive gauche de la Medjerda (antique Bagrada), où l'on a jeté un pont, à la jonction des routes de Tunis à Constantine, et de Bône à Tebessa. Dès 1852, vingt soldats français, enfermés dans le fondouk, arrêtèrent l'insurrection du pays. En 1855, on fil de ce point un chef-lieu de Cercle, et au commencement de 1856, des colons européens, des Tunisiens, des Juifs, des Mozabites, vinrent y fonder spontanément un centre de population qui est aujourd'hui de 731 Français, 339 Etrangers, 188 Juifs, 884 Arabes. Un décret du 15 septembre 1858 donna à cette fondation l'existence légale.
             Centre des communications de la contrée, les routes de Tunis à Constantine, et de Tebessa à Bône, se croisent sur l'emplacement même choisi pour l'assiette de la ville. C'est un point de passage obligé pour toutes les caravanes portant les produits de l'E. et du S. C'est aussi le lieu de transit et d'entrepôt du commerce de la Tunisie. Cette disposition des voies assure donc à toujours sur ce point un mouvement commercial qu'on chercherait vainement à faire dériver ailleurs.
             Un marché hebdomadaire considérable se lient depuis des siècles sur ce point, le jeudi, et offre à l'activité des Européens de productives branches de commerce, notamment sur les bestiaux, les céréales et les laines que la contrée fournit en très grande abondance.
             De toutes les tribus du cercle, et même de la Tunisie, les indigènes viennent en grand nombre, dès le mercredi soir, amenant avec eux de très-beaux chevaux, de nombreux troupeaux des races bovine et ovine, des chameaux, de grandes quantités de laine, des cuirs, du goudron, du miel, du savon, des tapis, des nattes, des cordes, des burnous, de l'huile, des dattes, des fruits de toutes sortes.
             De leur côté, les indigènes y achètent des quantités considérables de nos produits, et particulièrement des cotonnades, des foulards, des ustensiles de ménage, etc.
             Ces nombreux acheteurs composent une population flottante connue sous la dénomination de Berrani, que le décret du 12 février 1858 place sous la surveillance d'un amin.
             Souk H'arras qui a été érigé en commune de plein exercice par décret impérial du 23 août 1861, a un Commissaire civil, un Juge-de-paix. Cette ville possède déjà de beaux établissements publics : une église, une école des filles avec salle d'asile, une école de garçons, un abattoir, un vaste hangar couvert pour le marché aux céréales, une mosquée.
             La place, au centre de la ville, est à 661 mètres au dessus du niveau de la mer.
             Les noms des rues, pris dans l'histoire ancienne, rappellent Massinissa, Scipion, Jugurtha, qui ont eu pour théâtre de leurs exploits les localités de la banlieue, où se sont livrées les fameuses batailles de Zama, du Muthul.

             M'daourouche (Madaurus), patrie d'Apulée et de saint Alype, ami de Saint-Augustin, est éloigné à 24 kil. au Sud, de Souk H'arras.
             Non loin de la ville, des cours d'eau abondants et des sources nombreuses donnent des moyens d'irrigation aux exploitations agricoles et une grande force motrice pour l'installation de nombreuses-usines. Déjà, quatre moulins, construits sur les bords de la Medjerda, sont en pleine activité et produisent des farines de bonne qualité et en quantité suffisante, non-seulement pour les besoins de la consommation, mais encore pour l'exportation.
             Environnés de forêts présentant de belles essences, 30,000 hectares de bois offrent de grandes ressources aux exploitations de lièges et de bois de construction.
             Les montagnes voisines renferment aussi des richesses minérales qui n'ont point été encore sérieusement explorées, mais qui se révèlent à la surface du sol ; le fer, le cuivre, le plomb, le manganèse, sont déjà connus sur plusieurs points.
             C'est l'ensemble de ces diverses ressources qui explique le développement rapide et toujours croissant de ce centre de population et qui lui assure une ère de prospérité dans l'avenir; c'est-à-dire, dès qu'une bonne route, déjà en pleine voie d'exécution, praticable en toute saison aux voitures et aux charrettes, l'aura mis en communication prompte et facile avec Bône, son port naturel, d'où il tire ses approvisionnements et où il expédie, pour l'exportation, l'exubérance de ses produits.

             Pour terminer cette notice, nous dirons que 21,330 arbres de toutes essences ont été plantés par les colons, soit sur leurs lots ruraux, soit sur leurs lois de jardins. En outre, 400 arbres déjà fort beaux ornent les places et promenades publiques de la ville. - Enfin, 40 hectares, convenablement défoncés el défrichés, ont été complantés en vignes, et cette branche de l'agriculture, si riche d'avenir, est appelée à prendre dans le pays un très-grand développement.
             Il n'est peut-être pas sans intérêt de signaler l'existence d'une source thermale connue sous le nom de Hammam Oulad Zaïd, à 12 ou 13 kilomètres au N.-E. de Souk H'arras, sur la route de cetle ville à La Cale, par Bou-Hadjar. Les eaux de cette source sont très sulfureuses et très salines. Leur température est de 42°. Près de la source on a construit une petite maison et deux bassins pour prendre des bains. Les environs sont très pittoresques. (Moniteur de l'Algérie).

             La section communale de Souk H'arras est :
             MEDJEZ-SFA :

             En 1856, il n'existait à Medjez-Sfa qu'une auberge tenue par un Européen, à l'embranchement de la route qui conduit de Souk H'arras à Bône et à Guelma.
             Ce point, situé à 32 kilomètres de Souk H'arras, a son importance en ce qu'il forme un lieu d'étape pour les troupes et une halte pour les voyageurs. Ces circonstances favorables ont déterminé sur ce point la création d'un centre européen. Ce cenlre est divisé en deux groupes :
             Le village de Medjez-Sfa, Le hameau d'Aïn-Tahamimim, son annexe.
             Le territoire agricole affecté a ce centre, par le décret de création du 2 septembre 1859, est de 1.249 hectares. Les terres sont d'excellente qualité, les eaux abondantes.
             Les colons ont planté 1.500 arbres et 3 hectares de vignes.
             La population, y compris celle d'Aïn-Tahamimim, est de 53 Français, 16 Etrangers, 55 Arabes.
             L'oued Melah, qui reçoit les eaux de l'oued Sfa, à 700 mètres seulement du village, sert de moteur à une vaste usine créée sur ce point pour la mouture des céréales, dont les produits s'exportent principalement sur Bône.
             Il existe une chapelle catholique desservie par le curé de Duvivier, village à 10 kilomètres au N., sur la route de Bône; une école mixte, dirigée par une institutrice; une fontaine avec abreuvoir; quelques plantations publiques dans la traverse du village, sur les deux côtés de la route.
             Le hameau d'Aïn-Tahamimim est situé 4 kilomètres au S. du centre principal, sur la route de Souk H'arras, dont il est éloigné de 28 kilomètres (Moniteur de l'Algérie)
             La circonscription, en dehors du périmètre communal, comprend 51 Français, 27 Etrangers, 914 Arabes.


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Envoyées par M. Iacono

CARTES DU VIEIL ALGER
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De l'Algérie à la Normandie...
Écrit et envoyé par M. Aletti

2ème partie -
L'AIDE SOCIALE A L'ENFANCE

ANNEXES

- Note sur " Moissons Nouvelles "
- Note sur l'attaque de Mers El Kébir
- Note sur les évènements de Mai 1945
- Note sur Messali Hadj
- Note sur la Toussaint rouge (1954)
- Note sur la vie sociale en Algérie (1954)
- Note sur l'U.G.E.M.A
- Note sur l'Ecole en Algérie.

Ces notes, aussi objectives et neutres que possible, ont été rédigées à l'aide d'indications bibliographies, savoir :
- La seconde guerre mondiale (Larousse)
- Histoire de l'Algérie Coloniale (B. Stora La découverte)
- Les mémoires de Messali Hadj (Editions J.C. Lattès 1982
- Les Français d'Algérie de 1830 à nos jours (Verdès-Leroux)
- Les Pieds noirs (Philippe Lebaud) encyclopédie Larousse 1955
- Le destin tragique de Maxime Marchand (Serge Jouin)
- CID Nantes
- Et l'Algérie se libéra (Mahfoud Kaddach) EDIF 2000
- De la Régence aux centres sociaux Les amis de Maxime Marchand
Publisud
- La guerre d'Algérie (Pierre Montagnon) Editions Pygmalion Gérard Watelet Paris 1984, ainsi que divers articles de presse relatant la guerre d'Algérie.

" Moissons Nouvelles "

Cette note a pour but de présenter et décrire les grandes étapes qui ont marqué la vie de cette association en Algérie.
A partir de 1945, en France, le problème de l'Enfance Inadaptée a explosé : (séquelles de la guerre, personnes déplacées, orphelins…). Les maisons d'enfants étaient à l'ordre du jour, mais leur existence était, en fait, antérieure à la guerre. L'Education Nouvelle était non seulement une idéologie, mais aussi un mouvement, une action qui inspirait les institutions. Il ya eu des réalisations exemplaires : Montessori, Decroly, Freinet ….

C'est dans les années 1940 que les dirigeants d'un mouvement de jeunes, (la Jeunesse Ouvrière Chrétienne), décident de créer, tant en France qu'en Algérie, un service destiné à prendre en charge avec les jeunes concernés, les problèmes du moment. Les différentes actions engagées et prévues amenèrent à la création de deux associations, l'une en France, l'autre en Algérie.

Si l'association en France cessa rapidement ses activités, par contre en Algérie, les dirigeants décidèrent de faire appel à une équipe composée de différentes personnalités de divers milieux acceptant de se mettre au service des plus pauvres et d'œuvrer en faveur des jeunes en difficulté.
Une nouvelle association reprit les activités existantes et en développa des nouvelles.

Le Centre Artisanal du Beau Fraisier :
Implanté sur le secteur de Bab-el-Oued, quartier populaire de la banlieue d'Alger, il comporte 60 lits destinés à l'accueil, l'hébergement, l'éducation sociale, scolaire et professionnelle artisanale. Les adolescents sont placés en entreprise avec contrat d'apprentissage, pour une formation pratique et technique. Ils reçoivent aussi une formation théorique et générale à l'établissement.

Le service d'accueil de Jour :
Implanté au n°1 de la rue de Lyon, à Alger, il est créé par Jean Abbad, Kabyle chrétien, directeur du centre du Beau Fraisier. Il assurait aux jeunes travailleurs des loisirs, un soutien scolaire ou une alphabétisation.

Le Centre de Formation Familiale et Ménagère de Bône :
Sis rue Célestin Bourgoin à Bône (Constantine), il accueillait 80 jeunes filles.

Le Centre de Formation Familiale et Ménagère de Philippeville :
Situé à Philippeville (Constantine), il accueillait 60 jeunes filles.
Ces deux établissements sont destinés à des jeunes en fin de scolarité primaire, sans exigence de niveau scolaire, les analphabètes étant admises. Ils ont pour objectif de dispenser une formation familiale, sociale, humaine, ménagère et technique.

Le Centre d'Apprentissage d'0ran :
Destiné à dispenser un apprentissage professionnel dans les métiers du bois et du fer, il reçoit 60 garçons en fin de scolarité primaire, sans exigence de niveau scolaire. A la suite de difficultés de fonctionnement, le centre sera fermé et son équipement matériel affecté au centre du Beau Fraisier.

La période I947-I955 est marquée par deux nouvelles importantes, l'une concerne la réorganisation de l'association et son fonctionnement, l'autre son développement. 5 nouveaux établissements sont ouverts dont 4 fonctionnant avec un prix de journée.

Centre de Formation Familiale et Ménagère d'Alger :
Ouvert dans le quartier de Belcourt, allée des Mandariniers, il reçoit en externat une centaine de jeunes filles. Il comporte les mêmes critères et objectifs que les centres du Constantinois, avec en plus une section de formation professionnelle de dactylographie.

Foyer de semi-libertés d'Hussein Dey (Alger) :
Ouvert dans le quartier populaire d'Hussein Dey, route de Badjarah, cet établissement a été aménagé et équipé avec le concours financier du Ministère de la Justice. (Gouvernement Général de l'Algérie). Il est destiné à recevoir 30 garçons de 16 à 21 ans, ayant effectué un séjour en Etablissement Public d'Education Surveillée.

Foyer de Jeunes, appelé " Ernest Ilonier ", Alger :
Ouvert chemin de Gascogne, grâce à l'appui du Directeur Départemental de l'Assistance Publique, dans un bâtiment annexe de l'orphelinat de St Vincent de Paul, futur foyer départemental de l'Enfance. Il est destiné à recevoir 24 jeunes relevant des services de l'Assistance Publique.

La Cité de l'Enfance (Ancien Orphelinat St Vincent de Paul) :
Située avenue Savorgnan de Brazza, la cité de l'enfance a été prise en charge à la demande du Conseil Général pour une période de 4 ans. Il s'agissait de pallier le départ des Sœurs de St Vincent de Paul qui ne désiraient plus la gestion de cet établissement départemental comportant 200 places.

Le Centre d'Accueil d'Orientation et d'Observation de Tlemcen :
Ouvert sur les hauteurs de Tlemcen, route d'El Kalaa Supérieur (Oran), cet établissement a été équipé et aménagé avec le concours financier du service de l'Education Surveillée (Gouvernement Général de l'Algérie).il reçoit 64 jeunes de 14 à 21 ans confiés par les Juges des Enfants ou les services de la Population, pour un bilan en vue d'une orientation ou d'une formation dans l'établissement.
La période 1956 à 1962 marque le développement et l'orientation des activités de l'Association.

Le Centre artisanal du Beau Fraisier s'installe progressivement sur une propriété de 5 hectares, à Dely Ibrahim, banlieue d'Alger. Les constructions de ce nouvel établissement sont réalisées par deux petites entreprises avec le concours des ateliers du centre du Beau Fraisier. L'effectif de l'internat est porté à 90 lits, en structures pavillonnaires de 15. L'externat comporte 110 places pour 10 sections professionnelle et un ensemble de 6 classes.

La Maison d'Enfants d'âge scolaire de Delly Ibrahim :
Cet établissement est destiné à recevoir 45 jeunes d'âge scolaire en difficulté d'adaptation sociale ou scolaire. Il a été construit grâce au concours financier du Fonds Social d'une Caisse Départementale.

Le Centre de Formation d'Educateurs (trices) :
Dès 1952, d'une manière embryonnaire s'ouvrent, Allée des Mandariniers à Alger, puis avenue Savorgnan de Brazza, des stages de perfectionnement en cours d'emploi, puis de préparation à l'entrée en école spécialisée. En 1957, avec le concours financier du Fonds Social, un centre de formation d'éducateurs et d'éducatrices spécialisés est construit à Delly Ibrahim, à proximité de la maison d'enfants.
L'organisation et le fonctionnement pédagogique ont été mis en place avec le concours de Mr Pinaud, Directeur du centre de formation d'Epinay/seine. Agréé par le Ministère de la Santé et par le Gouvernement Général de l'Algérie, l'établissement reçoit en internat 24 stagiaires.

La Maison d'Enfants d'Arcole (Oran) :
Prévue pour l'accueil en internat de 60 enfants, cette maison achevée en juin 1962, n'a pu être mise en service.

§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§

Après l'Indépendance de l'Algérie, les activités de l'Association de sont poursuivies jusqu'au 30 juin 1965. Par décret n° 65146 en date du 3 mai 1965, le Gouvernement Algérien a décidé de transférer à l'Etat, certains établissements de l'organisme privé "Moissons Nouvelles ". (Ecole d'Educateurs, Etablissements de Delly Ibrahim, d'Hussein Dey et Tlemcen.)

L'attaque de " Mers el Kébir" 3 Juillet 1940

Une escadre de la flotte française, la force du raid, se trouvait dans le port de Mers el Kébir, près d'Oran. Conformément aux clauses de l'armistice, elle procédait à son désarmement. Au moment de la défaite de juin 1940, la flotte française était répartie le plus possible, hors des eaux métropolitaines, savoir dans les ports britanniques, aux Antilles, en Egypte, tandis que les croiseurs " Richelieu et Jean Bart " ralliaient Casablanca et Dakar. Les anglais craignaient que la flotte française tombe aux mains des allemands, la convention d'armistice et le serment de l'Amiral Darlan étaient les deux seules garanties protégeant la Grande Bretagne contre ce péril.

Churchill imposa l'opération " Catapult " dont l'objectif fut la neutralisation de la flotte française. La force anglaise " H ", commandée par l'amiral Sommerville, se présenta le 3 juillet devant la rade de Mers-El-Kébir. L'amiral Gensoul, commandant l'escadre française, avait cru qu'il éviterait la tragédie car il avait pris sur lui de montrer à l'officier britannique les instructions secrètes dont tout commandant d'un bâtiment de guerre français était muni. En vain, à 16 heures 26, Sommerville, l'amiral anglais, Sommerville, qui avait spontanément prolongé le délai de l'ultimatum, reçut le message suivant : " Les Français doivent se couler ou vous devez les couler avant la nuit.
La canonnade commença à 17 heures 54, les navires français étaient des cibles entassées à l'ancrage dans le port. Le tir cessa lorsque l'amiral Gensoul signala que tous ses navires étaient hors de combat.
La voix étranglée d'émotion, Darlan déclara : " j'ai été trahi par mes frères d'armes, ils n'ont pas cru en la parole que je leur avais donnée ".
Le ressentiment de la marine et de la nation française sera long à s'apaiser.

8 MAI 1945 Troubles du Constantinois

Durant la seconde guerre mondiale, des milliers d'européens et de musulmans d'Algérie sont morts, côte à côte lors de la campagne d'Italie, du débarquement en Provence et de la libération de la France.
Le jour de l'Armistice, les manifestations de la Victoire dégénèrent dans le Constantinois, notamment à Sétif et à Guelma.
A Sétif, la manifestation à laquelle prennent part les musulmans dont bon nombre sont des militants des Amis du Manifeste et de la Liberté, le parti de Ferhat Abbas, et du Parti du Peuple Algérien se transforme en émeute sanglante : des coups de feu, des victimes, des blessés, des morts. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre ; des fermes et des villages sont attaqués, des européens sont tués et une terrible répression s'enclenche. Aux atrocités commises par les émeutiers, le gouvernement réplique par une répression impitoyable. Des centaines d'insurgés sont tués dans les villes et les douars.
A Guelma, on estime le nombre des victimes à plusieurs centaines. L'impact de ces tragiques journées est énorme, c'est un choc qui sera à l'origine de la rupture entre les deux communautés.
Ces douloureux évènements n'ont pas fait l'objet de compte-rendu détaillé dans la presse locale ou régionale. C'est beaucoup plus tard qu'on a obtenu quelques échos de cette tragédie.
Le général Duval, qui dirigeait la répression, avait dit aux autorités civiles : " Je vous ai donné dix ans de paix mais il faut changer les choses. "
Dans la nuit du 31 octobre au 1 er novembre 1954, la guerre d'Algérie commençait.

Messali Hadj (1898-1974)

Fils d'artisans et de cultivateurs, Messali Hadj est né à Tlemcen, le 16 mai 1898. Il a grandi dans un milieu familial très fervent. Dans sa jeunesse, il fréquente l'école de la confrérie religieuse des Derkaouas ainsi que l'école française jusqu'en 1916.
Après son service militaire effectué à Bordeaux, il fonde, à Paris, l'Etoile nord africaine qui se dote d'un programme d'inspiration démocratique et socialiste : Réforme agraire, l'unité nord-africaine et la lutte pour l'indépendance sont les principes directeurs (1933).

En 1937, Messali Hadj fonde le Parti du Peuple Algérien et devient l'apôtre d'un populisme révolutionnaire, a base d'Islam et de socialisme. En Algérie, d'autres personnalités militent pour l'égalité des droits. Il y a notamment Ferhat Abbas, pharmacien à Sétif, qui fonde l'Union Populaire Algérienne en 1938 ainsi que le cheikh Abelhamid ben Badis, président de l'association des Oulémas d'Algérie, mouvement réformiste musulman.
C'est la seconde guerre mondiale qui va faire exploser l'Algérie Française : la débâcle de 194O, la perte du prestige de la France, le vent de liberté apporté par les troupes alliées, après le débarquement de 1942, tout est réuni pour que la situation change. Le mouvement messaliste se déploie dans la structure unitaire des Amis du Manifeste et de la Liberté. En 1946, Messali Hadj fonde le Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques, M.T.L.D. et approuve la création d'une structure paramilitaire chargée de préparer la lutte armée, l'Organisation Spéciale, O.S.
Ce n'est pas Messali Hadj qui est à l'origine du déclenchement de l'insurrection du 1 er novembre 1954, mais un noyau de militants plus jeunes, qui vont former le F.L.N.
En décembre 1954, il espère faire prendre un nouvel élan à son organisation, rebaptisée Mouvement National Algérien, mais les divergences entre le M.N.A. et le F.L.N. dégénèrent et c'est une lutte sanglante entre Algériens. Messali Hadj se retire de la vie politique, refus de participer à la conférence d'Evian et abandonne le pouvoir à ceux qui l'accusaient de vouloir s'en emparer.
Il décède le 3 juin 1974 dans une clinique parisienne, ses funérailles dans sa ville natale de Tlemcen, bien que non annoncées publiquement, sont suivies par des milliers de personnes.
Il faudra attendre le 5 juillet 1999 pour que le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, décide de donner son nom à l'aérodrome de Tlemcen.

1954 VIE SOCIALE EN ALGERIE

L'histoire de l'Algérie est complexe comme celle de la France, et comme elle, elle est faite d'invasions successives. Les populations autochtones, les Berbères, ont vu défiler des conquérants divers : Phéniciens, Romains, Vandales, Arabes, Turcs puis les Français. C'est la conquête arabe qui sera la plus marquante, toute la Berbérie sera islamisée.
Dès le début de la conquête, s'installent en Algérie des militaires, des fonctionnaires, des artisans, des petits commerçants qui viennent surtout du sud de la France. Par la suite, des paysans, des ouvriers arrivent de plus en plus nombreux, confirmant le mouvement général d'immigration du 19éme siècle. Tous ces arrivants s'ajoutant aux juifs et aux immigrants italiens, espagnols, maltais, grecs vont former une population originale, variée, indépendante, qui atteint en 195O, 1.O42.OOO personnes.

Quant on parle des " Français d'Algérie ", on a tendance à les assimiler tous à des colons aisés. En 1957, il y a en Algérie 12.OOO colons environ dont 3OO sont riches et une dizaine excessivement riches. Les autres " colons ", un million d'êtres humains, sont des ouvriers, des fonctionnaires, des employés, des garagistes, des chefs de gare, des infirmières, des standardistes, des ingénieurs, des enseignants, des commerçants, des chefs d'entreprise, et leur ensemble représente l'infrastructure économique du pays.
L'histoire de l'Algérie est singularisée par une situation politique faite d'attitudes d'espoir des musulmans, face à leur devenir. De 19OO à 193O, l'espoir d'accès à la citoyenneté française puis après 193O, l'espoir en la future nation algérienne.
En 1943, Ferhat Abbas fonde le MTLD qui réclamait l'abolition de la situation inférieure faite aux indigènes, une constitution propre à l'Algérie, la réforme agraire et la reconnaissance de l'arabe, comme langue officielle à côté du français. En fait, il dénonçait le refus de donner aux musulmans le droit de cité français et réclamait la participation des musulmans au gouvernement de l'Algérie. Le 7 mars 1944, une ordonnance du Comité Français de Libération Nationale accordait l'égalité des droits et conférait la citoyenneté à 60.000 musulmans algériens, l'exercice du droit de vote étant réparti entre collèges.

En 1947 est voté le statut de l'Algérie, c'est un compromis entre les tendances autonomistes et le rattachement à la Métropole. L'Algérie est un groupe de départements, le gouverneur général subsiste, il dépend du Ministère de l'Intérieur.
Ce statut, prévu pour assurer l'égalité des deux parties de la population, n'a été que partiellement appliqué en raison des réticences ou des résistances des diverses populations, constellation de groupes ethniques différents. (Il y avait, en Algérie, un non musulman pour neuf musulmans).
La masse musulmane restait profondément attachée à sa religion et à son particularisme, les intellectuels, même formés dans les universités françaises, ambitionnaient de prendre en mains le sort de leur pays. A l'opposition religieuse, s'ajoutaient les problèmes sociaux. Les européens, dans l'ensemble, constituaient les cadres ; nombre d'indigènes des tribus s'employaient sur les plantations et dans les villes, devant un prolétariat souvent misérable et sensible aux propagandes politiques.
A toutes ces causes de trouble s'ajoutait le mouvement de Renaissance Arabe qui prit naissance en Egypte et en Syrie. Il prêche l'unité arabe, l'usage de l'arabe classique, l'épuration de la religion. A partir de 1954,les événements se sont précipités……….

1954 LA TOUSSAINT ROUGE

Les actions armées du 1er novembre 1954 ont marqué le début d'une longue guerre de libération. Les premiers attentats ont surpris autant les Français et les Autorités que les Musulmans et leurs partis politiques. Le bilan militaire n'était pas considérable mais l'impact psychologique et politique était énorme. Des attentats multiples dans différents lieux du territoire, au cours de la même nuit, révélaient une synchronisation et une organisation qui annonçaient un tournant décisif de la politique algérienne.
Ce 1er novembre, les Algériens en s'éveillant apprennent des nouvelles stupéfiantes : un chapelet d'attentats contre des édifices publics, des fermes européennes, des casernes et des personnes, a été commis à Alger, dans le Constantinois et en Oranie.
L'attentat le plus émotionnel, c'est l'attaque d'un car dans les Aurès où sont mitraillés un jeune couple d'instituteurs et le caïd qui voulait les défendre. Rapidement, les Aurès apparaissent comme le bastion de la résistance algérienne.
Dans les campagnes et les villes, les sentiments sont partagés :Un sentiment profond et une fierté réelle de voir l'Algérie se joindre au " Djihad " commencé dans les pays voisins mais aussi la crainte d'une répression plus terrible que celle qui a suivi Mai 1945.
Dans un premier temps, les partis politiques Algériens ont été surpris par ces actions et leurs réactions ne furent pas identiques. En réalité, les Messalistes qui avaient opté pour l'action armée avaient été devancés par des militants nationalistes qui ont constitué le Front de Libération Nationale et l'Armée de Libération Nationale.

1956… Etudiants et Lycéens soutiennent le F.L.N.
Le congrès constitutif de l'Union Générale des Etudiants Musulmans Algériens - U.G.E.M.A.- s'est tenu à Paris, du 8 au 14 Juillet 1956.
Le programme arrêté, outre l'aspect corporatif, prône l'enseignement de la langue arabe à tous les degrés, le soutien aux élèves du secondaire en les aidant à lancer des associations de la Jeunesse Estudiantine Musulmane. L'U.G.E.M.A. s'engage, de plus en plus, dans l'action politique, elle proteste contre la répression qui a suivi le 20 août 1955.

Au 2ème congrès de Paris, l'U.G.E.M.A. réclame la proclamation de l'indépendance de l'Algérie, la libération de tous les détenus politiques et l'ouverture de négociations avec le F.L.N..
Le 18 mai 1956, l'U.G.E.M.A. appelle à une grève illimitée des cours et des examens et demande aux étudiants de rejoindre les rangs de l'Armée de Libération Nationale. Cette déclaration reflétait l'enthousiasme de la jeunesse estudiantine.

L'étudiant Yousef, devenu colonel dans l'A.L.N., a écrit à propos de la grève des étudiants : " appelée faussement grève des étudiants, il faudrait parler plutôt de la grève des études car la majorité des grévistes étaient des lycéens et des collégiens, en général des classes de seconde et de première ".
De nombreux étudiants accédèrent à des postes de responsabilité au sein des organisations du F.L.N. et de l'A.L.N.

L'ECOLE EN ALGERIE 1830 - 1962

C'est dans le livre de l'association intitulé l'école en Algérie - Editions Publisud Paris -, que j'ai puisé mes sources pour rédiger une notice destinée à faire comprendre les mécanismes complexes de la scolarité en Algérie, notamment au niveau de l'enseignement primaire.

Dans l'Algérie Turque de 1830, l'instruction publique n'était pas organisée, elle était dispensée dans les Medersas (niveau supérieur), dans les Zaouïas (niveau secondaire), les écoles coraniques représentaient le niveau primaire.
En 1838, les Berbères qui constituaient le tiers de la population ne parlaient, ni n'écrivaient l'arabe. Sur les deux tiers restants seuls les garçons fréquentaient l'école coranique.

Dès 1830, les régimes qui se succèdent en France tentent de mettre en place différents systèmes éducatifs qui seront voués à l'échec, car ils se heurteront à 2 foyers de résistance :
Le refus de l'école française, une opposition à la colonisation.
La résistance des Européens à replacer dans le contexte de l'époque, celui de l'entreprise coloniale, système discriminatoire et inégalitaire.

C'est à partir de 1881 que la scolarité bénéficia d'une impulsion nouvelle avec les lois de Jules Ferry qui instaurent pour les européens la même école laïque, obligatoire et gratuite, aussi bien pour les garçons que pour les filles, à l'exclusion des enfants indigènes. En 1883, un décret créait les écoles indigènes, les organisait et leur donnait une forme définitive.
En 1930, le nombre d'élèves musulmans inscrits dans les écoles primaires élémentaires s'élevait à 117.180 ; il restait 900.000 élèves musulmans à scolariser, alors que la totalité des enfants européens l'était.

En 1944, la place prise par l'Algérie dans notre histoire justifiait politiquement un vaste programme de réformes. La soif d'égalité poussa les élites musulmanes à demander l'abolition de toute discrimination entre " Européens et Indigènes " dans l'enseignement.
Le décret du 27/11/1944 règle les modalités de l'effort à accomplir, notamment l'ouverture de 20.000 classes sur une durée de 20 ans. Un autre décret du 15 mars 1949 opère la fusion des enseignements par la suppression de l'enseignement indigène, un texte qui suscita beaucoup d'enthousiasme, tant sur les enseignants indigènes qu'auprès de la population musulmane, qu'ils ont délivrée d'un certain complexe d'infériorité.

En 1950, on enregistrait 377.848 élèves scolarisés dans 2.294 écoles comprenant 9.735 classes.
En 1954, 12,75% des élèves de 6 à 14 ans étaient scolarisés. Ces progrès étaient encourageants mais la marée démographique annihilait la lutte contre l'analphabétisme.
La guerre d'Algérie n'arrêta pas l'application du plan de scolarisation de 1944, bien que le rythme initialement prévu ne fût plus en rapport avec l'accroissement de la population scolarisable. Le plan de Constantine accéléra la scolarisation et la formation des maîtres : 6 nouvelles écoles normales s'ajoutaient aux 6 déjà existantes. Au cours de l'année 1959-60, elles comptaient un effectif de 1.426 élèves-maîtres à comparer aux 300 de l'année 1950. Les dernières statistiques traduisent l'accélération de la scolarisation, les effectifs des élèves musulmans étaient passés de 346.000 à 632.360 élèves, soit une progression de près de 80% sur deux ans. A ces chiffres, il convient d'ajouter les 70.864 enfants scolarisés dans les écoles de pacification et 10.000 élèves scolarisés dans les centres sociaux.
Ce bilan final doit être relativisé car le taux de croissance démographique empêcha, après les mesures prises en 1944 et 1958, de combler l'énorme retard accumulé lors des années antérieures.

S'il convient de dire que l'école n'a pas toujours fonctionné dans l'égalité républicaine pour tous les enfants d'Algérie, il faut reconnaître que les résultats obtenus par les enseignants pour l'instruction et l'éducation des enfants qui leur était confiés.
Joseph ALETTI - Brassac 2009 -
FIN de ce récit
Ce récit est la vie d'un homme au service de la jeunesse en Algérie et qui n'a pas hésité à continuer son oeuvre de pionnier en France.
C'est ça l'Algérie Française, faite d'hommes de coeur et de bâtisseurs.
Merci M. Aletti d'avoir voulu partager votre récit sur la Seybouse, écrit pour la mémoire et non pas pour récolter des subsides comme c'est le cas pour une grande majorité de livres. MERCI



"B Ô N E " REVERIES D'HIVER
Envoyé par Mme Colette Lévy

Peinture Mme Colette Levy
Cathédrale de St Augustin                             cours Bertagna                        

              Notre belle Cathédrale s'est parée de son manteau blanc,
              Et nous ne verrons plus un seul amoureux sur un banc.
              Sur une branche, un petit oiseau sifflote frileusement,
              Puis, un deuxième l'entraîne vers les cieux précipitamment.

              Un enfant rose et blond joue dans les jardins de la Mairie,
              D'autres bambins se cachent et leur grand-mère en rit…
              L'écho monte alors dans nos cœurs,
              Et nous voilà plongés dans un grand bonheur,
              Celui où l'esprit danse tendrement avec notre cœur.

              Au loin, sur la grande robe blanche de Bugeaud, tout est silencieux,
              Et toi mon cœur, tu es déjà anxieux,
              Tu rejettes la douce voix répétant : " Tout est beau ici, mais il faudra partir ",
              Toi mon âme tu sais que : " Partir c'est mourir ".

              Mais mon être vibre à travers une lueur d'espoir,
              Une petite flamme scintillante rejette tristesse et déboires,
              Soudain, les mélodieux carillons de la Cathédrale résonnent au son de mon cœur,
              Mon âme murmure : " Je vous quitterai Amis, paysages, mais à jamais je vous garderai dans mon cœur ".

Colette LEVY
Avec ma plus grande sincérité,


La Cathédrale et le Cours Bertagna peints par Colette LEVY.
Site : http://www.amisdebone.com
Forum: www.amen.forumsactifs.com



PHOTOS NAVALES
Tirées de Gallica
L'ATTAQUE D'ALGER EN 1816
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LES FRANÇAIS EN ALGERIE (1845)
Source Gallica : Louis Veuillot N°3
Souvenirs d'un voyage
fait en 1841, par Louis Veuillot,

 XII - POUVAIT-ON CONVERTIR LES MUSULMANS ?

          La foi chrétienne et l'expérience de dix-huit siècles ne nous permettent pas de croire qu'il puisse exister jamais un peuple inconvertissable. L'Évangile règnera sur le monde ; tous les peuples l'ont reçu, toutes les passions l'ont subi, toutes les ignorances se sont laissé pénétrer à sa douce lumière. Si une société quelconque devait à jamais échapper à son amour, rester éternellement sourde à sa voix et demeurer insaisissable à l'abri d'un obstacle plus fort que lui, ce serait assurément le spectacle le plus étonnant et le plus effrayant qu'on eût encore vu sur la terre. La société musulmane ne peut être cette société-là. Le christianisme qui, un moment, a paru plier devant elle, a fait dans son sein les conquêtes qu'on lui a vu faire partout. Les musulmans n'ont pas été plus invincibles que les idolâtres du Japon et de la Chine, que les fétichistes et les sauvages de l'Afrique et de l'Océanie, que les philosophes de l'Europe; tous les jours, à Constantinople, nos sœurs de charité leur apprennent à croire en Jésus-Christ, avant même que les progrès de la civilisation les aient mis dans l'impossibilité de croire en Mahomet. Je sais que l'erreur des nations est retranchée derrière des remparts autrement forts que celle des individus. L'individu n'est défendu que par ses passions, il est seul, il est libre ; pour lui porter la conviction, il suffit d'un homme. Les nations se défendent par la multitude, par l'ignorance, par les coutumes et les mœurs, enfin par la violence, et le missionnaire voit s'opposer à lui des armées. Néanmoins, quand un individu raisonnable et de bonne foi a pu abjurer l'erreur, tout un peuple peut l'abjurer à son tour, et les nations chrétiennes ont aussi la force pour y pourvoir. Toute tyrannie en matière de religion est impolitique et impie; mais quand la conquête, déterminée par une raison humaine, est opérée, le meilleur moyen de la justifier, de la rendre plus douce et de la consolider, est de diriger la force de telle sorte qu'elle aide aux conquêtes de la religion.
          Sans dire au vaincu : Crois Ou meurs, ni même, ce qui est moins dur et plus excusable : Crois ou va-t-en; sans lui demander en aucune façon l'abandon de son culte, la simple politique du bon sens conseille de lui faciliter tous les moyens d'y renoncer; et quand la religion du vainqueur est la religion chrétienne, c'est-à-dire la vérité divine ; quand la religion du vaincu est l'islamisme, c'est-à-dire un amas de dogmes abrutissants et sauvages, ces efforts que le bon sens conseille, l'humanité ne les exige-t-elle pas? N'est-ce pas le premier des devoirs de mettre la religion chrétienne à même de travailler par les moyens qui lui sont propres, par la prédication et les bonnes oeuvres, à la conversion des vaincus? Serait-ce une perfidie d'ajouter à son action les mesures d'administration qu'elle pourrait indiquer, d'ouvrir des écoles religieuses, d'accorder quelques faveurs aux néophytes, de combattre dans les moeurs et dans les coutumes ce qui s'opposerait le plus à un changement désirable sous tant de rapports? Voilà tout ce que j'entends par la force. Je n'en exige pas d'autre secours. Son œuvre principale, c'est la conquête; lorsque cette œuvre est accomplie, je ne lui demande que de croire en Dieu et de se montrer le moins possible.

          La conversion des musulmans de l'Algérie aurait, dans ma pensée, rencontré d'autant moins d'obstacles, que leur croyance, aujourd'hui dépouillée de l'âpre fanatisme qui la caractérisa, s'est réduite, pour le plus grand nombre, à une sorte de déisme, bien grossier il est vrai, mais non pas enfiellé de philosophisme et de secrète incrédulité. Ils ont une foi naïve et profonde ; aucun mystère n'étonne leur esprit; ils ne refusent point à Dieu une puissance que l'homme ne peut avoir, et des qualités qu'il ne peut comprendre ; la vénération dont ils entourent leurs marabouts montre qu'ils sauraient estimer la vertu, puisqu'ils honorent tant les simples apparences de la régularité. Nos ordres religieux auraient excité, je ne dis pas seulement leur respect, mais leur admiration et leur enthousiasme, et bientôt leur reconnaissance. De la main des moines ils auraient reçu les bienfaits et les vérités que nos gouverneurs et nos fonctionnaires civils ne sauraient leur faire accepter, et songent encore moins à leur offrir. En tous cas, c'était une oeuvre à tenter, et n'eût-on laissé à la religion que les orphelins, que les pauvres, que les prisonniers, tous les misérables seraient devenus autant de voix qui auraient publié dans la langue des vaincus les générosités de la France, les œuvres miséricordieuses de son culte, l'inépuisable charité des ministres de son Dieu.

          Mais nous avons été loin d'agir ainsi. La première des conditions à remplir pour convertir les hommes, c'est la foi : elle nous a manqué, elle nous manque encore. Comment amener les musulmans au christianisme, lorsque nous ne sommes pas chrétiens nous-mêmes ? L'absence de toute conviction, de toute idée religieuse nous a empêchés de comprendre que le mahométisme pouvait être vaincu, elle nous a empêchés de vouloir le vaincre, elle nous a fait faire des fautes qui ont réveillé son fanatisme assoupi, qui l'ont fortifié. La religion de l'Évangile, commentée par nos oeuvres, a paru inférieure à la religion du Coran. C'est une chose digne, loyale et habile comme tout ce qui est loyal d'abaisser la puissance des vainqueurs devant l'inviolable sanctuaire de la conscience des vaincus, mais il faudrait que les effets répondissent en tout à la théorie : or nous n'avons respecté chez le vaincu que les préjugés qui s'opposaient à ce qu'il devint plus heureux et meilleur ; nous n'avons jamais reculé quand il s'est agi de l'opprimer et de le corrompre; nous avons redouté de paraître chrétiens, nous n'avons pas craint de nous montrer débauchés, cruels, impies, perfides même. Tel de ces musulmans, dont nous respections la croyance au point de rougir de l'Évangile, a vu un officier lui prendre sa fille, et l'Etat lui prendre sa maison.
          "Qui êtes-vous?" Disaient les Arabes à un brave officier qui m'a confié que son séjour parmi ces barbares l'avait ramené aux idées religieuses ; que nous apportez-vous? Quelle est votre religion? Jamais vous voit-on prier, jeûner, rendre hommage à Dieu ? Quand nous allons à Alger, nous trouvons dans les rues des chrétiennes dont les actions publiques nous font rougir ; nous passons par-dessus vos soldats ivres dans la boue; voyez-vous chez nous rien de pareil? Au contraire, vous nous voyez honorer Dieu, et vous ne l'honorez pas. Sachez que le dernier d'entre nous n'est pas ébloui des merveilles de Paris qu'on nous a fait voir, et dont nous parlons en nous moquant.
          Vous avez des pièces de canon, des bateaux à vapeur, des ponts de fil de fer, des maisons où vous êtes enfermés: c'est bon pour vous; vous vous établissez dans le monde comme des gens qui voudraient y rester toujours. Les musulmans dédaignent ces richesses. Ils savent que l'homme n'est dans la vie qu'en passant et pour en attendre une meilleure; et ils ne craignent pas de mourir.
          Vous autres, vous avez peur de la mort. Quand vos ivrognes tombent entre les mains d'Abd-el-Kader, ils se font musulmans pour être mieux traités, et Abd-el-Kader les méprise. Nous ne voulons être rien de ce que vous êtes : allez-vous-en."

          Les Douaires mêmes, qui nous servent, sont tourmentés de scrupules religieux. Le lendemain d'un avantage remporté par les Français, on entend toujours quelques-uns de ces sauvages cavaliers s'écrier : "Que n'étais-je parmi les Arabes, au lieu d'être ici, avec ces chiens qui ne prient pas ! Peut-être serais-je mort pour la religion."
          Ils disent : pour la religion, et non : pour la patrie. "Enfin, poursuivait cet officier, qui malheureusement n'était pas en état de venger le christianisme qu'il ne connaissait pas, lorsque nous combattons les Arabes, lorsque je sais qu'avant de nous attaquer, ils ont fait la prière, lorsque je sais que ceux qui meurent récitent en mourant la profession de foi et meurent martyrs, je me demande à qui Dieu s'intéresse, et je ne suis pas surpris de la stérilité de ces victoires que nous procurent la discipline, la tactique et le canon. "

          Tel est donc le véritable effet de cette indifférence que nous avons décoré du beau nom de respect pour la conscience d'autrui. Non, nous ne respectons pas la religion des Arabes, nous nous contentons d'insulter à la nôtre, et en même temps que nous nous privons par-là du bien particulier qu'elle pourrait nous faire, des services qu'elle aurait rendus dans nos hôpitaux et dans nos garnisons, de la moralité qu'elle aurait introduite dans nos populations civiles, des respects qu'elle nous aurait attirés de la part des indigènes, des avantages de la conduite plus humaine et plus scrupuleuse qu'elle nous aurait inspirée dans nos rapports avec eux, nous avons relevé l'orgueil et le courage de ceux-ci en leur donnant de justes raisons de se proclamer meilleurs que nous. Ils nous ont d'abord haïs comme infidèles, ils nous méprisent comme impies.

          Chose étrange et lamentable! Aujourd'hui que l'islamisme, ayant accompli sa mission, meurt abruti sur les ruines des plus belles contrées du monde, des exemples frappants nous montrent encore comment il a pu s'établir. Vers la fin du dernier siècle, des philosophes français trouvaient la religion de Mahomet moins impure que le christianisme, et de nos jours la France, maîtresse d'un pays musulman, y oublierait qu'elle est chrétienne, si ses ennemis ne le lui rappelaient pour l'insulter et justifier leur haine. Il y a plus : l'islamisme, si fort ébranlé à Constantinople par le peu de lumières qu'il a pu recevoir, fait en Afrique, sur les vainqueurs, les conquêtes qu'ils ne font pas sur lui. Des chrétiens, les uns par contrainte, les autres volontairement, ont embrassé l'islamisme, et je ne crois pas qu'aucun laïque ait essayé sur les musulmans un prosélytisme qui certainement n'aurait pas été encouragé, ni peut-être même souffert par l'autorité supérieure, dont les principes tolérants ne pardonneraient rien de pareil, même au clergé. Or pourquoi ces chrétiens ont-ils embrassé l'islamisme, sinon parce que l'ignorance de la religion dans laquelle ils sont nés les a livrés sans défense ou à la séduction de leurs désirs, ou à la crainte des mauvais traitements et de la mort (1) ?
          (1) Pendant longtemps les Arabes faisaient abjurer leurs prisonniers civils et militaires, et ces derniers n'ont pas toujours résisté. Voici ce que je lis dans la déposition d'un nommé Thoumen, potier à Boufarik, enlevé par les Arabes le 10 février 1840 : "Thoumen, Guchs, et le fils de ce dernier, âgé de huit ans, furent enlevés par un parti d'Hadjoutes. Ils n'eurent point à subir de mauvais traitements ; le fils de Guchs fut même l'objet d'attentions particulières. Les Arabes ne coupent plus la tête ; ils ne cherchent qu'à faire des prisonniers.
          "Ceux-ci, après avoir abjuré le christianisme, sont enrôlés, s'ils sont militaires, dans les troupes de l'émir; s'ils sont colons, on les envoie dans l'intérieur pour travailler. Thoumen vil un soldat et un tambour du bataillon d'Afrique, enlevés la veille ; trois Espagnols arrivèrent le lendemain. Après trente-six heures de captivité, Thoumen put s'échapper. Son compagnon Guchs refusa de le suivre, ne voulant point abandonner son fils."
          On voit par la phrase que nous avons soulignée combien l'abjuration des prisonniers est une chose ordinaire et devenue insignifiante. Citons quelques faits plus honorables. Le 23 mai 1842, trente hommes, commandés par un officier, furent attirés dans une embuscade, aux environs de la Maison-Carrée et massacrés impitoyablement. Au nombre des assaillants se trouvaient dix déserteurs de la légion étrangère, dont la cruauté dépassa celle des Arabes.
          Un seul soldat, nommé Waguener, échappa à la mort. Emmené en captivité, il put s'évader, et fut rencontré, mourant de faim et de fatigue, par une patrouille, auprès de l'un des camps de la Mitidja. Il raconta que son détachement, entouré par plusieurs centaines d'ennemis; avait à peine eu le temps de se défendre, et que ses malheureux camarades étaient tombés presque tous à la fois. Blessé lui-même et étendu à terre, il avait vu son brave officier et le tambour, restés seuls debout, refuser la vie, que les chefs leur offraient s'ils voulaient embrasser la loi du prophète, et succomber aussitôt. Pour Waguener, il n'avait pas eu le même courage ; il s'était rendu cl avait été circoncis. Sa captivité fut extrêmement douloureuse ; mais Dieu laissa la vie au renégat pour qu'il pût faire connaître la vertu des martyrs.
          Dans une autre circonstance, un prisonnier français avait consenti à prononcer la formule; ce n'était pour lui qu'une parole vide de sens. Il lui restait à recevoir l'espèce de tonsure usitée chez les musulmans. A ce moment il vit la honte de l'apostasie, et résista. On lui dit de choisir : " Qu'on me coupe la tête ! S'écria-t-il sans hésiter; je suis chrétien! " Il eut la tête tranchée. Abd-el-Kader avait fini par défendre qu'on exigeât l'apostasie des prisonniers. Il fil sévèrement punir un de ses agents qui avait voulu contraindre à cet acte infâme quatre-vingts malheureux, qui tous étaient décidés à mourir le lendemain.

          Certes, ni l'évidence de la vérité, ni l'éloquence des imams et des muftis n'ont pu déterminer de pareilles résolutions. L'homme intelligent et instruit qui ne peut croire à la mission de Jésus-Christ ne croit pas davantage à celle de Mahomet; si le miracle des pains multipliés répugne à sa raison, elle ne peut davantage accepter le miracle de la lune fendue en deux. Aujourd'hui donc, comme au septième siècle, ce n'est pas le Coran qu'on accepte lorsque l'on pense, c'est l'Évangile qu'on nie.

          Je rencontre des gens d'esprit, éclairés par un long séjour en Afrique, qui, sans tomber dans l'excès des encyclopédistes, et sans vouloir inutilement renoncer au titre de chrétien, ce qui est d'ailleurs une mauvaise spéculation, trouvent cependant que l'islamisme est après tout une religion aussi bonne qu'une autre, et à beaucoup d'égards plus commode, si l'on prend soin d'en élaguer certains préceptes superstitieux, tels que l'interdiction du vin et l'obligation de la prière. Ils le pensent et le disent, en présence de ces deux rives de la Méditerranée, qui proclament si haut l'abjection de la doctrine de mensonge et la gloire de la doctrine de vérité!
          Ils savent que, quand l'islamisme est venu fondre sur l'Afrique, celle-ci, malgré les récentes dévastations des Vandales, était plus civilisée que l'Europe, dont plusieurs contrées s'agitaient encore dans les ténèbres de l'idolâtrie; ils voient l'Europe lumineuse, forte et prospère, l'Afrique sauvage, sanglante et dépeuplée, et ces destinées si contraires ne les instruisent pas ! On les entend reprocher à l'Eglise son intolérance, ses dogmes surannés, l'asservissement où elle retient la raison humaine, l'obstacle qu'elle oppose à l'esprit de progrès; bref, toutes les sottises mal digérées qu'on ramasse dans les collèges et contre lesquelles la grande voix de la raison et des faits proteste vainement. Il ne faut pas hausser les épaules, il faut gémir, car ces hommes ne sont pas des fous, et parmi ceux qui les écoutent, ils passent encore assez volontiers pour savants. Ils ont d'ailleurs rendu quelques services, on croit à leurs lumières, à leur expérience, et beaucoup de mesures importantes sont prises ou inspirées par eux. Or la vérité est que, désespérant de montrer aux Arabes une foi et des vertus supérieures à celles dont ils se targuent, ils pensent à les imiter bien plus qu'ils ne songent à les convertir. S'étant aperçus de ce mépris sans bornes que la foi musulmane ressent pour l'incrédulité des chrétiens, une espèce d'émulation s'est éveillée dans leur âme. Ils se sont mis à parler de Dieu aussi; ils se sont dit bientôt qu'il fallait croire, qu'il était bon de prier, et, préparés par leur éducation, entre les deux croyances qui s'offraient à leur esprit ils ont naturellement donné la préférence à celle qui ne leur demandait ni sacrifice, ni changement, ni pénitence. Qu'est-ce que l'islamisme dépouillé de ses pratiques ridicules et de ses insoutenables fables? Un vain aveu de l'existence de l'Etre suprême, au niveau de tous les enseignements de la philosophie, c'est-à-dire de toutes les leçons que nous donnent les révoltes et les corruptions du cœur.

          A côté de ces mystiques, qui ne jugent pas à propos de se faire circoncire, mais qui ne verraient pas de mal à ce que les Français en masse devinssent musulmans, il y a les hommes d'affaires. Le spectacle de la foi ne les touche que d'une façon : ils en ont peur, voyant là une force qui n'est point en nous. Sans se mettre en peine de décider lequel vaut le mieux de l'Évangile ou du Coran, travail théologique au-dessus de leurs forces, ils ne s'occupent ni de l'un ni de l'autre, et craignent seulement de compliquer les affaires en irritant ce fanatisme qui leur semble un des caractères les plus fâcheux de la barbarie, et qui est moins barbare assurément, moins sauvage et moins honteux que leur matérialisme. Pour assurer la soumission du pays, ils comptent sur le sabre d'abord, et ensuite sur les avantages que notre commerce procurera aux indigènes. Il n'est pas de momeries musulmanes, et je dirais presque de lâchetés, s'il ne fallait avoir pitié de leur ignorance, que n'obtienne d'eux l'espérance d'adoucir ce fanatisme intraitable et désespérant. Ce sont eux qui, renouvelant autant qu'ils le peuvent la honteuse comédie jouée par Bonaparte en Egypte, ont employé les mains d'un prince français, d'un descendant de saint Louis, à poser la première pierre d'une mosquée, lorsqu'ils demandaient à la pitié des musulmans de leur faire cadeau d'une église; ce sont eux qui, dans les expéditions, ne se contentent pas de respecter les chapelles élevées en l'honneur des marabouts, mais encore y font des offrandes ; ce sont eux qui tirent le canon pour célébrer le mois de ramadan; ce sont eux qui ont autorisé la folie de quelques jeunes gens qu'on a vus embrasser l'islamisme. S'ils l'osaient, ils feraient publiquement la prière du Mugrheb avec autant de zèle qu'ils en sauraient montrer dans le cas où il faudrait empêcher les soldats français de réciter l'Angélus.
          Ils savent parfaitement que, pour nous combattre, les Maures ont quitté en foule Alger, où beaucoup d'entre eux étaient misérables (en grande partie par notre faute), mais où du moins leur religion était plus honorée qu'inquiétée; ils savent qu'Abd-el-Kader doit, avant tout, l'influence qu'il exerce sur ses compatriotes à son titre de marabout et à sa réputation de sainteté ; que, pour le suivre, un grand nombre de tribus ont tout sacrifié, tout souffert; que les Kabyles mêmes ont abandonné leurs montagnes pour attendre les Français dans les camps de l'émir, où, manquant de pain, ils mangeaient de l'herbe ; ils savent, enfin, que le reproche qui nous est fait n'est pas de combattre la religion des musulmans, mais de n'avoir pas de religion nous-mêmes;toutes ces circonstances sont comme non avenues, ils persistent à singer la piété musulmane, à penser qu'il est malheureux que nous soyons chrétiens, à craindre que l'évêque, s'il venait à convertir un Maure, ne nous fit du même coup des milliers d'ennemis.

          Sur quels faits, sur quelles raisons se fondent-ils, c'est ce qu'il m'a été impossible de découvrir. Arabes et Maures n'ont jamais témoigné que beaucoup de respect pour nos prêtres, et beaucoup d'estime pour les rares chrétiens qu'ils ont vus s'acquitter du devoir religieux. Lorsque la France voulut avoir dans Alger une église, ce qui n'eut lieu que deux ans après la conquête, les Ulémas, qui ont montré en toute occasion plus de fanatisme que le reste du peuple, nous concédèrent avec joie la mosquée que nous avons appropriée à cet usage, et nous félicitèrent, peut-être avec un peu d'ironie, de la résolution qui nous venait enfin d'honorer notre Dieu (2).
          (2)"L'église catholique fut établie dans une mosquée : cette mesure choqua beaucoup moins les musulmans qu'on n'aurait pu le croire, car notre indifférence religieuse était ce qui les blessait le plus. Ils furent bien aises de voir que nous consentions enfin à prier Dieu. (M. Pélissier, Annales algériennes, t. II.) " On remarque dans le même ouvrage que la population d'Alger ne s'émut nullement de la conversion d'une Moresque, qui occasionna cependant la destitution et le remplacement du mufti.

          L'évêque a reçu de tous les musulmans l'accueil le plus cordial et le plus respectueux; les malheureux sont venus à lui; Abd-el-Kader et ses khalifats, lui supposant une autorité qu'il n'a pas et une influence qu'on lui refuse, ont eu recours à son intervention; la ville de Constantine tout entière semblait vouloir se jeter dans ses bras; les rares conversions qui se sont faites n'ont soulevé aucune réclamation, aucune plainte : que craint-on ? J'ai peur quelquefois qu'on ne craigne le bien, et qu'une incompréhensible jalousie, s'ajoutant aux préjugés de l'éducation et de l'ignorance, ne fasse considérer comme ravi à la gloire du sabre tout ce que la soutane pourrait accomplir d'heureux et de grand.
          Il est certain du moins qu'après avoir installé la religion avec une sorte de pompe, on nourrit contre elle, au moins dans les basses régions du pouvoir, sinon dans les plus hautes, je ne sais quelle hostilité qui ne se déguise pas toujours. On la gêne, on la taquine, on a mille raisons de politique et d'économie pour s'opposer à ses développements. Il est facile de voir que les empiétements du clergé ne sont pas moins redoutés à Alger qu'ils ne le sont à Paris. On entoure l'évêque de plus d'honneurs qu'il n'en réclame. Il a rang de maréchal de camp, un factionnaire est à sa porte et lui présente les armes lorsqu'il passe ; mais il n'est d'aucune commission, d'aucun conseil; on le considère, lui ministre de Dieu, comme une superfétation au milieu de cette société qu'il s'agit d'organiser. Heureux lorsque, voyant la population civile s'agglomérer autour d'un camp ou d'une garnison, il peut faire porter au budget la modique rétribution nécessaire pour y entretenir un prêtre. S'il proposait d'en donner un à ces garnisons lointaines enfermées par l'armée ennemie, on lui répondrait peut-être, comme ce ministre de la marine à qui l'on proposait de mettre des aumôniers sur les vaisseaux : "A quoi bon, puisqu'il n'y a point de femmes ?

          Bref, en matière de religion, c'est le mauvais côté, le côté officiel de l'esprit français qui règne sur l'Algérie. Faut-il maintenant s'étonner des obstacles que nous oppose l'islamisme ? Malgré nos églises, malgré nos prêtres, déjà si impuissants par leur petit nombre, et garrottés encore par une politique hostile lorsqu'elle n'est pas indifférente, les Arabes sont restés dans cette conviction que nous sommes un peuple athée (3).
          (3) Quelques-uns, voyant les prêtres et les fidèles s'incliner devant la croix, nous accusent d'idolâtrie; et ils appellent la religion catholique Din-el-hhâtob, religion de bois. Il était nécessaire de les tirer de celte erreur, et on le pouvait facilement ; mais on ne saurait imaginer à quel point toute espèce de prosélytisme était encore redouté en 1811. Le simple bruit de la prochaine arrivée d'un prêtre parlant arabe mit en émoi le gouvernement de la province de Constantine, cl l'ordre fut donné de l'arrêter à son débarquement. J'espère qu'il n'en est plus de même aujourd'hui; toutefois, je ne voudrais pas en jurer.

          Observez la foi de vos pères, écrivait Ben-Salem, khalifat d'Abd-el-Kader, à un Arabe qui lui demandait pardon d'avoir demeuré chez nous. Si vous voulez vous séparer de moi ou de notre seigneur et maître, le sultan, retournez à votre ferme avec la paix de Dieu, ou réfugiez-vous dans les montagnes protectrices telles que Flissah, Beni-Ratel, les terres musulmanes sont grandes ; mais ne restez pas chez ceux qui doutent de leur religion et de la nôtre." Ainsi nous avons soufflé sur un feu qui s'éteignait, et la guerre sainte prêchée contre nous fut aussi véritablement religieuse que nationale ; elle eut autant pour but d'attaquer des impies que de défendre un territoire dont nous ne réclamions qu'une petite part, et une croyance que nous respections jusqu'à manquer de dignité.


Je vous ai envoyé mes vœux
Envoyée Par Eliane

         "Je vous ai envoyé mes vœux, mais après consultation d'un avocat, je me suis rendu compte de l'imprudence de ma formulation.
         Vous souhaiter une bonne année, une bonne santé et la prospérité me soumet en effet au risque de poursuites pénales...
         Voici donc la version rectifiée de mes vœux, qui remplace la précédente, et qui est en conformité avec le principe de précaution inscrit dans la Constitution.
         Nouvelle formulation:
         Je vous prie d'accepter, sans aucune obligation implicite ou explicite de votre part, mes vœux à l'occasion du solstice d'hiver et du premier de l'an, en adéquation avec la tradition, la religion ou les valeurs existentielles de votre choix, dans le respect de la tradition, de la religion ou des valeurs existentielles des autres, ou dans le respect de leur refus, en la circonstance, de traditions, religions ou valeurs existentielles, ou de leur droit de manifester leur indifférence aux fêtes populaires programmées.
         Ces vœux concernent plus particulièrement :
         - la santé, ceci ne supposant de ma part aucune connaissance particulière de votre dossier médical, ni d'une quelconque volonté de m'immiscer dans le dialogue confidentiel établi avec votre médecin traitant ou votre assureur avec lequel vous auriez passé une convention obsèques ;
         - la prospérité, étant entendu que j'ignore tout de la somme figurant sur votre déclaration de revenus, de votre taux d'imposition et du montant des taxes et cotisations auxquelles vous êtes assujetti ;
         - le bonheur, sachant que l'appréciation de cette valeur est laissée à votre libre arbitre et qu'il n'est pas dans mon intention de vous recommander tel ou tel type de bonheur.
         NB 1 :
         Le concept d'année nouvelle est ici basé, pour des raisons de commodité, sur le calendrier grégorien, qui est celui le plus couramment utilisé dans la vie quotidienne de la région à partir de laquelle ces vœux vous sont adressés.
         Son emploi n'implique aucun désir de prosélytisme. La légitimité des autres chronologies utilisées par d'autres cultures n'est absolument pas mise en cause.

         Notamment :
         - le fait de ne pas dater ces vœux du Yawm as-sabt 1 Safar de l'an 1434 de l'Hégire (fuite du Prophète à Médine) ne constitue ni une manifestation d'islamophobie, ni une prise de position dans le conflit israélo-palestinien.
         - le fait de ne pas dater ces vœux du 2 Teveth 5773, ne constitue ni un refus du droit d'Israël à vivre dans des frontières sûres et reconnues, ni le délit de contestation de crime contre l'humanité.
         - le fait de ne pas dater ces vœux du 3ème jour (du Chien de Métal) du 11ème mois (Daxue, Grande Neige) de l'année du Dragon d'Eau, 78ème cycle, n'implique aucune prise de position dans l'affaire dite "des frégates de Taïwan".
         - le fait de ne pas dater ces vœux du Quintidi de la 3ème décade de Frimaire de l'an 221 de la République Française, une et indivisible, ne saurait être assimilé à une contestation de la forme républicaine des institutions.
         Enfin, l'emploi de la langue française ne sous-entend aucun jugement de valeur.
         Son choix tient au fait qu'elle est la seule couramment pratiquée par l'expéditeur.
         Tout autre idiome a droit au respect tout comme ses locuteurs.
         Clause de non responsabilité légale :
         En acceptant ces vœux, vous renoncez à toute contestation postérieure.
         Ces vœux ne sont pas susceptibles de rectification ou de retrait.
         Ils sont librement transférables à quiconque, sans indemnités ni royalties.
         Leur reproduction est autorisée.
         Ils n'ont fait l'objet d'aucun dépôt légal. Ils sont valables pour une durée d'une année, à la condition d'être employés selon les règles habituelles et à l'usage personnel du destinataire.
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         Leurs résultats ne sont, en aucun cas, garantis et l'absence, totale comme partielle, de réalisation n'ouvre pas droit à compensation.
         En cas de difficultés liées à l'interprétation des présentes, la juridiction compétente est le Tribunal habituel du domicile de l'expéditeur.
         Après ce préambule je me permets de vous adresser mes vœux.
         NB 2 :
         Le fait d'avoir choisi la police de caractère "Time New ROMAN" ne présuppose évidemment pas de jugement de valeur sur la Suisse.
         (Finalement, afin d'éviter tout problème, je l'ai remplacée par " Comic Sans MS)
         L'emploi de NB (terme latin Nota Bene) ne sous-entend aucune prise de position. Il est dû aux habitudes linguistiques de l'expéditeur et pourrait très bien être remplacé par " Ah au fait ! " ou toute autre expression plus moderne.
         Le choix de NB plutôt que PS (Post Scriptum) n'est pas forcément discriminatoire envers un parti politique et ne doit pas être pris pour un signe ostentatoire de préférence. (Quoi que, NDLR)"




Chantiers nords-africains
           Trouvé à la BNF            01-1930   N°4
Stade Universitaire à Alger
par X. SALVADOR, Architecte D.P.L.G.


                          Le nouveau Stade universitaire d'Alger aura ouvert ses portes quand notre article paraîtra, et un certain nombre de nos lecteurs connaîtront, pour les avoir admirées, les caractéristiques de cette œuvre particulièrement réussie.

             Une conception originale a allié l'idée de cité universitaire à celle de terrain de jeux, et a donné naissance à une Cité des Etudiants, qui occupe un des petits côtés du grand rectangle formé par le nouveau Stade. Cette Cité des Etudiants, orientée vers la mer, tourne le dos au Stade, en supportant une partie des immenses gradins réservés aux spectacles. La Cité comporte 90 chambres avec cabinet de toilette, qui sont remises gratuitement à l'Université d'Alger, qui se chargera d'y loger les étudiants peu fortunés.

             Le Stade lui-même réalise les idées de M. Champault, concessionnaire de l'ancien Stade municipal du Champ de manœuvres, dont l'emplacement est aujourd'hui occupé par les habitations à bon marché. Une longue pratique des stades, une connaissance parfaite des besoins des spectateurs et des sportifs devaient naturellement conduire M. Champault à la conception d'un stade présentant de grandes qualités.

             La principale de ces qualités est, bien entendu, la visibilité. Elle était déjà très caractéristique de l'ancien Stade municipal. Nous la retrouvons au Stade-Cité des Etudiants. De n'importe quel point des tribunes ou des gradins, le spectateur voit commodément l'ensemble du terrain, ainsi que le détail de la piste cycliste.

             Des emplacements spacieux attendent les spectateurs : deux tribunes couvertes, de cinq mille places, occupent les deux grands côtés. Elles sont montées sur gradins en ciment armé, dont les marches sont assez élevées les unes par rapport aux autres pour que les spectateurs dominent parfaitement les personnes occupant les gradins inférieurs.

             La couverture des tribunes est légère, de manière à pouvoir être supportée par une charpente métallique qui ne comprend qu'un nombre restreint de poteaux de section réduite. C'est là un avantage très net au point de vue visibilité.
             Les spectateurs des tribunes ont la disposition d'un balcon promenoir qui surmonte les gradins et qui longe les lucarnes des chambres de la Cité des Etudiants.

             Les gradins, en partie couverts, occupent les deux petits côtés du rectangle du Stade. Seuls, ceux qui s'adossent à la Cité universitaire sont actuellement terminés. L'ensemble des gradins comporte cinq mille places.

             Alger, capitale de l'Afrique du Nord, possède enfin le Stade qui peut recevoir sans entassement et sans gêne un nombre considérable de spectateurs, qui s'y rendront très facilement en utilisant les deux lignes de trams des C.F.R.A., ainsi que les services d'autobus existants.

             Le boulevard Thiers, qui passera entre le Stade et l'usine Lebon, offrira une place plus que suffisante pour garer les automobiles des spectateurs. Ce tronçon nouveau du boulevard Thiers conduira au Jardin d'Essai, qui limite le Stade, et qui offrira, en lin de spectacle une délicieuse promenade aux habitués du Stade.

             Une brasserie-restaurant, avec une grande terrasse pour les consommateurs, dans un cadre délicieusement ombragé, donneront le repos, le calme, la fraîcheur, aux spectateurs et aux sportifs.

             Des courts de tennis vont être mis incessamment en construction, ainsi qu'une piscine d'eau douce, qui sera la première construite en Afrique du Nord, et qui permettra à nos nageurs de s'entraîner dans les mêmes conditions que celles qu'ils trouvent quand ils vont disputer une compétition en France.

             Un Stade conçu et réalisé de manière aussi large, et pour recevoir un nombre tel de personnes, doit bien entendu offrir des spectacles sportifs de tout premier ordre. Un terrain de football, très travaillé, bien nivelé, drainé, tuffé, donnera aux joueurs un ground qui ne leur fera pas regretter les qualités célèbres du terrain de l'ancien Stade, et qui permettra les jeux les plus précis.

             L'espace est suffisant pour recevoir, autour du terrain de football, tous les aménagements nécessaires pour la pratique des sports athlétiques. Et, entourant ces terrains, se déroule une magnifique piste cycliste de 400 mètres de longueur.

             Ce n'est pas la première piste cycliste construite en Algérie, mais aucune de celles qui ont existé ou disparu jusqu'à ce jour ne nous a produit une pareille impression. Celle du nouveau Stade, pour avoir une souplesse plus grande, est construite en bois, qui répond bien mieux à l'effort du coureur que le béton. Très spacieuse, elle a six mètres de large, et elle se développe dans les virages avec un moelleux parfait, à tel point que l'œil est surpris de découvrir, dans le profil de ces virages une inclinaison vertigineuse. L'angle de relèvement est en effet, de 70 degrés, ce qui permet une course normale à la vitesse de cent kilomètres à l'heure.
             Alger aura donc une piste cycliste et motocycliste de premier ordre, qui permettra de magnifiques courses derrière motos.

             Les techniciens qui ont collaboré avec M. Champault pour la réalisation du nouveau stade sont : MM. Salvador, architecte D.P.L.G. ; Guido Spaïni, entrepreneur ; Durafour, pour les charpentes métalliques ; Nicolas, pour la piste cycliste.
F. PUGET.             


Le Gouverneur Général visite les Grands Travaux de Barrages
             Deux grands barrages sont en cours d'exécution dans le département d'Alger : le barrage du Gribbs et celui de l'Oued-Fodda.
             Dans son numéro de mai 1929 et sous la signature autorisée de M. René Martin, ingénieur des Ponts et Chaussées, notre revue a publié les données techniques qui sont à la base de ces grands travaux. L'article portait d'ailleurs un titre explicite : "La Technique des Grands Barrages ". A l'occasion d'une visite récente de M. le Gouverneur Général, nous publions aujourd'hui de nouvelles photos qui montrent l'état actuel des travaux.



Le Palais de l'Algérie
à l'Exposition Coloniale Internationale

par CH. MONTALAND, Architecte D.P.I .G.
             Le Palais de l'Algérie à l'Exposition Coloniale Internationale de 1931, à Paris, sera édifié à Vincennes, sur les emplacements réservés à l'Afrique où seront réunis autour d'une grande place, l'Algérie, le Maroc et la Tunisie.
             L'entrée, à laquelle on accède par un perron, est flanquée de postes de spahis ; elle conduit au hall dédié à l'agriculture, à la suite duquel se trouve la grande nef où seront réunis les produits agricoles.

             Sur les bas côtés de cette nef, à gauche, seront disposés les dioramas confiés aux orientalistes algériens ; le centre et la droite recevront les diverses expositions agricoles.


             Deux escaliers conduisent au premier étage où seront réunies toutes les expositions spéciales du Gouvernement Général faisant l'objet de photographies, graphiques et statistiques.

             Au fond de cette nef, se trouveront les emplacements réservés aux Affaires Indigènes et aux Territoires du Sud.

             Une cour couverte réunira les expositions des tapis auxquels seront annexés un atelier de tissage dont le travail sera visible de l'extérieur. Autour de ce patio seront placées les expositions des différents services : Forêts, Artisanat, Chemins de fer, Mines, la Presse, Tourisme, etc...

             Les bâtiments comprenant exclusivement la partie officielle du Gouvernement Général, couvriront au rez-de-chaussée, une superficie de 3.214 mètres carrés et au premier étage, 860 mètres carrés.  
            Il sera ajouté à ces constructions diverses sections d'expositions particulières, ainsi que les salles de restaurant, cafés maures, etc., qui sont à l'étude.

 
            Tous les plans de ces constructions approuvés par M. le Gouverneur Général ont été présentés au Commissariat général par M. Gérard, directeur de l'Office de l'Algérie. 'L'architecte, M. Charles Montaland, auteur du projet, en a commencé l'exécution, dont les travaux ont été confiés, après adjudication, à MM. Perret frères, de Paris.
             D'après les prévisions, les bâtiments devront être achevés en décembre, époque à laquelle les installations intérieures seront commencées.

             Nous ne pouvons que nous réjouir de voir présenter, dans un tel cadre, la sélection remarquable des produits algériens réalisée à cette occasion. On ne saurait, en effet, désintéresser actuellement de la moindre des manifestations coloniales françaises sur lesquelles l'étranger Jette toujours un coup d'œil intéressés, sinon jaloux.
             Tant par les détails que nous publions ci-dessus que par l'autorité des hautes personnalités qui ont tenu, en l'occurrence, à attacher leurs noms il cette manifestation si éminemment nationale, on se rendra compte de l'importance qu'elle revêtira aux yeux du public universel.

             M. Montaland, l'architecte si avantageusement connu dans toute l'Afrique du Nord, s'est pénétré de la portée de l'œuvre à laquelle il était invité à collaborer et, particulièrement bien inspirée comme à l'accoutumée, il nous a fourni un travail splendide qui, une fois terminé, produira, sur les foules appelées à le contempler, une impression durable et profonde.
             MM. Perret frères sont des constructeurs connus, ayant à maintes reprises fait leurs preuves et donné leur mesure ; ils se montreront une fois de plus à hauteur de leur belle et noble tâche.

             Ainsi se continuera, en faveur de nos possessions nord-africaines et notamment en faveur de l'Algérie, le monument puissant d'intérêt et de sympathie largement amorcé et déclenché par les manifestations du Centenaire, dont les moins optimistes ne songent plus aujourd'hui à contester le succès.
             Il ne nous reste plus maintenant qu'à patienter quelques mois, pour voir dans tout son épanouissement la superbe exposition coloniale que Paris prépare dans un site particulièrement approprié.
             Nous avons déjà l'entière certitude que nos espérances à cet égard ne seront pas déçues.

Le Casino Municipal d'Alger
Architectes MM. BLUYSEN et JOACHIM RICHARD

           Les fêtes du Centenaire, dont on ne peut plus insinuer qu'elles n'ont pas brillamment réussi, ont provoqué sur le sol de l'Algérie l'éclosion de nombreux monuments. Parmi ceux-ci, à Alger même, le Casino Municipal est un des plus remarquables, le plus remarquable sans doute. Les Chantiers Nord-Africains ont déjà parlé de lui à plusieurs reprises, et même dans leur premier numéro. Dans celui d'avril 1929, ils ont donné en même temps que le projet général, les plans et façades principales auxquels peu de modifications ont été apportées. Nous nous devons aujourd'hui et nous nous faisons un plaisir de revenir sur une œuvre très significative au point de vue urbanisme, techniquement fort bien conçue et d'une incontestable beauté architecturale.


UN MONUMENT QUI S'IMPOSAIT

             Qu'un casino municipal fut indispensable à une ville comme Alger, c'est ce que personne ne saurait plus nier. Le succès, un succès qui a dépassé toutes les espérances, a été la plus complète justification de l'entreprise. Ce succès était prévisible.
             Alger est une ville riche, une grande ville qui comporte, pour employer le terme consacré, une aristocratie de privilégiés. A cette aristocratie, le Casino a donné un centre de distractions et de plaisir qui manquait jusqu'à présent. Dès sa création, il est devenu le lieu de réunion à la mode du Tout-Alger. D'autre part, il a offert à une riche clientèle touristique, sous un hôtel spécialement aménagé pour elle, des salles de jeu et de fête où se délasser quelque temps entre la traversée et les voyages à l'intérieur. En résumé Alger a enfin le Casino que se devait une capitale et le port d'un beau pays.
DES COMPETENCES

             Une telle situation n'avait pas échappé aux rois de l'industrie hôtelière qui ont mené à bonne fin cette œuvre grandiose. La Société Immobilière et Hôtelière de l'Afrique du Nord qui en est la propriétaire réunit en effet dans son Conseil d'administration les hommes les plus avertis. M. Lebrun, président, président de la Chambre Nationale de l'Hôtellerie française, administrateur de plusieurs sociétés hôtelières, propriétaire de l'Hôtel Royal à Paris et de plusieurs autres ; M. André Carrus, administrateur-délégué à Paris, directeur du Pari Mutuel, administrateur des Hôtels Negresco à Nice, Ambassador à Paris, de la Société des Grands Hôtels de Vichy et de la Société des Hôtels Paris-Vichy, etc. ; M. Roger Duhamel, administrateur-délégué à Paris, président délégué de l'Hôtel Ambassador à Paris, administrateur de l'Hôtel la Trémoille à Paris, co-propriétaire de l'Hôtel Savoy à Paris, etc. ; et les administrateurs : M. Albert Chauvin, des Sociétés Léon Grosse et Paris-Vichy, co-propriétaire du Trianon Lyrique ; M. Marcel Crozier, directeur des Etablissements Martin à Lyon, et administrateur de l'Ambassador ; André Duhamel, propriétaire de l'Hôtel Savoy à Paris et administrateur de l'Ambassador ; Henri Gibier, administrateur de l'Hôtel la Trémoille à Paris et co-propriétaire de l'Hôtel Grosvenor à Paris ; M. Manesse, ingénieur, qui a présidé pour une large part au lancement de la Société ; M. Louis Aletti fils, ancien élève de l'Ecole des Hautes Etudes Commerciales, licencié en droit ; M. Chevalier, propriétaire du Restaurant de la Mère-Boulard ; M. Ricoussine, propriétaire de l'Hôtel Noailles à Marseille et de l'Hôtel Hernandez, au Touquet-Paris-PIage.
             A Alger la Société est représentée par son administrateur-délégué dans cette ville, M. Aletti, chevalier de la Légion d'honneur, président de la Société Immobilière et des Bains de Mer de Juan-les-Pins, administrateur délégué de la Société du Palais Vénitien à Nice, administrateur délégué et directeur technique de la Société des Grands Hôtels de Vichy, et administrateur de la Société des Hôtels Paris-Vichy. Tous ceux qui ont eu de près ou de loin affaire au Casino ont connu M. Aletti, animateur prodigieux ; ils ont pu apprécier son activité débordante et sa franche amabilité. Cette revue et le rédacteur de cet article tiennent à le remercier pour l'empressement qu'il a mis à les renseigner.
             Le Casino Municipal conçu par cette pléiade d'administrateurs et de techniciens ne pouvait être qu'une œuvre opportune ; sa réalisation ne pouvait être que remarquable.
UNE SITUATION MERVEILLEUSE

             Après quelques hésitations de début sur le choix de l'emplacement, la Société Hôtelière s'est entendue avec la Ville d'Alger pour la location d'un terrain communal de 4.225 mètres carrés, sis entre les rues Waïsse et de Constantine, le boulevard Carnot et une voie privée, terrain en forme de quadrilatère irrégulier. Cet emplacement était on ne peut mieux choisi. Une artère commerçante ; une rue courte, mais très fréquentée ; un boulevard aristocratique. Et au cœur même d'Alger.

             D'autre part, le futur Hôtel Aletti, le futur Casino Municipal, allait se trouver en face de la baie, au centre d'un des plus beaux panoramas du monde. Inversement, sa belle façade du boulevard Carnot allait inclure dans la guirlande des autres façades, monumentales sinon très belles, que les bateaux arrivant au port voient ceindre le bas de la ville. Cette façade du Casino, on nous permettra d'ailleurs d'ores et déjà de la préférer aux autres dont elle a la grandeur, mais dont elle ne partage pas le caractère ici pompier, là, pseudo-mauresque.
UNE HEUREUSE SUBSTITUTION

             Un service non négligeable, négatif, mais réel, qu'a rendu à la Ville la construction du Casino, est d'avoir provoqué la démolition de je ne sais plus quelle bâtisse, laide et grise dans son aspect, hétéroclite dans ses affectations artistico-médico-policières, qui gâtait tout ce coin d'Alger, et, fort désagréablement, interrompait la ligne des façades Espérons que sa destruction sera suivie par celle de certaines casernes qui, sur le même alignement, persistent à se déployer.
DES DIFFICULTES A VAINCRE

             L'existence de constructions sur le terrain a été une des premières. Le temps manquait. Le Casino devait être terminé pour les grandes cérémonies du Centenaire. Il n'était pas commencé en 1929. La construction n'a duré que huit mois et demi. Il a fallu mener de pair démolitions et édifications. Nous ne saurions entrer dans des détails, mais les simples promeneurs qu'attirait dans les parages de la rue Waïsse l'activité du gros chantier ont été à même, sans formation technique spéciale, d'apprécier la méthode avec laquelle les travaux ont été conduits.
             Les architectes MM. Bluysen et Joachim Richard, de Paris. uni dirigé les travaux de main de maître. Les entrepreneurs ont eu la bonne fortune d'être représentés à Alger par un chef des travaux d'élite, M. Pelle, qui s'est dépensé sans compter. D'autre part, M. Alétti s'est trouvé secondé par un ingénieur digne de lui. M. Truchi. Le signataire qui a eu souvent affaire à ce dernier a été combien de fois au désespoir de trouver ce technicien qui, semblable à Dieu, partout appelé, partout invoqué, se trouvait dans ce monde qu'est le Casino, à la fois partout et nulle part.


             Je pourrais relever bien d'autres difficultés auxquelles les créateurs ont eu à faire face. Tous les architectes et tous les entrepreneurs comprendront que la main-d'œuvre n'en constituait pas la moindre. Cependant le Casino put être inauguré à peu prés dans les délais fixés. C'est là un résultat dont il faut féliciter architectes, ingénieurs et propriétaires. C'est là aussi un exemple bon à méditer en notre pays de fatalisme et de soleil.

LES FONDATIONS

             Parmi les difficultés à vaincre, une des moins négligeables provenait de la nature du sol. Celui-ci est en effet constitué uniquement par des remblais, débris de carrière et terres rapportées de toute nature. La seule solution était de fonder sur pieux et l'un a chargé la Maison Franki, la grande société française bien connue, de cet important travail. Deux puissantes machines Franki l'ont terminé en quelques semaines, ce qui n'a pas peu contribué à permettre l'achèvement rapide des constructions.
             Le Casino est fondé sur 335 pieux dont chacun supporte une charge effective de 80 tonnes: les piliers des arcades coté rue Waïsse reposent sur des pieux de 13 mètres de profondeur : les pipiers intérieurs sur des pieux de 8 à 11 mètres : pour ces derniers les machines ont été descendues dams les fouilles. La charge est reportée sur le sol par les bases élargies des pieux : celles-ci qui constituent en fin de compte de véritables rochers artificiels ont été obtenues par un damage spécialement énergique au moyen de pilons de 2.500 Kilos.

LA CONSTRUCTION

             Le Casino, constitué évidemment par une ossature de béton armé, ne présente dans sa superstructure aucune particularité sur laquelle il ait lieu d'insister ici. Il a fallu compter cependant avec des portées de 32 mètres qu'ont franchies des poutres de 3 m. 50 de hauteur sur 0 m. 50 de large, armées de barres de 5 centimètres de diamètre.

LES PLANS

             Le terrain était relativement exigu ; son utilisation n'en est que plus remarquable. Il s'agissait de grouper dans un seul immeuble un casino, un théâtre et un grand hôtel, tous pourvus de luxe et du confort désirables, tous suffisamment spacieux et bien aérés. Le parti adopté étonne par sa simplicité et par son élégance. Il fait grand honneur aux architectes, MM. Bluysen et Richard, de Paris.

             Nous parlerons plus loin des sous-sols. Le rez-de-chaussée est occupé par le théâtre et par les vestibules, hall et salles de lecture de l'hôtel. Du Casino il ne comporte que l'entrée, dont un escalier monumental conduit au premier étage entièrement consacré audit Casino, restaurant et dancing, hall, bar, salon de lecture et salles de jeu.
             L'hôtel ne traverse cet étage que les cages de ses escaliers, ascenseurs et montes-charges. Il occupera les trois autres de ses chambres.


             Telle est l'économie générale du plan. Nous allons maintenant entrer dans quelques détails sur la constitution des parties essentielles, tout en réservant pour la fin les études d'ordre esthétique.

             Dans les plans primitifs, la façade de la rue de Constantine était précédée de deux ailes entourant un jardin.

             On a préféré supprimer cet ensemble pour donner au bâtiment vue et accès directs à la rue.

             L'emplacement ainsi libéré constitue une cour où se garent les autos, cour égayée de quelques corbeilles de verdures et de fleurs.



LE THEATRE

             Le théâtre occupe toute la largeur du bâtiment du côté opposé à la rue Waïsse. Il peut contenir 750 personnes : une bonbonnière. L'entrée est de plein pied et directe sur les jardins de la rue de Constantine ; le vestiaire à côté de l'entrée. Un ascenseur monte au Casino. La visibilité est excellente, l'acoustique a été spécialement étudiée. Nous reviendrons sur la solution donnée au problème de l'aération, solution d'une extrême originalité. De sérieuses 'précautions ont été prises contre l'incendie. Tout a été fait pour assurer aux spectateurs les meilleures conditions de sécurité et de confort.

             L'orchestre est en contrebas. La fosse a été établie sur des couches de verre concassé de quarante centimètres de hauteur formant en quelque sorte réflecteur acoustique. La corniche supérieure qui couronne le théâtre de sa bande continue, s'ouvre d'une façon curieuse pour laisser passer le faisceau d'images lorsque la salle se consacre au cinéma. Et puisque cet art ne veut plus rester muet, il a été prévu un dispositif sonore Gaumont, de type mixte, pouvant fonctionner soit avec disques, soit avec bandes. Pour le théâtre proprement dit, la scène est organisée d'une façon très moderne ; on y remarque, outre les dispositifs de machinerie, un jeu d'orgues électriques. Les loges des artistes, dont l'entrée se fait par le boulevard Carnot, sont pourvues de tout le confort et de tout l'hygiène désirables.
LE CASINO

             Toutes les salles du Casino sont très agréablement groupées au premier étage autour d'un grand hall aéré par un lanterneau et un plafond en staff ajouré.
             Du côté du boulevard Carnot se succèdent la grande salle de restaurant et le dancing, tous éclairés par de grandes baies sur la mer.
             Au fond du dancing, est une petite scène réservée aux attractions.
             Au-dessus du théâtre, du boulevard Carnot à la rue de Constantine, s'étend la salle de baccara, divisée en deux par un somptueux rideau rouge, ce qui permet d'utiliser au choix soit la totalité de la longueur, soit seulement une partie.
             La grande salle de baccara se termine du côté de la rue de Constantine par un bar-restaurant de nuit, avec un office spécial.
             Les services de direction des jeux, chèques, secrétariat, caisse, etc., sont groupés autour du couloir d'accès du baccara, sur le grand hall.
             Au-dessus de l'entrée monumentale de l'hôtel, aérée par trois superbes baies vitrées sur la rue de Constantine, se trouve la salle de la boule avec ses cinq tables.
             Tout à côté le salon de lecture, sans oublier le bar du Casino largement ouvert sur le grand hall. Les cuisines, dont nous parlerons tout à l'heure sont tout à proximité.

L'HOTEL

             Au rez-de-chaussée se trouvent les hall, vestibule et entrée de l'hôtel ; toutes salles groupées les unes à côté des autres pour la plus grande commodité des clients. Le Grill-Room, également à proximité, a son entrée particulière pour les personnes ne logeant pas à l'hôtel. Sur le boulevard Carnot donne également le Bar Cintra. L'entrée de service est pratiquée sous les arcades de la rue Waïsse.
             Dans la cage de l'escalier, toute proche de l'entrée principale, montent deux ascenseurs électriques autonomes, de sorte que les clients de l'hôtel sont portés immédiatement à leurs étages.


             Les chambres, malgré leur prix relativement modéré, sont pourvues du confort le plus appréciable. Elles constituent plutôt chacune un minuscule appartement. Une porte donnant sur le grand corridor ; derrière elle un couloir d'accès ; ouvrant d'abord sur celui-ci, les w.-c. ; puis le cabinet de toilette. Enfin, au fond, la chambre proprement dite. La chasse des w.-c. ; les tuyauteries, leurs robinets et joints sont groupés dans une courette ouverte sur le grand corridor ; toutes les réparations de plomberie peuvent s'effectuer ainsi sans qu 'il y ait lieu de pénétrer dans les chambres ni dans leurs annexes. D'autre part aucun tuyau n'est apparent ni dans la salle de bains, ni dans les w.c.
             II est superflu de signaler la propreté et le souci de l'hygiène apportés à l'organisation de ces deux locaux. La baignoire est encastrée. Les amenées d'eau chaude et d'eau froide débitent à toute heure. Dans la chambre, l'armoire, très vaste, pourvue de belles glaces est encastrée dans le mur, ce qui économise la place et prévient les dépôts de poussière.
             Il est à remarquer que les chambres disposées suivant un U autour du jardin suspendu de l'hôtel ont toutes leur vue soit sur ledit jardin, soit sur les rues adjacentes. D'autre part, chaque chambre est reliée à ses voisines, tant à droite qu'à gauche, par une porte ; ainsi peut-on en grouper autant qu'il est désirable, par exemple pour des familles.

             Cette disposition, fort avantageuse, n'a pas l'inconvénient de rendre possible ces auditions, gênantes à tous points de vue, que, dans la plupart des hôtels, permettent les épaisseurs insignifiantes des cloisons. Les portes sont doubles, les cloisons également. On ne saurait, comme nous l'avons vérifié, entendre d'une chambre des paroles prononcées même à haute voix dans une chambre voisine. On n'entend pas non plus, au bout d'un couloir bien fermé, ce qui se passe dans le corridor extérieur. Enfin les jazz les plus endiablés ne traversent pas les planchers isolants du premier étage lui-même de l'hôtel. En somme, on peut tranquillement dormir, et je ne connais pas beaucoup d'établissements, où, à moins d'être sourd ou exténué, cela soit possible avant onze heures du soir et après quatre heures du matin. Les vues sur les rues ou sur le jardin sont particulièrement élégantes ; grandes baies, petits balcons, stores de bois.

             Le service est commandé, par des sonneries lointaines et par des signaux lumineux disposés partie aux coudes des couloirs, partie à l'entrée même delà chambre intéressée. D'élégants prismes de verre dépolis peuvent éclairer alternativement leurs trois bandes horizontales, la rouge, la jaune ou la verte suivant que l'on désire la femme de chambre, le valet ou le sommelier. Le domestique appelé éteint lui-même le signal en venant prendre les ordres. Ajoutons que le concierge est mis au courant par un système analogue et qu'il peut intervenir si satisfaction n'est pas donnée immédiatement au voyageur.

             Il est inutile de spécifier que le chauffage central est installé dans chaque chambre ; on y trouve également un appareil téléphonique aboutissant à un standard à vingt directions correspondant à sept numéros d'appel du réseau urbain. Le nombre de chambres est 150. Il y en a de différents styles, au goût de chacun, Louis XVI, Directoire, Anglais moderne, etc...
             Pour en finir avec l'hôtel nous pouvons signaler qu'un système de quatre monte-plats, un aboutissant à l'office d'étages, les trois autres chacun à un étage à partir de l'office ci-dessus, permettent un service rapide des petits déjeuners et consommations en chambre.
LES CUISINES

             Les cuisines du Casino occupent le premier étage sur la rue Waïsse. Celles du Grill-Room de l'hôtel sont à côté dudit Grill-Room dont de larges baies vitrées sont seules à les séparer ; les clients sont- ainsi mis en confiance quant à la valeur de la cuisine. Celle-ci a déjà sa réputation établie, aussi bien d'ailleurs au Casino qu'a l'hôtel.
             M. Aletti, qui tient spécialement à l'excellence gastronomique de ses établissements, a lui-même étudié l'agencement de ses locaux. MM. Ganivet et Sommer, des Grands Hôtels de Vichy et Nice et depuis de longues années collaborateurs de M. Aletti, sont concessionnaires du Restaurait du Casino, de la Rôtisserie Chantecler et du Bar Américain. Tout s'y passe d'une façon rationnelle et les manipulations y sont faites avec la plus grande propreté. Des ascenseurs et montes-charges ; de grands fourneaux ; des marmites à vapeur ; un four électrique pour pâtisserie ; des glacières ; deux chambres froides, l'une pour la boucherie, l'autre pour les bouillons ; des machines à laver la vaisselle, des plonges à barboteurs fonctionnait à la vapeur, on voit que l'installation technique ne laisse 'rien à désirer. Les locaux sont également très compartimentés et d'un façon rationnelle. Signalons par exemple des caféteries, des pâtisseries, etc... Ces dispositions permettent de servir les consommateurs avec la plus grande célérité.

             On ne s'étonne plus de ce qu'un mois après sa création, a une époque où beaucoup d'établissements en sont encore à combiner leur organisation, le restaurant du Casino ait pu servir d'une façon impeccable les 800 couverts du banquet présidentiel. Nous ne saurions passer sous silence le fait que le même restaurant possède ce sans quel, l'organisation la plus scientifique du monde serait inutile, un artiste en art culinaire, le chef Sommer, secondé par un personnel de choix.
             Les cuisines de l'hôtel ne fonctionnent pas encore ; elles ne seront pas indignes de celles du Casino. Les unes et les autres ont été établies par la Maison Cubain, de Paris.

LES SOUS-SOLS

             Leur visite n'est pas la partie la moins intéressante de la véritable excursion qu'on peut faire dans le Casino. Ce 'qui frappe dès qu'on y pénètre, c'est leur hauteur et leur aération. Certes il y a trop de clarté et de mesure latine dans l'œuvre de MM. Bluysen et Richard pour qu'on puisse à son sujet penser à Métropolis. En tous cas les habitants des sous-sols de l'Hôtel Aletti n'ont rien des damnés de catacombes que Fritz Lang nous a présentés. Ils sont au contraire beaucoup mieux que les ouvriers de telle ou telle usine en plein air.

             Disons tout de suite que les sous-sols abritent tout le personnel technique de l'Hôtel-Casino, chauffeurs des chaudières, électriciens, etc..., sans parler des préposés aux caves, etc...

             Comment a-t-on procédé à l'aération de locaux où vivent de longues heures de très intéressants êtres humains ? Oh ! d'une façon bien simple. Au milieu des sous-sols à côté de la salle de chauffe, on a prévu une cour formant plutôt une véritable cheminée. L'air chaud provenant de la chaufferie monte dans cette cheminée et donne lieu à un courant très sensible. Des soupiraux assurent l'arrivée de l'air froid. En somme cet organisme géant qu'est le Casino respire d'une façon naturelle, simplement par suite de son activité organique : il est difficile de mieux résoudre un problème, par ailleurs assez capital.
             Les caves, caves à bouteilles, caves à barriques, Caves du jour, caves de lavages sont d'une propreté et d'un ordre impeccables ; des monte-bouteilles s'en élèvent vers les divers offices de l'hôtel.
LUMIERE

             L'alimentation du Casino en énergie électrique, force et lumière, œuvre de la Maison Gauchy, de Paris, peut être assurée entièrement par une seule des deux arrivées en haute tension (10.000 volts ; 200 kW) branchées sur deux feeders distincts.
             L'une des deux arrivées est donc de secours. Dans la cellule H.T. se trouvent trois transformateurs, deux de 200 KV A et un de 100 KV A. Les deux premiers pour la lumière, l'un sous tension, l'autre de secours. Le troisième, généralement pour la force motrice. A noter qu'un jeu de barres permet de faire servir un transformateur lumière à la fourniture de la force ; le transformateur force à la fourniture de lumière et même dans le cas le plus défavorable un seul transformateur pour la force et la lumière à la fois, en consommation réduite bien entendu... Le tableau de distribution, qui permet ces commutations, comporte aussi des comptages autonomes pour les services : hôtel, jeux, théâtre, restaurant, casino.

             Une batterie d'accus de 1.000 AH fournit le réseau de sécurité, lequel, d'après les règlements de police, doit doubler les réseaux normaux. Quant aux réseaux de secours prévus ils entrent en activité par le jeu de contacteurs dès que les circuits ordinaires cessent de débiter. On voit que les lampes électriques ne risquent guère de s'éteindre, ni les ascenseurs, ventilateurs, etc... de s'arrêter.

             La force motrice actionne deux ascenseurs Otis-Pifre pour le casino, deux ascenseurs pour l'hôtel, un ascenseur casino-théâtre, un monte-charge casino, un monte-charge hôtel, un monte-plats et un monte-bouteille pour la cave du jour du casino, un monte-bouteille pour la cave du jour de l'hôtel, les quatre monte-plats de l'office des étages de l'hôtel, un monte-plats pour l'office du personnel et un analogue pour l'hôtel, sans parler du ventilateur du théâtre, sans parler aussi, bien entendu, des prises de courant lumière pour les aspirateurs de poussière.

CHAUFFAGE

             Quatre chaudières de la salle de chauffe produisent l'eau nécessaire au chauffage central ; celui-ci se fait à circulation accélérée. Ces chaudières, d'une capacité totale de 3.000 litres, peuvent être chauffées soit au coke, soit au mazout. Une citerne à mazout est même prévue à cet effet ; elle est de 30 mètres cubes et alimentée par une canalisation aboutissant à la rue Waïsse. Dans la même salle de chauffe se trouvent encore trois chaudières produisant de la vapeur pour le chauffage de l'eau des salles de bain et une autre alimentant en vapeur les cuisines, pour marmites, machines à laver tables chauffantes, etc... Tous ces générateurs ne fonctionnent d'ailleurs qu'à proportion des besoins. Réalisation de la Maison Gauchy, déjà nommée.

VENTILATION

             Le chauffage en hiver, la ventilation en toutes saisons du théâtre se fait d'une façon originale, par le système dit du chauffage renversé à Aérotherme. Etant donné le volume de la salle et le cubage d air à prévoir, la ventilation par le bas serait peu économique et même gênante. Aussi est-elle effectuée par le haut. L'air pénètre dans un soupirail de la cave, traverse une série de compartiments en chicane où fonctionnent des pulvérisateurs d eau ; les gouttelettes entraînant avec elles les particules solides se déposent dans cette sorte de labyrinthe. L'air ainsi lavé est ensuite filtré.
             Par des conduits en maçonnerie, il est dirigé vers le théâtre au moyen d'un puissant ventilateur. Des bouches le recevront après la traversée du dit théâtre et l'évacueront par des soupiraux de la cave. L'atmosphère fournie aux spectateurs est donc extrêmement saine.

ALIMENTATION EN EAU,
PRECAUTIONS CONTRE L'INCENDIE

             L'eau est là évidemment fournie par les canalisations de la ville, mais toutes les précautions ont été prises pour parer aux manques de pression. Une grande réserve de 900 mètres cubes a été construite dans le sous-sol ; elle permet aussi en temps d'épidémie, par exemple, de débiter de l'eau stérilisée par un procédé quelconque (javellisation ozonisation, etc.). Des surpresseurs à air, alimentés par deux pompes hydrauliques et un compresseur d'air restent toujours en charge. Si la distribution ordinaire vient à casser, ils entrent en action et y restent, de ce fait que la pression de l'air y est maintenue automatiquement constante.

             La canalisation urbaine et, si elle vient à faire défaut, des surpresseurs permettent d'alimenter les lances d'incendie. Par surcroît de précautions, on a prévu sur les terrasses, au-dessus du théâtre un réservoir en charge de 80 mètres cubes. Il est superflu de signaler que des extincteurs à mousse de 10 litres sont repartis un peu partout. Contre la foudre sont disposés des paratonnerres à courte tige, du système Mildé.

TECHNIQUE ET ESTHETIQUE


             Toutes les inventions de la technique moderne ont été mises en jeu pour contribuer à la sécurité et au bien-être des privilégiés auxquels il est donné de fréquenter le Casino ou l'Hôtel. Comme l'architecte, l'ingénieur a réalisé dans ce bâtiment un ensemble remarquable.
             Il nous reste à étudier maintenant la réalisation esthétique. Certes les belles photographies reproduites suffiraient à en montrer la réussite, mais il nous plaira d'ajouter encore par des descriptions et des analyses artistiques à l'impression première de luxe, d'élégance et d'équilibre harmonieux que donnent le monument et même ses photographies.

L'HARMONIE ARCHITECTURALE

             Celle des plans a-t-elle besoin d'être démontrée ? Il ne semble pas. A plusieurs reprises déjà, nous avons signalé combien les diverses parties de cet énorme édifice étaient bien à leur place les unes par rapport aux autres, combien les circulations étaient faciles, en harmonie avec l'esprit de gens qui viennent là pour jouir d'une vie facile et ne pas se fatiguer. Un coup d'œil sur les plans permet de voir aussi que des symétries ont été réalisées autant que faire se pouvait.

LES FAÇADES

             Une crainte pouvait venir à l'esprit des esthéticiens, nous ne saurions dire des esthètes. Cet énorme massif de maçonnerie cubique n'allait-il pas évoquer des impressions fâcheusement administratives ou même similaires ? Et la façade de la rue de Constantine, vaste rectangle non échancré, à la différence de son opposée, était tout à fait susceptible de donner de pareilles inquiétudes... On est aujourd'hui rassuré. Grâce à son avant-corps découpé d'arcades et de larges baies, grâce aux variations que jouent les fenêtres et les balcons, linteaux et pleins cintres, pilastres longs, colonnes courtes, harmonieux balancements des carrés et des demi-ronds, la dite façade corrige sa rigidité géométrique et la sobriété du style moderne qui en inspire les détails. Les deux étages inférieurs, conformément aux nécessités de l'édifice, sont beaucoup plus haut ; les pleins y dominent les vides ; la symétrie du rez-de-chaussée est réduite au minimum.


             En somme l'ordonnance est toute classique, encore que le détail soit moderne par la simplicité des lignes et la très grande sobriété des reliefs. Si l'on ajoute que cette façade est logique, sincère, qu'elle ne leurre pas sur la disposition intérieure, on aura signalé tous ses caractères artistiques qui en font une œuvre de grande allure.
             Je n'insisterai pas sur les façades latérales, même sur celle de la rue Waïsse. Elle n'est pas sans analogie avec la précédente, et je suis d'avis que les arcades imposées, et sous nos climats toujours bienvenues, n'ont pas peu contribué à lui donner de la vie.

             Côté boulevard Carnot, le problème était plus facile ; l'échancrure médiane, à laquelle donne lieu le jardin suspendu, rompait la rigidité de la forme enveloppe et permettait de pousser, sans risque de froideur, à la symétrie monumentale. On peut noter que cette symétrie est parfaite des arcades à la terrasse. Les deux ailes de l'hôtel se font pendant ; le restaurant oppose ses triples baies à celles de la salle de baccara. Ici encore la façade ne trahit pas le plan. Nous avons affaire à une architecture sincère.

             En résumé, il s'agit d'un monument d'une réelle beauté de lignes, monumental comme il convient, assez impressionnant de masse et cependant sans lourdeur, assez sobre de décoration et cependant sans froideur. Il est digne d'une aristocratie non seulement argentée, mais raffinée.

             A-t-il quelque chose de méditerranéen ? Cette revue et le signataire ne peuvent pas éluder cette question. Certes les architectes ont eu l'excellente idée de ne pas pasticher du mauresque, et d'évoquer de préférence des formes gréco-romaines. La dominante est l'horizontale et la terrasse l'affirme. L'usage des linteaux et, secondairement, des cintres confirme le caractère ; la blancheur cubique de l'ensemble ne manque pas de convenir à Alger, "la Ville blanche", l'ancienne ville des cubes blancs...
L'ARCHITECTURE INTERIEURE

             Dans les longues salles aérées, aux dimensions des galeries, au débouché des escaliers monumentaux, entre les pilastres et les colonnes, il n'est pas hors de propos de penser au style français dit classique. Ne sommes nous pas en face, ici comme à Versailles, toutes proportions gardées bien entendu, d'une architecture pour caste, destinée au plaisir et tirant sa raison d'être du luxe qu'elle peut déployer ? La différence, considérable, est due à ce que cette architecture a pu, depuis trois siècles, se débarrasser d'un véritable pédantisme archéologique (masquant souvent une impuissance imaginative foncière), éliminer les organes inutiles ou surannés, tels que souvent les chapiteaux et les bases des colonnes.
             L'hygiène lui a même appris que les reliefs trop fouillés étaient des nids de microbes. Il n'est pas jusqu'à la raréfaction de la main-d'œuvre qui n'ait poussé au choix de formes simples et faciles à réaliser. Toute l'architecture du Casino d'Alger se trouve ainsi en harmonie avec l'esprit d'une caste qui a remplacé, jusqu'à un certain point, la noblesse des anciennes cours, mais a perdu par rapport à elle, sinon en snobisme, du moins en goût du protocole, qui a gagné par contre en propreté et en souci d'hygiène. Le Casino est en conséquence d'un luxe certain mais sobre, qui contraste étrangement par exemple avec les salons de certains paquebots très luxueux récemment mouillés dans le port d'Alger. Il peut paraître à certains que l'on ne saurait parler de bon goût ni de mauvais goût, en vertu par exemple d'un proverbe connu.

             Pour nous, en revanche, il semble que le bon goût existe, qu'il réside dans l'adaptation des formes, des couleurs, de la décoration à la mentalité des personnes qui vivront dans le cadre de ces formes, de ces couleurs, de cette décoration. Et nous dirons que le Casino est une œuvre d'un goût exquis. Fait pour une aristocratie moderne, il a composé ses formes architecturales et décoratives en harmonie avec l'esprit de cette aristocratie. Nous ne nous étonnerons point en particulier qu'il s'agisse d'un style presque cosmopolite, à peine teinté d'un algérianisme très vague.

UN PROBLEME DE DECORATION

             La décoration du Casino d'Alger a été assurée par des spécialistes de choix : la maison Canat et Bellancourt, de Rouen, s'est chargée de la menuiserie, la maison Altieri, de Marseille-Alger, de la peinture, la maison Oberlé, des plâtres, la maison Bordure, d'Alger, de la serrurerie. Le décorateur, chef d'orchestre, est M. Lavallière, de Paris. J'ai eu l'occasion de m'entretenir longuement avec cet artiste et la rare fortune de l'écouter exposer ses théories sur la décoration en général, la décoration du Casino d'Alger en particulier. Il conçoit la décoration d'une manière très large et moderne. Pour lui elle résulte moins de la juxtaposition de détails plus ou moins astucieux et jolis (il a ce mot en horreur et je le comprends) que de l'harmonisation de grands plans colorés, de motifs amples. Le Casino d'Alger a été pour un décorateur épris de grandes réalisations comme M. Lavallière un champ d'action tout à fait passionnant. Avant d'analyser d'une façon plus approfondie la technique qui fut la sienne, il ne sera pas inutile de faire chatoyer sous les yeux de mes lecteurs cet arc-en-ciel matérialisé qu'est, dans ses principales salles, le Casino Municipal.

DES COULEURS, PLUTOT DES NUANCES ET DE L'OR

             Nous entrons dans le vestibule du Casino. Nous ne saurions oublier trop vite que nous sommes en Algérie ; nous devons cependant nous faire à une ambiance cosmopolite : c'est pour cela que les peintures de Carlos Reymond sont au-dessus de l'entrée des scènes algériennes, vues d'un œil cosmopolite. Le jaune antique et l'or baignent cependant d'une gaieté chaude celui qui se prépare à l'oubli, à la vie facile loin des luttes et des soucis. Le même ton sur ton de gaieté règne dans l'escalier d'honneur. Je vais m'excuser, une fois pour toutes, de répéter indéfiniment le mot " or ".
             La richesse de ce vocable n'a pas d'équivalent en français. Dans le vestibule, motifs sur sculpture en rehausse d'or ; dans l'escalier d'honneur, masques en or et motifs également en or sur le rampant de l'escalier.


             Les panneaux décoratifs " Les Cinq Sens", œuvres personnelles de M. Lavallière, en peinture-gravure à plat, représentent des femmes à demi voilées, certes à la mode antique, mais avec quelque chose de très moderne, par exemple dans la coiffure. Mais quoi ! S'il est vrai que certaines formes de l'art grec archaïque pourraient passer pour des créations du XXème siècle, il n'est pas étonnant que les belles païennes de M. Lavallière évoquent réciproquement des contemporaines d'Hélène ou de Pénélope. Les "Cinq Sens" sont des motifs symboliques assez riches pour tenter un artiste ; en tout cas, les portes ouvertes sur les richesses extérieures. Leur glorification s'impose à l'entrée d'un casino où "les parfums, les couleurs et les sons se répondent", où il est également loisible à des épicuriens raffinés de savourer des mets délicats et, dans le dancing voisin, de caresser des bras nus. Ajoutons que les gestes des femmes silhouettées, traits or sur jaune, se rapportent sans équivoque au sens représenté : allégorique d'une transparence gréco-latine, méditerranéenne si l'on veut.
             Je ne puis, dans le même ordre d'idées, oublier les bas-reliefs de M. Alaphilippe, Grand Prix de Rome, au-dessus des entrées du Casino ; ils sont intitulés Bacchanales ; la fougue ne leur manque pas, mais une réelle correction, bien conforme dans la forme géométrique qui les entoure, rend ces âpres, orgies antiques suffisamment convenables pour le lieu sélect et correct où l'on ose les évoquer.
             Les grandes salles du Casino auxquelles nous accédons maintenant font résider tout leur luxe dans la richesse de leurs nuances. Le Grand Hall est encore assez mouluré, avec ses colonnes et piliers cannelés, ses corniches et son plafond ajouré, il se contente en conséquence d'une couleur crème très distinguée mais assez uniforme. Le restaurant réalise une harmonie délicate en vert noble et or. Le dancing révèle une recherche subtile de tons violet de Parme éteint ; les panneaux, touchés de discrètes intentions régionalistes, figurent des feuilles de bananiers, dans le même ton plus foncé et en gris clair rehaussé d'or. Au fond de la salle, des colonnes dorées, cannelées, encadrent le rideau orange. Le bar, très moderne, est, dans l'ensemble, d'une chaude tonalité jaune et or; très " arts décoratifs" représentant des sujets de dégustation ; à remarquer de très curieux vitraux de la même inspiration.

             La salle de la boule: une savante polychromie vert émeraude, vert bleu, vert Véronèse et or extrêmement agréable à l'œil. Le vert est la couleur calme ; elle peut apaiser les passions qui se déploieraient autour de -la roulette et ne doivent pas sortir de la plus stricte convenance. Tout à côté, la salle de lecture s'agrémente de panneaux aux énormes fleurs signés Léon Lang, sur un fond havane foncé avec galons et ,filets vert bleu et or. La somptueuse salle de baccara oppose des bandes rouges et des panneaux verts; mais du rouge antique et du gris vert, ce dernier plus soutenu dans certains fonds. L'or s'extériorise une fois de plus de la personne des joueurs et se projette sur les parois. Au fond de la grande salle, le restaurant de nuit est enveloppé du même ton gris vert, mais avec les jeux d'un fond moderne plus soutenu. Pour rompre la monotonie somptuaire, galons et filets sont d'argent.
             Nous allons quitter le Casino et parcourir les quelques salles du rez-de-chaussée de l'Hôtel. Ici la clientèle peut être la même, ses intentions deviennent différentes. Il s'agit de séjourner, de se reposer peut-être, non plus de se distraire, voire de s'amuser. Le vestibule et le hall de l'Hôtel revêtent seulement des tons pierre ; les lignes architecturales gardent ainsi toute leur valeur. Le salon de correspondance réalise une harmonie d'argent et de roses ton sur ton. Le grill-room est une des salles les mieux réussies de l'ensemble. Il est curieux, quand on le visite, de se rappeler l'autre restaurant, vert noble et or. La gaieté ne manque pas, mais elle est plus sévère. Une rôtisserie d'hôtel n'est pas un restaurant de Casino. La corniche et les pilastres d'un ton havane ont des austérités de boiseries. Les galons rouge laque qui les orne leur ajoutent en distinction. Des motifs d'or, mais d'or patiné, décorent les grands panneaux sous la corniche, panneaux d'un ton paille ivoire.

             Le bar Cintra comporte successivement une salle de consommation et le bar proprement dit, séparées par un escalier montant vers le bar entre deux rampes de fer forgé d'une belle ligne moderne. La première salle, sous un plafond rouge sombre, alterne des pilastres noirs semés d'or et des panneaux d'or à plat animés de vibrations. Dans le bar, sous un plafond doré, les murs sont de teinte havane avec jeux d'or. Il ne faudrait pas croire que le noir, ici dominant, ait une valeur funèbre ; il met en valeur, à la manière héraldique, les métaux et les émaux.
             Le théâtre, sous ses plafonds à caissons, est d'une très originale tonalité violet foncé et amarante, avec jeux de fond or, et, de chaque côté de la scène, deux bandes d'or en vibration d'une réalisation curieuse.

             La technique de M. Lavallière s'avère, d'après ces quelques indications, d'une savante simplicité. Dans les petites salles, telles que les bars et certain salon de lecture, la décoration comporte des détails, oserais-je dire, des anecdotes, panneaux, vitraux, motifs divers. Dans les grands halls au contraire J'effet est surtout obtenu par des harmonies de nuances, souvent très rares, dont la combinaison peut-être fort délicate. Il faut songer d'ailleurs que les grands halls du Casino ont vue les uns sur les autres et que la composition des couleurs doit intéresser non seulement une salle, mais un ensemble de salles. C'est bien ainsi que l'a entendu M. Lavallière et on peut dire qu'il a réussi de vastes orchestrations. De tels succès sont d'une qualité assez subtile, plus même que la réussite d'un panneau décoratif. Mais le décorateur a su montrer le même talent dans le tracé de ceux des "Cinq Sens", problème linéaire, que dans le dosage des teintes, problème chromatique et à demi chimique.

DES TAPIS, DES VITRAUX, DES MEUBLES

             Sous la direction du décorateur ou en marge de celle-ci, de nombreux spécialistes ont collaboré à la décoration du Casino. Les lustres, dont la variété est absolument extraordinaire, quand à leur taille, à leur forme et à leur style, sont dus aux maisons Douillet et Simonet. Les belles photographies reproduites et les légendes qui les complètent renseigneront les lecteurs sur ces lustres. Ils sont presque tous constitués, comme il est à la mode aujourd'hui, par des plaques de verre dépoli ; tantôt pendantes comme des voiles figés ; tantôt armaturées en cubes ou en prismes, plus ou moins sévèrement, plus ou moins apparemment ; tantôt évoquant des fleurs ; tantôt planant de leurs lames superposées. Une seule fois le lustre classique. Souvent des globes ou des polyèdres. Ces lustres, il faut d'ailleurs les voir non en plein jour, mais le soir, alors qu'ils éclairent de clartés féeriques toute la décoration intérieure, sans troubler les harmonies des couleurs réalisées aussi bien pour l'éclairage artificiel que pour la lumière solaire.

             Dans les escaliers du palace, s'éclairent des vitraux blancs modernes, de la Maison Labouret, de Paris. Nous avons noté ceux du bar du Casino, œuvres curieusement cubistes de cette même maison.
             Le mobilier dont il est inutile de faire remarquer le confort et l'élégance, les tapis, ici modernes, là algériens, toujours très moelleux et très en harmonie avec les architectures, sont de la Maison Modet et Cogniet. Nous citerons parmi les tapis, ceux de l'escalier d'honneur, ton sur ton violet, ceux du restaurant-dancing, à décoration florale stylisée, interrompus sur la piste de danse, ceux des salles de jeu, bâtonnés l'un et l'autre des mêmes motifs, rouge au baccara, vert à la boulé. La salle de fête est jonchée de tapis orientaux. Où les tapis ne s'étendent pas, le carrelage fournit sa décoration.

COINS DE NATURE

             Au bout des longs corridors du premier étage de l'hôtel, une porte vitrée laisse voir soudain le jardin suspendu. Nous ne saurions le passer sous silence. Une. architecture sobre l'entoure ; la nuit, des colonnes de lumière, quatre cylindres en faisceau supportant de grosses boules, éclairent ses petites corbeilles déjà abondamment pourvues de fleurs et verdures, en leurs cadres de carreaux pers.
             Une pergola de ligne sobre double l'encadrement des façades à balcon. La vue au loin est magnifique sur toute la rade d'Alger. La Nature, intime ou immense, entoure et sacre l'œuvre des hommes qui ont cherché de la beauté.

             Il appartiendra à des auteurs plus qualifiés que moi de vanter l'utilité du Casino, au point de vue urbain et social. Certes l'attrait d'un tel cadre peut exalter cette volonté de puissance chère à Nietzsche. Nous le faisons ici que de l'architecture, de la technique et de l'art. A ce triple point de vue, que nous avons successivement étudiés, le Casino est une belle œuvre. Et comme nous croyons à la beauté plus peut-être qu'à tout autre chose, il nous reste à féliciter M. Aletti et ses collaborateurs d'en avoir réalisé.
J. COTEREAU.


Inondations catastrophiques
dans la vallée de la Soummam.

Envoyé par M. Louis Aymés
Une famille musulmane de cinq personnes et deux militaires emportés par les eaux. Une 8ème personne ensevelie à la suite d'éboulements 
            BOUGIE : Les habitants de Bougie et les riverains de la vallée de la Soummam ont vécu au cours des dernières 24 heures des instants dramatiques à la suite des inondations catastrophiques qui ont partout semé la terreur et la désolation. D'ores et déjà, on dénombre 8 victimes et des centaines de millions de dégâts

            A Bougie même, plusieurs voitures ont été projetées par un vent furieux qui soufflait violemment. Les artères qui relient la ville au camp inférieur étaient recouvertes de branches brisées et d'arbres déracinés. Au hameau des Eucalyptus, un arbre est tombé sur une maison, mais fort heureusement aucune victime ne fut à déplorer.
            Des scènes déchirantes se sont déroulées à la sortie du pont de la Soummam, sur les routes allant à Tichy et à Oued-Amizour. Toutes les petites fermes, appartenant pour la plupart à des fellahs, étaient inondées et hier matin les femmes, les enfants et même les hommes criaient pour attirer l'attention des sauveteurs.
            A la société industrielle de l'Afrique du Nord dont les usines, huileries et savonneries se situent à l'entrée de la ville, les dégâts sont très importants. L'usine qui est construite à l'embouchure de la rivière, est complètement inondée, et dès ce matin, on pouvait voir les fûts ballottés violemment par les eaux déchaînées.

Les secours

            Dés les premières heures de la matinée, les autorités locales, civiles et militaires, se sont rendues sur les lieux.
            Nous avons noté la présence de MM. Le sous-préfet Bonhore, le ministre Jacques Augarde, sénateur-maire, premier adjoint au maire ; le colonel Duque, commandant le secteur de Bougie ; M. Comolli, président de la commission administrative du département de Sétif ; le capitaine Ansart, inspecteur adjoint des services de protection civile.
            Le colonel Duque confia au capitaine de corvette Mariotti, commandant la marine à Bougie, la mission de coordonner les moyens civils et militaires pour secourir les nombreux sinistrés des mechtas de la vallée.
            Tous se sont employés à évacuer les sinistrés et leurs biens avec un inlassable courage et un esprit de sacrifice.

La basse Soummam sous les eaux

            Dans la vallée de la Soummam, les premières informations proviennent presque uniquement de sources militaires, les lignes téléphoniques étant en presque totalité coupées.
            La rive droite de la Soummam est complètement sous les eaux.

            Près de Turkine, deux militaires du 57ème R.I. ont été noyés dans un oued et leurs corps n'ont pas encore été retrouvés.
            Des civils qui étaient en danger près de Mellala et de Tiel, ont été évacués par hélicoptère ou par des éléments civils ou militaire du secteur.
            Signalons l'acte accompli par le pilote de l'hélicoptère qui, malgré le vent et le plafond extrêmement bas, a réussi à amener son appareil d'Aïn-Arnat à Bougie. La rive gauche de la Soummam est également inondée.
            Dans la région de sidi-Aïch, les dégâts sont très importants. Le pont métallique du Chemin du chemin de fer a été enlevé par les eaux.


Photo de M. Louis Aymés
Sidi-Aïch Le marché couvert est emporté

Photo de M. Louis Aymés
Sidi Aïch Le Pont viaduc des C.F.A ne résiste pas aux flots

Seddouk isolé

            La route de Bougie à El-Kseur est coupée. Sur cette route, six véhicules militaires ont été submergés par les eaux, mais le militaires ont réussi à se mettre à l'abri. Le village de Seddouk est complètement isolé, les deux ponts ayant été emportés par la violence des eaux.

            Dans la région d'Akbou, la route et la voie ferré ont été coupées à proximité d'Allaghan.
            Au passage à niveau de Taourirt-Larba, commune de la Réunion, une femme et quatre enfants musulmans ont péri moyés. De gros dégâts sont à déplorer à briqueterie et à la papeterie de la Soummam, de la Réunion.
            Le ballast de la voie ferrée a été, en plusieurs endroits, emporté par les eaux.
            A Boukhiama, commune de Bougie, on déplore un mort par accident à la suite des éboulements.
            A Bougie et dans toute la région, de nombreuses têtes de bétail ont été noyées.

            L'hébergement de tous les sinistrés et de tous les sans-abri a été assuré par la municipalité de Bougie, en accord avec le sous-préfet de l'arrondissement. Des centaines de personnes ont ainsi été recueillies à l'école Jacquard, où nourriture et vêtements leur ont été fournie.

ESPINOZA - 03/12/1957

Eglise Sainte Thérèse
Photo de M. Louis Aymés  Photo de M. Louis Aymés
            Lundi 23 décembre 1957 ; inondations dans la vallée de la Soummam. Les ponts de Biziou et celui de Takrietz sont emportés. Le village de Seddouk est complétement isolé.
            Le 5ème Génie de Versailles et le 19ème d'Hussein Dey sont sur place.

            Les hélicoptères ravitaillent les populations et évacuent les malades sur les hôpitaux civils de Sétif, Bougie, Tizi-Ouzou.

            Les sapeurs du 19ème lancent un Pont BAILLEY en amont de Takrietz.

            Sidi-Aïch et Seddouk sont 2 villages de la vallée de la Soummam à environ 60 kms de Bougie.
Photo de M. Louis Aymés





Les vannes du barrage des Zardezas
ouvertes partiellement.


            Philippeville. - A la suite des pluies diluviennes, la pressions des eaux qui se sont accumulées au barrage des Zardezas, dans la région de Philippeville, devenant inquiétante, les services de l'hydraulique ont, par mesure de précaution, partiellement ouvert les vannes en fin d'après-midi pour éviter des inondations catastrophiques comme celles qui se sont produites fin novembre.











           


" LE CYCLE DE L’ADIEU
Envoyé par Le Docteur J.C. Perez               N°18
L’agonie des cathédrales
CHAPITRE 18
L’AML

« l’association des Amis du Manifeste de la Liberté
Installée par De Gaulle à Alger en 1943…
… phase historique majeure
dans la genèse du djihad islamiste contemporain »

               De nos jours, on évoque un arabo-islamisme moderne agresseur et conquérant, en se gardant toutefois de préciser une notion fondamentale.
               Une des notions parmi les plus adultérées qui soient dans le cadre des péripéties historiques, qui méritent d’être analysées et retenues avec …. « sérieux ».
               Une notion qui finit par s’imposer comme « une pseudo bondieuserie », pourrait-on écrire car elle consiste, avant tout, à ne jamais porter atteinte à l’image résiduelle d’un homme politique, responsable majeur de l’agression qui se déploie, par épisodes, contre l’Occident.
               Une agression qui se confirme chaque jour.
               Aujourd’hui en effet, on croit nécessaire de nous éblouir du souvenir de De Gaulle, que l’on s’entête à parer de toutes les vertus. Vertus imaginaires, inventées. Si ce n’est celle d’avoir pris le risque de livrer l’Algérie, un immense territoire africain, au potentiel, alors inconnu, de l’envahisseur arabo-islamiste moderne.
               Envahisseur dont le processus de guerre anti-occidentale s’exerce avec un éclat riche de cruauté parfois. Depuis le massacre newyorkais de 2001, relayé par celui du Bataclan de Paris, en se gardant d’oublier la Promenade des Anglais de Nice, le 14 juillet 2016.

              Refusant, quant à moi, de me satisfaire des effets pervers, mais surtout sclérosants et infantilisants d’un gaullisme-maladie, je reste convaincu que la liquidation de l’Algérie française illustre stratégiquement et avant tout, la perte d’une guerre par la Vème République française.
               D’une guerre au contenu spirituel et religieux majeur, dont la gravité historique n’avait pas été comptabilisée à sa réelle valeur par les gestionnaires du capitalisme financier.
               C’est-à-dire aussi bien par les promoteurs que par les déclencheurs exclusifs du délestage économique de cet immense territoire, qu’était l’Algérie française.

              Une solution finale fut imprudemment envisagée pour le devenir de cet immense territoire géopolitique. Dont la création historique fut exclusivement française.

              Solution imprudente parce qu’elle était et parce qu’elle reste riche avant tout d’une interrogation historique majeure. Silencieuse aujourd’hui encore.
               Celle-ci concerne le rôle futur de l’Algérie dans la stabilité ou l’instabilité, c’est-à-dire dans l’avenir hypothétique d’un « Occident nouveau ».

              Nous constatons chaque jour un peu plus que l’Occident n’existe en réalité et ne peut être conçu que pour et par un homme libre.
               C’est-à-dire pour et par un homme moderne.
               Comment définir un homme moderne ?

              Il se définit par une adhésion sans marchandage de celui-ci à une laïcité saine, intelligente, et universelle.
               Une laïcité qui saura adapter la foi en Dieu de cet homme moderne, s’il en éprouve une, aux exigences nécessaires à la santé du monde ….
               Une laïcité qui prend ainsi, dès cet instant, une nouvelle place au sein, sinon à la tête, des constantes socio-biologiques majeures qui régissent la normalité de la vie humaine.
               Normalité nécessaire pour protéger ce monde contre une subversion pour le … néant.

              A l’analyse, tout banalement sérieuse, la subversion dans laquelle on prétend nous intégrer depuis la liquidation de la France en Algérie, n’est rien d’autre en effet que l’expression révolutionnaire d’une dialectique ultime.
               Une dialectique ultime, c’est-à-dire une confrontation ultime qui ne peut aboutir qu’à un néant.

              Un néant, ou une absence de vie confirmée en maintes occasions par nos téléviseurs. Ceux-ci nous transmettent, en effet, des images recueillies par les merveilleuses mécaniques d’observation, construites par le génie humain. Des images révélatrices de richesses géologiques, physiques et chimiques insoupçonnées certes. Pourvoyeuses d’un enseignement constant et précieux pour nos astrophysiciens.
               Mais ces espaces gigantesques interstellaires que nos scientifiques explorent avec compétence, n’offrent encore pour le moment aucun espace de vie capable d’accueillir les éventuels rescapés «élus » du monde terrestre actuel.
               D’un monde terrestre condamné à disparaître dans des délais encore lointains…. certes. Délais sur lesquels nos astrophysiciens et mathématiciens modernes semblent avoir, cependant, des notions précises.

              A quelle date fut prise par De Gaulle, en tant que subordonné majeur des instances universelles du capitalisme financier, une décision dont on refuse d’évaluer la responsabilité décisive qu’elle illustre, dans le déclenchement de l’actuelle révolution mondiale ?
               De cette révolution pour un néant ?
               Un néant riche avant tout de données mathématiques et cosmogoniques qui se mettent en place chaque jour un peu plus ?
               Sous nos yeux, grand-ouverts, s’il-vous-plaît !
               Car ce déclenchement ne s’’exprime pour le moment qu’à travers une révolution arabo-islamiste fondamentaliste qui claironne une volonté constante de conquérir le monde.
               Un arabo islamisme fondamentaliste que nous ne confondons pas avec la religion musulmane.

              Cette décision fut prise en 1943.
               En tant que Président du Comité Français de Libération Nationale, siégeant à Alger, De Gaulle imposa à la France d’accepter les statuts d’un nouveau parti politique.
               Il le fit sous la pression de Roosevelt.
               Pression exercée sur le terrain algérien par le relais du diplomate Murphy, représentant personnel de Roosevelt auprès du Maréchal Pétain en juin 1940 tout d’abord, expédié secondairement à Alger en décembre 1940.
               Murphy officialisa donc au niveau international la décision prise par De Gaulle d’accepter, au nom de la France, les statuts d’un nouveau parti créé par Ferhat Abbas.

              Il s’agit de l’AML, en 1943, permettez-moi de le préciser encore.

              L’AML, c’est-à-dire : l’association des Amis du Manifeste de la Liberté.
               Cette association regroupait différentes structures politiques, toutes animées d’une volonté première et exclusive : combattre la France. Rejeter notre patrie de cette terre algérienne située à 800 kilomètres seulement du port de Marseille.

              Rappelons, avec vigueur, car il importe de l’enseigner, que l’officialisation de l’AML à Alger avait été nettement refusée par le général Giraud, quelques semaines auparavant. Car celui-ci avait enregistré et avait pris soin de faire connaître l’identité exclusivement anti-française de cette association des Amis du Manifeste de la Liberté (AML).
               Identité qui ne gêna pas De Gaulle en 1943, dans son rôle subalterne de déclencheur historique d’une révolution mondiale qui s’apprêtait déjà, en 1943, à soumettre progressivement ce qui survivait encore de l’Occident chrétien.

              En raison des fonctions gravissimes qui furent les miennes sous le commandement du général Salan, lors de la dernière bataille que nous avons livrée pour la sauvegarde de l’Algérie française, c’est-à-dire pour la sauvegarde d’un Occident au sein duquel la laïcité serait parvenue à garantir une convivialité interreligieuse indispensable à la liberté du monde moderne, je me propose de revenir sur l’identité de l’AML, dans une perspective rigoureusement pragmatique.

              Je rappelle que l’AML était, théoriquement, constituée en 1943 de quatre partis politiques.

              - Le PCA, Parti Communiste Algérien d’Amar Ouezzeguéne,
              - Le PPA, Parti du Peuple Algérien de Messali Hadj
              - Le Manifeste Algérien de la Liberté de Ferhat Abbas (le MAL)
              - L’Association des ouléma créée en 1931.

I
              Le PCA, Parti Communiste Algérien d’Amar Ouezzeguéne.

              Ce parti joua son rôle dans ce combat en tant qu’ennemi de la France et de l’Occident.
               Rappelons qu’il ne participa en rien dans le déclenchement des évènements dramatiques du 8 mai 1945, plus connus sous le nom des « évènements de Sétif ».
               C’est-à-dire, rappelons-le, un soulèvement déclenché dans le Constantinois, au sud de Bougie, tout près de la terre de naissance d’Ibrahim Bachir, Tocqueville, Ras-el-Oued. Il s’agissait du président effectif sinon officiel en 1945, de l’association des oulémas, depuis la mort du président Ben Baddis en 1940, dans un camp de concentration français.

              Ben Baddis, en effet, avait été neutralisé par le pouvoir français dès le début de la guerre 1939-1945, en raison des contacts qu’il avait établis avec les services secrets militaires allemands. Comme nous le savons d’abondance.
               Il décéda d’une mort naturelle alors qu’il était détenu dans un camp.

              En 1945, lors du déclenchement des évènements de Sétif, le 8 mai de cette année-là, Maurice Thorez du parti communiste français tenait sa place dans un gouvernement français de l’époque, dirigé par De Gaulle. Il proclama avec violence dans un discours et des écrits reproduits dans la presse nationale et internationale, la nécessité de réprimer sans ménagement cette révolte de l’ouest constantinois. De la réprimer, sans réserve et surtout sans pitié.
               Ce sont des évènements que je rappelle en les résumant à l’extrême, car ils sont de notoriété publique et indiscutable. Une notoriété historique soumise néanmoins au silence entêté et pervers des hommes politiques actuels.

              Nous sommes informés du rôle que jouèrent par la suite le parti communiste français et le parti communiste algérien dans la rébellion algérienne en n’hésitant pas à s’inscrire, par tous les moyens, dans le camp anti-français.

              On n’oublie pas cependant, qu’à la fin du mois d’octobre 1954, malgré la requête suppliante du secrétaire général du PCF, Benoîst Frachon, auprès de Krim Ben Kacem au Champ de Manœuvres à Alger, l’incorporation du parti communiste dans les opérations de déclenchement de la guerre d’Algérie, avait été rejetée avec mépris par le FLN.

              Le parti communiste participa néanmoins, nous le savons, au combat contre la France. Mais toujours en situation d’auxiliaire toléré par la rébellion algérienne. En tant qu’agent majeur à cette époque du processus de désintégration occidentale, il ne concevait pas en effet, d’être rejeté de cette guerre d’Algérie déclenchée contre la nation française.
               Avec la bénédiction satanique des chrétiens félons représentés par Duval, Chaulet, et Scotto… parmi d’autres.
               Il y participa donc par des vols d’armes et des sabotages.
               En particulier ceux d’Yveton qui fut condamné à mort et exécuté à la prison de Barberousse en 1957.

              Je rappelle ce dernier évènement car lors de l’exécution d’Yveton en 1957, je séjournais moi-même avec treize autres compagnons dans cette même prison de Barberousse. A propos de ce séjour, je rappelle que nous étions quatorze combattants clandestins de l’Algérie française, concentrés dans deux cellules, avec de vulgaires paillasses pour notre sommeil nocturne.
               Nous, les combattants clandestins de la France et de l’Algérie française, ne bénéficiions pas en 1957 du soutien de notre propre communauté.
               Les « paillasses », c’était bien suffisant pour ces activistes qui perturbaient par leur engagement, la quiétude majoritaire de ceux qui ne voulaient rien faire !
               Le parti communiste algérien réussit néanmoins à jouer un rôle dans des livraisons d’armes au FLN, et dans des opérations de renseignements.
               Initiatives qui se traduisirent dans les faits, par une augmentation du chiffre des victimes françaises de toutes confessions, lors des opérations terroristes déclenchées par le FLN.
               Un terrorisme de huit ans, je le rappelle.

II
               Il me paraît utile de ne pas négliger le rôle joué par une autre formation politique qui prit part au combat contre la France à partir de la création de l’AML.
               L’AML, installée officiellement par De Gaulle en Algérie, en 1943, je crois utile de le rappeler.

              Il s’agit du PPA de Messali Hadj, le Parti du Peuple Algérien.

              Messali … fut tout le temps « l’homme des autres ».
               Il ne dirigea jamais rien.
               Mais il fut et reste encore une figure historique de la rébellion algérienne… dont nos ennemis avaient grand besoin et dont ces mêmes ennemis semblent encore avoir besoin de nos jours.
               Et dans ce besoin éprouvé par nos ennemis, on oublie évidemment la collaboration opérationnelle des maquis messalistes au combat anti FLN à partir de 1956.

              Une organisation communiste avait été créée près de Paris, à Saint-Ouen, avant la guerre de 1939-1945. En réalité, il s’agissait d’une structure stalinienne.
               Staline, sur son immense territoire, éprouvait quelques difficultés pour intégrer les musulmans caucasiens dans la dynamique révolutionnaire du soviétisme. Il fit créer à Paris, très discrètement, par le parti communiste français, une organisation : l’ENA.
               L’ENA ou l’Etoile Nord Africaine.

              L’ENA ne fut rien d’autre qu’une organisation soviétique créée opportunément dans le but d’y intégrer Messali, déjà connu à Moscou pour son sentiment fondamentalement anti-français. Pour cette raison, il fut intégré à l’ENA, dont il illustra une identité historique qu’elle ne méritait pas avant qu’il y fût lui-même incorporé.
               Il bénéficia tout logiquement d’un appui soviétique immédiat.
               On lui promit, en échange de ce que l’on attendait de lui, un secours soviétique ultérieur dans le cadre de sa lutte pour l’indépendance algérienne.
               En réalité, ce notable musulman convaincu et pratiquant qu’était Messali, n’avait rien de communiste. Il fut déguisé néanmoins en un redoutable communiste clandestin, dans le but d’être utilisé par Staline avec une efficacité opérationnelle renforcée qu’espérait le « Petit Père des Peuples ».

              Celui-ci sollicitait le concours de Messali pour le faire intervenir, en tant que « notable musulman algérien indépendantiste anti-français » auprès des peuples musulmans caucasiens, qui osaient exprimer leur hostilité aux réformes staliniennes, pour des motifs religieux.

              Confirmons donc : on déguisa Messali en communiste qu’il n’était pas, pour obtenir son intervention auprès des peuples musulmans soviétiques qui étaient encore opposés aux exigences politico-économiques du soviétisme stalinien.
               On lui demanda tout banalement de se servir de Dieu pour engager les musulmans russo-caucasiens dans la révolution bolchevique.

              Son action fut temporaire car, à l’évidence, il ne donna pas satisfaction au pouvoir soviétique qui prit soin de l’évacuer, en silence, vers l’extérieur des frontières de l’URSS.
               Vers la Suisse.

II – suite 1
               Il fut récupéré, en tant que fondateur et président du PPA, tout naturellement et tout logiquement à Genève par l’émir Chekib Arslan que l’on ne peut se permettre d’évoquer sans de sévères précautions.

              Rappelons, en résumant à l’extrême, que Chekib Arslan était un Druze libanais, un notable religieux de Beyrouth, qui n’accepta pas le mandat qui fut octroyé par la SDN 1 à la France, d’administrer la Syrie et le Liban en vertu du traité de San Remo de 1920.
               Il déclencha une guerre syrienne et libanaise contre la France. Il fut condamné à mort par contumace, après jugement d’un tribunal militaire français.
               Il avait trouvé asile entre temps à Genève. Il y fonda très rapidement une association : « Association pour la Libération de l’Afrique du Nord ».
               Chekib Arslan bénéficia d’énormes appuis financiers internationaux qui lui permirent de récupérer Messali en 1936 et de l’introniser en quelque sorte, dans une conjuration anti-française. En particulier au cours d’un congrès fastueux qu’il organisa, un an plus tard, à Genève en 1937.

              Messali connut ainsi un renouveau révolutionnaire. Car son rayonnement révolutionnaire justement, fut officialisé et valorisé sur un plan international à partir de ce congrès.
               Si Arslan détenait le pouvoir de relancer Messali et de l’intégrer dans son combat « Pour la Libération de l’Afrique du Nord occupée par la France » disait-il, c’était pour une raison majeure : il était l’homme nouveau de la « nahda ».

              La nahda dont il est question de nos jours sous le terme corrigé et imposé « d’enahda ». C’était alors, en 1936 et 1937, « la renaissance de l’islam ».
               Un mouvement pour renforcer l’idéal islamiste international. Mouvement qui avait été créé antérieurement, après la victoire des Pyramides, remportée par Bonaparte.

              Un mouvement religieux et conquérant qui voulait, dans un premier temps, assurer la survie de la religion musulmane et, dans un temps ultérieur, amplifier son rayonnement spirituel et universel.
               Et dans un temps devenu actuel, accéder par la terreur et par la guerre révolutionnaire universelle, à la domination finale du monde.
               Tel est le but opérationnel de l’Enahda actuelle.

II – suite 2
               La nahda, fut relancée par le congrès de Genève de 1937.
               Ce congrès était financé par une structure capitaliste qui, par ce procédé, créa une place de notable révolutionnaire international et islamiste pour Messali Hadj.
               Il fit de ce dernier un personnage dont personne ne pouvait se passer en Algérie, pour combattre la France.

              Messali était évidemment sous le coup d’un mandat d’arrêt français depuis quelques années. Nous avons vu comment, grâce à l’Etoile Nord Africaine de Saint-Ouen, il avait pu sortir de France.
               Son « emploi par Staline », nous l’avons souligné, ne fut pas un succès, loin de là.
               Mais Chekib Arslan trouva en lui un agent devenu prestigieux, qu’il fallait incorporer dans la révolution islamiste internationale qu’il prétendait organiser à partir de Genève. Alors que lui-même, l’émir, était condamné à mort par contumace, pour avoir pris les armes contre la France lors de son rejet du mandat qui avait été octroyé à notre pays, par la SDN, d’administrer le Liban et la Syrie.

              Révolution islamiste revitalisée, surtout, depuis la naissance du nouvel état d’Israël. Celui-ci fut à l’origine d’une coalition qui se structura entre l’Irak, la Transjordanie et l’Egypte. C’était dans le but de combattre Israël justement, avec l’appui militaire de l’Angleterre qui avait besoin d’un oléoduc pour exploiter le pétrole irakien. Un oléoduc qui, pour être rentable, devait relier, à travers la Palestine, les puits de pétrole irakiens au port d’Haïfa sur la Méditerranée.
              Asmine El Husseïni, muphti de Jérusalem et l’émir Cheikib Arslan, unirent leurs efforts pour combattre Israël, dès la naissance de cet état. Plus tard, ils n’hésitèrent pas pour combattre à la fois Israël et la France à s’intégrer à Berlin, dans le camp d’Adolphe Hitler en 1939-1945.

              Mais, entre temps, au début de l’été 1936, le mandat d’arrêt contre Messali Hadj avait été annulé par le gouvernement français de Léon Blum, nouveau président du conseil socialiste de la IIIème République française.
              Messali avait pu rentrer libre en Algérie.
               Commencèrent alors les activités du PPA, le Parti du Peuple Algérien, un composant historiquement majeur de l’AML.

              L’AML, rappelons-le, qui fut installée par De Gaulle en Algérie sept ans plus tard, en 1943, sur prière poliment et impérativement exprimée par le président Roosevelt.

III
               Il est une intervention qu’il ne faut pas négliger : il s’agit en réalité d’un leurre. Le leurre de Ferhat Abbas qui, jusqu’alors, s’était manifesté par des velléités indépendantistes…. maintes fois formulées.
               Il avait accédé à une renommée nationale, franco-algérienne, qui fit de lui un interlocuteur constant des agresseurs de la France. Interlocuteur renforcé, un peu plus tard par Farès dont nous connaissons le rôle divers et contradictoire qu’il joua dans l’avenir de l’Algérie.
               Ces deux hommes, parmi d’autres, dès l’amnistie de 1946 (celle de la quatrième République) eurent à prendre la précaution d’un contact inévitable avec le nouveau président de l’association des ouléma. Il s’agit d’El Bachir El Ibrahimi de Tocqueville, Ras-El-Oued, au sud de de Bougie, au nord de Setif.

               A cette époque, en 1946, Messali était assigné à résidence à Reibell, à l’ouest d’Alger.
               Ferhat Abbas intervint comme un relais historique et indispensable et finalement majeur, qui permit d’illustrer l’apparente continuité offerte par les différentes phases de la mise en route de la révolution algérienne.
               En exigeant de la part de Ferhat Abbas et de Farès, une adhésion proclamée aux exigences dogmatiques de l’association des ouléma.
               Une adhésion malgré une évidente modération de ces deux hommes dans l’observance quotidienne des impératifs du culte musulman.

IV
               L’association des ouléma devint la tête pensante islamiste, le moteur spirituel de la révolution algérienne. Elle était dirigée depuis la mort de Ben Baddis en avril 1940, par l’homme des Hauts Plateaux sétifiens, Ibrahim Bachir.
               Cette association fut renforcée par la volonté de De Gaulle de l’intégrer en 1943, au dispositif révolutionnaire et guerrier, l’AML, qui avait décidé de faire la guerre contre la France, au nom de la « umma, la nation arabe universelle », pourrait-on traduire.

               En 1945, le 8 mai, s’étaient déclenchées les émeutes de Sétif, des Hauts Plateaux sétifiens et de Guelma. C’est-à-dire dans une zone d’influence maximale, celle de Sétif, du président de l’association des ouléma, Ibrahim Bachir.
               La première victime de ces tueries fut une petite fille française de Sétif, de confession juive. Elle s’appelait Nackache.
               Après la répression des émeutes, répression nécessaire et urgente pour éviter le massacre de milliers de français de toutes confessions, ces mouvements furent dissouts par les autorités françaises.
               En 1946, survint une amnistie, lors de la naissance de la IVème République.
               Ces mêmes mouvements réapparurent alors, sauf le parti communiste qui s’était manifesté contre le soulèvement du 8 mai 1945. Qui avait même appelé à une répression sévère et qui, grâce à cette prise de position, n’avait pas été interdit en Algérie en 1945.
               Tous ces mouvements entrèrent en action sous d’autres sigles, dès le mois de janvier 1947 sous l’autorité spirituelle du nouveau président officiel de l’association des ouléma, El Bachir El Ibrahimi.

               L’UDMA de Ferhat Abbas.
               C’est l’Union Démocratique du Manifeste Algérien qui prit la suite du Manifeste Algérien de la Liberté, (le MAL) du même Ferhat Abbas.

               Le MTLD.
               C’est le Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques de Messali Hadj qui prit la suite du PPA.
               Soulignons que c’est à partir du MTLD, dont le siège se situe Place de Chartres à Alger, que naquit en 1947 une organisation fondamentale de la révolution algérienne : l’Organisation Secrète.
               Celle-ci donna plus tard l’essentiel de l’effectif du CRUA 2 , au mois de mars 1954 puis du FLN (Front de Libération Nationale ), le 23 octobre 1954.
               A l’évocation volontairement très schématique, que je vous propose, de la mise en route de la révolution algérienne, on se rend compte que l’appareil de guerre, ennemi de la France, n’a pas pu se développer ou se structurer et finalement s’implanter en Algérie, si ce n’est avec le consentement passif et lucide, sinon complice, des IIIème et IVème Républiques.

               La Vème République s’attribua, sans camouflage, le rôle historique de livrer sur un plateau, les moyens de la victoire à ce nouvel appareil de guerre anti-français, organisé à partir de l’OS du MTLD.
               Historiquement la Vème République fut intégrée à la naissance et au développement de la révolution algérienne. Donc à la phase majeure du déclenchement de l’actuelle révolution mondiale, dès 1959.
                CRUA : Comité Révolutionnaire d’Union et d’Action

               De Gaulle, en 1943, dans cet esprit nous l’avons vu, n’avait pas hésité à donner naissance à l’organisation officielle de l’anti-France, l’AML, sous la pression du président américain, Roosevelt.
               Tout logiquement, à partir des ouléma et surtout de l’OS, naquit le FLN, le 23 octobre 1954.
               Plus tard, dès l’avènement de De Gaulle, avec le concours de Ferhat Abbas et de Farès, va naître le GPRA : Gouvernement Provisoire de la République Algérienne.
               C’était le 18 septembre 1958. Au Caire.
               10 jours avant le référendum maudit du 28 septembre 1958.
               On oublie, avec une ténacité très instructive, de préciser que le destin de l’Algérie française était déjà scellé dans un écrit que personne ne veut évoquer : il s’agit du document Pompidou, qui, dès le printemps 1958, avant la prise du pouvoir par De Gaulle, précisait les manœuvres à déclencher pour obtenir du FLN une cessation des hostilités, en lui abandonnant l’Algérie évidemment.
               Ce plan Pompidou-Brouillet émanait du cabinet privé de De Gaulle. Tout y avait été prévu pour que la guerre fût perdue, et cela dès le printemps 1958.
               Il fallut néanmoins quatre ans de pouvoir gaulliste pour perdre officiellement et historiquement cette guerre contre le FLN.
               Quatre ans d’opposition d’une élite minoritaire de Français d’Algérie de toutes confessions et de Métropole qui, refusant la défaite mendiée par De Gaulle par l’intermédiaire de Pompidou et des « pompidoliens », opposèrent une résistance illustrée et symbolisée, en dernier recours, par le combat de l’OAS d’Algérie et de Métropole en 1961 et 1962.
Le docteur Jean-Claude PEREZ        
Nice, le 12 octobrebre 2016                

TRISTE MARIANNE
Par M. Hugues Jolivet

Images M. H. Jolivet

         Marianne, issue du peuple et mère de la Patrie,
         Tu souffres, depuis deux siècles, des envieux extérieurs
         Qui souhaitent annexer les biens de la fratrie,
         En brûlant sa culture, ses croyances, ses valeurs.

         Tes premières années, périodes difficiles
         Au sein de la famille, ta devise est bafouée
         Par des frères ennemis, ambitieux, peu dociles,
         Au terme de Liberté, répondent par le fouet !

         De nombreux coups d'Etat, tu sombres dans l'oubli
         Quant naît le Consulat et le Premier Empire.
         Puis après Waterloo, un Roi est rétabli.
         Libérée quinze années pour aller conquérir

         Un nouveau territoire, dénommé Barbarie,
         Sous régime Ottoman, en Afrique du Nord,
         Baptisée par la France "colonie d'Algérie",
         Abandonnée, plus tard, à un bien triste sort.

         A nouveau éloignée par Napoléon Trois,
         Au long d'un premier siècle, que de péripéties
         Avant d'être établie fermement dans tes droits
         A la chute de Sedan. Tu es nouveau Messie !

         Tu t'es durement battue, bravant les "tsunamis"
         De guerres de tranchées, de luttes aux baïonnettes,
         Hormis quatre années noires, muselée par l'ennemi,
         Et dont tes Dirigeants ne sont que marionnettes,

         Ton peuple t'aime bien, il se bat et s'implique
         Quand la menace gronde, il sauve la Patrie,
         Bien réel et concret, avant la République,
         Un concept politique qui fluctue et varie

         Selon que le pouvoir est de Gauche ou de Droite.
         Une seule Constitution, des lectures différentes
         Sources de dissensions, de querelles maladroites,
         Trop souvent partisanes, pour toi, intolérantes.

         En un siècle et demi, tu as forgé tes lois,
         Dont la plus essentielle, toujours d'actualité,
         Gère notre quotidien, jugé de bon aloi,
         Et le respect de l'autre par la laïcité.

         Marianne, tu es trahie par de grands Responsables,
         Ceux auxquels nous avions confié notre destin.
         Avides du Pouvoir, ils s'avèrent incapables
         D'appliquer clairement ce qui est opportun.

         Je suis triste avec toi, qu'un très grand Président
         Par la taille, abandonne, et sans contrepartie,
         Une terre française de quinze départements,
         Et un million d'enfants qui quittent l'Algérie.

         Ta famille est perdue, sauve-la du trépas,
         Trouve lui un vrai guide, qu'il soit un ''bon-papa'' !
- Hugues JOLIVET        
7 et 8 décembre 2016         





" LE CYCLE DE L’ADIEU
Envoyé par Le Docteur J.C. Perez               N°19
L’agonie des cathédrales
CHAPITRE 19

               Hier
               …la décadence des wisigoths espagnols généra l’islamisation endogène de l’Espagne…

              Demain
               …la décadence occidentale… est-elle sur le point de générer une soumission de l’Europe au djihad islamiste ?

I
              Au cours de l’étude précédente, l’étude XVIII du « Cycle de l’Adieu », j’ai proposé une synthèse. Celle-ci prétendait rappeler l’agression qui fut planifiée contre la France. A partir de 1943. Une agression mise en route à l’initiative du général De Gaulle. Celui-ci ne fit que se soumettre, en cette circonstance, aux exigences de Franklin Roosevelt quand il conféra à l’association des « Amis du Manifeste de la Liberté » un caractère officiel qui permit à cette AML de jouer un rôle majeur dans l’exclusion de la France du continent africain.

              Il n’est pas inutile de rappeler qu’en 1930, les cérémonies commémorant le centenaire du débarquement de Sidi-Ferruch avaient provoqué un « enthousiasme totalement français » du peuple multiconfessionnel d’Algérie. Sous la forme d’un élan patriotique qui aurait pu garantir la pérennité de l’implantation française en Afrique, dans un premier temps. Suivie d’une implantation occidentale en Afrique, dans un deuxième temps. A partir de cette immense contrée. L’Algérie.
               L’Algérie, dont le rôle géopolitique s’annonçait, déjà en 1930, comme majeur sinon primordial, dans le devenir historique du monde méditerranéen et africain.
               Nos gouvernants français ne furent pas perméables à cette conviction, qui exigeait, pour être éprouvée, une étude approfondie, sincère et convaincue, du problème unique qui dominait l’histoire de l’Algérie française. Problème qui ne fut jamais résolu.

              Nous évoquons le problème religieux.
               C’est-à-dire le problème d’une symbiose nécessaire, à constater d’abord et à conforter ensuite entre : d’une part la terre et les hommes qui y vivaient, et d’autre part, les trois convictions religieuses qui s’y exprimaient,
               La juive, la chrétienne et la musulmane, par ordre d’ancienneté historique.
               Il serait d’une imprudence dangereuse de se persuader que ce problème religieux ne se pose pas… ou ne se pose plus… de nos jours en France, en Europe, au niveau universel.

              D’une manière que l’on peut qualifier de systématique en Algérie, on a refusé de conférer tout son potentiel générateur d’intégration à une notion.
               Une notion, ou plutôt un concept qui ne fut jamais étudié avec sérieux et compétence en Algérie.
               Le concept de laïcité.

              La laïcité, fondement théorique et philosophique de l’esprit moderne, fut victime en Algérie, d’une méconnaissance dans un premier temps, accompagnée d’une atrophie volontaire et constante de son sens fondamental, dans un second temps.
               Car on a expérimenté dans les faits et pendant des dizaines d’années en Algérie, une « laïcité sélective ».
               Laïcité sélective, car elle octroyait aux musulmans le droit d’affirmer, d’exhiber même dans tous les actes de la vie quotidienne et à toute heure, leur identité de musulmans.
               Pendant le même temps, à partir de la IIIème République surtout, on a marchandé ou plutôt limité l’expression quotidienne du culte chrétien.
               Celui-ci fut astreint à des exigences restrictives de ses manifestations publiques quotidiennes.
               Ce fut une laïcité sélective certes, mais une laïcité servilement tolérante pour les pratiquants du culte musulman et nettement restrictive, répétons-le, pour les fidèles des cultes chrétien et juif.

              On s’entête encore, de nos jours, dans le refus d’une affirmation qui est celle-ci : la laïcité a fini par accéder, tout naturellement, à l’identité d’une constante biologique prioritaire.
               Nous l’avons fortement formulé en maintes occasions.
               C’est à partir de cette constante biologique, la laïcité, qu’auraient dû être définies, en Algérie, les conditions d’un vécu, intelligemment harmonisé, des différentes convictions religieuses.
               Dans la mesure où ces convictions se révélaient conformes aux exigences scientifiques, techniques, éducatives et sanitaires c’est-à-dire aux exigences fondamentales et non religieuses de la vie.
               La laïcité, oui, c’est une constante biologique.
               Elle doit être reconnue comme telle et défendue comme telle, parce que c’est à partir d’elle seulement que peut se concevoir une expression, viable pour tous, de l’incontournable composante religieuse de la vie moderne.
               Nous voulons souligner que cette conception biologique de la laïcité est seule capable de garantir une convivialité interconfessionnelle durable et nécessaire à la paix d’un peuple : le peuple français en l’occurrence.
               Elle doit se situer en conséquence, au sommet des exigences légales auxquelles doivent se conformer les expressions confessionnelles de la vie.
               Car elle seule, la laïcité, jouit d’un pouvoir à la fois conservateur et protecteur de la liberté.

II
               Cette détermination que j’exprime, de reconnaître à la laïcité la valeur d’une constante biologique, m’invite à une initiative audacieuse et néanmoins nécessaire dans le contexte de « djihad islamiste » que nous connaissons : résumer en quelques pages, comment l’Espagne est devenue volontairement musulmane, en quasi-totalité, vers la fin du VIIè siècle.

              Une première précision : écrire, enseigner, affirmer, et soutenir qu’au début du VIIIè siècle l’Espagne fut occupée par un envahisseur musulman et arabe, illustre une contre-vérité majeure.

              Il n’est pas inutile de rappeler qu’au VIè siècle, le royaume visigoth ibérique vécut le drame du prince héritier Herménégild. Celui-ci fut tué sur ordre de son père, le roi Léovigild, parce qu’il avait renié la foi de l’arianisme.
               Ce prince Herménégild avait épousé une princesse franque, Ingonthe, fille de Sigebert, roi d’Austrasie. Cette princesse était une chrétienne convaincue. Elle réussit à convertir son époux au catholicisme romain. Ce qui exacerba l’appétit de pouvoir du fils cadet de Léovigild, Récarède.
               Celui-ci convainquît le roi de faire exécuter son fils aîné Herménégild, pour le motif majeur que celui-ci s’affirmait comme un renégat de l’arianisme.
               Ce que fit le roi Léovigild.

              Vers cette époque, au VIè siècle donc, la foi arienne telle qu’elle s’exprimait en Espagne visigothe, était devenue conquérante.
               Après la mort du roi Léovigild, qui décéda du chagrin provoqué par l’exécution de son propre fils aîné, son cadet Récarède prit légitimement le pouvoir.

              Il tomba à son tour sous l’influence spirituelle de sa belle-sœur, la veuve Ingonthe, animée d’une ardente foi chrétienne. Elle réussit l’exploit de convertir son royal beau-frère Récarède, au catholicisme.

              L’Espagne vécut ainsi une abjuration solennelle de l’arianisme, à l’initiative du nouveau souverain Récarède, lors du concile de Tolède, en 589.

              La religion catholique devint dès lors, la religion officielle du royaume ibérique. Le baptême chrétien « de tous » fut proclamé obligatoire sous peine de mort, lors de ce célèbre concile de Tolède.

              L’arianisme survécut néanmoins au sein d’une fraction très importante sinon majoritaire, des forces armées visigothes. Tout particulièrement au sein de la cavalerie gothe qui, à la fin du VIIè siècle était commandée par Tarik.
               Tarik était le duc de Tanger. Son territoire se situait de part et d’autre du détroit de la Méditerranée qui sépare la péninsule ibérique de la côte africaine. Il était de souche gothe et n’avait rien d’arabe.
               Insistons donc : l’homme du « Djebel At Tarik », qui donna son nom au détroit de Gibraltar, était un visigoth arien adhérant tout naturellement à l’islam, dans un but opérationnel précis : vaincre et soumettre le christianisme romain.

              Coïncidaient ainsi deux pouvoirs en Ibérie :
               - d’une part un pouvoir officiel chrétien, qui s’affirma très rapidement instable, - d’autre part, une élite militaire arienne, ennemie du christianisme, qui restait menaçante.

              Les Goths ariens pratiquaient couramment la polygamie, ne croyaient pas en « Jésus Fils de Dieu ». Ils ne croyaient pas dans le culte chrétien tel que celui-ci avait été précisé au IVè siècle, lors du concile de Nicée, (325-326) et confirmé plus tard par le concile de Chalcédoine en 451.

              L’ennemi fondamental et unique de la religion catholique romaine, était donc illustré par l’arianisme.
               Ces deux courants religieux se disputaient une clientèle de païens, à l’échelon européen. Ceux-ci cherchaient, dans leur immense majorité, à s’intégrer dans ce courant moderne qu’était devenu le monothéisme.
               Ils avaient le choix, depuis le IVè siècle, entre l’arianisme et le christianisme romain.
               Un christianisme qui avait vu son potentiel de rayonnement spirituel s’atténuer considérablement. S’atténuer parce qu’il avait été poignardé dans le dos par son propre installateur dans l’empire romain, Constantin lui-même.
               Cet empereur, à la fin de sa vie, se convertit à l’arianisme, nous le savons. Il condamna le concile de Nicée qu’il avait lui-même convoqué, en 325-326 rappelons-le. Constantin fut baptisé « arien » sur son lit de mort, par l’évêque Eusèbe de Nicomédie, le successeur d’Arius au IVè siècle.
               Il est important de le souligner encore.
               Car, par ce baptême arien, un énorme potentiel humain déserta la collectivité catholique romaine, à l’est de l’Europe, et dans les premiers contreforts asiatiques du Proche et du Moyen-Orient.

              Un marché était constamment ouvert pour une récupération religieuse des païens balkaniques et orientaux.
               Récupération, soit pour le compte du christianisme romain qui prêchait la foi en Jésus, fils de Dieu et en la Sainte Trinité, soit pour le compte des ariens ou arianistes qui niaient la filiation de Dieu en Jésus Christ.
               Cette compétition pour l’acquisition d’une clientèle religieuse, eut pour conséquence :
               - d’une part, la naissance d’un arianisme balkanique oriental et vigoureux,
               - d’autre part, le choix des Khazars, un peuple de païens regroupés dans une monarchie populaire, très structurée, à l’ouest de la Volga et plus particulièrement dans la plaine du Don.

              Ces païens khazars connurent plusieurs décennies de doute. Un doute partagé entre l’arianisme et le christianisme romain. En dernier ressort, ils décidèrent et formulèrent avec conviction que ces deux expressions de la foi en Dieu étaient trop riches en incertitudes.
               Ils optèrent, en conséquence de cette conviction, pour le judaïsme, la religion mère.
               Avec la complicité souterraine des ariens qui craignaient de voir le christianisme hautement renforcé par l’adhésion éventuelle des Khazars.

              C’est ainsi que naquit la collectivité religieuse et moderne des Juifs Askhénazes qui se rallièrent à l’Ancien Testament et à la loi de Moïse.
               C’était vers la fin du IXè siècle donc. Naissance et rayonnement des juifs askhénazes qui, ethniquement, n’étaient pas des sémites.
               Cette collectivité nouvelle, intégrée au judaïsme, fut confortée dans son choix ainsi que dans le vécu de sa nouvelle spiritualité, par le soutien d’Hasdaï ibn Shaprunt.

              Celui-ci, Hasdaï ibn Shaprunt, juif séfarade né à Jaen en Andalousie, exerçait la fonction de vizir du calife de Cordoue, Abderrahmane III. C’est-à-dire qu’il jouait le rôle d’un premier ministre juif auprès d’un chef d’état espagnol de confession musulmane.

              L’intelligence, l’immense savoir de ce médecin juif séfarade, Ibn Shaprunt, lui permirent d’intervenir par ses conseils, auprès de la nouvelle collectivité juive askhénaze, dès le début du XIè siècle, et d’enrichir cette nouvelle collectivité de ses richesses bibliques et intellectuelles personnelles.
               Ce fut une opération majeure, hostile au christianisme, mise en œuvre d’une part par les juifs séfarades espagnols à l’initiative d’Hasdaï ibn Shaprunt, et d’autre part, à l’initiative aussi de ceux qui venaient de rallier la foi juive à partir de leur refus simultané du christianisme et de l’arianisme : les juifs askhénazes.

              Entre temps, vers 580, un conducteur de caravanes animé d’un profond mysticisme, Mohamed, avait rencontré des moines ariens ou arianistes, en Arabie, où il était né.
               Ceux-ci, à partir de cette rencontre, entreprirent d’enrichir le mysticisme réel et vécu de Mohamed, en lui communiquant leurs propres convictions.
               Ils apportèrent, sans aucun doute, au prophète, les précisions dont celui-ci avait une grande nécessité pour formuler son enseignement.
               Mohamed apprit à connaître la bible que lui enseignèrent les ariens. Comme eux, il rejeta le dogme de la Sainte Trinité.
               Il se déclara dès lors, le porte-parole unique de la foi en Dieu tel qu’il l’éprouvait lui-même. A Médine, en particulier, Mohamed jouit du concours, en 610, d’un intermédiaire de Dieu, Jibril, l’archange Gabriel, dont le Prophète affirma qu’il s’agissait de celui qui lui transmettait la parole de Dieu à titre personnel.
               Selon les enseignements du coran.
               Très rapidement, les ariens devinrent les principaux relais humains, « la masse », du nouveau culte dont Mohamed était devenu l’annonceur et le prophète.

              Culte transmis, universellement, à partir du IIIème calife Uthman, en langue arabe littérale que le Prophète ne parlait pas.
               Il est important de préciser, une fois de plus, que Mohamed ne s’exprimait pas en langue arabe littérale pour la raison toute simple qu’il ne la connaissait pas. Il s’exprimait en khoraïchite ou en araméen, vraisemblablement.
               La langue arabe littérale devint ainsi, après la mort du Prophète, un moyen d’universalisation majeure du nouveau culte musulman, à partir de la décision du IIIème calife.
               Elle contribua à conférer à l’islam une expression universelle qui enrichit son enseignement, bien au-delà de l’Arabie.

III
               On pourrait presque dire que l’Espagne arabe n’a jamais existé.
               Puisque l’Espagne n’a jamais connu d’invasion ou d’occupation arabe.

              Tout s’est passé comme si le drame vécu par le roi Léovigild au VIè siècle et la félonie de son cadet Récarède, avaient suffi à favoriser une islamisation culturelle, linguale, philosophique et élitiste des Ibériques ariens ou arianistes, à partir de 622, date de l’Hégire.

              L’Espagne, cette Ibérie mystérieuse, fut décrite par un historien français, Legendre, auteur d’une « Histoire de l’Espagne » que j’ai lue il y a 60 ans environ.
               Cet auteur avait soutenu une thèse à la fois originale et vigoureuse : « l’Espagne, ce n’est pas une presqu’île, c’est une plusqu’île ».

              Il insistait sur le sens qu’il fallait attribuer, parce que c’était le vrai, aux deux termes celtibères « Ibérie » et « Hispanie ».
               D’après lui, l’un de ces deux termes, j’ignore lequel évidemment, évoquait l’idée d’un « défilé étroit » permettant un accès certes, mais un accès très difficile vers un territoire donné.
               L’autre terme évoquait la notion d’une « île cachée ». Une île difficile à repérer et à aborder.
               Il insistait par cette description, sur une notion d’isolement géographique de la péninsule ibérique, qui fut à l’origine d’une particularité historique qui fit que « ce qui s’y passait fut très souvent différent de ce qui se passait chez les autres ».

              Il est difficile de soutenir que les Visigoths, « los godos » aient tenu un rôle majeur pendant leur souveraineté, dans l’élaboration du phénomène historique exceptionnel qui définit l’Espagne du Moyen Age.

              Au VIème siècle survint, il est nécessaire de le rappeler, ce drame que nous connaissons.
               Le roi Léovigild avait deux fils. Tous les membres de sa familles étaient ariens ou arianistes : le roi Léovigild, la reine Goswinthe, Herménégild l’aîné, Récarède le cadet. C’est-à-dire qu’ils ne croyaient pas en Jésus-Christ fils de Dieu. Ils rejetaient le concept de la Sainte Trinité.
               Ils n’acceptaient donc pas le catholicisme apostolique et romain et n’adhérèrent jamais aux enseignements du concile de Nicée (325–326) convoqué et organisé par Constantin, l’Empereur.
               Concile renié par l’empereur Constantin lui-même, un an plus tard, sur son lit de mort, quand il reçut le baptême arien, de la main du successeur d’Arius, l’évêque arien, Eusèbe de Nicomédie.
               Il est nécessaire d’insister dans le rappel de cet évènement négligé par une majorité d’historiens, car il permet d’évoquer les conséquences imprévisibles que peut générer une trahison, quand elle est accomplie par un chef d’état paré par le « qu’en-dira-t-on » obséquieux des soumis, de toutes les vertus malgré sa trahison majeure.

              Les souverains goths étaient donc ariens. Ils pratiquaient la polygamie, mais ne persécutaient pas pour autant les souverains voisins qui étaient chrétiens. De manière à ne pas altérer des relations nécessaires avec ces mêmes souverains.
               Ces monarques ibériques avaient en effet des filles et des fils à marier et les exigences de voisinage avec la Gaule en particulier, rendait des unions possibles voire inévitables entre des héritiers et des héritières de souverains voisins, qu’ils fussent chrétiens ou ariens.

              C’est en 589, à partir du concile de Tolède, convoqué par Récarède appuyé par l’évêque catholique Saint-Isidore, que s’organisa, en riposte armée à ce concile, une véritable opposition arienne ibérique. Une opposition militaire, Soulignons-le encore. Contre le pouvoir officiellement chrétien.
               Une opposition dans le but de régler son compte, dès que possible, au catholicisme romain ibérique.

              D’autant plus que les Goths ariens tenus en éveil par leur hostilité au christianisme à l’image des populations côtières en particulier, devenaient de plus en plus réceptifs aux messages transmis par des voyageurs commerciaux ou de simples migrants en provenance du Proche Orient. Ceux-ci rapportaient que là-bas, chez eux, en Arabie, un prophète arabe, conseillé et instruit par l’archange Gabriel, Jibril, enseignait ou plutôt propageait une religion superposable à celle que professaient en Ibérie les ariens espagnols.
               Tout naturellement se développèrent des adhésions enthousiastes au message du Prophète de Médine dans lequel tous reconnurent un messager de Dieu.
               Naquit ainsi à partir de la masse des ariens ibériques, une masse musulmane espagnole adhérente à l’enseignement du prophète lointain d’Arabie.
               Se déploya de cette manière un islam ibérique qui ne fut jamais implanté dans la péninsule espagnole par une invasion ou par une conquête arabe.

              Les ariens ibériques devinrent tout naturellement musulmans.
               Comme le prophète était arabe, que son enseignement était transmis en langue arabe littérale, ils se déclarèrent « arabes ».
               L’islam leur offrait la possibilité d’exprimer leur foi et surtout de la renforcer en même temps, par la cavalerie gothe de Tarik, duc de Tanger, rallié précocement au message du prophète de la Mecque et de Médine, en raison de la proximité des terres de son duché avec la Berbérie nord-africaine.

              Une guerre civile larvée se déclencha et se termina par un dernier combat entre le roi goth Rodrigue, et les féodaux goths ariens qui, entre temps, avaient adhéré à l’islam. Et se déclaraient « arabes ».

              L’Espagne anti-catholique, l’Espagne musulmane, après sa victoire sur le roi Rodrigue à Guadalète en 711, confirma, dans sa presque totalité, sa conformité aux lois de l’islam.
               Dans cet esprit, s’était déjà constitué le califat de Cordoue en 711.

              Un Califat qui exerça le pouvoir musulman en Espagne. Un pouvoir d’origine rigoureusement endogène, pendant plus de trois siècles.

IV
               Prétendre évoquer le glorieux combat de Covadonga (722), correspond en réalité, à la volonté d’étudier une opération de guerre civile espagnole.
               Depuis 711, en effet, l’Espagne n’était plus un royaume goth. Le territoire était devenu « en douceur », pourrait-on dire, un califat musulman.
               Le Califat de Cordoue, qui vécut jusqu’en 1036.
               Insistons sur une précision : il survécut en tant que « califat » pendant plus de trois siècles.
               Par la suite intervinrent des migrants musulmans nord-africains, des Berbères, motivés par des impératifs religieux, ou plutôt par des motivations intégristes islamistes.

              Les Almoravides tout d’abord.
               Il s’agissait d’une population nord-africaine occidentale qui émigrait de Mauritanie vers le Maghreb et l’Espagne. En quête de territoires plus accueillants pour survivre. Une population qui, évidemment, n’avait rien d’arabe. Mais qui était conduite par des talebs, c’est-à-dire des experts religieux, enseignants de l’islam qui, au cours de leur migration, exaltaient au milieu des populations ouest-africaines et ibériques, leur foi dans les commandements du Prophète d’Arabie, Mohamed.
               Ces talebs s’exprimaient en langue arabe littérale et enrichissaient l’expression orale et écrite des musulmans maghrébins et ibériques, dans leur adhésion aux enseignements du guerrier de Yatrib.

              Plus tard, à partir de 1147, intervinrent les Almohades, Berbères eux-aussi.
               Ils exigèrent un absolutisme absolu dans le vécu de leur foi. Ils ne toléraient aucune compromission. Ils organisèrent aussi bien en Berbérie qu’en Espagne, des autodafés, avec destruction massive d’ouvrages littéraires, scientifiques, philosophiques et religieux, jugés non conformes à leurs exigences dogmatiques.

              Ils structurèrent des tribunaux de « contrôle de sincérité ». Ils condamnèrent à l’exil le scolastique musulman Averroès, et le scolastique juif Maïmonide, deux victimes, célèbres et chanceuses, de l’épuration almohade.
               Chanceuses, parce que chacune de ces deux célèbres victimes échappèrent au bûcher expiatoire qui était un traitement courant de ceux qui ne se soumettaient pas aux exigences dogmatiques almohades.
               Ces tribunaux de contrôle de sincérité servirent de modèle, plus tard, aux Tribunaux du Saint-Office de l’Inquisition espagnole.

              Il est important de souligner que les Almohades refusèrent de s’exprimer en langue arabe. Ils s’exprimèrent en langue berbère, leur langue.
               Les Berbères almohades, berbérophones exclusifs et arabophobes fanatiques, fondèrent un empire de 1147 à 1268. Un empire étendu des Pyrénées à la Tripolitaine.

              Vitiza, avant-dernier souverain d’un reliquat du royaume goth, du nord de l’Espagne, avait des comptes personnels à régler avec Favila, le duc de Cantabrie.
               Celui-ci prétendait s’approcher de très près de la reine, l’épouse de Vitiza.
               On rapporte que Favila aurait subi une raclée de la part du royal-mari, indisposé par la fidélité défaillante de son épouse.
               Cet évènement aurait provoqué le départ vers Cordoue du fils de Favila, Pelayo ou Pelage. Comme il était de coutume chez les Goths, le successeur immédiat ne portait pas le nom du père. Le patronyme familial réapparaissait dans la génération suivante. C’est ainsi que le fils de Pelayo s’appela Favila, comme son grand-père, le rival de Vitiza.

              Pelayo ou Pelage… nous évoquons là le vainqueur historique de Covadonga !
               Il fut à la tête de cette bataille du 28 mai 722, qui est évoquée aujourd’hui, à juste titre, comme le départ historique de la « reconquista », c’est-à-dire de la reconquête chrétienne de l’Espagne… qui nécessita huit siècles de conflits entre, «Arabes et Chrétiens », entre « Moros y Cristianos ».
               Moros y cristianos : en français « les Maures et les Chrétiens »

              Sans nous égarer dans la relation d’une foule de sous-évènenement il est utile de connaître certaines « particularités » historiques de ces personnages Vitiza et Pelayo.
               Vitiza, souverain goth d’une enclave gallo-asturienne résiduelle, régnait en réalité sur un territoire mis en situation de protectorat sous l’autorité du calife de Cordoue.
               Son frère, Oppas, était un évêque arien de grande influence. Un notable religieux dont l’autorité majeure consistait à faire accepter par les chrétiens espagnols, le pouvoir exercé par les potentats musulmans sur la majorité du territoire espagnol.
               Il illustrait une personnalité très influente de l’hérésie arienne.
               Hérésie arienne qui accentua son essor universel à partir de la conversion de Constantin 1er, empereur romain, dès 326.

              Il s’agit d’un évènement historique qu’il ne faut pas oublier.

              Constantin fut le plus grand félon du christianisme romain. Christianisme auquel il avait donné un élan enthousiaste par l’intermédiaire du concile de Nicée, en 325. Concile qu’il renia un an plus tard, par le baptême arien que lui donna, sur son lit de mort, le successeur d’Arius, Eusèbe de Nicomédie.
               Par cette décision, il provoqua un rayonnement inespéré de l’arianisme qui permit à des évêques ariens, comme Oppas, quatre siècles plus tard, de favoriser l’implantation de l’islam aux dépens du christianisme, sur toute l’étendue du royaume ibérique.
               Oppas, frère du roi Vitiza, était « l’homme des musulmans » c’est-à-dire qu’il était l’homme de propagande des tenants réels du pouvoir ibérique depuis 711, date de naissance théorique du Califat de Cordoue.

              Avant la bataille de Covadonga, Pelayo, duc de Cantabrie, dut se soumettre aux exigences du califat, qui exerçait un pouvoir péninsulaire par l’intermédiaire de gouverneurs provinciaux.
               Pelayo devint très rapidement hostile aux exigences du califat. Cette hostilité s’aggrava quand il apprit que Munuza, un gouverneur castillan musulman, voulait incorporer sa sœur dans son harem.
               Il eut néanmoins l’obligation de se soumettre à une convocation du calife.
               Le calife, c’est-à-dire le véritable souverain espagnol. Il se rendit donc à Cordoue. Il fit partie d’un effectif d’otages rassemblés par le pouvoir musulman dans le but de garantir l’obéissance de notables goths chrétiens, encore réticents à l’égard du pouvoir musulman.

              Quand il apprit l’incorporation de sa sœur dans le harem de Munuza, Pelayo rejoignit le nord de la Castille et prit la tête d’une révolte chrétienne contre le pouvoir musulman.
               Oppas, l’évêque arien, frère du roi Vitiza, vint tenter une médiation à Covadonga en 722. Il fut capturé par les révoltés chrétiens et … je ne suis pas informé du sort qui fut le sien après la victoire de Covadonga.

              L’exploit chrétien de Covadonga représente l’évènement fondamental de la naissance de l’Espagne. La première étape d’une reconquête qui se termina en 1492, par la prise de Grenade accomplie sous la reine Isabelle la Catholique.
               Pelayo mourut en 737. Lui succéda son fils, Favila. Celui-ci fut grièvement blessé par un ours et mourut des suites de ses blessures.

              Entre temps, la fille de Pelayo, Ermenesinda, avait épousé Alfonso, le fils du duc de Cantabrie.

              Ce prince, héritier légal de Pelayo, devint le premier roi de Castille, sous le nom de « Alfonso Primero El Catõlico .
               « Alphonse 1er le Catholique »


              Les souverains catholiques d’Espagne, « Los Reyes catolicõs » connurent un état de guerre de plus de sept siècles pour le retour du peuple ibérique à la liberté de vivre la foi catholique apostolique et romaine dans l’intégrité péninsulaire de son territoire. Et à partir de là, sur d’immenses territoires extra-européens.

V
               On se rend compte, après ce parcours volontairement nnnnschématisé, que toute évolution est envisageable au sein d’une collectivité nationale déstructurée par une désinformation magistralement mise en œuvre.
               Toute évolution est possible, aujourd’hui encore, surtout si l’on s’entête à négliger cette fonction biologique devenue primordiale chez l’homme d’Occident, la laïcité.
               Pour un homme d’Occident, la laïcité en tant que valeur de référence, s’inscrit parmi les valeurs fondamentales indispensables à un équilibre collectif, qu’il ne faut pas hésiter à qualifier d’équilibre physiologique.
               La laïcité, dans cet esprit, ou plutôt dans sa réalité, offre plus de motifs de liberté que d’interdits.

              Ce qui permet de comprendre le danger actuel véhiculé par le propos d’un célèbre socialiste français qui écrivit, en substance, il y a quelques années :

              « Le droit coranique pourrait constituer une alternance aux droits de l’homme ».

              C’était déjà la formulation d’une soumission au djihad islamiste, que l’on prétend nous faire subir dans un avenir qui se précise, étape par étape, depuis la mort de l’Algérie française.
Le docteur Jean-Claude PEREZ        
Nice, le 6 décembre 2016                

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BIBLIOGRAPHIE

L'assassinat de l'Algérie française, terreau de la conquête islamiste actuelle. 2012
              Un des livres du cinquantenaire, à lire et à faire lire.
Vérités tentaculaires sur l'OAS et la guerre d'Algérie
              Stratégies et tactiques, 2006 ; 2e Edition
              Cet ouvrage a été d'un grand recours dans la rédaction de cette étude
L'islamisme dans la guerre d'Algérie
              Logique de la Nouvelle Révolution Mondiale, 2004
Le sang d'Algérie
              Histoire d'une trahison permanente, 2006 ; 2e édition
Debout dans ma mémoire
              Tourments et tribulations d'un réprouvé de l'Algérie française, 2006 ; 2e édition
Attaques et Contre-attaques
              Vérités tentaculaires sur l'OAS et la guerre d'Algérie II, 2008
Editions Dualpha
Boite 37
16 bis rue d'Odessa
75014 PARIS
Tel. : 09 52 95 13 34 - Fax : 09 57 95 13 34
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Site internet : www.dualpha.com

Vous pouvez prendre connaissance des deux interview accordées par Jean-Claude PEREZ :
- la première à Monsieur Olivier CAZEAUX : sur Internet tapez « OAS, le docteur PEREZ parle » ;
- la seconde, à Monsieur BESSOU dans le cadre de la préparation d’un film. Monsieur BESSOU a livré à Jean-Claude PEREZ tout le matériau de son exposé visible sur le site
www.jean-claude-argenti-sauvain.com.



MANOLETE DESCEND DANS L'ARENE
Par M. Hugues Jolivet

Images M. H. Jolivet

         Revêtant sans tarder son habit de lumière,
         Et prêt à conforter, dans les arènes publiques,
         Ses aficionados pour gagner la primaire,
         Manolete se voit Chef de la République !

         Pour l'instant, soutenu par sa seule volonté
         De remplacer François, au plus bas des sondages,
         Il se voit obligé et contraint d'affronter
         Réticences et critiques de son aréopage.

         Il est fort suspecté d'avoir influencé
         Le Président Hollande à déposer les armes,
         Afin, qu'immédiatement et au pas cadencé,
         Il tente l'impossible en déployant son charme.

         Une corrida sanglante rougira la campagne
         D'une primaire socialiste. Des blâmes acérés,
         Qui, des Flandres lilloises aux frontières de l'Espagne,
         Détruiront les espoirs d'électeurs sidérés.

         C'est vers sa mise à mort que notre matamore
         S'expose consciemment : trois candidats de gauche,
         Et deux autres de droite. Joue t-il au trompe la mort ?
         A t-il donc un secret ? Pourquoi tant de débauche ?

         Se prend t-il pour Fillon, loin d'être favori,
         Qui s'octroie la victoire en dernière ligne droite ?
         Il est fier hidalgo, méprise le pilori,
         Croit il en son destin, même dans une voie étroite ?

         Je ne voterai pas pour que Valls devienne
         Président des Français, avec son air grognon.
         Au violon, son épouse joue toutes les valses de Vienne,
         Elle, pour nous étourdir, quand lui prend notre pognon !

- Hugues JOLIVET        
5 Juillet 2016         






Boualem Sansal
Envoyé par Jacques Cataldo
            
    Boualem Sansal : né le 15 octobre 1949 à Theniet El Had, petit village des monts de l’Ouarsenis, est un écrivain algérien d'expression française, principalement romancier mais aussi essayiste, censuré dans son pays d'origine à cause de sa position très critique envers le pouvoir en place. Il habite néanmoins toujours en Algérie, considérant que son pays a besoin des artistes pour ouvrir la voie à la paix et à la démocratie. Il est en revanche très reconnu en France et en Allemagne, pays dans lesquels ses romans se vendent particulièrement bien, et où il a reçu de nombreux prix.
    Boualem Sansal a une formation d'ingénieur à l'École nationale polytechnique d'Alger ainsi qu'un doctorat d'économie.
    Il a été enseignant, consultant, chef d'entreprise et haut fonctionnaire au ministère de l'Industrie algérien. Il est limogé en 2003 pour ses prises de position critiques contre le pouvoir en place particulièrement contre l'arabisation de l'enseignement.
    Son ami Rachid Mimouni (1945-1995) l'encourage à écrire. Boualem Sansal, bien que grand lecteur, ne se vouait pas à l'écriture. Il commence pourtant à écrire en 1997, alors que la guerre civile bat son plein. Il cherche à entrer dans l'esprit de ses compatriotes, pour tenter de comprendre puis d'expliquer ce qui a mené à l'impasse politique, sociale et économique de son pays, et à la montée de l'islamisme.

     En 1999, il publie son premier roman, Le Serment des barbares, qui reçoit le prix du premier roman et le prix Tropiques. Cet ouvrage connait un très grand succès de librairie : Boualem Sansal est invité au printemps 2000 au Festival du premier roman de Chambéry et, en été, au festival Les Nuits & les Jours de Querbes. Depuis, il multipliera les rencontres avec ses lecteurs, en France ou en Allemagne.
    Son livre Poste restante, Alger, une lettre ouverte à ses compatriotes, est resté censuré dans son pays. Après la sortie de ce pamphlet, il est menacé et insulté1, mais il décide de rester en Algérie. Un autre de ses ouvrages, Petit éloge de la mémoire, est un récit épique de l'aventure berbère.

    En 2003, Boualem Sansal est rescapé du séisme meurtrier qui a touché sa région à Boumerdès. Après avoir été porté disparu pendant un certain temps, il est retrouvé grâce à un appel lancé par la télévision algérienne.
    Son troisième roman, Dis-moi le paradis, publié en France en 2003, est une description de l'Algérie post-colonisation, à travers les portraits de personnages que rencontre le personnage principal, Tarik, lors de son voyage à travers ce pays. Le ton est très critique envers le pouvoir algérien, se moquant de Boumediene, critiquant ouvertement la corruption à tous les niveaux de l'industrie et de la politique, l'incapacité à gérer le chaos qui a suivi l'indépendance, et attaquant parfois violemment les islamistes. Ce livre est l'une des raisons qui ont conduit le pouvoir à limoger l'auteur de son poste de haut fonctionnaire au ministère de l'Industrie algérien.

    En 2005, s'inspirant de son histoire personnelle, il écrit Harraga, (Harraga qui signifie « brûleur de route », surnom que l'on donne à ceux qui partent d'Algérie, souvent en radeau dans des conditions dramatiques, pour tenter de passer en Espagne). Pour la première fois, les personnages principaux sont deux femmes : Lamia, médecin pédiatre qui vit dans la misère à Alger, et Cherifa qu'elle recueille alors que cette dernière est enceinte de cinq mois. (Cherifa est arrivée chez Lamia sur le conseil du frère de celle-ci, Sofiane, qui est en route pour entrer en Espagne clandestinement). Encore une fois, le ton est très critique envers le pouvoir algérien : l'argent du pétrole coule à flots, mais, l'argent étant accaparé par une minorité de dirigeants, le peuple est dans la misère et les jeunes vont tenter leur chance ailleurs, pendant que ceux qui ne peuvent pas partir restent dans la misère et la peur.
    Boualem Sansal est lauréat du grand prix RTL-Lire 2008 pour son roman Le Village de l'Allemand sorti en janvier 2008, roman qui est censuré en Algérie, car il fait le parallèle entre islamisme et nazisme. Le livre raconte l'histoire du SS Hans Schiller, qui fuit en Égypte après la défaite allemande, et se retrouve ensuite à aider l'armée de libération algérienne, pour finalement devenir un héros de guerre et se retirer dans un petit village perdu. Le livre s'inspire d'un destin réel, découvert par la presse dans les années 1980.

    En 2007, il reçoit le prix Édouard-Glissant, destiné à honorer une œuvre artistique marquante de notre temps selon les valeurs poétiques et politiques du philosophe et écrivain Édouard Glissant : ce prix récompense les œuvres développant une réflexion sur le métissage et toutes les formes d’émancipation, celle des imaginaires, des langues et des cultures.

    Le 9 juin 2011, il remporte le prix de la paix des libraires allemands, pour la manière dont il « critique ouvertement la situation politique et sociale de son pays ». En mars 2008, il choisit de se rendre au Salon du livre de Paris, malgré la polémique soulevée dans le monde arabe quant au choix d'Israël comme invité d'honneur et l'appel au boycott venant des pays arabes et de certains intellectuels. Il s'en explique par la formule : « Je fais de la littérature, pas la guerre », et en ajoutant : « La littérature n'est pas juive arabe ou américaine, elle raconte des histoires qui s'adressent à tout le monde. » Ce choix aggrave sa situation en Algérie.

    En 2011, il publie un nouveau roman, Rue Darwin, l'histoire d'une famille prise dans la guerre d'Algérie. C'est un livre très personnel, écrit trois mois après la mort de sa mère. Le personnage de Yaz ressemble beaucoup à Boualem Sansal ; par ailleurs, la rue Darwin est une rue où l'auteur a vécu dans son enfance, à cent mètres de la maison d'Albert Camus.
    Boualem Sansal est également connu pour ses propos critiques envers toute forme de religion, et l'islam en particulier : « La religion me paraît très dangereuse par son côté brutal, totalitaire. L'islam est devenu une loi terrifiante, qui n'édicte que des interdits, bannit le doute, et dont les zélateurs sont de plus en plus violents. Il faudrait qu'il retrouve sa spiritualité, sa force première. Il faut libérer, décoloniser, socialiser l'islam. »

    En février 2012, il fait partie du jury de la Berlinale 2012, sous la présidence de Mike Leigh et aux côtés de Anton Corbijn, Asghar Farhadi, Charlotte Gainsbourg, Jake Gyllenhaal, François Ozon et Barbara Sukowa.
    En mai 2012, il participe à la troisième édition du Festival international des écrivains à Jérusalem, suscitant de nombreuses critiques dans le monde arabe. Il fait un récit plein d'humour de son voyage.
    En juin 2012, il reçoit le prix du Roman arabe pour son livre Rue Darwin, avec l'opposition des ambassadeurs arabes qui financent le prix. Le 13 juin 2013, l'Académie française lui décerne le grand prix de la francophonie, doté de 20 000 euros. Ce prix est « destiné à “couronner l’œuvre d’une personne physique francophone qui, dans son pays ou à l’échelle internationale, aura contribué de façon éminente au maintien et à l’illustration de la langue française” ».
    Du 6 au 8 octobre 2012, Boualem Sansal et l'écrivain israélien David Grossman se sont retrouvés à Strasbourg, avec le soutien du Centre Nord-Sud du Conseil de l’Europe, et ont lancé « L’appel de Strasbourg pour la paix » dans le cadre du 1er Forum mondial de la démocratie organisé par le Conseil de l’Europe. Près de 200 écrivains venant de cinq continents ont depuis signé cet appel, et se sont déclarés prêts à s’engager pour faire progresser la paix et la démocratie partout dans le monde.
    Il habite près d'Alger, dans la ville de Boumerdès.

    Il obtient en 2015 le Grand prix du roman de l'Académie française pour son roman 2084 La fin du monde publié chez Gallimard. Ce roman de science-fiction crée un monde fondé sur l'amnésie et la soumission à un dieu unique. Inspiré de 1984 d'Orwell, le pouvoir religieux extrémiste a lancé une nouvelle langue, l'abilang.
Boualem SANSAL : son allocution du 13 décembre 2016 devant les adhérents de Fondation Varenne - A méditer !
Il ne faut désespérer ni Billancourt,
ni le Qatar, ni l’institut.

              Mesdames et Messieurs, bonjour, bonsoir,

              Daniel Pouzadoux m’a fait l’amitié de m’inviter à votre cérémonie et il a poussé la gentillesse jusqu’à me demander de venir au pupitre dire quelques mots. Je le remercie très chaleureusement. Je vais le faire en essayant!de ne pas vous ennuyer, j’ai tendance ces derniers temps à me répéter, et pas de la meilleure façon, je veux dire la politiquement correcte.
              Je ne sais pas si vous l’entendez mais je vous le dis, parler devant vous n’est pas facile, dans la salle je vois de grands noms de la presse française… c’est impressionnant. Et flatteur pour moi, dans mon pays, l’Algérie, j’ai droit au traitement pour lépreux, on lâche les chiens, on jette des pierres. En ce moment, à la suite d’un supposé amalgame, blasphème, ou mauvaise pensée de ma part, on délibère à mon! sujet, et la fumée n’est pas blanche, ça ne dit rien de bon.

              Mais passons, rien n’est certain tant qu’il n’est pas arrivé. voudrais, avec la permission de Daniel, et la vôtre aussi, vous dire deux trois choses sur l’islamisme, il y a d'autres sujets mais celui-ci les dépasse, il tient le monde en haleine, et la France en premier, elle est une pièce essentielle dans son programme de domination planétaire. C'est ici qu'il gagnera ou perdra face à l'Occident, il le croit, voilà pourquoi il s'y investit avec tant de rage, derrière laquelle cependant agit un monde étonnant de froide intelligence et de patience.

              Personne ne peut mieux qu'un algérien comprendre ce que vous vivez, ce que vous ressentez, l'Algérie connaît l'islamisme, elle en a souffert vingt années durant.
              Je ne veux pas laisser entendre que l'islamisme est fini dans ce pays, simplement parce que le terrorisme a reflué, c'est tout le contraire, l'islamisme a gagné, à part quelques voix dissonantes qui s'époumonent dans le désert, rien ne s'oppose à lui, il a tout en main pour réaliser son objet. Tout son programme, dont le terrorisme est un volet important mais pas le plus important, il en est dix autres qui le sont davantage, ne vise que cela : briser les résistances, éteindre les Lumières avec un grand L et installer les mécanismes d'une islamisation en profondeur de la société. On peut dire que l'islamisme ne commence véritablement son oeuvre qu'après le passage du rouleau compresseur de la terreur, à ce stade la population est prête à tout accepter avec ferveur, humilité et une vraie reconnaissance. On en est là en Algérie, le programme se déroule bien, les islamistes travaillent comme à l'usine, ils contrôlent tout, surveillent tout, le point de non-retour est franchi et le point final arrive comme un coup de poing. Encore quelques réglages et nous aurons une république islamique parfaite, tout à fait éligible au califat mondial. Vous en entendrez parler, je pense.

              Un exemple pour le montrer : dans la petite ville où j'habite, à 50 kms d'Alger, une ville universitaire dont la population, 25000 habitants environ, se compose essentiellement d'enseignants, de chercheurs et d'étudiants, il y avait avant l'arrivée de l'islamisme, dans les années 80, une petite mosquée branlante, coloniale par son âge, que ne fréquentaient que quelques vieux paysans des alentours ; aujourd'hui, après deux décennies de terrorisme et de destruction, et alors que le pays manque de tout, il y en a quinze, toutes de bonne taille et bien équipées, eau courante au robinet, haut-parleurs surpuissants, climatisation et internet à tous les étages, et je vous apprends que pour la prière du vendredi elles ne suffisent pas pour accueillir tous les pénitents. I1 faudrait clairement en construire quinze autres ou réquisitionner les amphis et les laboratoires. Attention, je ne fais pas d'amalgame, ni de persiflage, je ne dis pas que les pénitents sont des islamistes, aucun ne l'est, je vous l'assure, n'ayez crainte, je dis simplement que les islamistes ont bien travaillé, en peu de temps ils ont assaini le climat et fait de nous de bons et fidèles musulmans, ponctuels et empressés, et jamais, au grand jamais j'insiste, ils ne nous ont de-mandé de devenir des islamistes comme eux. " Point de contrainte en religion ", c'est dans le Coran, sourate 2, verset 256.

              En Algérie, on suit avec beaucoup d'inquiétude l'évolution des choses en France. Je ne parle pas de nos islamistes, ils se félicitent de leurs avancées chez vous, ni de notre gouvernement, tout entier mobilisé au chevet de son vieux président, M. Bouteflika, je parle de ceux qui ont de l'amitié pour vous et ceux qui ont des parents en France et qui voudraient les voir continuer de vivre leur vie française le mieux possible.

              Je vous le dis, ceux-là sont inquiets, très très inquiets et même désespérés. Ils vous en veulent pour cela.
              Inquiets parce qu'ils constatent jour après jour, mois après mois, année après année, que la France ne sait toujours pas se déterminer par rapport à l'islamisme : est-ce du lard, est-ce du mouton, est-ce de la religion, est-ce de l'hérésie ? Nommer ces choses, elle ne sait pas, c'est un souci. Pendant ce temps, le boa constrictor islamiste a largement eu le temps de bien s'entortiller, il va tout bientôt l'étouffer pour de bon. Insouciante qu'elle est, la mignonne est allée faire amie-ami avec les gros cheikhs du Golfe que chacun sait être les géniteurs et les dresseurs du boa et surtout d'anciens redoutables détrousseurs de caravanes.

              Inquiets de voir la France des libertés verser dans le maccarthysme. Que se passe-t-il, bon sang, il n'est plus possible, pour personne, de parler de certains sujets liés à la Chose sans se voir aussitôt traîné au tribunal et condamné sévèrement. On en sort encore avec des amendes, des sursis et des marques à l'épaule, mais le jour n'est pas loin où on se verra appliquer la vraie charia.

              Inquiets et dégoutés de voir cette grande nation laïque et avant-gardiste exhiber à tout bout de champ ses imams et ses muftis, ses pachas de MOIF, ses commandeurs du CFCM, et, pour la note moderne, deux trois soeurs cagoulées à l'arrière-plan, comme jadis au temps des colonies de papa elle promenait de cérémonies en cérémonies ses caïds chamarrés bardés de medailles, ses marabouts en boubous et autres sorciers en plumes, et repousser fermement ceux qui peuvent parler aux gens sans réciter un seul verset ou lever de doigt menaçant au ciel. On croirait que la France n'a pas été décolonisée en même temps que ses colonies ou que la laïcité y a été abrogée par un édit du grand imam.

              Inquiets et en colère de voir que les algériens de France, pourtant instruits de la vraie nature de l'islamisme, et pis, qui savent qu'il a lancé une OPA sur leurs enfants, ne s'engagent pas plus que ça dans la lutte contre lui, pas au-delà des protestations de principe : " C'est pas ça l'islam " ; " L'islam est paix chaleur et tolérance ", " l'islam est une chance pour la France ".
              Misère, comment le dire : l'urgent n'est pas de sauver l'islam de l'amalgame mais de sauver les enfants de la mort !

              Inquiets et effarés de voir l'Europe se déliter et devenir un amplificateur de crises et fabricant d'un islamisme européen véritablement monstrueux, qui par ses prétentions totalitaires et ses haines tous azimuts, s'apparente au nazisme-fascisme d'antan, qu'il contribue de la sorte à ressusciter.

              Désespérés en fin de compte de voir que la France et l'Europe sont à mille lieues de pouvoir concevoir et mener ensemble la seul combat qui puisse venir à bout de l'islamisme : le contre-djihad, conçu sur le principe même du djihad. Et le djihad n'est pas la guerre, c'est mille chamboulements dans mille domaines différents, menées sans restriction ni frein, dans un mouvement brownien accéléré irréversible.

              Après tout ça, y a-t-il de l'espoir ? Oui, il existe, il est puissant, la France est un grand pays avec une immense histoire pleine de ressort et d'énergie, il continue de vivre et de se projeter dans l'avenir, mais chacun sent que l'effort coûte de plus en plus, que le poison islamiste court dans ses veines, que la langueur de la décadence le travaille, que le pays perd de sa cohérence et de son unité, que le gouvernement n'y entend goutte, que l'Europe est un boulet, bref chacun comprend que la fin approche. L'espoir est précisément là, dans cette horrible sensation que l'Histoire est finie, c'est là que le désespoir trouve sa meilleure énergie.

              Il y a une condition cependant, un vrai challenge de nos jours, la France doit retrouver l'usage de la parole libre et en faire une arme. Si le terrorisme se combat dans la discrétion et la patience, par le renseignement et l'infiltration, l'islamisme se combat par la parole, dite au grand jour, haut et fort. Ce combat a toujours été celui des journalistes et des écrivains, qu'ils reprennent le flambeau, il est à eux.

              On n'oubliera pas de mener ce combat en premier contre l'armée des idiots utiles et des bien-pensants, qui avec une poignée de considérations de patronages ont réussi à paralyser la France, peuple et institutions, et l'ont livrée aux islamistes et demain à la guerre civile : " pas d'amalgame tu feras ", " l'assassin de ton frère est ton frère, des bisounours tu lui adresseras ", " raciste et islamophobe tu es si tu ne tends pas l'autre joue ", " ta coulpe tu battras car colonisateur et esclavagiste tu f us ", " de remords et de pénitences, tu te nourriras ", "ta place tu cèderas, dhimmi tu seras ", " paix, tolérance et soumission, tu pratiqueras avec tes agresseurs ". Ces formules sont arrivées à l'école, avec d'autres douceurs du même genre, ce qui facilite les abandons de demain.

              " Cons et dangereux ", disait d'eux Yves Montand, qui fut lui-même un idiot-utile des plus célèbres, c'était hier, aujourd'hui il dirait plus : " cons, dangereux, et heureux de l'être ".

              Vous l'avez noté, à aucun moment je n'ai parlé de l'islam. Vue par là, l'affaire nous dépasse, on est dans l'intouchable, l'islam, c'est Allah, c'est Mahomet, le Coran, le Califat, la Oumma, c'est la fin universelle des hérésies et de la mécréance. " L'islam est l'horizon indépassable de notre temps ", ce cher jean-Paul Sartre nous le dirait sans faute s'il revenait parmi nous.

              A côté, l'islamisme n'est rien, avec sa pauvre charia et ses sabres ébréchés, on pourrait le balayer ce soir, si on nous le permettait, il n'est que l'expression des délires et des caprices de bédouins du désert arabique, abrutis par des siècles d'ignorance et de consanguinité féroce, soudainement enrichis et ennoblis par des anglais idiots et accueillis à bras ouverts dans les grandes capitales d'Europe. Nous vivons les frasques de ces enfants monstrueusement gâtés, jouisseurs fous et insatiables. Aujourd'hui, ils saccagent des pays comme hier, quand ils apprirent à prendre l'avion et actionner des ascenseurs, ils saccageaient les palaces du monde libre avant de les acheter pour les mettre à leur goût. C'est cela que les idiots utiles et les bien-pensants aiment en vérité : l'argent des cheikhs, il sent bon l'encens et le mazout. Avec eux, Billancourt ne désespérera jamais, et d'ailleurs par leur faute Billancourt n'existe plus, il a disparu en même temps qu'une certaine France. A Colombey-les-deux-Mosquées, il y en a un qui doit salement râler.

              Pour terminer, je voudrais vous dire mon sentiment sur les propositions récentes de l'institut Montaigne pour réformer l'islam et rendre possible l'émergence d'un islam de France. J'ai vérifié, c'est bien d'islam qu'il parle, d'islam de France, ce qui déjà est un gros blasphème, l'islam est un, il est partout chez lui. C'est par le JDD du 18/9 passé que j'en ai pris connaissance. Ces propositions qui s'enfilent comme des perles sont au nombre de dix et se résument ainsi : on lève une redevance sur le halal, on construit des mosquées, on forme des aumôniers et des imams, on enseigne l'arabe aux écoliers et le français aux imams, on expurge l'histoire, on crée un secrétariat d'Etat à la laïcité et aux cultes, on implique les maires, on actionne la diplomatie pour endiguer l'influence des régimes wahhabite d'Arabie et du Qatar. Quand j'ai lu ça, je suis tombé à la renverse, j'ai compris que le plan était un programme d'arabisation et d'islamisation des plus sévères, il ne laissait aucune possibilité de faire machine arrière en cas de regret. Il ressemblait comme deux gouttes d'eau au plan d'arabisation et d'islamisation que le pouvoir algérien a mis en oeuvre en Algérie au début des an-nées 80 sous la pression de l'Arabie saoudite et qui al-lait en peu de temps faire de nous des perroquets wahhabites salafisés.

              Il fallait réfléchir et comprendre l'intention de l'institut.
              Même à long terme et dans un climat apaisé, ces propositions seraient à mon avis sans portée ni effet quant à l'objectif visé : réformer l'islam et faire émerger un islam de France, accepté de tous, les français d'abord, religieux et laïcs de tous bords, et ensuite tous les pays arabes et musulmans, et à leur tête l'Arabie saoudite gardienne universelle du dogme.
              Au contraire, elles joueront dans le sens de la réalité et celle-ci est la suivante : la France est déjà très avancée dans la voie de son islamisation par un islam importé, archaïque et brutal, sectaire et haineux, affairiste et opportuniste en diable, fortement teinté de salafisme mais pas seulement, adepte du djihad mondialisé, et ces propositions généreuses inespérées vont formidablement aider à son expansion et son enracinement. L'effet multiplicateur et accélérateur n'a pas été pris en compte dans l'étude, il jouera à plein, ce que l'étude montre pourtant puisqu'elle nous apprend que 29% des musulmans de France sont déjà en rupture avec la communauté nationale. Il semblerait que l'institut n'a pas travaillé sur la réalité mais sur une image de la réa-lité. Le fait de formuler de telles propositions dans ce contexte de déchirement et après une année 2015 riche en attentats islamistes, révèle que le but recherché par les planificateurs des attentats est atteint : la France est prête à tout céder, les dix propositions de l'institut se présentent comme un acte d'allégeance au calife.

              Je ne veux pas désespérer l'Institut M. mais on doit le lui dire : le calife tient son pouvoir d'Allah, il n'attend rien de personne, il écrase tout sur son chemin, les idiots utiles, les allégeants et les soumis en premier. Je vous remercie.


   LETTRE à M. BOUTEFLIKA    
Président de la République algérienne.
Envoyé par M. Martinez G.

               Courrier exemplaire adressé au président algérien, Monsieur BOUTÉFLIKA, par M. André SAVELLI, professeur agrégé en histoire au Val de Grâce.
               Il semble indispensable de faire circuler ce document, extrêmement bien documenté, venant d'un érudit de l'histoire, relatant brièvement l'histoire d'un pays, l'Algérie, et éclatant de vérité


               Monsieur le Président,

               En brandissant l’injure du génocide de l’identité algérienne par la France, vous saviez bien que cette identité n’a jamais existé avant 1830. Mr Ferrat Abbas et les premiers nationalistes avouaient l’avoir cherchée en vain.
               Vous demandez maintenant repentance pour barbarie : vous inversez les rôles !

               C’était le Maghreb ou l’Ifriqiya, de la Libye au Maroc. Les populations, d’origine phénicienne (punique), berbère (numide) et romaine, étaient, avant le VIIIème siècle, en grande partie chrétiennes (500 évêchés dont celui d’Hippone / Annaba, avec Saint Augustin). Ces régions agricoles étaient prospères.

               Faut-il oublier que les Arabes, nomades venant du Moyen Orient, récemment islamisés, ont envahi le Maghreb et converti de force, « béçif » (par l’épée), toutes ces populations. « Combattez vos ennemis dans la guerre entreprise pour la religion….Tuez vos ennemis partout où vous les trouverez » (Coran, sourate II, 186-7). Ce motif religieux était élargi par celui de faire du butin, argent, pierreries, trésor, bétail, et aussi bétail humain, ramenant par troupeaux des centaines de milliers d’esclaves berbères; ceci légitimé par le Coran comme récompense aux combattants de la guerre sainte (XLVIII, 19, 20).
               Et après quelques siècles de domination arabe islamique, il ne restait plus rien de l’ère punico romano berbère si riche, que des ruines (Abder-Rahman ibn Khaldoun el Hadram , Histoire des Berbères,T I, p.36-37, 40, 45-46. 1382).

               Faut-il oublier aussi que les Turcs Ottomans ont envahi le Maghreb pendant trois siècles, maintenant les tribus arabes et berbères en semi esclavage, malgré la même religion, les laissant se battre entre elles et prélevant la dîme, sans rien construire en contre partie.

               Faut-il oublier que ces Turcs ont développé la piraterie maritime, en utilisant leurs esclaves. Ces pirates barbaresques arraisonnaient tous les navires de commerce en Méditerranée, permettant, outre le butin, un trafic d’esclaves chrétiens, hommes, femmes et enfants. Dans l’Alger des corsaires du XVIème siècle, il y avait plus de 30.000 esclaves enchaînés. D’où les tentatives de destruction de ces bases depuis Charles Quint, puis les bombardements anglais, hollandais et même américain…..Les beys d’Alger et des autres villes se maintenaient par la ruse et la force, ainsi celui de Constantine, destitué à notre venue, ayant avoué avoir fait trancher 12.000 têtes pendant son règne.

               Faut-il oublier que l’esclavage existait en Afrique depuis des lustres et existe toujours. Les familles aisées musulmanes avaient toutes leurs esclaves africains. Les premiers esclavagistes, Monsieur le Président, étaient les négriers noirs eux-mêmes qui vendaient leurs frères aux Musulmans du Moyen Orient, aux Indes et en Afrique (du Nord surtout), des siècles avant l’apparition de la triangulaire avec les Amériques et les Antilles, ce qui n’excuse en rien cette dernière, même si les esclaves domestiques étaient souvent bien traités.

               Faut-il oublier qu’en 1830, les Français sont venus à Alger détruire les repaires barbaresques ottomans qui pillaient la Méditerranée, libérer les esclaves et, finalement, affranchir du joug turc les tribus arabes et berbères opprimées.

               Faut-il oublier qu’en 1830, il y avait à peu près 5.000 Turcs, 100.000 Koulouglis, 350.000 Arabes et 400.000 Berbères dans cette région du Maghreb où n’avait jamais existé de pays organisé depuis les Romains. Chaque tribu faisait sa loi et combattait les autres, ce que l’Empire Ottoman favorisait, divisant pour régner.

               Faut-il oublier qu’en 1830 les populations étaient sous développées, soumises aux épidémies et au paludisme. Les talebs les plus évolués qui servaient de toubibs (les hakems), suivaient les recettes du grand savant « Bou Krat » (ou plutôt Hippocrate), vieilles de plus de 2.000 ans. La médecine avait quand même sérieusement évolué depuis !

               Faut-il oublier qu’à l’inverse du génocide, ou plutôt du massacre arménien par les Turcs, du massacre amérindien par les Américains, du massacre aborigène par les Anglais et du massacre romano-berbère par les Arabes entre l’an 700 et 1500, la France a soigné, grâce à ses médecins (militaires au début puis civils) toutes les populations du Maghreb les amenant de moins d’un million en 1830 en Algérie, à dix millions en 1962.

               Faut-il oublier que la France a respecté la langue arabe, l’imposant même au détriment du berbère, du tamashek et des autres dialectes, et a respecté la religion (ce que n’avaient pas fait les Arabes, forçant les berbères chrétiens à s’islamiser pour ne pas être tués, d’où le nom de « kabyle » - j’accepte).

               Faut-il oublier qu’en 1962 la France a laissé en Algérie, malgré des fautes graves et des injustices, une population à la démographie galopante, souvent encore trop pauvre, - il manquait du temps pour passer du moyen âge au XXème siècle - mais en bonne santé, une agriculture redevenue riche grâce aux travaux des Jardins d’Essais, des usines, des barrages, des mines, du pétrole, du gaz, des ports, des aéroports, un réseau routier et ferré, des écoles, un Institut Pasteur, des hôpitaux et une université, la poste….. Il n’existait rien avant 1830.!
               Cette mise en place d’une infrastructure durable, et le désarmement des tribus, ont été capitaux pour l’Etat naissant de l’Algérie.

               Faut-il oublier que les colons français ont asséché, entre autres, les marécages palustres de la Mitidja, y laissant de nombreux morts, pour en faire la plaine la plus fertile d’Algérie, un grenier à fruits et légumes, transformée, depuis leur départ, en zone de friche industrielle.

               Faut-il oublier que la France a permis aux institutions de passer, progressivement, de l’état tribal à un Etat nation, et aux hommes de la sujétion à la citoyenneté en construction, de façon, il est vrai, insuffisamment rapide. Le colonialisme, ou plutôt la colonisation a projeté le Maghreb, à travers l’Algérie, dans l’ère de la mondialisation.

               Faut-il oublier qu’en 1962, un million d’européens ont dû quitter l’Algérie, abandonnant leurs biens pour ne pas être assassinés ou, au mieux, de devenir des habitants de seconde zone, des dhimmis, méprisés et brimés, comme dans beaucoup de pays islamisés. Il en est de même de quelques cent mille israélites dont nombre d’ancêtres s’étaient pourtant installés là 1000 ans avant que le premier arabe musulman ne s’y établisse. Etait-ce une guerre d’indépendance ou encore de religion ?

               Faut-il oublier qu’à notre départ en 1962, outre au moins 75.000 Harkis, sauvagement assassinés, véritable crime contre l’humanité, et des milliers d’européens tués ou disparus, après ou avant, il est vrai, les excès de l’O.A .S. Il y a eu plus de 200.000 tués dans le peuple algérien qui refusait un parti unique, beaucoup plus que pendant la guerre d’Algérie. C’est cette guerre d’indépendance, avec ses cruautés et ses horreurs de part et d’autre, qui a fondé l’identité algérienne. Les hommes sont ainsi faits !

               Monsieur le Président, vous savez que la France forme de bons médecins, comme de bons enseignants. Vous avez choisi, avec votre premier ministre, de vous faire soigner par mes confrères du Val de Grâce. L’un d’eux, Lucien Baudens, créa la première Ecole de médecine d’Alger en 1832, insistant pour y recevoir des élèves autochtones. Ces rappels historiques vous inciteront, peut-être, Monsieur le Président, à reconnaître que la France vous a laissé un pays riche, qu’elle a su et pu forger, grâce au travail de toutes les populations, des plus pauvres aux plus aisées - ces dernières ayant souvent connu des débuts très précaires -.
               La France a aussi créé son nom qui a remplacé celui de Barbarie.
               Personne ne vous demandera de faire acte de repentance pour l’avoir laissé péricliter, mais comment expliquer que tant de vos sujets, tous les jours, quittent l’Algérie pour la France ?

               En fait, le passé, diabolisé, désinformé, n’est-il pas utilisé pour permettre la mainmise d’un groupe sur le territoire algérien ? Je présente mes respects au Président de la République, car j’honore cette fonction.
Un citoyen français,                
André Savelli,                
Professeur agrégé d’Histoire au Val de Grâce.                

 
Le 5 Décembre 2016
Envoyé par M.r Jean Paul Selles
Commémoration, des Morts pour la France en Algérie,
le 5 décembre 2016 à St Aygulf

       Un grand Merci à notre compatriote Gérard ROIGNANT pour ce beau reportage réalisé à Saint Aygulf ( commune de FREJUS )
       Magnifique monument aux morts rapatrié de TLEMCEN
       Faire circuler autour de vous si vous le souhaitez...
       La station balnéaire de Saint-Aygulf se trouve au sud-ouest de Fréjus.
       Bien amicalement, Jean Paul


LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini

                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.

             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens d'ajouter Petit, Clauzel, Guelât Bou Sba, Héliopolis, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.

             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.

             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Duvivier, Duzerville, Herbillon, Kellermann, Milesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Penthièvre, Randon, Kellermann et Millesimo, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :

CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net
             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :
http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P.Bartolini.
 


SOUVENIRS
Pour nos chers Amis Disparus
Nos Sincères condoléances à leur Familles et Amis


Envoyé par Mme N. Kergall

Décès de M. Yves SALIBA

                                                                      CHERS AMIS,
        C'est avec une grande tristesse que nous venons d'apprendre le décès de Notre Ami Yves SALIBA
        Malgré son combat contre cette sale maladie, il est parti la nuit dernière.
        Nous nous associons à la peine d'Odile, de ses filles, de sa famille, et nous leur présentons nos très sincères condoléances .

        Les BÔNE ELEVES n'oublieront jamais la gentillesse et la disponibilité d'Yves.
        Ses obsèques ont eu lieu à Avignon le mercredi 7 Décembre 2016 :

        Si vous souhaitez envoyer un message à son épouse Odile SALIBA
odile.saliba@wanadoo.fr


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Envoyé par Mme N. Kergall

Décès de M. Claude CHEVALIER

                                                                      CHERS AMIS,
        C'est avec une grande tristesse que nous venons d'apprendre le décès de Notre Ami Claude CHEVALIER

       les obsèques de Claude CHEVALIER ont eu lieu lundi 26 décembre :
        Si vous souhaitez lui envoyer un message à Michelle CONTARINI
contarinimichelle@yahoo.fr





NOUVELLES de LÁ-BAS
Envoyées d'Algérie



Algérie: le calvaire des migrants expulsés vers Tamanrasset

Envoyé par Gilles
http://www.rfi.fr/afrique/20161209-algerie-migrants-voie-expulsion-precarite-tamanrasset

Par RFI-Afrique, 08 décembre 2016   l Par Leïla Beratto

L
           Ça ressemble à un véritable calvaire. Plusieurs centaines de migrants subsahariens ont été arrêtés le week-end dernier à Alger, puis envoyés dans un camp à Tamanrasset, dans le sud du pays. Mercredi 7 décembre, une partie a été expulsée vers le Niger et est arrivée à Agadez. D'autres étaient toujours à Tamanrasset où leur situation est très précaire.

           Selon le Croissant-Rouge, les migrants ont été envoyés à Tamanrasset pour obtenir de meilleures conditions d'accueil. Ils ont pourtant été installés à 25 dans des préfabriqués, dormant sur des matelas, faisant leurs besoins sur du plastique.

           On leur servait un repas par jour : du riz avec deux bouteilles de lait pour 25. Pas d'eau. « La police nous ordonne de rester à l'intérieur. Si on sort, ils nous tabassent. On nous traite comme des chiens », raconte une migrante.

           Puis soudain, jeudi 8 décembre en fin de journée, les forces de l'ordre les ont relâchés dans la nature, leur disant de se débrouiller. Heureux d'être libres, mais sans ressources, la plupart tentaient de retourner à Alger. « Je vais passer la nuit dehors et vendre mon téléphone pour acheter un billet de bus », explique l'un d'eux.

           Selon plusieurs sources, certains ont été mis dans des véhicules en direction du Niger, rejoindre ceux arrivés mercredi. En effet, cette opération était discutée entre les deux pays depuis plusieurs semaines. Alger disait vouloir expulser des migrants clandestins. Niamey avait accepté, à condition que le Niger serve simplement de transit, et que les Algériens transportent les migrants vers leur pays respectifs. « Ça ne s'est pas passé comme convenu », explique un proche du dossier.

           En cours de recensement, les migrants seraient plus d'un millier à Agadez, installés dans une concession entourée par une enceinte. Un témoin décrit des autorités locales sous tension face à la situation.

           Les migrations à Tamanrasset font parties du tissu social, donc on a une très grande concentration de population migrante....
           Mohamed Guemmama, président de l'association Green Tea qui travaille auprès des migrants à Tamanrasset
Leïla Beratto           


UN JOURNAL BRITANNIQUE PRÉDIT L’IMPLOSION DE L’ALGÉRIE APRÈS LA MORT DE BOUTEFLIKA

Envoyé par Pierre
http://fr.le360.ma/politique/un-journal-britannique-predit-limplosion-de-lalgerie-apres-la-mort-de-bouteflika-98069


Par Liberté Algérie : 02.12.2016   l Par Ziad Alami

Abdelaziz Bouteflika, président de la république algérienne.


           Un avenir sombre attend l’Algérie, prédit «The Spectator», un journal britannique de référence pour les intellectuels, dans un article qui met en garde contre les menaces que représentera ce pays pour l’Europe et la région toute entière. Diagnostic.
        Le scénario est sans appel. Et il vient d'être établi par un journal britannique très sérieux, soit "The Spectator", "référence des intellectuels et des dirigeants conservateurs", dans un article diffusé sous ce titre révélateur: "Comment l'Algérie pourrait détruire l'Europe". La vacance "institutionnelle" causée par la maladie du président Bouteflika et l'absence de successeur entraînera le pays dans le chaos généralisé, à la faveur des islamistes qui vont essayer de prendre le pouvoir, annonce le magazine britannique, mettant en garde l'Europe contre "une autre crise de réfugiés".

Algérie: explosion sociale à l'horizon 2017

        Un scénario catastrophe qui s'imposerait avec d'autant plus de force que l'état de santé du président Bouteflika, déjà précaire, s'est aggravé ces derniers jours, relève le journal britannique. Citant une source médicale, The Spectator indique que "l'esprit de Bouteflika est aujourd'hui plus infirme que son corps", mettant ainsi en doute les aptitudes du chef d'Etat algérien, victime d'un accident vasculaire cérébral (AVC) en 2013.

           Evoquant l'hospitalisation du président en novembre dernier dans un hôpital de Grenoble, en France, le journal britannique fait état d'un "mauvais pronostic".

           "Officiellement, Bouteflika a subi des «tests médicaux périodiques» standards à Grenoble. Mais personne ne le croit. Parmi les personnes qui connaissent bien l'Algérie, il ne fait aucun doute que le président est gravement touché et qu'il lui reste peu de temps à vivre. Cela signifie que son régime n'a plus beaucoup de temps non plus. Les conséquences de cette situation vont bien au-delà de l’Algérie", avertit la même publication.

           "Quand Bouteflika s'en ira, l'Algérie va probablement imploser. Les islamistes qui ont été maintenus à distance par sa main de fer exploiteront le vide laissé. Les tensions qui ont été enterrées depuis la guerre civile vont ressurgir. Et puis l'Europe pourrait être submergée par une autre grande vague de réfugiés d'Afrique du Nord", annonce The Spectator.

           "Une guerre civile algérienne créerait un grand nombre de réfugiés. Un analyste a dit attendre 10 à 15 millions de réfugiés à partir de l'Algérie. Compte tenu de l'histoire de ce pays, ils s'attendraient à être sauvés par une nation: la France. Dans son impact sur l'UE, même une fraction de ce nombre diminuerait l'effet de la guerre civile syrienne. Etant donné le traumatisme politique que la crise des réfugiés a déjà causé en Europe, un exode massif algérien pourrait provoquer une énorme insécurité en Europe", alerte la publication.

Le Mossad prédit un coup d'Etat militaire en Algérie

        Un scénario bis de la tristement célèbre "décennie noire" risque de se produire, étayé par les messages d'alerte lancés par les services de renseignement occidentaux. "Presque personne en dehors de l'Algérie n'ignore ce qui va se passer. Les agences de renseignement occidentales ont peut-être été prises au dépourvu par le mal nommé printemps arabe en 2011, mais tous sont très conscients des dangers guettant l'Algérie. Dans les coulisses, les gouvernements se préparent à une nouvelle guerre civile et à ses conséquences", indique The spectator.

           Et d'ajouter: "Il y a seulement 24 ans, 150.000 personnes sont mortes dans une guerre civile algérienne entre les islamistes et l'Etat. Cette fois-ci, les choses seront plus sanglantes, notamment à cause du développement de l'islamisme armé ces dernières années". Le journal britannique pointe du doigt cette forte implantation de groupes terroristes en Algérie, notamment Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et Daech.

           Autrement dit, un scénario syro-libyen guette l'Algérie déjà minée par une crise financière dévastatrice à la faveur d'une explosion sociale imminente.

          

           NDLR:


Algérie: «La chasse à l’homme noir» se poursuit dans les quartiers d’Alger

Envoyé par Marcel
http://geopolis.francetvinfo.fr/algerie-la-chasse-a-l-homme-noir-se-poursuit-dans-les-quartiers-d-alger-127631


Par GeopolisFTV : 6 décembre 2016  par Martin Mateso


           L’opération a été déclenchée le 1er décembre 2016 à Alger. Tous les quartiers où vivent les migrants subsahariens ont été encerclés par la police. Les rafles n’épargnent ni les femmes, ni les enfants. Un syndicat autonome algérien, le Snapap, dénonce «la plus grande chasse à l’homme noir depuis l’indépendance».

           Les indésirables sont regroupés dans un camp insalubre à la périphérie Ouest d’Alger. Plusieurs centaines d’entre eux ont déjà été transférés à Tamanrasset, une ville du Sud, située à 2000 km de là.

           Dans la capitale algérienne, les migrants subsahariens ont été arrêtés à leurs domiciles, sur leurs lieux de travail ou sur le chemin du retour à leur domicile. Ceux qui ont échappé aux rafles vivent désormais cachés, la peur au ventre.

           «On ne peut plus aller au travail, on a peur de sortir parce qu’on va nous arrêter», raconte à RFI une Ivoirienne qui attend avec inquiétude des nouvelles de son mari.

           «Dès que tu ouvres la porte, on t’embarque. On m’a pris avec tous mes bagages, tout m’a été volé: l’ordinateur, les choses de la maison, le réfrigérateur, l’argent, ils ont tout pris», témoigne un migrant encore sous le choc. Il fait partie de ceux qui ont été transférés et enfermés dans un camp de Tamanrasset.

           L’Algérie sur la route de l’Europe
           Le 30 septembre, Amnesty International avait tiré la sonnette d’alarme sur la situation des migrants subsahariens en Algérie. Ils seraient près de 150.000, selon la gendarmerie algérienne. Ils viennent majoritairement du Nigeria, du Niger, du Libéria, du Cameroun, du Mali et de la Guinée.

           La plupart ont afflué en Algérie dans l’espoir de rejoindre l’Europe en passant par le Maroc ou par la Libye. Mais faute de moyens, ils ont posé leurs maigres balluchons et opté pour une vie clandestine.

           Sur le site des Observateurs de France 24, un migrant guinéen vivant à Alger témoigne de leurs conditions de vie déplorables. Contraints de travailler dans l’illégalité pour des employeurs sans scrupules.

           «Ici, il y a des chantiers partout. On loge dans des chantiers abandonnés, on travaille dans des chantiers en cours: notre vie se résume à ça. On transporte des sacs de sable, des pierres. On fait tout ce que personne ne veut faire. Les patrons nous appellent "camarades", on a l’impression que ça veut dire "esclaves". Mais on n’a pas le choix, ce sont les seuls qui acceptent de faire travailler les clandestins», raconte-il, résigné.

           «Ils nous prennent pour des putes»
           Livrés à eux-mêmes, ces migrants sont aussi rejetés et victimes de racisme. Même les femmes ne sont pas épargnées. Les Algériens voient d’un mauvais œil l’installation des communautés subsahariennes dans leurs quartiers. Des insultes fusent à longueur de journée, témoigne une migrante qui a échoué dans un quartier populaire d’Oran.

           «Ils nous prennent pour des putes. Ils nous demandent toujours combien c’est pour coucher avec eux», déplore-t-elle dans un reportage publié par Courrier international. On y découvre des migrants subsahariens marginalisés par les autorités, ostracisés par la population. Cette année encore, ils ont été victimes de violences dans les villes de Ouarga, Béchar et Tamanrasset.

           «Les voyous en ont profité pour tout leur prendre»
           La communauté subsaharienne a été traumatisée par les expulsions musclées qui ont visé des milliers de migrants dans la ville d’Oran à la fin de l’année 2014. Une opération qui visait au départ les seuls migrants nigériens.

           «La nuit du 24 au 25 décembre, les forces de police ont ramassé tous les Noirs de la ville. Ils étaient très mal renseignés. Pourtant, il était facile de savoir où dormaient les Nigériens. Ils ont même arrêté les étudiants subsahariens en situation régulière. Les voyous en ont profité pour tout leur prendre», se souvient le père Thierry Becker du diocèse d’Oran dont le témoignage est rapporté par Courrier International.

           Les dernières expulsions de migrants subsahariens remontaient au mois d’août. Plus de 400 migrants maliens vivant à Tamanrasset avaient été rapatriés à Bamako où ils ont dénoncé des traitements inhumains.

           «Les Maliens sont considérés comme des bêtes en Algérie», avait dénoncé Boubou Camara, l’un des expulsés en présence du représentant d’Amnesty International-Mali, El Béchir Singaré, qui se demandait comment un pays africain pouvait «se comporter de cette manière avec les ressortissants d’un autre pays africain?»

           L’Algérie n’est plus un pays de transit
           L’expulsion collective en cours de 1400 migrants ouest-africains confirme la volonté du gouvernement algérien de mettre un terme à l’immigration clandestine y compris par la manière forte. Faire comprendre aux aventuriers que l’Algérie ne doit plus être considérée comme un pays de transit pour les migrants subsahariens.

           Reste à savoir si la politique du bâton suffira à enterrer le rêve européen des migrants. La plupart restent déterminés et sont prêts à tout pour ne pas rebrousser chemin. «A quoi bon rentrer et vivre la vie que j’ai déjà vécue et qui m’a fait fuir», lance une migrante dont les propos sont rapportés par Courrier International.

          



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